Le président du Sénat, Loubet, est élu président de la
République en 1899 dans un climat tendu, marqué par le déchaînement de
lopposition nationaliste. Il confie à un sénateur, le républicain modéré
Waldeck-Rousseau, la formation dun gouvernement de défense
républicaine et le soin de ramener la stabilité dans le pays. Cet avocat nantais
engage la lutte sur un double front. Il fait juger par le Sénat réuni en Haute Cour les
chefs des ligues, Déroulède et Jules Guérin. Il affaiblit le pouvoir des congrégations
religieuses en faisant voter le 2 juillet 1901 la loi sur les associations qui prévoit la
liberté des associations laïques, mais limite et contrôle le droit dassociation
des congrégations. Son successeur, le petit père Combes poursuit et
radicalise luvre de laïcisation entreprise par Waldeck-Rousseau,
en appliquant de façon restrictive la loi sur les associations (presque toutes les
autorisations sollicitées par des congrégations religieuses sont refusées par la
Chambre) et en faisant voter le 9 décembre 1905 la loi sur la séparation de
lÉglise et de lÉtat. Mais le Bloc des gauches, vainqueur des élections de
1902 qui ont porté Combes à la présidence du Conseil, seffrite peu à peu. Combes
doit démissionner en 1905. En janvier 1906, Armand
Fallières, président du Sénat, succède à Émile Loubet à lÉlysée et charge
Georges Clemenceau, sénateur et leader du parti radical, alors âgé de soixante-cinq
ans, de former le gouvernement. Malgré la longévité de son ministère - il se maintient
jusquen 1909 - le Tigre est loin de réaliser toutes les mesures
radicales affichées à son programme. Linstauration de la journée de travail à
huit heures pour les mineurs, du principe des habitations à bon marché ou des retraites
ouvrières voient bien le jour, mais le projet dun impôt sur le revenu, adopté par
la Chambre, se heurte à lopposition du Sénat.
Souvrent alors six années dinstabilité
ministérielle pendant lesquelles dix cabinets se succèdent à la tête du pays.
Lantiparlementarisme progresse dans lopinion. Pour lenrayer, Briand,
successeur de Clemenceau à la présidence du Conseil, préconise ladoption de la
représentation proportionnelle, ce qui permettrait aux électeurs de se prononcer sur des
programmes dintérêt général. Adopté à la Chambre, le projet est arrêté au
Sénat, forteresse des nouveaux notables radicaux, principaux bénéficiaires du scrutin
darrondissement. En 1913, un sénateur, Raymond Poincaré, qui a été président du
Conseil en 1912, est élu président de la République à cinquante-deux ans.
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