M. Michel BERSON, (app. SOC – Essonne), président du groupe interparlementaire d’amitié France-Albanie, a rencontré, au Quai d’Orsay, M. François PUGEAUT, Sous-Directeur de l’Europe balkanique à la Direction de l’Europe continentale du ministère des affaires étrangères et européennes, pour faire le point sur la situation politique en Albanie.

L’Albanie a déposé sa candidature d’adhésion à l’Union européenne en 2009, mais n’a pas encore obtenu le statut de candidat, à la différence d’autres pays de la région. L’Albanie a encore d’importants efforts à fournir avant d’obtenir ce statut. Parmi les conditions fixées par l’Union européenne figure l’amélioration du travail parlementaire. À ce titre, un jumelage entre l’Albanie et l’Union européenne, axé sur la coopération parlementaire, a été lancé. Ce projet, d’une durée de 24 mois, sera conduit par un consortium auquel participent les assemblées parlementaires françaises. Dans ce cadre, des fonctionnaires du Sénat ont déjà effectué des déplacements en Albanie pour préparer le lancement du jumelage.

La vie politique albanaise demeure encore très polarisée, plus marquée par la confrontation que par la culture du compromis, pourtant indispensable dans un Etat démocratique.

Au cours du déplacement qu’il va effectuer à Tirana, pour le lancement du jumelage, M. Michel BERSON va rencontrer d’importantes personnalités politiques albanaises, en particulier Mme Jozefina TOPALLI, Présidente du Parlement et « poids lourd » de la majorité dans ce pays, ainsi que M. Edi RAMA, chef du Parti socialiste dans l’opposition, et ancien maire de la capitale, qui a perdu ce dernier mandat à une centaine de voix près, à l’issue des élections municipales de 2011, au profit du candidat du Parti démocratique au pouvoir, M. Lulzim BASHA, ancien ministre de l’intérieur.

Les résultats des élections législatives de juin 2009, qui ont reconduit le Parti démocratique emmené par le Premier ministre sortant, M. Sali BERISHA, n’ont jamais été acceptés par le Parti socialiste, entraînant un blocage politique complet et empêchant le vote de réformes indispensables au pays. Un accord entre les deux principales formations politiques a pu être trouvé en novembre 2011, mais il demeure limité. Des lois requérant une majorité qualifiée ont ainsi pu être votées, mais elles sont de nature essentiellement technique, tandis que le code civil et le code pénal restent à amender. Une commission parlementaire a également été instituée pour réformer le code électoral selon les normes et recommandations de l’OSCE, afin de mettre un terme à la contestation systématique marquant chaque étape du processus électoral, mais seuls des aménagements techniques paraissent envisageables tant que les deux principales formations politiques ont un intérêt objectif à ne pas modifier un système qu’elles critiquent, certes, mais qui leur assure le quasi monopole de la représentation en Albanie.

Surtout, l’accord de novembre 2011 demeure fragile. Les sujets de discorde ne manquent pas, qu’il s’agisse des affaires de corruption ou du fonctionnement de la justice. Surtout, l’élection du président de la République par le Parlement, selon des modalités particulièrement complexes, prévues au printemps 2012, pourrait compliquer la situation, même si des tentatives existent pour trouver un candidat susceptible de satisfaire la majorité et l’opposition. Selon plusieurs observateurs de la vie politique albanaise, le titulaire de la fonction, M. Bamir TOPI, pourrait ne pas se représenter.

Deux affaires relevant de l’actualité peuvent également contribuer à tendre le climat politique. La première concerne l’enquête en cours sur les circonstances des manifestations de janvier 2011 devant les services du Premier ministre, au cours desquelles plusieurs personnes ont été tuées. La recherche des responsabilités mettrait en cause à la fois les forces de sécurité et des députés de l’opposition, dont l’immunité parlementaire a été levée. La seconde affaire porte sur l’enquête pour corruption visant M. Ilir META, chef du Mouvement socialiste pour l’intégration, partie à la coalition formée par le Parti démocratique.

Il n’en demeure pas moins vrai que l’Albanie a connu de profonds et rapides changements depuis une vingtaine d’années, et fait preuve d’une grande vitalité. Elle ne manifeste pas de tendances nationalistes, et le thème de la « Grande Albanie » n’a pas de portée autre que romantique.

Les relations économiques franco-albanaises sont encore très réduites. Les principaux partenaires économiques du pays sont l’Italie et la Grèce, mais aussi l’Allemagne, l’Autriche et la Turquie. Plusieurs entreprises françaises ou à fortes participations françaises ont néanmoins réalisé des percées récentes en Albanie : la SAGEM pour la confection des passeports biométriques, Eurocopter pour la vente d’hélicoptères de transport Cougar, Carrefour pour l’ouverture de supermarchés, etc. D’autres entreprises françaises s’intéressent à des projets en Albanie, par exemple Alstom pour la construction d’un moyen de transport collectif à Tirana ou la Compagnie nationale du Rhône pour l’exploitation de barrages hydro-électriques. Ces tentatives demeurent toutefois ponctuelles et la pénétration du marché albanais par les entreprises françaises est très lente, comme c’est d’ailleurs le cas pour les Balkans en général, considérés par les entrepreneurs français comme un marché trop étroit et insuffisamment stable.

L’Albanie est pourtant fortement tournée vers la France sur le plan culturel. Elle est membre de l’Organisation internationale de la francophonie et entre 10 % et 20 % de sa population serait francophone. Le système éducatif du pays est doté de plusieurs classes bilingues et le lycée français de Korçë, qui a formé plusieurs générations de l’élite albanaise avant la Seconde Guerre mondiale, suscite une réelle nostalgie.

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