ITALIE



La constitution énonce à l'article 2 : " La République reconnaît et garantit les droits inviolables de l'homme, aussi bien en tant qu'individu que dans les formations sociales où s'exerce sa personnalité (...) ".

Elle protège en outre à l'article 15 " la liberté et le secret de la correspondance et de toutes les autres formes de communication ".

Par ailleurs, elle garantit à l'article 21 la liberté de la presse :

" Chacun a le droit de manifester librement sa pensée par la parole, par les écrits ou par tout autre moyen de diffusion.

" La presse ne peut être sujette à autorisation ou à censure.

" Il ne peut être procédé à la saisie que par un acte motivé de l'autorité judiciaire en cas de délit que la loi sur la presse prévoit expressément, ou en cas de violation des règles que cette même loi prescrit pour la désignation des responsables (...)
".

Le droit civil ne fait pas explicitement référence à la vie privée ou à une notion équivalente. Le code civil et la loi sur la protection du droit d'auteur garantissent en revanche le droit à l'image . Quant au code pénal , il sanctionne les " interférences illicites avec la vie privée ".

La récente loi n° 675 du 31 décembre 1996 sur le traitement des données personnelles, qui vise essentiellement à protéger les citoyens contre le traitement automatisé des données personnelles, comporte des dispositions particulières pour les journalistes : elle leur interdit notamment de diffuser sans le consentement de l'intéressé des informations concernant la santé ou la vie sexuelle et invite le Conseil national des journalistes à élaborer un code déontologique .

I. LA RECONNAISSANCE JURISPRUDENTIELLE DE L'INVIOLABILITE DU DROIT A LA PROTECTION DE LA VIE PRIVEE

1) La protection législative du seul droit à l'image et la reconnaissance jurisprudentielle des autres composantes de la vie privée

Les textes ne reconnaissant que le droit à l'image , c'est la jurisprudence qui a affirmé l'inviolabilité du droit à la protection de la vie privée.

a) Le droit à l'image

L'article 10 du code civil , intitulé " Abus de l'image d'autrui ", énonce : " Lorsque l'image d'une personne, ou de ses proches, de son conjoint ou de ses enfants a été exposée et publiée en dehors des cas où l'exposition ou la publication est consentie par la loi, ou en portant préjudice à la dignité ou à la réputation de la personne même ou desdits proches, l'autorité judiciaire, sur requête de l'intéressé, peut disposer que l'abus cesse, sans préjudice des dommages et intérêts ".

Par ailleurs, la loi sur la protection du droit d'auteur comporte deux articles qui protègent le droit à l'image.

Aux termes de l'article 96, " Le portrait d'une personne ne peut être exposé, reproduit ou commercialisé sans son consentement, sous réserve des dispositions de l'article suivant ".

L'article 97 stipule quant à lui : " Le consentement de la personne représentée n'est pas nécessaire lorsque la reproduction de l'image est justifiée par la notoriété ou par la fonction publique remplie, par des nécessités de justice ou de police, par des buts scientifiques, didactiques ou culturels, ou lorsque la reproduction est rattachée à des faits, des événements, des cérémonies d'intérêt public ou qui se sont déroulés en public.

" Le portrait toutefois ne peut être exposé ni commercialisé lorsque l'exposition ou la mise en vente porte préjudice à l'honneur, à la réputation, ainsi qu'à la dignité de la personne représentée
".

b) Les autres composantes de la vie privée

Après une première prise de position négative, en 1956, la Cour de cassation a, à partir de 1963, affirmé l'existence d'un droit général de " liberté d'autodétermination ", fondé sur l'article 2 de la constitution. Selon elle, ce droit est violé lorsque l'on répand des nouvelles relevant de la vie privée, sauf lorsqu'il y a consentement, même implicite, de l'intéressé, ou lorsqu'il existe un intérêt public à l'information. En 1975, la Cour de cassation a proclamé expressément l'existence d'un droit à la protection de la vie privée .

La Cour constitutionnelle s'est alignée sur la position des juridictions ordinaires et a qualifié, dans un arrêt de 1973, le droit à la protection de la vie privée de droit inviolable garanti par l'article 2 de la constitution . Parmi les droits inviolables, il faut en effet inclure " le droit à la dignité, à l'honneur, à la responsabilité, à l'intimité, à la discrétion, à la réputation ".

Toutefois, en cas de conflit entre le droit à la protection de la vie privée et la liberté de la presse, qui jouit également d'une protection constitutionnelle, la jurisprudence se refuse à donner la priorité à l'un ou à l'autre. Elle apprécie chaque cas séparément. De façon générale, elle est très réticente à limiter le " droit de chronique ", c'est-à-dire cette manifestation de la liberté d'expression propre au journaliste et qui consiste non seulement à diffuser des informations mais aussi à les commenter.

Dans le domaine de la protection de la vie privée, les tribunaux n'opposent au " droit de chronique " que deux limites : ils condamnent la publication d'informations relatives à des faits qui se sont produits dans l'enceinte du domicile, ainsi que la révélation d'informations initialement transmises par pli cacheté.

En revanche, ils estiment que la divulgation d'une nouvelle, même si elle est préjudiciable à la réputation d'autrui, est licite pour peu que l'information soit vraie et que sa diffusion corresponde à une utilité sociale.

2) L'action civile

a) L'action en dommages-intérêts

Le code civil prévoit que la réparation des dommages non patrimoniaux n'a lieu que dans les cas prévus par la loi, ce qui limite la portée de la garantie des droits de la personnalité. C'est pourquoi une partie de la doctrine tend à considérer le dommage à la personne comme un dommage spécifique et autonome par rapport aux notions traditionnelles de dommage patrimonial et non patrimonial.

En revanche, l'article 10 du code civil prévoit l'attribution de dommages-intérêts en cas de violation du droit à l'image.

b) Les autres actions

Le premier remède prévu par l'article 10 du code civil pour violation du droit de l'image est l'action en cessation.

Dès que les conditions légales sont réunies, c'est-à-dire lorsque la personne représentée est identifiée, le juge doit, sur requête de l'intéressé, donner l'ordre de cessation de l'acte illicite.

S'il y a possibilité de répétition de l'acte illicite, le juge peut agir préventivement.

De plus, le juge peut ordonner d'autres mesures : saisie ou retrait du commerce des photographies incriminées par exemple. Il peut aussi prescrire la publication de la décision de condamnation.

II. LES INFRACTIONS PENALES CONTRE LA VIE PRIVEE

L'article 615 bis du code pénal, introduit en 1974, sanctionne les " interférences illicites avec la vie privée ".

" Toute personne qui, grâce à l'utilisation d'un dispositif d'enregistrement visuel ou sonore, se procure indûment des informations ou des images relatives à la vie privée et qui se déroulent dans les lieux indiqués à l'article 614 ( 6( * ) ) est punie d'une peine de réclusion de six mois à quatre ans.

" Celui qui révèle ou diffuse au public, par quelque moyen de communication que ce soit, les nouvelles ou les images obtenues par les moyens indiqués à l'alinéa précédent est, sauf si le fait constitue une infraction plus grave, soumis aux mêmes peines
".

Les articles suivants du code pénal punissent la violation du secret de la correspondance, par ailleurs protégé par l'article 93 (7( * )) de la loi sur la protection du droit d'auteur, ainsi que les écoutes téléphoniques.

III. LE CODE DE DEONTOLOGIE DES JOURNALISTES

La loi 675 du 31 décembre 1996 sur la protection des personnes contre le traitement des données comporte des dispositions particulières pour les journalistes.

De façon générale, toute personne qui traite des données personnelles, avec ou sans moyens électroniques, doit le notifier au Garant qui est l'organe collégial institué pour veiller au respect de la loi 675 . Les journalistes entrent dans le champ d'application de la loi : ils doivent respecter une procédure de notification simplifiée.

L'article 22 de la loi prévoit que les données sensibles (c'est-à-dire qui concernent l'origine raciale et ethnique, les convictions religieuses, philosophiques ou autres, les opinions politiques, la participation à des partis, à des syndicats, à des associations ou à des organisations à caractère religieux, philosophique, politique ou syndical, ainsi que des données propres à révéler l'état de santé et la vie sexuelle) ne peuvent pas faire l'objet de quelque traitement que ce soit sans l'accord écrit de l'intéressé et sans l'autorisation préalable du Garant.

Cependant, à titre exceptionnel, les journalistes peuvent, conformément à l'article 25, traiter des données sensibles sans autorisation de l'intéressé si les conditions suivantes sont réunies :

-
qu'ils agissent dans l'exercice de leur profession , et pour la poursuite exclusive des objectifs de la profession ;

- qu'ils restent dans les strictes limites du " droit de chronique " ;

- que l'information rapportée ait un caractère essentiel pour l'intérêt public.

Cette exception ne s'applique pas aux informations relatives à l'état de santé ou à la vie sexuelle . Cette disposition tend à établir l'équilibre entre la liberté de la presse et le droit au respect de la vie privée.

Au deuxième alinéa, l'article 25 prévoit que le Garant encourage l'adoption par le Conseil national des journalistes d'un code de déontologie sur le traitement des données sensibles. Ce code doit notamment comporter des mesures de garantie pour les intéressés.

Selon la loi, la violation de l'article 25 n'est pas sanctionnée. En revanche, la violation du code de déontologie pourra être sévèrement punie par le Garant qui pourra interdire le traitement de certaines données, voire en imposer l'embargo.

Si le Conseil des journalistes n'élabore pas le code dans le délai requis, le Garant peut proposer le sien.

Le premier code de déontologie devait être adopté avant la fin du mois de novembre 1997.

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