N° 63 SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014 17 janvier 2014 |
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rÉsolution
europÉenne sur
la mise sur le marché et la brevetabilité des semences et obtentions végétales (E 8314). |
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Est devenue
résolution du Sénat, conformément à l’article 73 quinquies, alinéas 4 et 5, du
Règlement du Sénat, la résolution adoptée par la commission des affaires
économiques dont la teneur suit : |
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Voir
les numéros : Sénat : 218
et 272 (2013-2014). |
Le Sénat,
Vu l’article 88-4 de la
Constitution,
Vu la proposition de
règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la production et à la
mise à disposition sur le marché de matériel de reproduction des végétaux
(règlement sur le matériel de reproduction des végétaux)
[COM (2013) 262 ‑ E 8314],
Sur les règles
relatives à la production et à la mise à disposition sur le marché de matériel
de reproduction :
Accueille favorablement le
regroupement des différents textes en vigueur dans un texte horizontal qui
conserve les grands principes du droit en vigueur ;
Souligne, en particulier,
que l’enregistrement des variétés et matériels permet à la fois de disposer d’un
référentiel pour les semences et matériels de reproduction autorisés, et de
servir de base pour la protection intellectuelle des nouvelles variétés
créées ; que la certification des lots donne la garantie que les matériels
de reproduction mis sur le marché et échangés au sein de l’Union européenne
respectent les exigences de la réglementation européenne en matière d’identité
variétale et de qualité des semences ; et demande que la mise sur le
marché des semences repose sur un service public de l’enregistrement et de la
certification, garantissant la confiance des utilisateurs ;
Prend acte des aménagements
prévus pour certaines situations particulières (échanges en nature, matériels
hétérogènes, marchés de niche, variétés traditionnelles) ; souligne
toutefois que le texte devra prévoir des dispositions destinées à prévenir un
contournement du régime général ; est favorable aux dérogations pour les
opérateurs non professionnels car celles-ci sont indispensables à la conservation
de la biodiversité ;
S’oppose à une définition
au niveau européen des critères pour l’évaluation des performances et des
règles de décision ; considère, en effet, que les États membres sont les
mieux placés pour prendre en compte les caractéristiques qui leur sont propres,
même s’il convient d’encourager parallèlement l’harmonisation des
protocoles ;
Juge excessif le nombre des
actes délégués ou des actes d’exécution qui relèveraient de la Commission
européenne ; considère que le texte doit prévoir directement toutes les
dispositions essentielles comme la liste des espèces visées par les obligations
liées à la certification obligatoire ;
Constatant qu’il existe
très peu de définitions et de règles communes entre l’agriculture et la forêt,
considère qu’il est préférable d’exclure les matériels forestiers du dispositif
proposé ;
Sur les règles de
protection de la propriété intellectuelle :
Rappelle que les semences
et obtentions végétales relèvent d’un régime particulier de protection, le
certificat d’obtention végétale (COV), qui est un régime ouvert encourageant la
création variétale et la diversité végétale, en évitant l’appropriation privée
du vivant ;
Souligne que la Convention
sur la délivrance de brevets européens (CBE) exclut les variétés végétales de
la brevetabilité ; que sont aussi exclus de la brevetabilité les procédés
essentiellement biologiques d’obtention de végétaux, c’est-à-dire les méthodes
d’obtention de végétaux consistant en des phénomènes naturels tels que le
croisement ou la sélection ; que ne peuvent non plus être brevetées les
techniques modernes d’assistance à l’amélioration des plantes comme par exemple
l’utilisation de marqueurs moléculaires génétiques ;
S’inquiète, en conséquence,
de la délivrance de brevets dont l’étendue est parfois incertaine, du manque d’informations
des sélectionneurs et des agriculteurs leur permettant de vérifier si des
éléments brevetés sont présents dans les variétés qu’ils manipulent ou
produisent, et du coût qui peut en résulter pour les programmes de sélection ;
Fait valoir les risques de
blocage de l’innovation qui sont d’autant plus forts lorsque les brevets
portent sur des gènes dits natifs, c’est-à-dire ceux qui sont naturellement
présents dans une variété exploitée par le sélectionneur, la variété étant susceptible
d’être considérée comme dépendante du brevet ;
Considère qu’une évolution
qui privilégierait le brevet comme outil de protection en matière d’innovation
semencière serait lourde de risques ; qu’elle renforcerait la
concentration de l’industrie semencière autour de quelques grandes
entreprises ; qu’elle ferait aussi peser une menace sur l’indépendance des
États ;
Soutient des règles de
propriété intellectuelle qui permettent de préserver un tissu dense et
diversifié de sélectionneurs et, ce faisant, d’encourager l’innovation ;
rappelle, en conséquence, la priorité qui doit être accordée à une protection
par le certificat d’obtention végétale (COV) et à limiter les possibilités de
protection par le brevet ;
Affirme son attachement au
caractère non brevetable des plantes issues de la sélection génétique, tout
particulièrement dans le cas de plantes obtenues par des procédés d’amélioration
classique et exclut en conséquence les plantes comme les variétés du domaine de
la brevetabilité ;
Demande que l’accès des
sélectionneurs et des agriculteurs à l’information pertinente sur les brevets
déposés et délivrés soit mieux assurée ; relève que cette information
devrait leur permettre de vérifier si des éléments brevetés sont présents dans
le matériel végétal qu’ils manipulent ou produisent ; qu’elle devrait
conditionner la recevabilité d’une action en contrefaçon ; et souhaite que
la notion de contrefaçon en matière de semences et plants soit définie de
manière plus circonscrite ;
Réaffirme que, conformément
aux principes fondamentaux du droit des brevets, ne peuvent être brevetables
que les inventions décrites de manière complète et compréhensible, qui
satisfont aux conditions de la brevetabilité en particulier la nouveauté et l’activité
inventive ; que la brevetabilité des procédés ne devrait pouvoir être
admise que dans les seuls cas où l’intervention humaine a un impact déterminant
sur l’objet obtenu et où le procédé intervient directement au niveau du
génome ; que devraient être exclus de la brevetabilité les plantes issues
de procédés essentiellement biologiques et les gènes natifs ;
Estime que ces principes
devraient clairement figurer dans les lignes directrices de l’Office européen
des brevets (OEB), qui devraient être modifiées dans ce sens, voire donner lieu
à des modifications de la directive 98/44/CE du Parlement européen et du
Conseil, du 6 juillet 1998, relative à la protection juridique des
inventions biotechnologiques ;
Demande au Gouvernement de
défendre ces orientations au sein du Conseil.
Devenue résolution du Sénat le 17 janvier 2014.
Le
Président,
Signé :
Jean-Pierre BEL