Alors que l’Italie vient d’annoncer sa décision de bloquer le robot conversationnel ChatGPT, et que plusieurs centaines d’experts mondiaux se sont prononcés cette semaine en faveur d’un moratoire sur l’intelligence artificielle, la commission des affaires européennes du Sénat a adopté à l’unanimité hier matin une proposition de résolution européenne pour appuyer l’instauration d’une réglementation européenne dans ce domaine.

Sous la présidence du sénateur Jean-François Rapin, la commission y affirme la nécessité de prévenir une utilisation excessive de cette technologie, et d’en promouvoir un déploiement conforme aux valeurs européennes, c’est-à-dire au service de l’humain, fiable et éthique. En effet, les rapporteurs de la commission, les sénateurs André Gattolin, Catherine Morin-Desailly, Cyril Pellevat et Elsa Schalck, ont souligné que : "mal utilisée, l’intelligence artificielle est susceptible de causer de graves atteintes aux droits fondamentaux, qu’il s’agisse du respect de la vie privée, de l’accès à la justice ou encore du respect du principe de non-discrimination".

Dans sa proposition de résolution, la commission plaide donc en faveur de l’interdiction générale de certaines applications particulièrement contraires aux valeurs de l’Union européenne, comme les systèmes de reconnaissance des émotions, de catégorisation des personnes dans l’espace public ou de notation sociale. Elle appelle également à un renforcement des garanties entourant l’utilisation des systèmes d’intelligence artificielle qui génèrent un haut risque pour la santé, la sécurité ou les droits fondamentaux des citoyens. Elle insiste pour que les fournisseurs de systèmes d’intelligence artificielle à usage générique, capables d’accomplir une grande variété de tâches, soient eux aussi soumis à des obligations spécifiques. Elle réclame par ailleurs une meilleure prise en compte des personnes affectées par l’intelligence artificielle, sans en être directement utilisatrices. Elle invite, enfin, à expliciter l’articulation entre la réglementation européenne sur l’intelligence artificielle et le règlement général sur la protection des données, afin de ne pas amoindrir le haut degré de protection dont jouissent les citoyens européens en ce qui concerne la protection de leurs données personnelles.

En parallèle, la commission relève que l’Europe souffre d’un déficit d’investissement regrettable en matière d’intelligence artificielle, alors que cette technologie représente des gisements de croissance considérables. Elle demande donc à l’Union européenne et à ses États membres de soutenir l’innovation et les investissements dans ce secteur, afin de renforcer la compétitivité européenne.

Soulignant, enfin, qu’une application uniforme du règlement sur l’intelligence artificielle au sein de l’Union européenne constitue une condition sine qua non de son effectivité, la commission encourage les États à consacrer des moyens techniques et humains suffisants à sa mise en œuvre. Elle préconise également un renforcement des compétences du Comité européen de l’intelligence artificielle, future cheville ouvrière de l’exécution du règlement.

La proposition de résolution européenne adoptée par la commission des affaires européennes du Sénat est renvoyée à sa commission des lois qui peut ou non s’en saisir avant qu’elle ne devienne définitivement résolution du Sénat d’ici un mois.

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