Question de M. CHÉRIOUX Jean (Paris - RPR) publiée le 18/02/1988

M. Jean Chérioux appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions d'admission à l'aide sociale des étrangers en situation irrégulière en France, et il lui demande notamment si l'octroi du bénéfice de l'aide sociale à des étrangers ne peut pas être considéré comme un acte passible des peines prévues par l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée par les lois n° 72-617 du 5 juillet 1972, article 44, et n° 76-621 du 10 juillet 1976, chapitre II, article 21, relatives aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, qui prévoient que " tout individu qui, par aide directe ou indirecte, aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d'un étranger, sera puni d'un emprisonnement de deux mois à deux ans et d'une amende de 2 000 à 200 000 francs ". En effet, le versement de prestations financières facilite le maintien de ces personnes sur le territoire français et pourrait, de ce fait, constituer un délit dont les prestataires seraient les auteurs ou les complices, ainsi qu'il ressort d'une réponse à une question posée à un magistrat du Parquet au cours d'une réunion du conseil départemental de prévention de la délinquance. D'autre part, le rejet d'une demande d'aide sociale présentée par un étranger en situation irrégulière pourrait être considéré comme un refus d'assistance à personne en danger, puni par l'article 63, alinéa 2, du code pénal, tout au moins en matière d'aide médicale. Dans ces conditions, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître la conduite à tenir pour les élus locaux et les fonctionnaires qui participent aux décisions d'admission à l'aide sociale, que ce soit au niveau des centres communaux d'action sociale ou des commissions d'admission.

- page 222


Réponse du ministère : Justice publiée le 14/04/1988

Réponse. -Le garde des sceaux, ministre de la justice, peut indiquer à l'honorable parlementaire que l'infraction d'aide à l'entrée ou au séjour irrégulier, prévue par l'article 21 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 n'est constituée, comme tout délit, que lorsqu'est établie l'intention dolosive du mis en cause, souverainement appréciée par les cours et tribunaux. Ainsi, n'est susceptible d'être poursuivi que celui dont l'action d'aide avait pour but de permettre à un étranger en situation irrégulière d'entrer ou de se maintenir sur le territoire national. Par ailleurs, l'infraction de non-assistance à personne en danger exige pour être caractérisée que soit démontré l'état de péril de la personne qui sollicite l'assistance, et la jurisprudence estime qu'il convient que ce péril soit imminent et constant et nécessite une intervention immédiate. Il apparaît peu vraisemblable que les éléments constitutifs de cette infraction puissent être réunis à l'encontredu fonctionnaire ou élu local auquel incombe - en tout ou partie - la tâche d'octroyer l'aide sociale.

- page 514

Page mise à jour le