Question de M. CANTEGRIT Jean-Pierre (Français établis hors de France - UC) publiée le 13/07/1995

M. Jean-Pierre Cantegrit appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés rencontrées par certaines personnes résidant hors de France pour obtenir la reconnaissance de leur nationalité française, notamment dans le cadre de l'article 21-14 du code civil. Il apparaît en effet que, lorsque les intéressés font une déclaration de nationalité auprès de nos consulats, une interprétation restrictive des textes du bureau de la nationalité entraîne un refus d'enregistrement de ladite déclaration. Or il s'est avéré que, dans plus d'un cas, les liens avec la France et la culture française sont manifestes. Il lui signale en particulier le cas d'une personne, résidant au Chili, qui, bien qu'ayant suivi toute sa scolarité au sein d'établissements français, bien que parlant notre langue ainsi qu'en atteste notre ambassade, bien qu'étant membre d'associations françaises et travaillant pour un établissement bancaire français, s'est vu refuser l'enregistrement de sa déclaration, la preuve des liens avec notre pays n'étant pas suffisante et manifeste. Un autre cas quelque peu similaire, où de plus la filiation française est établie, a abouti au même résultat. C'est pourquoi il souhaite que lui soit indiqué précisément ce qu'il faut entendre par " preuve suffisante de la conservation ou de l'acquisition de liens manifestes d'ordre culturel, professionnel, économique ou familial avec la France " et quelle est la marge d'interprétation laissée à l'administration.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 14/09/1995

Réponse. - L'article 18 de la loi no 93-933 du 22 juillet 1993 a institué, à l'article 21-14 du code civil, un nouveau cas d'acquisition de la nationalité française par déclaration en faveur des personnes qui ont perdu la nationalité française par désuétude en application de l'article 23-6 du code civil ou à qui a été opposée la fin de non-recevoir prévue par l'article 30. Les personnes concernées sont les personnes d'origine française, qui n'ont jamais eu leur résidence habituelle en France, dont les ascendants n'ont eux-mêmes jamais eu leur résidence en France depuis au moins un demi-siècle et qui, ainsi que leurs ascendants, n'ont pas eu la possession d'état de français. La recevabilité de cette déclaration est soumise soit à la condition que le déclarant ait conservé ou acquis avec la France des liens manifestes d'ordre culturel, professionnel, économique ou familial, soit à la condition qu'il ait effectivement accompli des services militaires dans une unité de l'armée française ou combattu dans les armées françaises ou alliées en temps de guerre. Aucune condition d'âge, de résidence en France ou de perte préalable d'une autre nationalité n'est exigée et, dans le cadre de cette procédure simplifiée, les dispositions des articles 21-23 et 21-24 du code civil relatives au contrôle de l'assimilation et de la dignité du postulant à la nationalité française ne sont pas applicables. Les dispositions précitées ont été commentées par une circulaire du 27 juin 1994 relative à l'enregistrement des déclarations de nationalité, qui demande aux juges d'instance d'apprécier l'existence de ces liens avec la France de manière très concrète en recherchant s'ils traduisent un rattachement effectif avec la France et donne pour exemples de liens d'ordre culturel, professionnel, économique ou familial : le fait d'appartenir à une association qui a pour objet de répandre la culture française, d'envoyer ses enfants dans des établissements scolaires français, d'exercer une activité dans une entreprise française ou collaborant étroitement avec des organismes français, de conserver en France des biens mobiliers ou immobiliers, de maintenir des relations avec sa famille résidant en France. Ces liens doivent présenter un caractère manifeste, c'est-à-dire être d'une totale évidence. La recevabilité de la déclaration est appréciée par l'administration, sous le contrôle des tribunaux judiciaires, devant lesquels le déclarant peut se pourvoir en cas de refus d'enregistrement. Aucun tribunal n'a eu encore à se prononcer sur la recevabilité d'une déclaration souscrite au titre de l'article 21-14 du code civil.

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