Question de M. GIROD Paul (Aisne - RDSE) publiée le 21/03/1997

Question posée en séance publique le 20/03/1997

M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Je tiens, tout d'abord, à remercier Mme le ministre de l'environnement de sa gentillesse.
En fait, ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, qui - nous le comprenons bien - assiste aujourd'hui au
congrès de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, à Toulouse. Mais comme il s'agit d'une affaire à
la fois agricole et européenne, je ne doute pas que M. le ministre délégué aux affaires européennes pourra me répondre.
Monsieur le ministre, les quinze ministres de l'agriculture de la Communauté se sont réunis ces derniers jours pour
examiner ce que l'on appelle le « paquet prix » présenté par la Commission.
Selon mes informations, un certain nombre de prévisions sont à la baisse : baisse des compensations de 7,3 % pour les
céréales, de 4,2 % pour les oléagineux et de 26,8 % pour la jachère.
Inutile de vous dire que l'agriculture du département que je représente ici serait terriblement touchée par ces mesures,
notamment en raison du fait que s'arrêterait net son évolution vers les cultures non alimentaires ! Cela ne manque pas de
soulever un certain nombre de questions, notamment au regard des biocarburants, au moment où la loi sur l'air va entrer
en application.
Mais, au-delà du préjudice causé à mon département, je tiens à formuler trois observations sur le fond monsieur le
ministre.
En premier lieu, toute la base sur laquelle repose la politique agricole commune actuelle s'en trouverait ébranlée puisque
l'on considérerait comme illégitime le fondement même du système actuel.
En deuxième lieu, il semblerait que la Commission s'engage dans une voie qui consiste à pousser les agriculteurs à se
battre entre eux - productions végétales contre productions animales - puisque l'un des prétextes invoqués est le problème
de la viande bovine, alors qu'en réalité les dépenses à engager à ce titre devraient pouvoir être financées sur le budget
normal.
Enfin, en troisième lieu, dernière observation mais pas la moindre, ce serait un désarmement unilatéral de l'Europe au
moment même où les Américains viennent d'accroître leur aide à leur agriculture au travers du Fair Act. Ce serait nous
rendre fragiles au moment des négociations de l'Organisation mondiale du commerce de l'an 2000.
Monsieur le ministre, je crois ne pas être le seul, dans cet hémicycle, à être extrêmement inquiet...
M. Philippe François. Certainement !
M. Paul Girod... devant les perspectives que de telles propositions commencent à dessiner devant nous.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants).

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Réponse du ministère : Affaires européennes publiée le 21/03/1997

Réponse apportée en séance publique le 20/03/1997

M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Barnier, ministre délégué aux affaires européennes. Monsieur Paul Girod, votre question prouve - mais
nous le savions déjà ! - que vous vous intéressez au moins autant à l'agriculture qu'à l'environnement, ce qui n'est d'ailleurs
nullement contradictoire, bien au contraire.
Vous l'avez dit, les discussions viennent de commencer. Le conseil des ministres de l'agriculture s'est réuni les 17, 18 et
19 mars, saisi qu'il était des propositions de la Commission.
Ces propositions sont inacceptables pour la France (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et de
l'Union centriste) et M. Philippe Vasseur l'a dit de manière aussi claire que possible à l'occasion de cette réunion.
J'observe d'ailleurs qu'il n'a pas été le seul à constater qu'elles étaient minimalistes et négatives.
Je saisis l'occasion que vous me donnez pour rappeler devant le Sénat quelle est aujourd'hui la position de la France.
C'est une position extrêmement claire.
Premièrement, nous souhaitons qu'une décision intervienne, avant le 30 juin prochain, fixant le taux de jachère en dessous,
bien évidemment, du taux de base de 17,5 %. Cette mesure, vous le savez tous, est essentielle pour l'ensemble des
agriculteurs français, mais aussi pour remplir nos engagements sur les marchés mondiaux, pour faire face à une demande
intérieure qui ne décroît pas et également - vous être nombreux à y être attentifs sur ces travées - pour faire face à la
demande de la filière des biocarburants. (M. Jacques Machet applaudit.)
Deuxièmement, nous demandons la fin du gel extraordinaire.
Troisièment, nous avons marqué notre hostilité à la diminution des aides aux grandes cultures, qu'il s'agisse des céréales
ou des oléagineux, en tout cas telle qu'elle était proposée par la Commission c'est-à-dire sans une vraie vision d'ensemble,
sans cohérence avec une approche globale des réformes des organisations communes de marché.
Bien entendu, nous avons, tout autant que la Commission, le souci de la maîtrise budgétaire. Souvent, ici même, vous avez
souhaité que le budget de la Communauté n'augmente pas, que l'on ne fasse pas payer davantage les contribuables pour
l'Europe.
Mais la réforme, telle qu'elle nous est proposée, ce paquet prix - vous l'avez très bien dit vous-même, monsieur Girod -
remet en cause l'équilibre de la réforme de la PAC. Il n'y a pas de perspective à moyen ou à long terme. Surtout, il y a
des échéances graves et importantes auxquelles nous ne pourrions pas faire face convenablement : l'élargissement, les
négociations de l'OMC et l'approfondissement de la politique agricole commune.
Voilà donc la position de la France. Elle est, je le répète, extrêmement claire. Elle a été affirmée avec beaucoup de
détermination par M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, au congrès de la FNSEA, à Toulouse.
Je suis heureux que cette question m'ait donné l'occasion de la confirmer devant le Sénat. (Applaudissements sur les
travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)

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