Question de Mme DIEULANGARD Marie-Madeleine (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 10/04/1998

Question posée en séance publique le 09/04/1998

M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
En décembre dernier, un plan de sauvetage de la communauté internationale a été engagé pour sortir certains pays
asiatiques, dont la Corée du Sud, de la crise financière qu'ils traversent.
Cette crise a de graves conséquences pour ces pays et présente des risques pour les économies occidentales.
Pour ne citer que la Corée du Sud, il était capital d'intervenir afin que ce pays ne soit pas déclaré en état de cessation de
paiement. C'est ce qui a été fait, et l'on sait que le programme d'aide qui a été lancé est le plus important jamais consenti
par la communauté internationale. Le FMI est intervenu à hauteur de 57 milliards de dollars, soit plus de 340 milliards de
francs au total.
Ce plan a été assorti de contraintes, de réformes à engager pour ce pays, en vue de sa restructuration.
Si l'effort de la communauté internationale vise, comme le déclarait le secrétaire d'Etat au Trésor américain, « à aider la
Corée et non pas les investisseurs privés », il conviendrait également que cette aide n'induise pas en retour, pour les pays
qui la financent, dont la France, des distorsions de concurrence accrue qui pourraient leur être préjudiciables dans le
cadre de leurs marchés.
Vous comprendrez, monsieur le ministre, qu'en ma qualité d'élue de la région de Saint-Nazaire je m'inquiète de telles
répercussions pour la construction navale, qui est le deuxième secteur industriel français le plus exposé à la concurrence
asiatique. Mais je pense aussi aux secteurs des composants électroniques et de l'automobile. Soumis au libre-échange, ils
risquent d'être fragilisés par une concurrence exacerbée que nous aurions nous-mêmes contribué à attiser.
Il serait, à notre sens, nécessaire de réfléchir à la mise en place d'un code de bonne conduite prévoyant que, lorsque des
pays reçoivent des aides de la part de la communauté internationale, ces aides ne sauraient être injectées dans des
secteurs qui enregistrent des surcapacités de production. C'est notamment le cas de la construction navale, qui est une
industrie de main-d'oeuvre.
M. le président. Posez votre question, madame !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je le fais immédiatement, monsieur le président !
La construction navale française serait gravement fragilisée si la Corée du Sud poursuivait, grâce au FMI, sa stratégie
expansionniste sur ce secteur industriel.
Je souhaiterais connaître la position du Gouvernement français sur cette question. (Applaudissements sur les travées
socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

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Réponse du ministère : Budget publiée le 10/04/1998

Réponse apportée en séance publique le 09/04/1998

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Madame la sénatrice (Exclamations sur de nombreuses travées.
- Mmes Dusseau et Terrade applaudissent), je voudrais vous dire d'emblée que le Gouvernement est très sensible à la
construction navale en général, - il l'a montré récemment en facilitant la commande d'un certain nombre de paquebots - et
qu'il s'intéresse à l'ensemble de ce secteur et à la marine marchande. Vous aurez d'ailleurs l'occasion, en examinant le
projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, le DDOEF, de mettre en place un dispositif
encourageant ces secteurs.
Vous m'avez interrogé sur la Corée. Le programme que le Fonds monétaire international a mis en place pour ce pays
exige des réformes de structures importantes. Elles touchent de plein fouet ces grands conglomérats que l'on appelle
là-bas des « chaebols » et les obligeront à la fois à assainir leurs relations financières et à tempérer le surinvestissement et
la surproduction que vous avez dénoncés, à juste titre.
Il est vrai que la monnaie coréenne a été considérablement déprécée, ce qui, à terme, comporte un risque.
J'étais en Corée il y a quinze jours et j'ai pu constater que les circuits d'importation y sont désorganisés, que les pièces
nécessaires à la fabrication des produits à exporter arrivent mal. L'impact immédiat de la dépréciation du won ne sera
donc pas aussi fort que prévu.
Il est par ailleurs probable que, dès que la confiance dans l'économie coréenne sera revenue, la monnaie coréenne,
comme les autres monnaies asiatiques, se réappréciera. Le Gouvernement veillera à ce qu'il en aille ainsi.
Vous avez parlé d'un code de bonne conduite. Il existe : ce sont les règles de l'Organisation mondiale du commerce. La
France veillera à ce que la Corée, comme l'ensemble de ses partenaires et de ses concurrents, les respecte.
Je dirai un dernier mot, monsieur le président, si vous le permettez.
La Corée est certainement un concurrent, mais c'est aussi un client potentiel. Lorsque le programme du FMI sera parvenu
à son terme, la Corée redeviendra un marché pour notre industrie. L'exemple du contrat obtenu pour le TGV devrait être
suivi par de très nombreuses entreprises françaises. Des emplois pourront ainsi être créés en France si nous nous tournons
vers le marché coréen, qui est en train de s'ouvrir aux investissements et aux produits étrangers. Cela fait partie aussi du
programme du FMI, et je voulais souligner devant vous ces éléments d'espoir.
M. le président. Monsieur le secrétaire d'Etat, grâce à la rigueur qui m'est souvent reprochée et grâce à la discipline
aimable des orateurs, vous serez passé à la télévision quatre fois cet après-midi sans être coupé ! (Sourires.)

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