Question de M. HUGOT Jean-Paul (Maine-et-Loire - RPR) publiée le 30/04/1998

M. Jean-Paul Hugot attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le développement inquiétant de la violence sous toutes ses formes à l'égard des enfants. En 1995, en France, 65 000 nouveaux cas d'enfants en danger ont été recensés contre 58 000 en 1994, 20 000 enfants maltraités en 1995 contre 17 000 en 1994. Sur ces 20 000 cas on enregistre 5 500 cas de violence avec sévices sexuels (p 22 % par rapport à 1994). Les violences psychologiques et physiques sont en progression respectivement de p 25 % et p 8 % en 1995 par rapport à 1994. En 1997 et 1998, les rapports de la police nationale et de la gendarmerie nationale confirment cette évolution. Il est clair que nous assistons aujourd'hui à une normalisation de la dépravation contre laquelle une seule mesure a été prise : la signalétique imposée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Cette mesure constitue un premier pas vers la prévention. Elle mise cependant uniquement sur un élan des plus hypothétiques de responsabilisation des téléspectateurs. Les récents débats relatifs à la loi sur la prévention et à la répression des abus sexuels ont surtout mis en avant le renforcement de la répression. La question est de savoir si l'on souhaite appliquer à la prévention la même détermination que celle appliquée à la répression. Le programme d'action que les pouvoirs publics se sont assigné en 1997, année de l'enfance maltraitée, visait trois objectifs : faire comprendre aux enfants qu'ils ont le droit de dire non, réprimer pour éviter les récidives, assister les victimes de violences sexuelles. Chacun de ces objectifs est précieux. Malheureusement, la prévention contre la récidive n'a jamais constitué une mesure de prévention mais de répression. Ces objectifs s'inscrivent en aval de l'acte coupable ou de l'attitude déviante. Aucune réelle prévention ne s'applique en amont. Tous les rapports confirment que presque tous les pédophiles et une bonne partie des proxénètes et des pornocrates sont atteints de troubles graves de la personnalité. S'il est faux de dire que certaines publications ou messageries sont à l'origine de ces troubles, on peut cependant affirmer que les dérèglements dont il s'agit trouvent dans la débauche d'articles, de photographies et d'images une source d'aggravation de troubles et de déclenchement de pulsions perverses incontrôlables. La loi relative aux publications destinées à la jeunesse de 1949 constitue aujourd'hui l'un des seuls textes qui ait proposé d'engager une véritable politique de prévention. Si l'intitulé de la loi n'est plus adapté dans la mesure où, aujourd'hui, un diffuseur ne peut plus être certain que son produit sera lu ou visionné par des majeurs exclusivement, il n'en reste pas moins que le législateur avait confié à une commission la charge de surveillance et de contrôle des publications destinées à la jeunesse. Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser quels sont aujourd'hui les membres qui composent cette commission et quelle est son activité.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 22/10/1998

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la protection des mineurs dans les publications qui leur sont destinées demeure une préoccupation constante des pouvoirs publics. Depuis la loi nº 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, les ouvrages périodiques et non périodiques publiés en direction des jeunes ainsi que les ouvrages de toute nature susceptibles de présenter un danger pour la jeunesse sont soumis à une surveillance exercée par la commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à la jeunesse. L'article 3 de la loi susvisée fixe ainsi qu'il suit la composition de cette commission : un membre du Conseil d'Etat, président, un représentant du ministre de la culture et de la communication, un représentant du garde des sceaux, ministre de la justice, un représentant du ministre de l'intérieur, un représentant du ministre de l'éducation nationale, un représentant du ministre de l'emploi et de la solidarité, un représentant du ministre de la jeunesse et des sports, un représentant du service juridique et technique de l'information, un représentant du personnel de l'enseignement public, un représentant du personnel de l'enseignement privé, trois représentants des éditeurs de publications destinées à la jeunesse, trois représentants des éditeurs de publications autres que celles destinées à la jeunesse, quatre représentants des mouvements ou organisations de jeunesse, deux députés et deux sénateurs, trois représentants des dessinateurs et auteurs, un père et une mère de famille, deux magistrats ou anciens magistrats, siégeant ou ayant siégé dans des tribunaux pour enfants, soit, au total, trente titulaires, non compris le président, pour lesquels trente suppléants sont également désignés. Lots des séances plénières trimestrielles, dont l'ordre du jour est fixé par le président, la commission examine les livres et revues périodiques principalement destinés à la jeunesse, y compris les publications importées, à la lumière de l'article 2 de la loi du 16 juillet 1949, lequel prohibe les insertions de toute nature présentant sous un jour favorable le banditisme, le mensonge, le vol, la paresse, la lâcheté, la haine, la débauche ou tous actes qualifiés crimes ou délits ou de nature à démoraliser l'enfance ou la jeunesse ou à inspirer ou entretenir des préjugés ethniques. Afin de permettre à la commission de remplir son rôle de surveillance, les éditeurs de publications pour la jeunesse ont l'obligation de déposer, lors de chaque parution, cinq exemplaires de chaque publication au secrétariat de la commission situé au ministère de la justice. De même, ces ouvrages doivent porter la mention " loi nº 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse ", mention qui est de nature à attirer l'attention des parents et familles sur le public visé. Il y a lieu de préciser que les publications importées ne sont pas soumises au dépôt, ni à l'obligation de la mention de la loi de 1949. La commission est chargée d'émettre à leur égard un avis relatif à l'importation, décision prise ensuite par le ministre de la culture et de la communication. La mission de surveillance impartie à la commission s'étend également à toutes les publications susceptibles de présenter un danger pour la jeunesse, à l'encontre desquelles la commission est habilitée à donner un avis au ministre de l'intérieur en vue d'une interdiction de vente aux mineurs, d'exposition à la vue du public et de publicité par quelque moyen que ce soit. L'avis de la commission est consultatif. Il peut viser la première interdiction, ou les deux premières interdictions ou, encore, les trois interdictions. Il est formulé à la lumière de l'article 14 de la loi qui vise les revues présentant un caractère licencieux ou pornographique, ou faisant place au crime, à la violence, à la discrimination ou à la haine raciale, à l'incitation à l'usage, à la détention ou au trafic de stupéfiants. La commission peut également soumettre au ministre de la justice l'exercice d'éventuelles poursuites pénales à l'encontre des publications contenant des insertions contraires aux lois. Enfin, il peut être utile de préciser qu'un groupe de réflexion ayant étudié les améliorations susceptibles d'être apportées aux missions et au fonctionnement de la commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à la jeunesse devrait rendre ses conclusions rapidement.

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