Question de M. CHABROUX Gilbert (Rhône - SOC) publiée le 18/06/1998

M. Gilbert Chabroux attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation gravissime que connaît actuellement la population d'origine albanaise du Kosovo. En effet, les forces militaires et paramilitaires serbes ont déclenché récemment une offensive de vaste envergure destinée à faire fuir les Kosovars d'origine albanaise de leur lieu d'habitation. Une nouvelle fois la politique de " purification ethnique " est mise en application. Ainsi, il semblerait que les villages de Junik et Decane aient été complètement vidés de leur population. Des milliers de personnes sont jetées sur les routes de l'exode et les victimes se comptent désormais par dizaines. En conséquence, alors que des pourparlers entre les plus hautes autorités serbes et albanaises avaient été ouverts, mais que la situation se dégrade de jour en jour, il lui demande quelle est la position du Gouvernement et quelle mesure il compte adopter auprès des diverses instances internationales et européennes pour qu'enfin cette région retrouve la paix.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 30/07/1998

Réponse. - Comme le souligne l'honorable parlementaire, l'évolution du Kosovo est particulièrement préoccupante. En effet, les violents incidents qui ont marqué la région depuis le 28 février dernier ont déjà fait près de 300 victimes, parmi lesquelles on compte de nombreux civils. En outre, les combats ont conduit plus de 75 000 personnes à quitter leur foyer, pour se rendre soit dans d'autres régions à l'intérieur du Kosovo, soit dans les pays vosisins (10 000 réfugiés en Albanie, 13 000 au Monténégro). Aussi les Etats membres du groupe de contact et de l'Union européenne ont-ils condamné avec la plus grande fermeté l'usage excessif de la violence par la police serbe, comme les attentats terroristes organisés par l'Armée de libération du Kosovo. Ils ont également exigé des autorités de Belgrade qu'elles autorisent et facilitent le retour de tous les réfugiés et déplacés. La Commission européenne a attribué une aide de 1,5 mécus en faveur des populations réfugiées dans le nord de l'Albanie. A titre national, la France a envoyé 21 tonnes d'aide humanitaire. La conviction selon laquelle un règlement global de la crise ex-yougoslave ne saurait ignorer la question du Kosovo sauf à courir le risque d'un nouvel embrasement, a également conduit la France et ses partenaires du groupe de contact à décider d'exercer de fortes pressions sur les parties pour que se noue enfin un véritable dialogue politique. Sont ainsi mis en uvre un embargo sur les armes et les matériels de répression civile, ainsi qu'un certain nombre de mesures d'ordre économique (gel des avoirs du gouvernement serbe à l'étranger, interdiction des investissements en Serbie, interdiction des vols effectués par la compagnie aérienne nationale yougoslave à destination et au départ de nos pays). La France a également demandé que soit étudiée la plus large gamme possible d'options militaires, dans le cadre de l'Alliance atlantique. Vis-à-vis de la partie albanaise, nous marquons clairement notre refus de l'indépendance et condamnons les actions terroristes. Aujourd'hui, l'approche privilégiée par la France dès l'origine (des pressions graduées avec le maintien d'une perspective positive pour Belgrade en cas d'ouverture politique substantielle, le refus de l'indépendance du Kosovo), traduite dans un certain nombre de démarches particulières (lettre commune de MM. Védrine et Kinkel au président Milosevic du 19 novembre 1997 ; lettre du président de la République remise à M. Milosevic par le directeur politique, le 3 avril 1998), reste plus que jamais justifiée. Nous attendons désormais des parties qu'elles s'engagent de manière constructive en faveur d'un processus politique et pacifique de règlement de la question du Kosovo. Celui-ci est indispensable à l'apaisement des tensions, mais doit aussi déboucher sur la définition d'un statut d'autonomie renforcée dans le cadre des frontières internationalement reconnues de la RFY et dans le respect des droits fondamentaux de tous les citoyens du Kosovo. C'est d'ailleurs à ce prix que la RFY pourra retrouver sa place au sein de la Communauté des nations, comme au demeurant l'Union européenne et la France le souhaitent.

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