Question de M. HAMEL Emmanuel (Rhône - RPR) publiée le 06/08/1998

M. Emmanuel Hamel attire l'attention de M. le ministre de la défense sur le rapport de la Cour de comptes consacré " aux dispositifs de lutte contre la toxicomanie ", rendu public le 7 juillet 1998 et dans lequel les magistrats de la Cour des comptes soulignent une absence de concertation entre la police, la gendarmerie et les douanes, la coordination entre ces services répressifs se heurtant à " des logiques différentes : maximiser les saisies à l'entrée sur le territoire français pour les douanes, désorganiser les réseaux d'approvisionnement pour la police et la gendarmerie ". Il lui demande quelle est sa réaction face à cette constatation et quelles mesures il entend prendre pour améliorer la collaboration entre la police, la gendarmerie et les douanes en matière de lutte contre la drogue et la toxicomanie.

- page 2515


Réponse du ministère : Défense publiée le 24/09/1998

Réponse. - La gendarmerie nationale assure l'exécution des lois ainsi que la protection des biens et des personnes. A cet effet, 17 000 officiers de police judiciaire et 34 000 agents de police judiciaire de la gendarmerie départementale et des formations spécialisées uvrent quotidiennement dans les zones où la gendarmerie assume seule la responsabilité de l'exécution des missions de sécurité et de paix publiques. S'agissant de la lutte contre les infractions à la législation sur les stupéfiants, la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) conduit une politique visant à réduire , d'une part, la demande en mettant en uvre un dispositif dédié à la prévention primaire et, d'autre part, l'offre en s'attaquant aux réseaux locaux de distribution et à leurs sources d'approvisionnement, tout en veillant à assurer une dissuasion générale efficace. En outre, la gendarmerie nationale travaille en étroite collaboration avec la police nationale et le service des douanes, notamment à travers différents dispositifs nationaux, européens et internationaux. En matière de prévention, la gendarmerie mène essentiellement des actions d'information orientées en priorité vers les adolescents et leurs parents. Elles sont conduites depuis 1990 par des formateurs relais antidrogue (FRAD). Au nombre de 400, ces sous-officiers (au moins deux par département) sont volontaires et spécialement formés. Leurs interventions sont coordonnées au niveau de chaque groupement de gendarmerie départementale par " l'officier correspondant drogue gendarmerie ". Les FRAD apportent à la demande, sous forme de dialogue, une information adaptée à leur auditoire : pour les jeunes, rappel de la loi et des risques psychologiques et corporels liés à la drogue ; pour leurs parents et les adultes-relais, présentation des produits et des conduites à tenir. Ainsi, 510 000 personnes auront participé à ces séances en 1997, expression d'une demande de plus en plus pressante du public (plus de 2 millions de personnes ont été approchées depuis 1990). Par ailleurs, la gendarmerie a créé, en 1997 et 1998, 21 brigades de prévention de la délinquance juvénile (BPDJ), au sein desquelles au moins un FRAD est affecté. Ainsi, un travail en profondeur est conduit en direction des jeunes en contact permanent avec ces unités, notamment en matière de lutte contre les stupéfiants. Quant à la répression, dont l'objectif est de limiter l'offre de drogue, les efforts de la gendarmerie visent prioritairement le démantèlement des réseaux locaux de revente, très actifs dans les zones périurbaines, et qui se développent désormais en secteur rural. Dans le droit fil de cette action, les enquêteurs sont amenés à s'engager contre le " tourisme de la drogue ", qui permet l'approvisionnement fractionné de ces réseaux de distribution. Au-delà, la gendarmerie participe au démantèlement des filières européennes qui relèvent souvent de la criminalité organisée. Enfin, la dissuasion est réalisée grâce à la surveillance générale des secteurs sensibles, effectuée par les 51 000 militaires des 3 640 brigades territoriales de la gendarmerie départementale répartis sur les territoire métropolitain, ainsi que par les 2 800 personnels de la gendarmerie d'outre-mer agissant dans les Dom-Tom, notamment dans les Antilles-Guyane. Elle se traduit concrètement par la multiplication de contrôles orientés sur les lieux de rencontre des revendeurs de drogue et des usagers. Ces missions (prévention, répression et dissuassion) sont prises en compte à l'échelon du groupement de gendarmerie départementale qui décide des actions à conduire au plus près du terrain et de la population, avec les moyens humains et matériels adaptés, et ce en liaison avec les autres services de l'Etat concernés. La collaboration de la gendarmerie avec les autres services de l'Etat en matière de lutte contre la drogue n'est d'ailleurs pas nouvelle. En effet, différentes structures interministérielles sont en place ou en cours de réalisation : 1º au plan opérationnel, des plans départementaux de sécurité (PDS), dynamisés par les dispositions de la circulaire interministérielle du 2 janvier 1997 prise en application de la loi nº 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, les PDS permettent le développement de la coopération inter-institutionnelle au niveau du département, notamment avec la police nationale et les douanes. La récente création du comité départemental restreint de lutte contre la drogue et la toxicomanie, placé sous la présidence du préfet, assisté par un chef de projet, générera une plus large concertation ; l'office central de répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS) : ce service interministériel est placé auprès de la direction générale de la police nationale (direction centrale de la police judiciaire). Il est chargé de fonctions de représentation à l'étranger, de la coordination des actions et de la centralisation des statistiques. Des militaires de la gendarmerie y sont affectés, et la présence de fonctionnaires des douanes est envisagée ; les bureaux de liaison permanents (BLP) : créés par une circulaire interministérielle du 9 mai 1997, les deux premiers sont installés à Lille pour la région Nord - Pas-de-Calais et aux Abîmes pour la région Antilles-Guyane. Ils participent à la coordination de l'action des services de police, des douanes et de gendarmerie ; les centres de coopération policière et douanière (CCPD) : dans le cadre du développement de la coopération policière et douanière au sein des espaces de Schengen et européen, ces centres, qui vont se mettre en place au niveau des frontières, recevront des représentants (police, douanes, gendarmerie) des deux Etats frontaliers et permettront l'échange de renseignements, tout en favorisant le bon déroulement de la coopération transfrontalière ; Europol : le développement de la coopération européenne a déjà amené la création de l'unité nationale Europol (UNE), contact national entre les services de police, de gendarmerie et des douanes avec Europol ; le project management office (PMO) : en cours d'installation à La Barbade à la suite d'une initiative franco-britannique, ce bureau, où seront regroupés des représentants des ministères de l'intérieur, de la défense et budget, sera chargé d'assurer la collaboration avec les Etats de la zone Caraïbe ; 2º au plan de la formation, le centre interministériel de formation antidrogue (CIFAD) : créé en 1992 à l'initiative des ministères de la justice, de la défense, de l'intérieur et du budget, ce centre, dont le personnel est mis en place par la police, la gendarmerie, les douanes et la justice, forme les agents des services concernés en poste aux Antilles-Guyane, mais aussi dans la zone des Caraïbes et en Amérique latine ; en application de l'article 17 de la convention de Vienne, la mise en uvre de la loi nº 96-359 du 29 avril 1996 et du décret du 28 mai 1997, relatifs à la lutte contre le trafic de stupéfiants en haute mer, implique la gendarmerie et les douanes dans la formation des commandants des bâtiments de la marine nationale à leurs nouvelles prérogatives judiciaires ; 3º au plan central, le groupe tripartite police-douane- gendarmerie : institué en 1993 au sein des directions générales des trois administrations, il vise à faciliter le rapprochement des moyens techniques et des méthodologies. Cette collaboration a d'ores et déjà permis de diffuser aux unités une documentation précisant les dispositions législatives, les missions et les pouvoirs juridiques de chacune des intitutions, ainsi qu'un argumentaire antidrogue. Ce dernier document fournit aux enquêteurs des éléments communs de réponse sur les questions essentielles touchant à la drogue et à la toxicomanie ; la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) : dépendant du Premier ministre, elle est mise à la disposition du ministère de l'emploi et de la solidarité et du secrétariat d'Etat à la santé. Chacune des administrations chargées de la lutte contre la drogue et les dépendances y est représentée et peut ainsi participer pleinement aux réflexions engagées, visant à permettre une plus grande concertation et collaboration entre les services, voire à développer des projets communs. En 1997, le nombre de personnes mises en cause pour trafic et revente de stupéfiants par la gendarmerie nationale a augmenté de 187 %, alors que celui des majeurs mis en cause pour simple usage a baissé de 4 %. Ces données démontrent l'efficacité des actions menées au niveau interministériel.

- page 3061

Page mise à jour le