Question de M. du LUART Roland (Sarthe - RI) publiée le 30/06/1999

M. Roland du Luart interroge M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur la lutte contre le tabagisme des jeunes. Différentes mesures ont déjà été prises, à savoir l'interdiction de publicité, la hausse de la fiscalité, des campagnes de sensibilisation et enfin une récente initiative en faveur du remboursement du coût du sevrage. Mais, malgré ces mesures, le tabagisme des jeunes n'est qu'en très léger déclin. En France, aujourd'hui, n'importe quel jeune peut entrer chez un débitant et acheter du tabac. Ne serait-il pas judicieux d'interdire la vente du tabac aux jeunes ? L'usage des produits du tabac doit être réservé aux adultes informés des risques sanitaires associés à la consommation de ces produits. Aussi il lui demande s'il compte mettre en place un dispositif de limitation de l'accès des jeunes au tabac, comme par exemple une interdiction au-dessous d'un certain âge. Et, dans cette perspective, quel serait l'âge retenu pour distinguer un jeune d'un adulte ?

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Réponse du ministère : Équipement publiée le 03/11/1999

Réponse apportée en séance publique le 02/11/1999

M. Roland du Luart. Compte tenu des nombreux rapports qui ont été publiés dans la presse et des nombreux débats
qui ont eu lieu dans nos instances parlementaires ces derniers temps, j'ai pensé que la présente question s'inscrivait
parfaitement dans le cadre des actions à mener pour lutter contre les excès du tabagisme.
Malgré les quelques progrès qui ont été réalisés en la matière, la France demeure néanmoins le pays de l'Union
européenne où le pourcentage de fumeurs est le plus élevé, notamment dans la catégorie d'âge des quinze-trente ans,
âge qui est très important pour l'avenir.
J'aimerais savoir, dans ces conditions, ce que vous attendez pour faire appliquer sérieusement la loi Evin, et notamment
l'interdiction de fumer dans les écoles et les collèges. Une loi qui est mal appliquée devient une loi nocive !
« On fume aujourd'hui dans environ la moitié des établissements scolaires. Plus du tiers des adolescents français
reconnaissent qu'ils violent délibérément cette loi, sans que personne ne leur en fasse la moindre réflexion », déclarait
récemment le professeur Tubiana.
C'est une incitation à l'incivisme ! Il serait urgent que M. le ministre de l'éducation nationale clarifie sa position dans ce
domaine.
Par ailleurs, je vous demande, monsieur le ministre, de me dire comment vous comptez organiser la concertation entre
les parties concernées - débitants de tabac, fabricants et collectivités territoriales - pour qu'il puisse concrètement être
interdit aux jeunes de fumer ou d'acheter du tabac, afin que les prescriptions de la loi ne restent pas un voeu pieux.
Le succès d'une telle mesure impose que les débitants de tabac y soient associés, car le lien social que représente le
bureau de tabac dans les zones rurales ne doit pas être rompu. Le petit buraliste demeure souvent, en effet, le dernier
maillon du service public en contact avec le citoyen. Je préconise donc, avant tout, une bonne concertation en amont.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mme Dominique Gillot, qui assiste
actuellement, à Matignon, à une réunion importante sur l'encéphalite spongiforme bovine, m'a demandé de m'exprimer
en son nom.
La lutte contre le tabagisme, notamment chez les jeunes, est une des premières priorités de santé publique du
Gouvernement. En mai dernier, un plan ambitieux de lutte contre le tabagisme a été rendu public et des crédits
complémentaires importants ont été affectés à cette lutte puisque le budget qui y est consacré a été multiplié par cinq
entre 1997 et 1999.
Depuis une vingtaine d'années, on constate globalement une baisse de la consommation de tabac, y compris chez les
adolescents. Cette diminution de la proportion de fumeurs dans la tranche d'âge douze - dix-neuf ans, la plus jeune,
traduit en partie un recul de l'âge d'entrée dans le tabagisme.
Cette évolution d'ensemble, certes favorable, recouvre néanmoins des constats qui restent très préoccupants, comme
vous l'avez souligné, monsieur le sénateur. Ainsi, la consommation de tabac chez les jeunes demeure à un niveau
qu'on ne peut que juger inacceptable - 48 % des garçons et 46,7 % des filles de dix-huit - dix-neuf ans fument. Chez les
jeunes filles, la proportion de fumeurs tend même à augmenter. Il convient donc d'amplifier notre action, en particulier
dans le domaine de la prévention en direction des adolescents.
L'interdiction de vente du tabac aux mineurs de moins de seize ans, à l'instar des dispositions concernant l'alcool, est
une mesure qui existe déjà dans des législations étrangères. Elle constituerait un affichage fort de notre volonté
commune de protéger la jeunesse contre ce fléau.
Les conclusions du rapport qu'Alfred Recours a remis au Premier ministre vont permettre de guider notre action en la
matière. Le Gouvernement organisera notamment une concertation sur l'intérêt, en termes de santé publique, d'une
part, de l'interdiction de la vente de tabac aux jeunes de moins de seize ans, en s'inspirant des résultats obtenus dans
les pays étrangers, d'autre part, d'une modification de la marge des petits débitants de tabac, en les faisant participer à
des actions de prévention en direction des jeunes.
Voilà la réponse que Mme Dominique Gillot souhaitait vous apporter.
M. Roland du Luart. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. Je remercie M. le ministre de cette réponse et de l'éclairage qu'elle donne, car je sais que, pour
lui comme pour moi, ce sujet est quelque peu délicat compte tenu de notre passion commune pour certains tabacs...
Nous souhaitons simplement faire évoluer les choses pour que la jeunesse ne soit pas mise en position de fragilité. Or
vous ne m'avez pas répondu sur un point qui me chiffonne tout de même : la non-application de la loi en milieu scolaire.
Cela n'est pas normal, c'est de l'incivisme ! L'éducation nationale devrait peut-être prendre ce problème à bras-le-corps.
Par exemple, dans les restaurants, ou ailleurs, il y a des zones non fumeurs, et c'est respecter son voisin que de
s'abstenir de fumer. Eh bien, dès lors que la loi prévoit qu'il est interdit aux jeunes de fumer en milieu scolaire, elle doit
être appliquée ! Déjà, nous aurions gagné une première bataille dans la lutte contre le tabagisme des jeunes.

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