Question de M. MOREIGNE Michel (Creuse - SOC) publiée le 10/02/2000

M. Michel Moreigne attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les risques écologiques qui pèsent sur la forêt suite aux ravages des tempêtes de la fin 1999. En effet, en dépit des efforts déployés pour exploiter les millions de mètres cubes de bois abattus, de multiples sortes de parasites risquent de se développer dès le printemps. Face à cette grave menace et afin d'éviter la contamination des peuplements forestiers encore sur pied, il paraît impératif de mettre en place, dès à présent, une veille phytosanitaire dans les départements touchés par les tempêtes et de limiter les pullulations d'insectes par des mesures préventives. Ainsi, il lui demande s'il lui est possible de détailler les moyens qui vont être mis en oeuvre pour protéger les arbres indemnes, limiter la prolifération d'insectes xylophages, et pour que le développement de maladies ne compromette pas la régénération et la reconstruction de la forêt française.

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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 27/07/2000

Réponse. - Les tempêtes de décembre 1999 ont causé à la forêt française des dégâts d'une ampleur inconnue jusqu'alors, et qui peuvent effectivement laisser craindre des conséquences sanitaires importantes pour les peuplements encore sur pied dans les zones affectées. Cependant, l'expérience acquise au cours des vingt dernières années permet de hiérarchiser ces risques qui sont très différents selon les essences. L'inquiétude majeure réside dans la prolifération vraisemblable d'insectes se développant sous l'écorce (insectes dits sous-corticaux et en particulier scolytes), et cela essentiellement sur les résineux. Dans ce groupe, les épicéas constituent les essences à haut risque, alors que le douglas à l'inverse est très peu menacé, les pins et sapins étant dans une situation plutôt intermédiaire mais très variable selon le contexte régional : la prudence s'impose par exemple tout particulièrement dans le massif aquitain. Par ailleurs, le développement des insectes va varier en fonction du rythme d'évacuation des chablis et également des conditions climatiques des étés 2000 et 2001, les sécheresses augmentant sensiblement les risques. Une veille phytosanitaire efficace mais aussi la mise à disposition des gestionnaires d'une information technique précise sont deux éléments déterminants du système de prévention et de lutte qui est en cours de mise en place par les services du ministère de l'agriculture et de la pêche. Ainsi, les correspondants-observateurs du département de la santé des forêts, qui sont des techniciens appartenant aux différents organismes de gestion forestière, effectuent depuis les mois de mars et d'avril un suivi des populations d'insectes dans les zones affectées par la tempête, et cela sur près d'un millier de sites permanents qui seront visités régulièrement pendant deux à trois ans. Cette opération, qui n'a pas d'équivalent historique, permettra de fournir aux gestionnaires les informations nécessaires à l'organisation efficace des opérations de lutte curative, si nécessaire. En outre, deux documents (Info Santé Forêts Tempêtes nºs 1 et 2) conçus par le département de la santé des forêts et parus les 14 janvier et 20 mars 2000 (disponibles sur le site Web du ministère) donnent les repères nécessaires pour évaluer les risques et orienter les interventions des gestionnaires. Une grande partie des mesures du plan national pour la forêt mis en place par le Gouvernement à la suite des tempêtes concourent à une lutte préventive qui est, de longue date, reconnue comme la plus efficace. Les aides visant à favoriser l'exploitation des bois, le stockage par voie humide (qui empêche toute attaque ultérieure des insectes ravageurs), et le nettoyage des parcelles limitent de fait les risques de pullulation d'insectes ravageurs quand ces mesures concernent les essences à risques. Mais en dépit des efforts déployés pour mobiliser et valoriser les chablis, des volumes de bois relativement importants resteront probablement en l'état, favorables à la multiplication des insectes sous-corticaux. C'est pourquoi des aides d'un montant de 100 millions de francs prévues dans le cadre de ce plan national - qui peuvent être complétées par des aides des collectivités territoriales - seront consacrées spécifiquement à la prévention et à la lutte phytosanitaire, notamment le broyage de jeunes peuplements résineux dévastés et de rémanents d'exploitation, l'écorçage et dans des conditions bien déterminées, le traitement insecticide de grumes, comme le précise la circulaire DERFKDSF/C2000-3010 du 20 mars 2000. En 2001 et ultérieurement, les aides iront à une lutte phytosanitaire classique visant la détection et la neutralisation précoce des foyers de scolytes (abattage des arbres colonisés, écorçage et brûlage des écorces, etc.). La principale condition d'efficacité de ces interventions est leur rapidité, ce qui n'est pas toujours aisé, notamment dans un contexte de forêt privée morcelée, et suppose que soient mises sur pied des formes d'organisation adaptées. Au-delà des méthodes éprouvées de lutte, la recherche a été mobilisée pour tenter d'identifier de nouveaux moyens de quantifier les populations de scolytes afin de pouvoir prévoir leur développement ultérieur probable, ainsi que de nouveaux moyens de lutte. Enfin, si le développement de champignons pathogènes susceptibles de compromettre la régénération et la reconstitution des peuplements est peu à craindre, il convient de rappeler régulièrement les risques que font encourir aux futurs peuplements des exploitations forestières entreprises en conditions d'humidité excessive (problèmes de tassement de sol) ou le fait de négliger les précautions usuelles de traitement contre le champignon fomes, agent responsable de graves pourritures du bois de c ur ou de mortalités de nombreuses essences résineuses. L'histoire des grands chablis en France et à l'étranger rend nécessairement modeste, et personne, aujourd'hui, ne peut prétendre juguler l'ensemble des problèmes sanitaires. Les mesures de suivi et de lutte mises en place mettent cependant de notre côté les meilleures chances de diminuer le contrecoup sanitaire des tempêtes dévastatrices de décembre 1999.

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