Question de M. TRÉGOUËT René (Rhône - RPR) publiée le 25/01/2001

M. René Trégouët attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la difficulté d'interprétation soulevée par certains juges d'instruction pour faire application du nouvel article 143-1 du code de procédure pénale en matière de détention provisoire. Cette nouvelle disposition, issue de la loi nº 2000-516 du 15 juin 2000 et inscrite en son article 57, prévoit dans son second alinéa du 2º : " Toutefois, la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que si la peine encourue est supérieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement, s'il est reproché à la personne mise en examen un délit prévu par le livre III du code pénal et que cette personne n'a pas déjà été condamnée à une peine privative de liberté sans sursis supérieure à un an ". Cette rédaction peu claire laisse à penser que le juge d'instruction, en dépit du bon sens, n'est pas en droit de placer en détention provisoire les " gros " délinquants, mais uniquement ceux ayant un casier judiciaire chargé de peines légères. Il lui demande en conséquence de bien vouloir lui donner une réponse très claire quant à l'interprétation à donner à cet alinéa du code de procédure pénale et s'il ne s'avérerait pas judicieux d'en amender le contenu en cas de doute sérieux à donner au sens de ces dispositions.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 19/04/2001

Réponse. - La garde des sceaux, ministre de la justice rappelle à l'honorable parlementaire que l'un des objectifs recherchés par le législateur lors du vote de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes est de limiter, dans leur nombre comme dans leur durée, les détentions provisoires dont le caractère exceptionnel est désormais plus solennellement affirmé par l'article 137 du code de procédure pénale. A cet égard, l'article 143-1 du code de procédure pénale doit être compris de la façon suivante : en matière correctionnelle, en règle générale, une détention provisoire ne peut être prononcée ou prolongée que si la peine encourue par la personne mise en examen est d'une durée supérieure ou égale à trois années. Cependant l'article précité prévoit un régime plus restrictif pour les délits relatifs aux atteintes contre les biens qui sont prévus par le livre III du code pénal tels que les vols, escroqueries ou abus de confiance. Dans ce cas, la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que si la peine encourue est supérieure ou égale à cinq ans. Or tous les vols autres que le vol simple (cambriolages par exemple) font encourir des peines de 5, 7 ou 10 ans ou plus selon les cas. En plus, cette exigence n'est pas applicable si la personne a déjà été condamnée à une peine privative de liberté sans sursis supérieure à un an. Dans cette hypothèse, le régime de droit commun s'applique et la détention est possible dès lors que la peine encourue est au moins égale à trois ans. En tout état de cause, en retenant comme critère l'existence préalable d'une peine privative de liberté supérieure à un an pour permettre au juge des libertés et de la détention de placer en détention provisoire une personne mise en examen pour une infraction d'atteintes aux biens punie de la peine maximale de trois ans, tels le vol simple, l'abus de faiblesse, l'abus de confiance simple, le détournement de gage ou d'objet saisi, l'organisation frauduleuse de l'insolvabilité ou la dégradation d'objet d'utilité publique, le législateur a clairement entendu prévoir un régime plus sévère pour ceux, qui au vu de leur casier judiciaire, témoignent d'un passé délinquant important.

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