Question de M. OUDIN Jacques (Vendée - UMP) publiée le 14/02/2003

Question posée en séance publique le 13/02/2003

M. Jacques Oudin. Monsieur le président, mes chers collègues, en cinquante ans, la France s'est dotée d'un réseau d'infrastructures autoroutières parmi les plus performants d'Europe.

Ce réseau a été obtenu grâce à la loi de 1955 et aux textes qui l'ont complétée.

La gestion de l'ensemble de ce réseau a été confiée à des sociétés autoroutières dont le plus beau fleuron est ASF, la société des Autoroutes du sud de la France.

Le gouvernement précédent avait ouvert une partie du capital des ASF, et cette opération financière a connu un large succès.

Le problème est désormais de savoir si la privatisation des ASF doit se poursuivre.

Nous devons également déterminer les ambitions que nous devons continuer à avoir pour assurer la poursuite de l'aménagement de nos infrastructures autoroutières.

L'éventuelle poursuite de la privatisation des ASF nous amène à nous interroger sur ses conséquences, notamment sur le financement des nouvelles opérations d'aménagement. Je ne saurais croire que le seul objectif d'une telle mesure serait d'abonder le budget général de l'Etat ou le fonds de réserve des retraites.

Pour ma part, je constate que la durée des concessions autoroutières a été prolongée. Je constate également que le trafic connaît une croissance régulière et constante et que le maintien des sociétés autoroutières dans le giron de l'Etat assure à ce dernier des recettes suffisantes pour achever le réseau autoroutier français.

Mme Nicole Borvo. Et le train !

M. Robert Bret. Et le ferroutage !

M. Jacques Oudin. La privatisation des sociétés d'autoroutes présente un double risque : elle prive l'Etat de recettes pérennes et elle n'incite pas les nouveaux actionnaires à aménager de nouvelles liaisons. Dans un tel système, moins vous investissez, plus la rentabilité de votre société augmente. C'est un effet pervers dramatique.

La Cour des comptes, dans son rapport remis au Sénat le 28 janvier dernier, affirme d'ailleurs ceci : « La privatisation des plus rentables des SEMCA, après celle des ASF, mettrait un terme au système antérieur de mutualisation de leurs moyens financiers. » Elle ajoute : « Dans ce nouveau contexte, il convient de redéfinir au plus tôt le rôle des établissements publics du secteur autoroutier. »

Je vous demande en conséquence, monsieur le ministre, de préciser la position exacte du Gouvernement sur cette affaire au regard des objectifs de développement de nouvelles infrastructures nécessaires à notre développement économique et à notre politique d'aménagement du territoire.

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Réponse du Ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer publiée le 14/02/2003

Réponse apportée en séance publique le 13/02/2003

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Oudin, il est vrai que l'ouverture du capital des ASF est un succès. La façon dont le titre se comporte en bourse dans un contexte difficile le prouve et incite naturellement les pouvoirs publics à réfléchir sur la poursuite de ce processus, non seulement pour les ASF, mais également pour l'ensemble ou pour tout ou partie du réseau autoroutier français.

A mon sens, nous devons peser les avantages et les inconvénients d'un tel processus ou de la poursuite d'un tel processus.

Nous devons nous poser trois types de questions.

Premièrement, nous devons nous interroger sur le financement des autoroutes. Jusqu'ici, nous disposions du système de l'adossement. Le mécanisme de l'adossement a été supprimé mais, fort heureusement, restent des dividendes pour poursuivre le financement du réseau autoroutier. Ainsi, le tronçon de l'autoroute A 28 entre Rouen et Alençon a pu être réalisé grâce à ces dividendes.

Le Gouvernement attend donc beaucoup de la représentation nationale, dans le cadre du débat sur les infrastructures, pour savoir comment pourra se poursuivre la réalisation non seulement d'autoroutes, mais également d'infrastructures ferroviaires ou aériennes.

Deuxièmement, nous devons nous interroger sur l'autorité dont disposent les pouvoirs publics vis-à-vis des concessionnaires. Un passé récent, mais aussi plus lointain, nous prouve que les pouvoirs publics doivent - pardonnez-moi cette expression un peu familière - être mieux « bordés » vis-à-vis des concessionnaires pour que soit vraiment assuré, dans des conditions parfois difficiles, le service public ou pour que soient respectés les contrats de concession dans la vie courante.

Nous devons nous poser d'autant plus de questions que, dans un pays libéral s'il en est, les Etats-Unis, les pouvoirs publics rachètent les sociétés d'autoroute. Nous devons donc nous interroger sur le processus à enclencher.

Troisièmement, nous devons nous interroger sur le maintien d'une concurrence saine et efficace dans les marchés de travaux. Mais la concurrence existe-t-elle vraiment quand une entreprise de travaux publics contrôle une société privée ?

La réflexion sur ce sujet n'est donc pas close. Nous y travaillons encore, car nous savons que les liens entre ces entreprises et celles qui bénéficient de délégations, notamment dans le service de l'eau, ont posé des problèmes dans le passé, ont été critiquées, même par les marchés.

C'est pour cela, monsieur Oudin, qu'il nous est nécessaire d'approfondir notre réflexion afin de pouvoir prendre en compte ces différents aspects. Lorsque nous aurons pris la décision, nous serons ainsi bien assurés que c'est la bonne.

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