Question de M. VIDAL Marcel (Hérault - SOC) publiée le 24/07/2003

M. Marcel Vidal attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur le projet de brevetabilité des logiciels. Derrière l'aspect technique se cache un vrai sujet de civilisation, dans le sens où l'introduction des brevets logiciels en Europe remettrait en cause notre conception de la libre circulation du savoir humain. Une directive européenne ouvrant la voie à de nombreux brevets logiciels aurait des conséquences sur la circulation et le statut du savoir humain. Aussi, il souhaiterait connaître la position du gouvernement français sur ce projet de directive.

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Transmise au Ministère délégué à l'industrie


Réponse du Ministère délégué à l'industrie publiée le 04/09/2003

Le projet de directive européenne portant sur la brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur, qui doit être examiné début septembre par le Parlement européen, n'a pas pour finalité d'étendre le champ de la brevetabilité mais, bien au contraire, d'en préciser les limitations, tout en restant respectueux des accords internationaux auxquels nous adhérons. Si des ambiguïtés étaient présentes dans le projet initial élaboré par la Commission européenne et avaient motivé des réserves de la France vis-à-vis de ce texte, les amendements proposés par la commission juridique du Parlement européen les corrigent dans le sens approprié, à l'instar de ce qui avait été proposé par le groupe de travail des représentants des États membres. En Europe, une invention est brevetable si, relevant d'un domaine technologique, elle est nouvelle, implique une activité inventive et est susceptible d'application industrielle. Pour impliquer une activité inventive, une invention doit apporter une contribution technique. Ces critères sont bien plus restrictifs que ceux appliqués aux États-Unis où, en l'absence d'exigences de contribution technique, la jurisprudence a pu étendre le champ de la brevetabilité aux logiciels et aux méthodes d'affaires. En Europe, un logiciel en tant que tel n'est pas considéré comme une invention brevetable ; ne pourra l'être qu'une solution technique innovante apportée à un problème technique, solution qui peut être mise en oeuvre par des moyens matériels ou logiciels. Le droit d'auteur est une protection contre la copie servile de tout logiciel, innovant ou pas, mais n'interdit pas la reconstitution d'une invention ; seul le brevet permet à un inventeur de protéger ses droits vis-à-vis de compétiteurs, notamment des grandes entreprises. Le développement des technologies informatiques a naturellement conduit à l'augmentation des dépôts de brevet dans ce secteur. Si des brevets ont été accordés alors qu'ils ne paraissent pas répondre aux critères en vigueur en Europe, la procédure d'opposition peut être utilisée pour les contester, mais actuellement, en l'absence de texte communautaire, des divergences de jurisprudence peuvent apparaître entre États membres. La future directive permettra l'élaboration d'une jurisprudence européenne unifiée sur la base de critères explicités de façon restrictive, ce qui devrait être accueilli favorablement par l'ensemble des acteurs économiques européens, notamment nos petites entreprises et les développeurs indépendants. La proposition de directive poursuit des objectifs de transparence et de clarté. En son absence, la pratique et la jurisprudence de l'Office européen des brevets et des juridictions nationales resteraient la norme de fait. Les effets négatifs du manque de transparence de la situation juridique actuelle, qui affectent essentiellement les PME, perdureraient et affaibliraient la position de l'Europe.

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