Question de M. MUZEAU Roland (Hauts-de-Seine - CRC) publiée le 19/12/2003

Question posée en séance publique le 18/12/2003

M. Roland Muzeau. Aujourd'hui, 4 millions de personnes tentent de survivre avec moins de 550 euros par mois et un dixième de la population française est en très grande difficulté, n'accédant pas aux droits, pourtant fondamentaux, que sont l'emploi, le logement et la santé.

La France compte 10 % de chômeurs ; à peine un sur deux est indemnisé.

En outre, 86 000 personnes fréquentent les structures d'hébergement d'urgence et 200 000 personnes seraient sans domicile fixe, c'est-à-dire plongées dans la misère absolue.

L'extrême précarité des conditions de vie d'une partie croissante de nos concitoyens n'est pas une fatalité, mais le résultat de la politique économique et sociale du Gouvernement. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Le décalage est patent entre le discours du Président de la République, soucieux de « cette fracture sociale qui menace de s'élargir », affichant son « refus d'abandonner à elle-même une partie de la nation », et les choix du Gouvernement, « inspirés par des courants d'intolérance »,...

M. René-Pierre Signé. C'est le libéralisme !

M. Roland Muzeau. ... créant des « inégalités supplémentaires », selon les termes de Didier Robert, membre du Conseil économique et social.

Depuis le mois de septembre, on assiste à une véritable avalanche de mesures régressives risquant, comme l'ont dénoncé les associations, de « rejeter dans la précarité les plus fragiles ».

Je vous rappelle les économies réalisées sur le dos des personnes âgées, des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés, de la couverture maladie universelle et de l'aide médicale de l'Etat.

M. Henri de Raincourt. Il ne faut pas être gêné pour dire des choses pareilles !

M. Roland Muzeau. En face de cela, on multiplie les cadeaux fiscaux pour les plus riches !

Faut-il rappeler encore les restrictions budgétaires sévères sur les budgets « sociaux », par exemple sur les crédits du logement, qui baissent de 8 %, ou le désengagement de l'Etat des dispositifs de traitement social du chômage ?

Vous entendez encore réduire les dépenses publiques. Vous ne cessez de désigner les personnes en situation de précarité comme coupables d'être un fardeau pour la nation. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Christian Cointat. C'est scandaleux de dire cela !

M. Henri de Raincourt. C'est honteux !

M. Roland Muzeau. Après avoir durci les conditions d'indemnisation des chômeurs, réduit leurs droits à l'allocation spécifique de solidarité, le Gouvernement, avec le RMA, conditionne le versement d'une allocation à la reprise d'un pseudo-emploi.

Lutter contre l'exclusion au nom de l'égale dignité de tous les êtres humains est un impératif national. Ce gouvernement va-t-il enfin, comme le souhaitent les associations membres du collectif Alerte, placer l'éradication de la pauvreté et de l'exclusion en tête de ses priorités nationales ?

Allez-vous enfin réorienter la politique de l'emploi, oeuvrer pour établir des garanties collectives de protection contre les risques sociaux, au lieu de détricoter la solidarité nationale ? Madame la secrétaire d'Etat, allez-vous consentir à aborder dans sa globalité la question de l'exclusion sociale sur la base du rapport d'évaluation de l'IGAS, comme le prévoyait la loi du 29 juillet 1998 ?

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Réponse du Secrétariat d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion publiée le 19/12/2003

Réponse apportée en séance publique le 18/12/2003

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'exclusion n'est pas une fatalité.

L'exclusion est une véritable question de société. Il convient effectivement d'en débattre, de l'analyser et d'apporter des solutions. C'est ce que nous faisons.

Le 19 mars dernier, j'ai mis en place, à la demande du Premier ministre, un plan national de renforcement de la lutte contre l'exclusion dont le coeur est l'accès aux droits sociaux.

M. René-Pierre Signé. Avec quels résultats ?

M. le président. Monsieur Signé, seule Mme la secrétaire d'Etat a la parole !

M. Alain Gournac. Et, eux, qu'est-ce qu'ils ont fait ?

M. Henri de Raincourt. Rien !

M. Raymond Courrière. Nous avons refait ce que vous aviez supprimé !

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat. L'accès aux droits sociaux est une question fondamentale pour tous les pays européens, mais la France est le seul pays en Europe à avoir mis en place un plan destiné à rendre cet accès à nos concitoyens les plus fragiles.

Pour nos concitoyens les plus désocialisés, pour ceux qui sont à la rue, j'ai mis à plat et renforcé le dispositif « urgence sociale et insertion ».

M. Jacques Mahéas. Il faut voir les conditions !

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat. Ces conditions sont plutôt favorables, monsieur le sénateur. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.) En effet, après avoir évalué ce dispositif géré par des associations auxquelles il faut rendre hommage parce qu'elles agissent aux côtés de l'Etat pour mettre à l'abri les plus fragiles de nos concitoyens, j'ai pris conscience que ces associations avaient été placées, ces dernières années, dans une situation de grande difficulté financière. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Grâce à des crédits complémentaires, de l'ordre de 145 millions d'euros - soit 15 % de la ligne « lutte contre l'exclusion » -, que le Premier ministre a débloqués en juillet dernier, j'ai pu régler la situation de ces associations et mettre en place, à l'approche de l'hiver, un plan digne de ce nom, permettant à tous ceux qui le veulent d'être mis à l'abri durant les périodes où, chacun le sait, ils sont le plus en danger. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

M. Henri de Raincourt. Bravo !

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat. Quant aux associations du collectif Alerte, dont vous avez parlé, monsieur le sénateur, M. le Premier ministre les a reçues lundi dernier.

Au cours d'une discussion longue et approfondie, il a confirmé la tenue d'un comité interministériel de lutte contre l'exclusion en juin 2004. La loi de 1998 l'avait certes prévu, mais, jusqu'à présent, aucun Premier ministre n'avait réuni ce comité interministériel. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Marc Todeschini. L'actuel n'y parviendra peut-être pas non plus ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean Chérioux. Ils n'ont jamais rien fait, eux !

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat. En vue de la réunion de ce comité, monsieur le sénateur, j'ai fait procéder à l'évaluation de l'application de la loi de 1998, qui, nous le savons bien, n'est pas effective pour nos concitoyens.

Dans le cadre de ce comité interministériel de lutte seront abordées les questions relatives à l'emploi, au logement, à la santé.

Nous avons par ailleurs mis en place un certain nombre de mesures pour favoriser le retour à l'emploi des publics en difficulté. Bien sûr, pour notre part, nous avons choisi de privilégier, plutôt que des dispositifs d'assistanat, des dispositifs visant à faciliter réellement le retour à l'emploi.

M. Alain Gournac. Bravo !

M. le président. Je vous prie de conclure, madame la secrétaire d'Etat.

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat. C'est l'objet du RMA, du CIVIS, des contrats jeunes en entreprise. (Exclamations sur les travées socialistes.)

Je rappelle que près de 130 000 jeunes ont un contrat à durée indéterminée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Je rappelle également que, en ce qui concerne le logement, l'objectif de Gilles de Robien est de créer 80 000 logements sociaux en 2004.

Mme Odette Terrade. Avec quel argent ?

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat. C'est un objectif qu'aucun des gouvernements précédents n'a pu tenir. Nous, nous le tiendrons.

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