Question de M. YUNG Richard (Français établis hors de France - SOC) publiée le 12/01/2006

M. Richard Yung rappelle à M. le ministre des affaires étrangères qu'en décembre, l'ambassade de France à Vienne a annoncé la fermeture des cours de français à l'Institut français de Vienne à partir du mois de février prochain. Cette décision a été annoncée sans qu'un quelconque projet alternatif soit évoqué. Il ne s'agit donc pas d'un redéploiement des activités de l'institut, mais bel et bien d'une fermeture. Il semble qu'il soit prévu de maintenir les cours destinés aux entreprises et aux institutions autrichiennes mais le plus grand flou semble régner, en particulier pour les personnels qui ont déjà reçu leur lettre de licenciement. Cette décision est malheureusement cohérente avec la politique de désengagement que conduit le ministère depuis des années et qu'il ne manque pas de dénoncer. Les instituts culturels français de Salzbourg et de Graz ont été également fermés ces dernières années. Néanmoins, annoncée à quelques jours du début de la présidence autrichienne de l'Union européenne et en cette année où l'Autriche a adhéré à l'Organisation de la francophonie avec le statut de pays observateur, cette décision prend un relief tout particulier. Elle a suscité de nombreuses réactions dans cette ville francophile et francophone qu'est Vienne, et ceci au plus haut niveau. Symboliquement, il s'agit également d'un coup porté à la francophonie. La manière dont la France n'assume ouvertement pas la position de « direction » qui devrait être la sienne est patente dans cette affaire. Il souhaiterait donc avoir sa position sur cette affaire.

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Réponse du Ministère de la coopération, du développement et de la francophonie publiée le 08/02/2006

Réponse apportée en séance publique le 07/02/2006

M. Richard Yung. Madame la ministre, ma question est relative à l'Institut français de Vienne.

L'ambassade de France à Vienne a annoncé la fermeture des cours de français à l'Institut français de Vienne à partir de ce mois de février. Cette décision a été annoncée alors qu'aucun projet alternatif n'est évoqué ni préparé. Il ne s'agit donc pas d'un redéploiement des activités de l'institut, mais bel et bien de la fermeture d'une partie importante de ses activités.

Il semble qu'il soit prévu de maintenir une partie des cours en développant des cours spécialisés destinés aux entreprises et aux institutions autrichiennes, mais, à notre connaissance, le plus grand flou règne sur ces projets d'avenir.

La principale explication qui est donnée tiendrait au déficit financier - de l'ordre de 250 000 euros, nous dit-on - qu'engendreraient les cours de français. C'est une surprise ! Cette situation est d'autant plus difficile à comprendre que tous les autres instituts français que je connais à travers le monde se financent au contraire par les cours de français. Pour des raisons que je ne m'explique pas et qui me paraissent mériter une explication, l'Institut français de Vienne serait donc le seul institut français dans le monde qui perde de l'argent en dispensant des cours de français.

La décision de fermeture est malheureusement cohérente avec la politique de désengagement que conduit le ministère depuis des années. En Autriche, les instituts culturels français de Salzbourg et de Graz, pour ne citer que ceux-là, ont été également fermés ces dernières années.

L'annonce de cette décision à quelques jours du début de la présidence autrichienne de l'Union européenne et en cette année où l'Autriche a adhéré à l'Organisation internationale de la francophonie avec le statut de pays observateur est pour le moins paradoxale. Elle a évidemment suscité de nombreuses réactions dans cette ville francophile et francophone qu'est Vienne, et cela au plus haut niveau.

Quelles explications et quelles perspectives peut nous donner le Gouvernement sur cette situation ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu appeler mon attention sur la situation de l'Institut français de Vienne.

Le ministère des affaires étrangères est amené à adapter et à moderniser son dispositif culturel dans les pays de l'Union européenne, et je tiens à souligner fortement notre volonté de maintenir notre présence à travers des formes d'action et de coopération plus efficaces.

Il ne s'agit, dans ce cas d'espèce, ni, bien sûr, de fermer l'Institut français de Vienne, ni de renoncer à promouvoir la langue française dans un pays qui, comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, est membre observateur de la Francophonie. Il s'agit au contraire de moderniser et même de développer notre politique.

L'Institut français de Vienne axera désormais son activité pédagogique autour des priorités suivantes : la promotion de l'apprentissage du français en milieu scolaire et universitaire, en partenariat avec les autorités éducatives et les universités ; le développement des enseignements bilingues en étroite collaboration avec le ministère autrichien de l'éducation ; le soutien aux projets de formation linguistique spécifique en direction des partenaires institutionnels ; la promotion des études en France en partenariat avec l'agence Edufrance et avec les programmes communautaires encourageant la mobilité étudiante ; l'organisation de manifestations liées à la francophonie ; enfin, dans le cadre de la présidence autrichienne de l'Union européenne, la formation au français d'environ 500 fonctionnaires autrichiens.

L'institut pourrait également signer des conventions de partenariat avec certaines écoles de langue locales afin d'apporter son expertise et un accompagnement pédagogique à l'organisation des cours de français général. Il demeure en outre centre d'examen pour les certifications de français.

Par ailleurs, la France et l'Autriche soutiennent l'association autrichienne des professeurs de français à travers le ministère autrichien de l'éducation, de la science et de la culture et l'ambassade de France à Vienne dans l'organisation du premier congrès européen des enseignants de français, qui aura lieu à Vienne en 2006, événement majeur dans le calendrier de la promotion du français.

Enfin, la médiathèque poursuivra sa transformation en un espace moderne avec un centre de ressources sur la France contemporaine et s'ouvrira davantage encore aux nouveaux publics.

Pour fortifier notre influence auprès des élites européennes, nos centres et instituts culturels en Europe doivent aujourd'hui renforcer leur offre de français de spécialité à l'attention de publics ciblés, aider à la promotion des établissements français d'enseignement supérieur afin d'attirer plus d'étudiants européens dans nos universités et écoles, valoriser le débat d'idées et les idées françaises, enfin, promouvoir les industries culturelles françaises et la création contemporaine, en partenariat avec les institutions locales et dans le cadre de partenariats public-privé.

L'Institut français de Vienne aura à coeur de remplir ces missions nouvelles.

Pour répondre plus spécifiquement à votre inquiétude sur les cours de langue, seule est envisagée la suppression des cours de français général, qui ne présentent pas de valeur ajoutée avérée par rapport à l'offre pédagogique des institutions autrichiennes, qu'elles soient publiques, telles les universités populaires, ou privées, et qui sont effectivement aujourd'hui largement déficitaires.

Quant aux cours de français « sur objectifs spécifiques », c'est-à-dire destinés à des publics particuliers, qu'il s'agisse des hauts fonctionnaires, des professeurs de français, des étudiants en mobilité ou des entreprises, ils sont bel et bien maintenus et, si possible, développés.

Il s'agit donc, monsieur le sénateur, non pas d'un repli de notre action, mais de nouvelles perspectives répondant, tout simplement, à la demande locale.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Je remercie Mme la ministre d'avoir bien voulu indiquer les activités envisagées pour l'Institut français de Vienne, mais la question qui se pose est de savoir comment elles seront financées autrement que par dotation, puisque ce sont normalement les cours de français classiques qui permettent de financer nos instituts.

L'Institut français de Vienne paraît très pauvre puisqu'il a indiqué ne pas disposer de 1 000 euros nécessaires pour organiser la Journée de la francophonie !

Il y a donc un vrai problème. Je ne suis pas partisan du financement des instituts par l'enseignement de la langue française ; ce devrait être le rôle de l'Alliance française. Il serait normal, comme c'est le seul moyen de financement, de maintenir l'enseignement du français.

Dernière observation, les personnels concernés ont déjà reçu leur lettre de licenciement. C'est regrettable pour eux et pour l'outil pédagogique.

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