Question de Mme BRICQ Nicole (Seine-et-Marne - SOC) publiée le 10/11/2006

Question posée en séance publique le 09/11/2006

Mme Nicole Bricq. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le président, comme vous pouvez le constater, mes collègues socialistes et moi-même ne sommes ni à Marseille ni à Toulouse. Nous souhaitons simplement exercer notre responsabilité nationale et interroger le Premier ministre sur la politique de la France face au risque climatique à l'heure où se tient la conférence de Nairobi sur le réchauffement climatique.

Le rapport Stern, du nom de l'économiste missionné par le gouvernement britannique, a évalué le coût mondial de l'inaction des États : coût financier, 5 500 milliards d'euros ; coût économique, entre 5 % et 20 % du PIB ; et le coût humain se chiffre en dizaines de millions de personnes déplacées ou migrantes.

Pour la première fois, ce rapport introduit de la rationalité dans le débat en n'optant ni pour le catastrophisme ni pour le laisser-faire. Il appelle à l'action et place les États face à leurs responsabilités.

À cette fin, il définit, et c'est en cela qu'il est intéressant, les moyens à mettre en oeuvre s'agissant de la fiscalité, de la réglementation et de l'innovation technologique.

Depuis 2002, les différents gouvernements qui se sont succédé n'ont introduit aucune innovation fiscale. Il faut remonter à l'année 1999, au gouvernement Jospin et à la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, pour trouver la marque d'une volonté politique. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Les rares fois où les ministres de l'environnement de l'actuelle majorité ont eu des velléités d'agir, vous les avez contraints de céder aux lobbies. Vous vous êtes contentés de mesures brouillonnes et dispersées qui ne sont en aucun cas à la hauteur de l'enjeu.

Vous n'avez mis en place aucun plan sérieux d'économies d'énergies.

M. Alain Vasselle. Et les biocarburants ?

Mme Nicole Bricq. Aucune mesure fiscale ne figure dans le projet de loi de finances pour 2007. Pourtant, des États européens - je pense à la Suède et au Royaume-Uni - ont instauré une taxation du carbone.

M. Alain Vasselle. Taxer, taxer, vous ne savez faire que cela !

Mme Nicole Bricq. Cela prouve que l'on peut agir au niveau national.

Finalement, tout se passe comme si vous vous en remettiez au bon vouloir du marché, via les permis d'émission de gaz carbonique. Et même de ce point de vue vous êtes laxistes. En effet, la France figure parmi les dix-sept États qui ont été rappelés à l'ordre par la Commission européenne pour avoir proposé le maintien du niveau des émissions de l'année 2005 pour la deuxième phase de l'application du protocole de Kyoto jusqu'en 2012.

Il est bien temps, au bout de cinq ans, de proposer une commission fiscale écologique. M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, qui est par ailleurs candidat à l'élection présidentielle, suggère pour sa part de doubler la fiscalité écologique. Que ne l'a-t-il fait quand il était ministre de l'économie et des finances ?

Ces surenchères verbales préélectorales sont dérisoires face à l'enjeu. Le rapport Stern fixe le niveau d'engagement moyen des États à 1 % du produit intérieur brut, équitablement réparti entre les pays riches et les pays pauvres, afin d'éviter les coûts majeurs que j'ai rappelés. C'est possible si la volonté politique est là pour réorienter notre économie et nos pratiques.

M. Alain Vasselle. La question !

Mme Nicole Bricq. Monsieur le Premier ministre - car c'est à lui que nous posons la question - quelles mesures immédiates proposez-vous pour répondre par l'action, et pas par les discours, au défi écologique ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère délégué au budget et à la réforme de l'État, porte parole du Gouvernement publiée le 10/11/2006

Réponse apportée en séance publique le 09/11/2006

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Je vous remercie, monsieur le président, je vais me faire des amis ! (Nouveaux sourires.)

Madame Bricq, pourquoi utiliser une voix aussi douce pour dire des choses aussi cruelles ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Éliane Assassi. Ne soyez pas machiste ! Déjà qu'il n'y a aucune femme au banc du Gouvernement !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. En vous écoutant, je n'ai pas eu l'impression que nous ayons vécu de la même manière les quatre années qui viennent de s'écouler.

M. Didier Boulaud. Ça, c'est sûr ! C'est une vérité de La Palice !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Et j'ai pensé qu'il y avait effectivement deux manières d'appréhender la question de l'environnement.

La première consiste à vouloir en permanence s'arroger la vérité au nom d'une idéologie d'un autre temps (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)...

M. René-Pierre Signé. Et vous, quelle est votre idéologie ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué.... et à penser que, dès lors que l'on a marqué « écologiste » sur le front, on a réglé les problèmes environnementaux.

M. Didier Boulaud. Vous devriez lire le dernier livre de Mme Bachelot-Narquin !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. La seconde manière consiste à s'efforcer, dans la mesure du possible, avec humilité, de trouver des solutions pragmatiques à un problème qui nous engage tous, parce qu'il concerne notre planète.

M. David Assouline. Vous n'avez rien fait !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. D'ailleurs, madame Bricq, la France s'honore d'être l'un des pays du monde les plus en pointe sur ce dossier. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Dominique Mortemousque. Tout à fait

M. Didier Boulaud. Ce n'est pas ce que dit Roselyne Bachelot-Narquin !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Madame Bricq, vous fustigez le Gouvernement, qui, à vos yeux, n'aurait rien fait pour l'environnement. Pourtant, et vous le savez bien, ce gouvernement est celui qui a inscrit dans notre Constitution la charte de l'environnement. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Celle-ci nous engage tous pour l'avenir de notre planète.

M. David Assouline. Ce ne sont que des mots ; nous voulons des actes !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Parmi les pays de l'OCDE, la France est celui qui a l'un des plus faibles taux d'émission de dioxyde de carbone par habitant des pays industrialisés.

Mme Nicole Bricq. Ce sont des statistiques trafiquées ; tout le monde le sait !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. En outre, notre pays figure parmi ceux qui respectent le plus strictement les engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto. Il a fait des choix, notamment en matière nucléaire, qui permettent non seulement de garantir une bonne part de notre indépendance énergétique, mais également de le faire dans la préservation de l'environnement.

Mme Annie David. C'est pour cela que vous privatisez notre énergie !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Par ailleurs, il faut également, me semble-t-il, réfléchir à une fiscalité écologique moderne pour l'avenir.

M. Didier Boulaud. Demandez à Roselyne Bachelot-Narquin ce qu'elle en pense !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. En effet, dans ce domaine, un débat majeur aura lieu au cours des mois qui viennent. Nous pourrons ainsi réfléchir à un volet fiscal préservant le pouvoir d'achat.

Nous le voyons déjà au travers d'un certain nombre de mesures. Je pense notamment au super-éthanol E85 ou au livret du développement durable. Cela permettra d'associer la fiscalité tant nationale que locale à cet égard.

M. Didier Boulaud. C'est comme l'histoire de la pompe à essence qui n'existait pas !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je pense également à la taxe foncière sur les propriétés bâties applicable aux constructions de logements économes en énergie.

En réalité, sur ces sujets, nous avons beaucoup plus de points de convergence que de divergences. Toutefois, j'en ai assez de recevoir des leçons (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC) de la part de ceux qui partagent pourtant les mêmes combats.

Nous n'avons qu'une seule idée : travailler à l'avenir de nos enfants, de notre pays et de notre planète. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

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