Question de M. MÉZARD Jacques (Cantal - RDSE) publiée le 06/03/2009

Question posée en séance publique le 05/03/2009

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre et porte sur les conséquences pour les collectivités locales de la suppression annoncée de la taxe professionnelle.

En effet, le 5 février dernier, non sans rappeler l'annonce faite il y a un an de la suppression de la publicité sur le service public de l'audiovisuel, le Président de la République a annoncé, cette fois-ci, la suppression de la taxe professionnelle en 2010. Et puis, plus rien, plongeant alors dans l'inquiétude les collectivités et les élus locaux, qui craignent une nouvelle improvisation intempestive.

Cette suppression profitera, bien évidemment, aux entreprises assujetties à un impôt sur lequel tout le monde s'accorde à dire, depuis des années, que son mode de calcul doit être revu, en premier lieu d'ailleurs par ceux qui l'ont créé. Il n'est pas envisageable qu'elle ne fasse l'objet d'aucun remplacement par des ressources fiscales nouvelles préservant les collectivités locales. Or, sur la compensation, comme en son temps pour la publicité, le chef de l'État est très flou, se contentant de dire : « il y a des possibilités autour de la taxe carbone ».

Dans un contexte de crise grave et au moment même où le Gouvernement sollicite les collectivités pour financer son plan de relance, l'enjeu est de taille : il y va de la survie et du maintien des politiques de proximité menées par les collectivités sur tous nos territoires. Plonger ainsi les collectivités dans l'incertitude les amène à freiner leurs investissements.

Faut-il rappeler dans cet hémicycle que les collectivités ont perçu l'année dernière plus de 28 milliards d'euros au titre de la taxe professionnelle, dont 17 milliards d'euros ont été affectés aux communes et aux intercommunalités.

Cette taxe représente ainsi, à elle seule, 43 % de ce que rapportent les impôts directs locaux. La taxe professionnelle constitue donc une recette essentielle pour toutes les collectivités de notre pays et l'on comprend alors aisément l'émoi suscité par l'annonce de sa disparition chez les élus locaux de tous bords, comme le montrent d'ailleurs les réactions et les craintes exprimées par toutes les associations d'élus.

Ces inquiétudes sont, me semble-t-il, partagées sur l'ensemble des travées de la Haute Assemblée. En effet, monsieur le Premier ministre, trouver un impôt de substitution en un an ne sera pas chose facile, a fortiori dans la situation de crise économique actuelle.

M. le président. Posez votre question, mon cher collègue !

M. Jacques Mézard. Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement envisage-t-il toujours de supprimer la taxe professionnelle ? Si oui, quelles sont vos réelles intentions pour garantir la compensation des pertes de recettes ? Disposez-vous d'un calendrier précis ? De quelle façon le Parlement sera-t-il associé à ce chantier ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)


Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 06/03/2009

Réponse apportée en séance publique le 05/03/2009

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, votre question comporte un certain nombre des éléments de ma réponse et je ne doute pas que, dans un travail de réflexion qui ne sera pas improvisé, auquel je souhaite associer des représentants de votre Haute Assemblée et de l'Assemblée nationale, nous arrivions à trouver les substituts auxquels vous faisiez référence.

Permettez-moi de rappeler quelques-uns des principes qui nous guideront.

Premièrement, nous en sommes d'accord, la taxe professionnelle n'est pas un bon impôt, ni dans son assiette, ni dans son taux, ni dans son mode de calcul.

Deuxièmement, la suppression de certains de ses éléments – la base foncière subsistera, car elle constitue un lien étroit entre l'entreprise et le territoire – améliorera considérablement la compétitivité des entreprises et l'attractivité du territoire français.

Troisièmement, la suppression de la taxe professionnelle entraînera un allègement pour les entreprises : il est chiffré aujourd'hui à 11,4 milliards d'euros, soit, net d'impôt sur les sociétés, 8 milliards d'euros.

Avec l'ensemble des modes de calcul, la perte de recettes représente 22 milliards d'euros pour les collectivités locales ; elle sera intégralement compensée collectivité par collectivité, M. le Premier ministre l'a réaffirmé haut et fort.

M. Jean-Pierre Sueur. Comment ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Vous avez raison, il faut ensuite déterminer comment !

Tout d'abord, il est indispensable de conserver un lien entre les entreprises et le territoire. C'est la raison pour laquelle la partie foncière, en particulier le foncier industriel, doit demeurer un élément de base extrêmement important.

M. Jean-Pierre Sueur. Cela ne suffit pas !

Mme Christine Lagarde, ministre. Ensuite, nous allons devoir chercher d'autres sources de financement qui permettront de compenser le manque à gagner, collectivité par collectivité.

M. Jean-Pierre Sueur. Dans quelle direction ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Certaines indications ont déjà été données ; il s'agit, notamment, de fractions supplémentaires de la TIPP et de la taxe sur les conventions d'assurance. D'autres pistes doivent être explorées, en particulier pour ce qui est de la base foncière industrielle ou de la valeur ajoutée.

Ce sont des pistes que nous examinerons de façon concertée et productive, après la conférence nationale des exécutifs que M. le Premier ministre réunira prochainement.

Quoi qu'il en soit, vous pourrez compter sur le Gouvernement, sous l'autorité de François Fillon, pour être extrêmement attentif à la compensation de la suppression de la taxe professionnelle pour les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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