Question de Mme BRICQ Nicole (Seine-et-Marne - SOC) publiée le 24/09/2009

Mme Nicole Bricq attire l'attention de M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales sur les freins législatifs au developpement d'une démocratie locale ouverte à la participation citoyenne au travers notamment de la composition des commissions municipales.

Si les lois n° 92-125 du 6 février 1992 et n° 2002-276 du 27 février 2002 ont apporté des avancées significatives en prévoyant l'obligation de créer des comités consulatifs ou des conseils de quartiers, elles n'ont pas prévu l'ouverture des commissions municipales aux citoyens. Malgré cette lacune juridique, des communes de toute la France ont pris le parti d'ouvir leurs commissions municipales à leurs habitants. C'est par exemple le cas des communes de Ercé (35), Ouzouer-sur-Loire (45), Ifs (45), Yvré l'Evêque (72).

Une commune de son département, Chelles, a, par délibération, décidé de s'insrire dans cette démarche. Mais elle s'est vue opposer le refus du représentant de l'État au motif que les dispositions de l'article L. 2121-22 du code général des collectivités territoriales ne prévoient pas une participation citoyenne dans les commissions municipales. Les communes précedemment citées n'ont pas, elles, à sa connaissance, connu une telle entrave.

C'est pourquoi, elle souhaite savoir pourquoi un traitement différencié entre les communes est, en l'espèce, autorisé et lui demande si le Gouvernement est disposé à adapter, par voie réglementaire, le droit existant aux réalités de la démocratie moderne en permettant notamment la constitution de commissions municpales ouvertes à des citoyens non élus. À défaut, elle lui indique qu'elle se verra contrainte de déposer une proposition de loi pour compléter l'article L. 2121-22 du code susvisé.

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Réponse du Secrétariat d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales publiée le 28/10/2009

Réponse apportée en séance publique le 27/10/2009

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, auteur de la question n° 631, adressée à M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.

Mme Nicole Bricq. Monsieur le secrétaire d'État, ma question concerne un sujet qui relève de la démocratie locale.

J'ai été saisie par le maire de Chelles, l'une des villes les plus importantes de mon département de Seine-et-Marne, de ce qu'il est convenu d'appeler un vide juridique et qui engendre une iniquité territoriale à la suite des interprétations variables que les représentants de l'État dans les départements en font.

Les lois du 6 février 1992 et du 27 février 2002 ont apporté des avancées significatives en matière de démocratie locale en prévoyant l'obligation de créer des comités consultatifs ou des conseils de quartier dans les communes. En revanche, elles n'ont pas prévu l'ouverture des commissions municipales aux citoyens.

Pourtant, et malgré ce vide juridique, des communes de toute la France ont pris le parti d'ouvrir leurs commissions municipales à leurs habitants sans que les autorités préfectorales de leur département ne s'en émeuvent. C'est par exemple le cas des communes d'Ercé en Ille-et-Vilaine, d'Ouzouer-sur-Loire dans le Loiret, d'Ifs dans le Calvados et d'Yvré-l'Évêque dans la Sarthe.

En revanche, en Seine-et-Marne, le représentant de l'État, le préfet, a demandé explicitement le retrait d'une délibération du conseil municipal de Chelles visant à ouvrir aux habitants les commissions municipales.

Devant le refus de l'autorité administrative, le maire a transformé les commissions municipales en comités consultatifs afin de créer une coexistence paritaire entre les élus et les citoyens, le contraignant dès lors à supprimer les commissions municipales.

Cette situation paraît absurde, et l'interprétation différenciée de la loi par les autorités préfectorales engendre une inégalité de traitement des territoires de la République que nous ne saurions laisser s'installer durablement.

C'est pourquoi je vous demande, monsieur le secrétaire d'État, si le Gouvernement compte adapter, et par quelle voie, réglementaire ou législative, le droit existant aux réalités de la démocratie moderne, en permettant notamment la constitution de commissions municipales ouvertes à des citoyens non élus.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Madame la sénatrice, vous m'avez interrogé sur les freins, ou prétendus tels, au développement de la démocratie locale.

Comme vous le savez, les affaires de la commune dont le conseil municipal doit débattre font généralement l'objet de travaux préparatoires au sein de groupes de travail dont la composition est variable en fonction de la décision des conseils municipaux eux-mêmes.

Ainsi, un conseil municipal peut créer en son sein des « commissions municipales », qui ne sont composées que d'élus communaux, ou bien constituer des « comités consultatifs », ouverts à des personnes non élues.

Dans le cas où le conseil municipal désire associer à un groupe de travail composé d'élus des citoyens, notamment des représentants d'associations locales, le code général des collectivités territoriales lui donne la faculté de mettre en place un ou plusieurs comités consultatifs, dont il revient au conseil municipal, sur proposition du maire, de fixer la composition. Chaque comité est présidé par un membre de l'assemblée communale, lui-même désigné par le maire.

Je précise cependant que la jurisprudence interdit à un conseil municipal d'instituer un comité consultatif en lieu et place d'une commission municipale. Il commettrait effectivement, dans ce cas, une erreur de droit.

Toutefois, rien ne s'oppose à ce que le maire propose la transformation d'une commission municipale en comité consultatif par l'intégration de personnes extérieures audit conseil municipal. Dans ce cas, la commission municipale change de nature et perd son appellation traditionnelle, qui correspond à une définition très précise de la loi.

Il n'y a donc pas lieu de modifier le droit existant, qui permet de différencier très clairement les groupes de travail constitués exclusivement d'élus communaux de ceux qui accueillent des personnalités locales qui n'ont pas la qualité d'élus.

Tels sont, madame la sénatrice, les éléments de réponse que je pouvais vous apporter ce matin.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Je ne suis pas sûre, monsieur le secrétaire d'État, que votre réponse apporte la démonstration que le vide juridique se trouve comblé, parce qu'elle ne tient pas compte de la différence de traitement, liée à une variation dans l'interprétation des textes de loi, que l'on constate d'un département à l'autre.

Il faudra donc qu'une proposition de loi finisse par être déposée pour que soit clarifié ce qui relève de la loi. Car, contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le secrétaire d'État, la loi n'a pas réglé le problème, nous en avons la preuve chaque jour. Le recours à un véhicule législatif sera donc inéluctable, si le Gouvernement ne veut pas utiliser la voie réglementaire.

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