Question de M. MÉZARD Jacques (Cantal - RDSE) publiée le 03/12/2009

M. Jacques Mézard attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la réforme annoncée par son ministère et par le ministère de l'éducation nationale au sujet du recrutement et de la formation des enseignants.

D'une part, cette réforme conduirait les enseignants du 1er et du 2ème degré à se retrouver devant des élèves alors qu'ils sont dépourvus de toute expérience professionnelle et n'ont pas bénéficié d'une formation adéquate. Cette vision du métier d'enseignant, qui en minimise la dimension professionnelle, serait très préjudiciable à la fois aux enseignants, qui risquent de se trouver démunis sur les plans pédagogique et didactique, et aux élèves, à qui l'on doit de mettre tout en oeuvre afin de leur garantir un enseignement de qualité.

D'autre part, la réforme envisagée aboutirait nécessairement à la fermeture des antennes délocalisées des IUFM dans les villes moyennes, du fait de la disparition de toute formation professionnelle en alternance nécessitant des lieux de stage.

Enseigner est un métier qui s'apprend et qui requiert de ce fait une véritable formation professionnelle. La réforme envisagée va à l'encontre des attentes et des objectifs annoncés en matière d'enseignement et de réussite scolaire : priver les enseignants d'une formation adéquate et nécessaire ne sera pas sans conséquence sur l'enseignement dispensé aux élèves.

Il souhaite connaître les intentions exactes du Gouvernement sur cette question essentielle pour la qualité de notre système éducatif. Il lui demande donc de lui préciser le contenu du projet annoncé de réforme de la formation et du recrutement des enseignants et de lui indiquer clairement quel sera le sort qui sera réservé, dans le cadre de cette réforme, aux IUFM des villes moyennes.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé des sports publiée le 27/01/2010

Réponse apportée en séance publique le 26/01/2010

M. Jacques Mézard. Ma question porte sur le recrutement et la formation des enseignants, et en particulier sur le devenir des instituts universitaires de formation des maîtres dans les départements ruraux dépourvus d'université.

À la suite de la réforme, la plupart des enseignants du premier et du deuxième degrés nouvellement recrutés se retrouveront devant des élèves sans pouvoir s'appuyer sur la moindre expérience professionnelle ni avoir bénéficié d'une formation adéquate. À nos yeux, cette vision du métier en minimise la dimension professionnelle et risque d'être très préjudiciable à la fois aux enseignants, qui seront démunis sur les plans pédagogique et didactique, et aux élèves, auxquels devrait être garanti un enseignement de qualité.

Par ailleurs, la réforme aboutira nécessairement, selon nous, à la fermeture des antennes délocalisées des IUFM dans les villes moyennes, du fait de la disparition de toute formation professionnelle en alternance nécessitant des lieux de stage. Pour cette raison, elle va à l'encontre des attentes et des objectifs annoncés et risque de priver les enseignants d'une formation tout à fait indispensable. Je souhaite demander aujourd'hui au Gouvernement de préciser le contenu du projet de réforme à cet égard et de nous indiquer clairement quel sort sera réservé aux IUFM des villes moyennes.

Dans un courrier adressé au maire d'Aurillac, le ministre précise que « les centres départementaux des IUFM ne disparaissent pas. Les universités “ intégratrices ” continueront de les gérer dans le cadre d'une politique académique du site. » Malheureusement, le directeur de l'IUFM régional m'a écrit l'inverse : « En ce qui concerne les antennes de l'IUFM, leur implantation territoriale devient caduque dans la mesure où, d'une part, leur éloignement du centre universitaire clermontois et, d'autre part, la disparition de toute formation professionnelle en alternance qui nécessite des lieux de stages, les condamne irrémédiablement. »

Les deux auteurs de question précédents ont évoqué la France profonde ; cette France profonde, nous souhaitons qu'elle sorte au gouffre dans lequel on l'enfonce. À cet égard, il y a certes la désertification rurale, mais la fuite de la matière grise est aussi un phénomène redoutable. Je voudrais donc une réponse claire et précise à la question suivante : que deviendront les antennes départementales des IUFM.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. Monsieur le sénateur, au nom de Mme Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, je voudrais vous dire que vous avez entièrement raison : enseigner est un métier qui s'apprend et qui requiert une véritable formation professionnelle. C'est précisément pour cette raison que le Gouvernement a décidé de réformer la formation des maîtres.

Les futurs maîtres bénéficieront désormais d'une formation plus ouverte et véritablement adaptée à la réalité de leur métier, qui comprendra des disciplines littéraires et scientifiques, des cours de pédagogie et l'apprentissage d'une langue étrangère. Cette préparation leur permettra de mieux appréhender leur futur métier, ainsi que d'être mieux armés pour rebondir sur le marché du travail en cas d'échec au concours. Ne l'oublions pas, beaucoup de débouchés étaient jusque-là fermés aux étudiants concernés, du fait de la trop forte spécialisation de leur cursus.

Mais il ne s'agit là que d'une des facettes de la réforme. Le Gouvernement partage totalement, monsieur le sénateur, votre indignation contre le fait que de jeunes enseignants puissent être placés devant des élèves alors même qu'ils sont dépourvus de toute expérience professionnelle. Toutefois, cette situation, anormale, est celle que nous vivons aujourd'hui : elle ne résulte pas de la réforme ; bien au contraire, celle-ci prévoit la mise en place de stages professionnalisants avant même l'entrée en fonctions et une formation continue après le recrutement.

Il n'est en effet plus acceptable que des enseignants se voient confier une classe sans avoir été confrontés à la réalité du terrain au cours de leur formation. C'est pourquoi la réforme prévoit des stages d'observation et des stages pratiques en première année de master, puis des stages en responsabilité en deuxième année.

Enfin, soyez rassuré : la réforme ne remet nullement en cause l'existence des antennes des IUFM en tant que pôles universitaires de proximité. Mme Valérie Pécresse a déjà eu l'occasion de s'exprimer sur ce sujet devant vos collègues députés. Elle a ainsi réaffirmé le rôle très important que les antennes IUFM auront à jouer dans la réforme, dans la mesure où il leur reviendra de gérer les stages et les formations au plus près du terrain, sur l'ensemble du territoire. Il est en effet très important que les étudiants puissent bénéficier d'une formation de proximité. Cette réforme offre donc toutes les garanties pour la mise en place d'une formation des maîtres adéquate et de qualité.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Nous connaissons le brio de Mme la ministre, mais nous jugerons sur pièces. Je ne suis pas complètement rassuré quant au devenir des antennes départementales des IUFM. Les indications données ne correspondent ni aux propos de certains présidents d'université, ni à ceux des directeurs d'IUFM. Mais gardons-nous des procès d'intention : si ces structures sont maintenues et continuent leur action au bénéfice des enseignants et des élèves, je ne manquerai pas d'en donner acte au Gouvernement.

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