Question de Mme KAMMERMANN Christiane (Français établis hors de France - UMP) publiée le 13/05/2010

Mme Christiane Kammermann attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur les six écoles publiques conventionnées du Gabon (EPC) qui scolarisent plus de 2 000 élèves dont 45 % d'enfants de français expatriés ou résidents.

Ce système original qui n'appartient pas au réseau de l'enseignement primaire de l'AEFE perdure depuis les années 1970 et assure un enseignement de qualité à programme français à la satisfaction générale des parents français et gabonais.

Son financement est assuré par les frais de scolarité recueillis par l'association des parents d'élèves et sur le plan pédagogique, qui est essentiel, et par le détachement dans le cadre de la coopération française de dix-neuf enseignants français titulaires de l'éducation nationale qui enseignent aux enfants et forment leurs collègues gabonais en vue d'un éventuel passage de relais aux gabonais.

Cela est redouté par les parents qui sont persuadés que seule une présence significative d'enseignants français est à même de garantir la qualité de l'enseignement.

Il semblerait que le ministère des affaires étrangères n'ait jamais vraiment pris la mesure de cette "exception gabonaise » et qu'il considère les EPC comme un projet de coopération qui doit être soumis à la déflation des moyens comme tous les projets et non pas comme une obligation de la France d'assurer la scolarisation des enfants français par le réseau AEFE (inexistant au Gabon au niveau primaire) comme cela se pratique dans tous les autres postes.

Au vue de cette situation, elle lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement sur la pérennité, pour ne pas dire la survie, de l'enseignement primaire à programme français dans le cadre des EPC et quels moyens il compte dégager pour aligner le poste du Gabon sur ses voisins de l'Afrique centrale où le ratio élèves/enseignants, pour la même population scolaire concernée, est de 34 enseignants en RDC par exemple pour 19 à peine au Gabon.

Le rééquilibrage des charges en personnel français expatrié et donc qualifié, ne pouvant venir ni du ministère gabonais ni des parents d'élèves déjà très sollicités, seule une prise en compte de la situation par notre tutelle peut apporter aux parents français cadres expatriés publics et privés entre autres, les assurances qu'ils attendent de leurs représentants.

Au vue de cette situation, elle souhaite savoir ce qu'il compte faire pour clarifier cette situation pesante et angoissante pour les parents d'élèves.

- page 1183


Réponse du Secrétariat d'État aux affaires européennes publiée le 30/06/2010

Réponse apportée en séance publique le 29/06/2010

Mme Christiane Kammermann. Monsieur le secrétaire d'État, au Gabon, les six écoles publiques conventionnées, ou EPC, scolarisent plus de deux mille élèves, dont 45 % d'enfants de Français expatriés ou résidents. Ce système original perdure depuis les années 1970 et assure un enseignement de qualité conforme aux programmes français, à la satisfaction générale des parents français et gabonais. Son financement est assuré par les frais de scolarité, s'élevant à environ mille euros par an et par enfant, recueillis par l'association des parents d'élèves.

Sur le plan pédagogique, l'enseignement est assuré par le détachement, dans le cadre de la coopération française, de dix-neuf enseignants français titulaires de l'éducation nationale. Ils enseignent aux enfants et, pour un tiers d'entre eux, forment leurs collègues gabonais.

Depuis plusieurs années, les postes d'assistants techniques sont peu à peu supprimés ; leur disparition, à terme, est redoutée par les parents d'élèves, persuadés que seule une présence significative d'enseignants français permet de garantir la qualité de l'enseignement dispensé. Un plan prévoit même la déflation des effectifs d'assistants techniques restants, afin que ces écoles n'aient plus, à partir de 2012, que des enseignants et des directeurs gabonais, encadrés par six maîtres-formateurs français titulaires.

La convention liant l'État gabonais à l'État français arrive à échéance en août prochain et doit donc être renégociée.

Il semblerait que le ministère des affaires étrangères n'ait pas pris toute la mesure de cette « exception gabonaise » et qu'il considère les EPC comme un projet de coopération devant être soumis à la déflation des moyens, à la même enseigne que tous les autres projets, et non pas comme une obligation pour la France d'assurer, comme dans tous les autres postes, la scolarisation des enfants français au Gabon par le réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE, réseau d'ailleurs inexistant pour l'enseignement primaire dans ce pays.

L'homologation des établissements par le ministère de l'éducation nationale suppose un taux d'encadrement de 50 % par des enseignants titulaires ; or, à ce jour, ce taux n'atteint que 35 % dans les EPC du Gabon. À terme, la qualité de l'enseignement sera donc remise en cause.

Le 24 février 2010, lors de sa visite au Gabon, le Président de la République, Nicolas Sarkozy, a donné un espoir à la communauté française de ce pays en s'engageant à veiller au maintien de l'aide de la France aux écoles conventionnées.

Dans ce contexte, quelles sont vos intentions, monsieur le secrétaire d'État, pour garantir la pérennité de l'enseignement primaire à programme français dans le cadre des EPC ?

Quels moyens comptez-vous dégager pour aligner le poste du Gabon sur ses voisins de l'Afrique centrale ? Dois-je rappeler que le nombre d'enseignants, pour la même population scolaire concernée, s'élève à trente-quatre en République démocratique du Congo, par exemple, pour dix-neuf à peine au Gabon ? C'est une véritable discrimination !

Il n'est pas envisageable que les enfants français du Gabon ne reçoivent pas un enseignement de qualité, au même titre que leurs camarades résidant au Cameroun, pour prendre un autre exemple !

Le rééquilibrage des charges en personnel français expatrié, et donc qualifié, ne pouvant venir ni du ministère gabonais de l'éducation ni des parents d'élèves déjà très sollicités, seule une prise en compte de la situation par notre tutelle peut apporter aux parents français, cadres, expatriés publics et privés, entre autres, les assurances qu'ils attendent de leurs représentants.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame la sénatrice, je vous prie d'excuser M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, empêché de venir vous répondre bien que présent à Paris.

J'espère toutefois, même si le Gabon ne figure pas directement dans mes attributions et le périmètre des affaires européennes, vous fournir des éléments d'information qui vous serviront de viatique en vue d'une conversation avec M. le ministre des affaires étrangères et européennes, susceptible d'apporter les réponses précises que mérite votre question.

Comme vous le savez, le Gouvernement prend actuellement des mesures de restriction financière. Néanmoins, les points que vous soulevez sur le droit à l'éducation de tous les enfants français sont fondamentaux, et M. Kouchner, je n'en doute pas, ne refusera pas de s'en entretenir avec vous.

À ce stade, je me contenterai de vous donner lecture des points suivants :

Premièrement, le dispositif des écoles primaires conventionnées au Gabon continuera de bénéficier de l'aide de l'administration française et devrait même connaître un accroissement de ses capacités.

Deuxièmement, à la suite de la mission à Libreville des services du ministère des affaires étrangères et européennes, en février dernier, il a été convenu, dans le cadre de la nouvelle convention entre le ministère gabonais de l'éducation nationale et notre ambassade à Libreville, que les établissements concernés devraient continuer à s'appuyer sur des enseignants français, recrutés localement, et sur un nombre d'assistants techniques inchangé.

Troisièmement, la nouvelle convention de partenariat devrait par ailleurs confirmer l'engagement de la partie gabonaise sur la maintenance des établissements. L'association des parents d'élèves, quant à elle, prendrait en charge, en s'appuyant sur notre expertise, la gestion tant humaine que financière de ces écoles, qui ont aussi vocation à la formation professionnelle d'enseignants gabonais.

Enfin, non seulement l'engagement de la France à l'égard de ce réseau d'excellence est maintenu, mais celui-ci devrait même gagner en extension afin de rayonner également auprès des familles de nationalité tierce. Un projet d'ouverture d'un cycle complet de sections de maternelle, visant à nous attacher une population scolaire actuellement attirée par des offres privées, devrait même être mis en œuvre.

Conscient de l'enjeu tant pour les enfants de nos compatriotes que pour le Gabon, je puis vous assurer que le Quai d'Orsay continuera de suivre avec la plus grande attention l'évolution de ce dossier.

M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann.

Mme Christiane Kammermann. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie infiniment de votre réponse. Je n'ignore pas le mal qu'elle vous a donné.

Je suis tout de même quelque peu peinée et étonnée que M. Kouchner n'ait pas donné sa réponse. Cette question est posée depuis longtemps. Le sujet que nous abordons est important pour les Français de l'étranger, qui ne se distinguent en rien des Français de France. Ils disposent aussi, je le rappelle, du droit de vote !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Je le sais !

Mme Christiane Kammermann. J'en suis consciente, monsieur le secrétaire d'État, mais je suis affectée par le manque d'attention dont fait preuve M. Bernard Kouchner. Vous dites qu'il me recevra… Je le souhaite, pour pouvoir lui faire part de mes remarques, et j'espère qu'il aura une réponse positive et plus approfondie à m'apporter.

- page 5432

Page mise à jour le