Question de M. MAGRAS Michel (Saint-Barthélemy - UMP) publiée le 16/09/2010

M. Michel Magras attire l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur l'application des sanctions pénales à Saint-Barthélemy dans les domaines de compétence transférées à la collectivité.

Dans ces domaines délimités par l'article L.O. 6214-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la collectivité est habilitée à fixer les règles applicables sur le territoire de Saint-Barthélemy. Elle peut donc décider de remplacer les règles en vigueur en métropole par abrogation d'un code ou d'une loi intervenant dans ses compétences.

Parallèlement, l'article L.O. 6214-5 du CGCT permet à la collectivité de fixer, sous le contrôle de l'État, les sanctions en vue de la répression des infractions aux règles qu'elle fixe.

L'article L.O. 6251-3 du CGCT précise par ailleurs les conditions dans lesquelles la collectivité exerce cette faculté. Aux termes de ce dernier, les actes intervenant dans le domaine du droit pénal doivent être transmis par le président du conseil territorial au ministre de l'outre-mer, qui les transmet à son tour au ministre de la justice pour approbation totale ou partielle ou refus d'approbation publié par décret, l'acte devant être ensuite ratifié par la loi pour entrer en vigueur.

Mais, dans certaines matières, alors que la collectivité a publié le code local, les sanctions pénales sont encore en attente ou de promulgation par décret ou de ratification par la loi.

Ainsi, l'acte fixant les sanctions en matière d'urbanisme a été promulgué par le décret n° 2009-1645 du 23 décembre 2009 et reste dans l'attente de ratification par le Parlement. Il n'est donc pas en vigueur. Or, cette situation du fait, du caractère inédit et relativement récent du statut de Saint-Barthélemy laisse la place à de nombreuses interprétations. En l'occurrence, l'absence d'entrée en vigueur des actes fixant les sanctions adoptées par le conseil territorial suscite des interrogations quant aux règles applicables dès lors que le code national a été abrogé.

Il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles sont, dans l'attente de promulgation et/ou de ratification, les règles en vigueur en matière pénale.

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Réponse du Secrétariat d'État à la justice publiée le 03/11/2010

Réponse apportée en séance publique le 02/11/2010

M. Michel Magras. Monsieur le secrétaire d'État, dans les domaines de compétence délimités par l'article L.O. 6214-3 du code général des collectivités territoriales, la collectivité de Saint-Barthélemy est habilitée à fixer les règles applicables sur l'ensemble de son territoire. Elle peut donc décider de remplacer les règles en vigueur en métropole par abrogation d'un code ou d'une loi intervenant dans ces domaines.

Parallèlement, l'article L.O. 6214-5 du même code permet à la collectivité de participer, sous le contrôle de l'État, à l'exercice de la compétence en matière de droit pénal en vue de la répression des infractions aux règles qu'elle a fixées.

Pour mémoire, la procédure établie à cet effet par l'article L.O. 6251-3 du code général des collectivités territoriales prévoit que les actes fixant les sanctions pénales sont d'abord transmis au ministre de l'outre-mer qui les transmet à son tour au ministre de la justice. Les actes doivent ensuite faire l'objet d'un décret d'approbation totale, partielle ou d'un refus d'approbation avant leur ratification par le Parlement pour qu'ils puissent entrer en vigueur.

Mais alors que la loi organique laisse un délai de deux mois après transmission au Gouvernement pour la promulgation du décret, ce délai est en réalité largement dépassé.

L'acte fixant les sanctions pénales en matière d'urbanisme a été promulgué par le décret n° 2009-1645 du 23 décembre 2009 et est en cours de ratification. Il n'est donc pas en vigueur.

S'agissant des sanctions pénales des codes des contributions locales et de l'environnement, les décrets sont toujours en attente.

Or la non-applicabilité de ces dispositions pose aujourd'hui des difficultés d'ordre pratique.

En l'occurrence, dès lors que le code national a été abrogé par la collectivité afin d'y substituer un code local, il convient de savoir quelle règle s'applique dans le silence du code local.

Je vous serais donc reconnaissant, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir me préciser quelles sont les règles pénales applicables dans cette situation et, au-delà, s'il convient de considérer que, même en cas d'abrogation du code national, les sanctions pénales continuent d'être applicables à Saint-Barthélemy.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. Monsieur Magras, votre question, très concrète, est tout à fait pertinente.

Saint-Barthélemy, collectivité d'outre-mer autonome, dispose en effet aujourd'hui de compétences plus étendues que celles qui sont dévolues aux départements et aux régions, notamment en matière d'urbanisme.

La collectivité de Saint-Barthélemy peut donc « participer, sous le contrôle de l'État, à l'exercice des compétences qui relèvent de la compétence de l'État en matière de droit pénal », en adoptant « des actes dans le domaine du droit pénal aux seules fins mentionnées à l'article L.O. 6214-5 ».

Ces actes doivent être approuvés par les autorités de l'État qui peuvent les refuser pour des motifs de légalité comme d'opportunité.

Conformément à l'article 74 de la Constitution, les sanctions pénales définies par le législateur national continuent dès lors à s'appliquer sur le territoire de la collectivité lorsque les actes pris localement ne sont pas encore entrés en vigueur. C'est la situation que, précisément, vous avez décrite à l'instant.

Si, toutefois, les incriminations nationales spécifiques en matière d'urbanisme s'avèrent en pratique inapplicables localement – c'est le cas de figure que vous évoquiez – en raison de l'abrogation du code national, il appartient aux autorités locales de faire application des infractions de droit commun les plus adaptées aux faits de l'espèce, l'infraction de mise en danger d'autrui notamment.

Nous sommes donc là dans une démarche d'interprétation des textes, qu'il convient d'adapter à la réalité en se référant aux éléments de droit existant. C'est au fond la méthode que vous suggériez dans votre question qui devra s'appliquer. Telle est la réponse que je peux vous apporter, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Michel Magras.

M. Michel Magras. Monsieur le secrétaire d'État, j'ai bien compris que, dans l'attente de l'applicabilité des sanctions locales, les sanctions nationales restent applicables sur l'ensemble du territoire, à condition, bien entendu, qu'elles correspondent aux mêmes infractions. (M. le secrétaire d'État acquiesce.)

On peut toutefois regretter que la procédure, qui est particulièrement bien encadrée par la loi puisqu'elle fixe les limites à ne pas dépasser, donne lieu à un processus relativement long, susceptible de retarder l'entrée en vigueur des règles que nous fixons.

Cela étant, je vous remercie particulièrement de la clarté de votre réponse.

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