Question de Mme BRICQ Nicole (Seine-et-Marne - SOC) publiée le 21/10/2010

Mme Nicole Bricq attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur l'évolution de la prévention de la délinquance suite à la fermeture, le 1er septembre 2010, du poste de police de Crégy-lès-Meaux en Seine-et-Marne. Cette décision est présentée par le préfet de Seine-et-Marne comme une amélioration de la présence policière sur le terrain, du fait que les policiers de Crégy-lès-Meaux seront réaffectés dans des patrouilles de voies publiques dans la même zone. Cette suppression est emblématique du désengagement de l'État dans sa mission de sécurité. Pourtant, cinq policiers ont été violemment pris à partie et blessés, le 3 septembre dernier dans une commune de Seine-et-Marne. Ce type d'agression se banalise et inquiète les citoyens. Il y a en effet les discours officiels et la réalité qu'ils vivent. A cet égard, les derniers chiffres de la préfecture de Seine-et-Marne sur l'évolution de la délinquance sont préoccupants puisque l'activité d'investigation et d'initiative a nettement diminué entre août 2009 et août 2010. Le nombre de mis en cause suite à enquête a diminué de 16,75 % et le nombre de faits élucidés a pour sa part diminué de 6,09 %. Le Président de la République a pourtant fait du « taux d'élucidation » le critère d'évaluation de l'efficacité des forces de l'ordre.

Compte tenu du fait que des policiers sont agressés en pleine rue, que dans le même temps des postes de police ferment et que légitimement la population s'inquiète, elle s'interroge sur la volonté du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et plus généralement du Gouvernement, de maintenir des services publics régaliens dans le département de Seine-et-Marne en les dotant de moyens à la hauteur des enjeux d'un département en progression démographique constante pour améliorer les chiffres de l'activité d'investigation et d'initiative et assurer un service public, ou s'il entend poursuivre le transfert rampant de missions et charges relevant des compétences de l'État vers les collectivités locales à qui, par ailleurs, il réduit drastiquement les capacités financières et fiscales.

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Réponse du Ministère chargé de l'outre-mer publiée le 17/11/2010

Réponse apportée en séance publique le 16/11/2010

Mme Nicole Bricq. J'ai souhaité attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'évolution de la prévention de la délinquance dans le département de Seine-et-Marne, notamment dans sa partie nord, à la suite à la fermeture, le 1er septembre 2010, du poste de police de Crégy-lès-Meaux.

Assez paradoxalement, cette décision a été présentée par le préfet de Seine-et-Marne comme une amélioration de la présence policière sur le terrain, du fait que les policiers de Crégy-lès-Meaux seront réaffectés dans des patrouilles de voies publiques dans la même zone.

Cette suppression est emblématique du désengagement de l'État dans sa mission de sécurité.

Il se trouve que, deux jours après la fermeture du poste, le 3 septembre, cinq policiers ont été violemment pris à partie et blessés dans une agglomération située du nord de la Seine-et-Marne.

Ce type d'agression se banalise et inquiète nos concitoyens. Il y a en effet les discours officiels qu'ils entendent et la réalité qu'ils vivent. À cet égard, les derniers chiffres de la préfecture de Seine-et-Marne sur l'évolution de la délinquance sont préoccupants, puisque l'activité d'investigation et d'initiative a nettement diminué entre août 2009 et août 2010. Le nombre de « mis en cause suite à enquête » a diminué de 16,75 %, celui des faits élucidés de 6,09 %. Le Président de la République a pourtant fait du « taux d'élucidation » le critère d'évaluation de l'efficacité des forces de l'ordre.

Compte tenu du fait que des policiers sont agressés en pleine rue, que, dans le même temps, des postes de police ferment, je m'interroge sur la volonté du ministère et, plus généralement, du Gouvernement de maintenir un service public fondamentalement régalien dans le département de Seine-et-Marne.

Il importe de doter ces postes de moyens à la hauteur des enjeux d'un département en progression démographique constante pour améliorer les chiffres de l'activité d'investigation et d'initiative et assurer un service public de qualité.

Madame la ministre, ma question est simple : le Gouvernement entend-il poursuivre le transfert rampant de missions et charges relevant des compétences de l'État vers les collectivités locales, des collectivités dont, par ailleurs, ce même Gouvernement réduit drastiquement les capacités financières et fiscales ?

M. Roland Courteau. Bonne question !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Madame la sénatrice, vous appelez l'attention du ministre de l'intérieur sur l'évolution de la prévention de la délinquance, à la suite de la fermeture, le 1er septembre 2010, du poste de police de Crégy-lès-Meaux, en Seine-et-Marne.

Conformément à la volonté du Président de la République, le ministre de l'intérieur poursuit avec détermination un objectif simple : faire reculer la délinquance et garantir la sécurité partout et pour tous.

Cette politique, loin d'exprimer un « désengagement de l'État », se traduit par plusieurs faits : une mobilisation totale et une action résolue sur le terrain des préfets et des forces de sécurité ; une organisation optimisée ; des plans d'actions opérationnels correspondant aux différentes formes de délinquance ; une occupation accrue du terrain, avec notamment la mise en place d'unités spécifiques de lutte contre les bandes violentes et la création de « brigades spécialisées de terrain ».

Les moyens des forces de l'ordre seront encore améliorés par le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, en cours d'examen au Parlement.

La fermeture du commissariat de secteur de Crégy-lès-Meaux répond à une rationalisation de l'organisation de la circonscription de sécurité publique de Meaux, qui s'est déjà traduite par la fermeture du local de police de Nanteuil-lès-Meaux.

Ce commissariat de secteur était, en effet, peu fonctionnel et ne répondait plus aux réalités de la délinquance. Il enregistrait, en effet, moins de six plaintes par semaine. Sa fermeture permet de disposer, dans ce secteur, de deux patrouilles aux heures les plus sensibles. Les élus locaux, comme les divers partenaires de la police, conservent de toute façon un interlocuteur spécifique pour cette commune.

D'autres mesures ont, par ailleurs, été mises en œuvre : prise de plaintes à domicile pour les personnes ne pouvant se déplacer, présence accrue de policiers lors des événements festifs et des marchés, etc. Les élus et les partenaires de Crégy-les-Meaux ont été informés de ces nouvelles dispositions.

Le ministre de l'intérieur est particulièrement vigilant quant à la situation dans ce département et déterminé à y faire baisser durablement la délinquance.

Une réunion avec le préfet et les responsables de la police et de la gendarmerie sera organisée afin d'évaluer la situation en Seine-et-Marne, où les statistiques de la délinquance témoignent de la mobilisation de la police nationale puisque, au cours des neuf premiers mois de l'année, les atteintes volontaires à l'intégrité physique ont diminué de 3,37 % et les atteintes aux biens, de 3,55 %.

Si la mobilisation de l'État est totale, les collectivités territoriales ont également un rôle central à jouer en matière de sécurité. Ainsi, la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a consacré leur rôle dans ce domaine, tout en leur donnant des moyens nouveaux pour remplir leurs missions avec le soutien de l'État, par le biais, notamment, du fonds interministériel de prévention de la délinquance. La vidéoprotection et les polices municipales constituent en particulier deux outils majeurs à la disposition des maires.

La sécurité est l'affaire de tous et exige une approche globale, mobilisant l'ensemble des acteurs concernés.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Madame la ministre, vous avez fait référence à la loi LOPPSI et je vais également m'y reporter. Notre collègue Aymeri de Montesquiou, rapporteur pour avis de la commission des finances sur ce texte, avait indiqué au Sénat, au mois de septembre, que le ratio national était d'un policier pour 248 habitants. Sur le terrain, en Seine-et-Marne, les chiffres constatés sont très loin de cette moyenne !

Ainsi, à Chelles, une ville que je connais bien, il y a 116 agents pour 76 000 habitants dans la circonscription du commissariat, soit un policier pour 655 habitants. La municipalité dispose en outre de vingt-trois gardiens de police municipaux. Pour atteindre le ratio légal, il faudrait que 74 policiers soient ajoutés aux effectifs du commissariat. Pour rejoindre le ratio national évoqué par M. de Montesquiou, ce sont 190 agents supplémentaires qu'il faudrait embaucher !

Et cet exemple n'est pas isolé en Seine-et-Marne. Je prendrai maintenant celui de La Ferté-sous-Jouarre, en zone de gendarmerie. Il y a 33 gendarmes pour assurer la sécurité des vingt communes sur lesquelles ils interviennent et qui comptent au total 28 000 habitants. Le ratio grimpe à un gendarme pour 848 habitants !

J'en conclus qu'en matière de sécurité, domaine régalien par excellence, le Gouvernement utilise, là comme ailleurs, une logique comptable quand seule celle du service public devrait prévaloir. L'action du ministère de l'intérieur ne correspond pas du tout à la communication que vous venez de me faire.

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