Question de M. MÉZARD Jacques (Cantal - RDSE) publiée le 11/03/2011

Question posée en séance publique le 10/03/2011

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE.)

M. Jacques Mézard. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

M. Guy Fischer. Il n'est pas là !

M. Jacques Mézard. Il est des textes qui sont fondateurs de la République. Viendrait-il l'idée à quiconque de remettre en cause la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, sous prétexte que la société évolue ? La marque d'une politique, d'un président de la République, passe-t-elle par la remise en cause constante de nos principes fondamentaux ?

Le combat des radicaux pour mettre au cœur de la République française la laïcité, qui est non pas une opinion mais la liberté d'en avoir une, a abouti à la loi du 9 décembre 1905. L'article 1er de la Constitution a consacré ce principe. La République n'est donc concernée ni par les encycliques ni par les fatwas.

Le Premier ministre, lui-même, a déclaré que la laïcité était une « déclinaison du principe même de la liberté ». Il a pourtant ajouté récemment qu'il convenait de réévaluer ce principe et son application pour tenir compte des évolutions de la société française.

M. Guy Fischer. Il y a de quoi se faire du souci !

M. Jacques Mézard. Monsieur le ministre de l'intérieur, pour nous, il ne convient pas de réévaluer la loi de 1905 ; il convient de l'appliquer, de garantir l'indépendance de l'État et de ses services publics à l'égard des institutions et des pouvoirs religieux quels qu'ils soient.

M. Louis Mermaz. Très bien !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oui, quels qu'ils soient !

M. Jacques Mézard. La République ne connaît que des citoyennes et des citoyens ayant les mêmes droits et les mêmes devoirs, dans les cités, les rues, les écoles et les entreprises.

Aux termes de l'article 2 de la loi de 1905, « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ». Le lancement d'un débat sur « la laïcité et l'islam » procède-t-il de la même réévaluation de la laïcité ? (Oui ! sur les travées de l'UMP.)

Personne n'est dupe de ce qu'un tel débat sous-entend, de son caractère inopportun et peu responsable.

M. Didier Boulaud. Absolument !

M. Jacques Mézard. Le fiasco du précédent débat sur l'identité nationale n'est-il pas suffisant ?

M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue.

M. Josselin de Rohan. Au fait !

M. Alain Gournac. Tous les débats sont bons !

M. Jacques Mézard. Effectivement, mon cher collègue...

Le Président de la République a placé son quinquennat sous le signe de la rupture, et il a atteint ses objectifs : la France est de plus en plus divisée, le populisme et les extrêmes prospèrent.

Monsieur le ministre de l'intérieur, il est des sujets qui font naître très légitimement des divergences profondes entre majorité et opposition.

M. Jean-Pierre Fourcade. La question !

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Mézard !

M. Jacques Mézard. Mais, sur la question de la laïcité, la nation n'a pas besoin de rupture, elle a besoin de rassemblement.

Pour y parvenir, allez-vous renoncer au débat annoncé ? Allez-vous renoncer à modifier la loi de 1905 ? (Très bien ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration publiée le 11/03/2011

Réponse apportée en séance publique le 10/03/2011

M. le président. Monsieur le ministre de l'intérieur, alors que vous allez intervenir pour la première fois dans l'hémicycle du Sénat, je tiens à vous adresser mes vœux de plein succès dans vos nouvelles fonctions ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Monsieur le ministre, vous avez la parole.

M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Je vous remercie, monsieur le président, de vos encouragements. Permettez-moi de vous dire, ainsi qu'à vous tous, mesdames, messieurs les sénateurs, combien je suis conscient de l'honneur qui m'est fait et de la responsabilité qui m'incombe.

Monsieur Mézard, le principe de laïcité, consacré par la loi de 1905, est effectivement un principe fondateur et majeur de nos institutions républicaines. Du reste, il est inscrit dans notre Constitution.

Le Gouvernement, je vous le dis d'emblée, est parfaitement en phase avec ce que vous venez de déclarer. Il n'est pas question, en tout état de cause, de toucher à la loi de 1905.

M. Jean Bizet. Très bien !

M. Claude Guéant, ministre. Alors, me direz-vous, pourquoi un tel débat ? La raison en est toute simple : nous avons vu apparaître un certain nombre de comportements non conformes au principe de laïcité que nous partageons.

M. Alain Gournac. Voilà !

M. Claude Guéant, ministre. Des personnes ont transporté sur l'espace public des pratiques cultuelles.

M. Jean-Louis Carrère. Comme les pèlerinages à Lourdes...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ou les processions au Sacré-Cœur !

M. Claude Guéant, ministre. Sous le prétexte de pratiquer une religion, certaines personnes développent le communautarisme, une forme de vie en société que nous n'acceptons pas.

Par conséquent, il nous est apparu important de rappeler le principe de laïcité, comme vous venez de le faire à l'instant, monsieur le sénateur. Par ailleurs, le Parlement a récemment voulu confirmer ce principe,...

M. Guy Fischer. Pour le transgresser !

M. Claude Guéant, ministre. ... de même que celui de l'égalité entre l'homme et la femme, en interdisant le port du voile sur la voie publique.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Claude Guéant, ministre. Ce débat sera l'occasion de confirmer que le principe de laïcité s'applique dans notre pays.

J'ajoute que la laïcité ne s'oppose pas à aux religions. Il s'agit simplement d'affirmer le principe selon lequel l'État ne prend pas parti dans ce domaine ni ne soutient aucune religion.

Ceux qui vivent leur foi dans la discrétion seront donc rassurés par ce débat, qui permettra de réaffirmer le principe de laïcité ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Didier Boulaud. Tout le monde n'applaudit pas à droite : il y a une cassure à ce sujet !

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