Question de M. PLACÉ Jean-Vincent (Essonne - ECOLO) publiée le 11/10/2012

M. Jean-Vincent Placé attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur le soutien du ministère de l'agriculture à la filière des éco-matériaux.

Déclaré en 2010 par le Commissariat au développement durable comme l'un des « champions français de la croissance verte », le chanvre constitue une plante d'avenir pour notre agriculture. Sa culture est très respectueuse de l'environnement (peu ou pas de pesticides selon les régions) et les débouchés existent pour l'ensemble des constituants de la plante.

Le chanvre est une opportunité pour la France. C'est une culture qui garantit une absence de traitement phytosanitaire et qui constitue de fait un réservoir de biodiversité dans les exploitations agricoles lié cette absence de traitement. C'est également un élément de lutte contre le dérèglement climatique, qui ne nécessite pas d'irrigation, et qui est de plus, économe en azote. Le chanvre s'inscrit ainsi dans une politique de développement durable.

Avec 12 000 hectares de culture en France sur 18 000 hectares dans l'Union européenne, la France fait figure de leader dans cette filière. Pourtant ce type d'agriculture représente une très faible part de la surface agricole utile, même en France (1 hectare sur 2 500), et ne représente pas une concurrence avec le potentiel de production alimentaire.

C'est pour cela que le chanvre industriel, ainsi que le lin textile, est une culture qui a été soutenue jusqu'en 2011 par l'Union européenne par une organisation commune de marché spécifique, l'OCM « lin et chanvre ». Pourtant, le lien entre la production de chanvre et la perception d'aides communautaires a été brutalement rompu en 2012, ce qui se traduirait actuellement par une perte de compétitivité immédiate de l'ordre de 200 euros par hectare de culture, et cela dans une conjoncture économique de prix élevés des productions dominantes (céréales et oléagineux).

La filière a aujourd'hui besoin d'un appui, rendu envisageable par la future politique agricole commune (PAC) post 2013. Les projets très avancés de règlement de la PAC post 2013, basés sur la proposition de la Commission européenne au Parlement européen du 19 octobre 2011 -COM (2011) 625- pourraient offrir deux opportunités majeures de rééquilibrages économiques partiels.

Il lui demande si la France compte peser au niveau communautaire pour le maintien du chanvre dans la liste des « secteurs agricoles spécifiques rencontrant des difficultés et [qui] sont particulièrement importants pour des raisons économiques et/ou sociales et environnementales, comme c'est le cas dans le projet de la Commission » (articles 38-1, 38-2). Par ailleurs, il lui demande si la France va user de son influence pour que la culture de chanvre soit nommément intégrée dans les surfaces d'intérêt écologique (article 32), ce qui n'est pas le cas dans le projet de la Commission européenne.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 06/12/2012

Les négociations sur la politique agricole commune (PAC) post-2013 sont engagées à l'échelle communautaire. Les propositions législatives de la Commission européenne, qui servent de base pour cette négociation, ont été rendues publiques à la mi-octobre 2011. Le projet de règlement relatif aux soutiens directs prévoit, notamment, un dispositif d'aide forfaitaire lié à la mise en œuvre, par l'agriculteur, de mesures favorables à l'environnement. Cette aide, appelée « verdissement », doit représenter 30 % du budget total des aides directes. La Commission européenne propose trois mesures qui doivent être respectées par chaque agriculteur, dont une obligation consistant à prévoir 7 % de la surface agricole de l'exploitation, hors les prairies permanentes, à des éléments d'intérêt écologique comme les terres mises en jachère, les terrasses, les bandes tampons ou les particularités topographiques. La France est favorable au principe de verdissement car il contribue à la légitimité des soutiens directs versés aux agriculteurs. Toutefois, la proposition de la Commission européenne mériterait d'être améliorée. En particulier, en ce qui concerne le critère relatif aux surfaces d'intérêt écologique, il est opportun de retenir, au sein de ces surfaces, une liste d'éléments suffisante pour répondre aux enjeux du climat et de l'environnement de manière adaptée aux situations diverses des exploitations agricoles de l'Union européenne. Ainsi, au-delà des éléments proposés par la Commission européenne, certaines cultures nécessitant peu d'intrants et jouant un rôle important dans le stockage du carbone, comme le chanvre, présentent des caractéristiques qui devraient leur permettre d'être incluses dans cette liste. Par ailleurs, le projet de règlement relatif aux soutiens directs prévoit la possibilité d'octroyer des soutiens couplés pour certains secteurs agricoles particulièrement importants, pour des raisons économiques, sociales ou environnementales et qui rencontrent des difficultés économiques. Cette proposition de la Commission européenne semble être proche du point d'équilibre entre l'ensemble des États membres sur ce sujet sensible. Lorsque les négociations communautaires seront achevées, il conviendra d'évaluer les aides couplées pertinentes à mettre en œuvre en France, en tenant compte des équilibres entre les filières et les territoires. Le débat sur les modalités de la PAC post-2013 est en cours. La France reste particulièrement attentive, au cours des négociations, à ce que les différents volets de la future PAC contiennent les dispositifs et les instruments appropriés aux différentes filières agricoles. À ce titre, le chanvre occupe une place particulière, du fait de ses avantages agronomiques et environnementaux et du développement de nouveaux débouchés très prometteurs, notamment dans la construction et les composites.

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