Question de Mme SCHILLINGER Patricia (Haut-Rhin - SOC) publiée le 27/06/2013

Mme Patricia Schillinger attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur les matériaux au contact des denrées alimentaires, et plus particulièrement sur la migration des encres alimentaires d'emballage dans les aliments. En 2011, l'association de consommateurs UFC-Que choisir avait publié des analyses faites en Allemagne et en Suisse qui mettaient en avant la migration dans des aliments de dérivés pétroliers présents dans les encres et les cartons d'emballage. À la suite de ces conclusions, l'association UFC-Que choisir avait réalisé un test sur vingt produits alimentaires vendus en France (pâtes alimentaires, riz, couscous, chapelure, sucre en poudre) afin de vérifier si les substances chimiques présentes dans les encres et emballages en carton étaient susceptibles de se retrouver dans les aliments qu'ils contiennent. Il en est ressorti que les dérivés pétroliers, présents dans les encres d'emballage et le carton, se retrouvaient dans les aliments. Parmi les vingt produits testés, quatorze contenaient, à des niveaux préoccupants, des huiles minérales provenant des encres des emballages en carton, tandis que pour deux produits les doses relevées en huiles minérales saturées dépassaient considérablement la dose limite internationale. Il avait été demandé aux pouvoirs publics français et européens de combler le vide réglementaire et de définir sans plus attendre une réglementation sur les huiles minérales garantissant l'absence de dérivés pétroliers dans les aliments. En octobre 2012, la Commission européenne a déclaré étudier la nécessité de mesures spécifiques sur le sujet et qu'une analyse était en cours. Cependant, elle a aussi déclaré que la réglementation de l'Union européenne sur les matériaux en contact avec des denrées alimentaires faisait obligation aux fabricants de mettre sur le marché des matériaux sûrs (aux termes du règlement (CE) n° 1935/2004 du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 2004). En particulier, les matériaux ne doivent libérer dans les denrées alimentaires aucune substance susceptible de menacer la santé humaine. Ainsi, les États membres peuvent se réclamer de cette législation et retirer dès maintenant les produits dangereux du marché. Par conséquent, elle souhaiterait savoir si le Gouvernement envisage, par principe de précaution, de prendre des mesures pour supprimer les dérivés pétroliers dans les aliments.

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Transmise au Ministère chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation


Réponse du Ministère chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation publiée le 09/01/2014

La problématique des huiles minérales au contact des denrées alimentaires est apparue suite aux travaux d'un laboratoire suisse qui avait mis en évidence la présence de certaines catégories d'huiles minérales (hydrocarbures saturés d'huile minérale - MOSH et hydrocarbures aromatiques d'huile minérale -MOAH) dans les denrées alimentaires sèches conditionnées dans des emballages en papier et carton. En l'absence de données toxicologiques sur ces catégories de composés, les valeurs mesurées avaient alors été comparées à la valeur calculée de 0,6 mg/kg de denrées alimentaires établie en 2002 par le comité mixte de l'organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO)/organisation mondiale de la santé(OMS) d'experts des additifs alimentaires (JECFA) sur la base d'un seuil toxicologique temporaire de référence établi pour d'autres catégories d'huiles minérales de moyenne et basse densités. L'article publié en octobre 2011 dans le magazine Que Choisir, s'appuyant sur de nouvelles analyses réalisées par le laboratoire suisse, a mis en évidence la contamination d'emballages en papier et carton sur le marché par ces composés dérivés d'huiles minérales. Les matériaux destinés à entrer au contact des denrées alimentaires sont régis par le règlement (CE) n° 1935/2004 du Parlement européen et du Conseil. Ce texte prévoit comme principe de base que tous les matériaux et objets destinés à entrer en contact direct ou indirect avec des denrées alimentaires sont élaborés conformément aux bonnes pratiques de fabrication afin que, dans des conditions normales ou prévisibles de leur emploi, ils ne cèdent pas aux denrées alimentaires des constituants en une quantité susceptible de présenter un danger pour la santé humaine et n'entraînent pas une modification inacceptable de la composition des denrées ou une altération de leurs caractères organoleptiques. Il prévoit en outre que des mesures spécifiques peuvent être adoptées pour certains groupes de matériaux afin de définir notamment la liste des substances autorisées pour leur fabrication, les conditions particulières d'emploi de ces substances et/ou matériaux, ou encore des limites de migration spécifiques pour certains constituants. Toutefois, un certain nombre de matériaux ne font pas encore l'objet d'une réglementation européenne spécifique. Il s'agit notamment du groupe des papiers et cartons. Des enquêtes sont régulièrement menées par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pour vérifier l'inertie des papiers et cartons destinés à être mis au contact des aliments. Fin 2010, à la demande des États membres, la Commission européenne a interrogé l'autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) pour évaluer le risque lié à la présence des huiles minérales provenant des papiers et cartons dans les denrées alimentaires. L'avis de l'AESA, publié en juin 2012, a fait le point sur cette problématique. Il a permis d'identifier les différentes sources d'hydrocarbures d'huile minérale dans les aliments avec notamment une contribution significative des papiers recyclés pour les denrées sèches. Il a exprimé une préoccupation pour l'exposition aux MOSH et une préoccupation particulière pour l'exposition aux MOAH, et enfin la nécessité d'établir de nouvelles valeurs toxicologiques de référence pour ces catégories spécifiques d'hydrocarbures d'huile minérale. L'avis de l'AESA a recommandé : - la distinction parmi les MOSH des composés de moins de 16 carbones et de ceux de plus de 16 carbones ; - l'identification des sources de contamination à divers stades de la production alimentaire ; - l'usage de barrières ou la sélection des sources de papiers recyclés ; - la non-utilisation de composés de type hydrocarbures d'huile minérale dans la composition des papiers et cartons recyclés. Par ailleurs, la contamination des papiers et cartons étant plus significative en Allemagne, cet État membre prépare un texte réglementaire qui doit faire l'objet de discussions à la Commission européenne dès la rentrée 2013, ce qui sera l'occasion d'envisager d'éventuelles mesures réglementaires au niveau communautaire. La mise au point d'une réglementation - en priorité au niveau communautaire afin de minimiser les barrières aux échanges - dépend en particulier de la mise au point d'une méthode analytique permettant l'analyse et la séparation des huiles minérales MOAH et MOSH (selon le nombre de carbones des hydrocarbures d'huile minérale), la technique analytique utilisée par le laboratoire suisse nécessitant un appareillage lourd et coûteux dont ne disposent pas la plupart des laboratoires officiels. Dans l'attente de telles mesures, la DGCCRF a réuni à plusieurs reprises les représentants des organisations professionnelles pour faire le point. Ces réunions ont été l'occasion d'échanger sur les sources de contamination des papiers et cartons (qui s'avèrent se trouver principalement dans les encres d'impression des journaux et magazines utilisés pour la fabrication de fibres recyclées et dans une moindre mesure dans les encres utilisées dans des emballages alimentaires) et d'inviter les opérateurs à entreprendre des actions, le plus en amont possible, pour limiter voire supprimer l'utilisation d'huiles minérales.

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