Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UDI-UC) publiée le 12/02/2015

M. Hervé Maurey attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique sur la mise en œuvre de la mission « très haut débit ».

Reprenant, pour l'essentiel, les orientations du programme national très haut débit engagé en 2010, le plan « France Très haut débit », engagé par le Gouvernement, est censé permettre d'atteindre les objectifs ambitieux fixés par le président de la République en matière de couverture du territoire par les réseaux à très haut débit d'ici à 2022.

Le plan laisse, ainsi, la part belle aux investisseurs privés, censés couvrir 57 % de la population en investissements propres ou co-investissements, et laisse le soin aux collectivités locales et à leurs groupements d'assurer une couverture des territoires restant, les plus coûteux à raccorder, avec un concours limité de l'État.

Deux ans après la mise en place de ce plan et sept ans avant son échéance, il lui demande de bien vouloir préciser l'état des déploiements des opérateurs privés dans leurs zones d'intervention, le taux de raccordement et le rythme attendu des déploiements des opérateurs au regard de leurs engagements. Il lui demande également de préciser quelles initiatives le Gouvernement a adoptées ou entend adopter pour contrôler et garantir la tenue des engagements pris par les opérateurs.

Concernant les initiatives publiques, il lui demande, en outre, de bien vouloir préciser l'état des déploiements, le taux de raccordement et le rythme attendu des déploiements.

Il lui demande également de préciser le montant des subventions attribuées et en cours d'attribution par le fonds national pour la société numérique (FSN) pour les projets portés par les collectivités locales et leurs groupements et le taux de financement par prise retenu.

Le plan « France Très haut débit » faisait état, lors de son lancement, d'un investissement de vingt milliards d'euros d'ici à 2022. Il lui demande donc, à ce jour, le montant des sommes effectivement engagées pour leurs parts par les opérateurs, l'État, les collectivités et les autres financeurs.

Enfin, au vu de ces éléments, il lui demande si l'objectif fixé par le président de la République pourra être atteint en 2022 et s'il y a lieu de modifier le plan engagé pour l'atteindre.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des finances et des comptes publics, chargé du budget publiée le 08/04/2015

Réponse apportée en séance publique le 07/04/2015

M. Hervé Maurey. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, reprenant pour l'essentiel les orientations du programme national très haut débit engagé en 2010 par le gouvernement de François Fillon, le plan France Très Haut Débit, mis enœuvre par l'actuel gouvernement depuis 2013, prétend couvrir 100 % de la population à l'horizon 2022.

Ce plan laisse la part belle aux investisseurs privés, censés desservir 57 % de la population, et laisse le soin aux collectivités locales et à leurs groupements d'assurer une couverture des territoires restants, les plus coûteux, avec un concours limité de l'État.

Deux ans après la mise en place de ce plan, je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'État, que vous établissiez un premier bilan.

À ce titre, pouvez-vous m'indiquer l'état des déploiements des opérateurs privés dans leurs zones d'intervention, le taux de raccordement et le rythme attendu de ces déploiements, au regard des engagements pris ?

Je souhaiterais également savoir quelles initiatives le Gouvernement a pris ou entend prendre pour contrôler et garantir la tenue des engagements des opérateurs.

Concernant les initiatives publiques, je vous demande de bien vouloir préciser l'état des déploiements, le taux de raccordement et le rythme attendu de ces déploiements.

Dans un contexte budgétaire extrêmement tendu pour les collectivités et leurs groupements, pensez-vous que les subventions limitées du FSN, le Fonds national pour la société numérique, à savoir 300 euros par prise, suffiront à garantir un déploiement ambitieux dans les territoires ruraux ?

Pour ma part, je ne le pense pas. Alors que le coût par prise peut atteindre 2 000 euros dans certains territoires, je ne pense pas que 300 euros soient suffisants et, surtout, permettent d'assurer une péréquation, qui est nécessaire.

En matière d'aménagement numérique du territoire, la question de la téléphonie mobile est également essentielle. Je me réjouis que, dix jours avant le premier tour des élections départementales, le Premier ministre ait découvert ce problème.

À l'issue du Comité interministériel aux ruralités, qui s'est tenu le 13 mars dernier, le Gouvernement a en effet annoncé un certain nombre de mesures, qui vont dans le bon sens en matière de couverture des territoires en téléphonie mobile.

Toutefois, au-delà des effets d'annonce, comment entendez-vous passer très concrètement des paroles aux actes, avec quels moyens et quel calendrier ?

Vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, nos territoires ont un besoin vital de couverture mobile, et la bonne volonté des opérateurs est, chacun le sait, tout à fait limitée. En matière de couverture mobile, notamment, force est en effet de constater que ces derniers ne respectent pas toujours leurs engagements. Ainsi, en février 2010, ils se sont engagés dans un accord tripartite à poursuivre le déploiement de leur réseau 3G et à atteindre une couverture équivalente à celle de la 2G d'ici à la fin de l'année 2013. Or nous sommes en 2015, et à peine un tiers de l'objectif annoncé a été atteint.

C'est donc avec beaucoup d'intérêt que j'attends, monsieur le secrétaire d'État, vos réponses à mes questions.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert,secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur le sénateur, la couverture numérique en réseaux à très haut débit fixes et mobiles constitue un important levier d'égalité des territoires. Il s'agit d'un moyen pour améliorer la productivité des entreprises, l'accessibilité des services publics et l'attractivité des territoires.

Avec le plan France Très Haut Débit, nous avons voulu que le passage à une nouvelle génération de réseau soit l'occasion de combler des inégalités d'accès.

Ce plan a aussi marqué le retour de l'État stratège en matière de télécommunications. Il s'appuie sur l'intervention combinée des collectivités territoriales, des opérateurs privés et de l'État. Ce partenariat est essentiel pour atteindre l'objectif du très haut débit pour tous en 2022. L'État apporte 3,3 milliards d'euros de soutien aux projets des collectivités et son soutien est renforcé dans les territoires les plus ruraux.

Où en sommes-nous ? S'agissant de l'état des déploiements en fibre optique jusqu'à l'abonné des opérateurs privés, 3,4 millions de prises avaient été déployées à la fin de l'année 2014, soit une hausse de plus de 30 % en un an. À ce stade, les opérateurs respectent globalement leurs trajectoires de déploiement. Mais le Gouvernement sera particulièrement vigilant à ce que l'ensemble des opérateurs, et en particulier le nouvel SFR, poursuivent bien leurs investissements pour couvrir 57 % de la population en très haut débit.

Les conventions de suivi et de programmation des déploiements passées avec les collectivités sont l'outil privilégié pour confirmer localement ces engagements. À ce jour, une quarantaine de conventions ont été signées par les opérateurs Orange et SFR et une trentaine sont en cours de négociation.

S'agissant des initiatives publiques, 73 dossiers de collectivités ont été déposés, ce qui représente 86 départements, un investissement public global de près de 10 milliards d'euros, un soutien de l'État de 2,7 milliards d'euros, et plus de 6 millions de lignes très haut débit. Début mars, l'État avait engagé 1,5 milliard d'euros sur les 3,3 milliards d'euros prévus d'ici à 2022. Il devrait apporter en moyenne 50 % du financement public par prise. Au total, la couverture en très haut débit de notre territoire a d'ores et déjà considérablement progressé, avec plus de 13 millions de logements éligibles au 31 décembre 2014, soit une hausse de 20 % sur un an.

Nous avons aussi décidé de compléter la couverture mobile en zone rurale. Un courrier a été récemment adressé à tous pour préciser nos intentions. Je vous rappellerai simplement deux de nos objectifs : une couverture de l'ensemble des communes en zone blanche de la téléphonie mobile fin 2016 et la couverture de ces mêmes communes en internet mobile à la mi-2017.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie des éléments statistiques que vous venez d'apporter.

Vous avez dit que l'État stratège était de retour. C'est un slogan que j'entends régulièrement, mais que j'avoue ne pas comprendre complètement. En effet, vous avez repris à peu de choses près la politique de vos prédécesseurs.

Au-delà des chiffres, il faut bien avoir à l'esprit qu'il existe malheureusement encore de nombreux territoires dans lesquels il n'y a même pas de haut débit, voire de débit tout court. Il ne convient donc pas de nous gorger de mots témoignant de notre autosatisfaction. La réalité, c'est des territoires sans haut débit et sans téléphonie mobile.

Or une telle situation concourt au mal-être des territoires, notamment ruraux, mal-être qui s'exprime à l'occasion des élections. Sur le terrain, on le voit bien, l'une des principales demandes concerne une couverture numérique satisfaisante.

Il nous faut vraiment nous atteler à cette tâche ! C'est d'ailleurs l'objet du groupe de travail mis en place au Sénat sur l'aménagement numérique du territoire, qui a commencé ses travaux voilà quelques semaines et qui formulera des propositions concrètes. Au-delà des mots, il faut passer aux actes. Sur ce sujet, nous serons extrêmement vigilants.

Le problème, monsieur le secrétaire d'État, c'est que, comme d'autres avant vous, vous privilégiez les opérateurs au public. Tant que nous mènerons une politique qui considère les opérateurs uniquement comme des vaches à lait - on les taxe, mais sans leur fixer une obligation de couverture -, les choses n'avanceront pas.

Or, en la matière, il y a malheureusement peu de changements au rendez-vous et sur le terrain.

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