Question de M. VAUGRENARD Yannick (Loire-Atlantique - Socialiste et républicain) publiée le 03/12/2015

M. Yannick Vaugrenard attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la proposition d'instaurer une « pré-retraite amiante ».

La mise en place de la cessation anticipée des travailleurs de l'amiante a été une avancée qui a permis à de nombreuses victimes de l'amiante d'arrêter de travailler. Cependant, certains travailleurs dont l'exposition à l'amiante a réduit l'espérance de vie en sont exclus. Pour réparer cette injustice, les associations de soutien aux victimes demandent que le dispositif collectif existant soit complété par une voie d'accès individuelle à la « pré-retraite amiante », un dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA).

Elles proposent d'utiliser un faisceau d'indices, tels que le secteur d'activité, le métier, la durée et la période d'exposition, les situations de travail et gestes professionnels, l'exercice d'une activité professionnelle sur le site d'un établissement inscrit sur les listes, ou encore le nombre de malades sur le site.

Le rapport sur la faisabilité d'une voie d'accès individuelle au dispositif d'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA), rapport réalisé par M. Ricordeau à la demande du Gouvernement, a été remis au Parlement sur ce sujet à la fin d'août 2015. Il juge la voie d'accès individuelle trop coûteuse et trop lourde de contentieux.
L'auteur du rapport reconnaît que le dispositif actuel exclut des personnes ayant été exposées professionnellement à l'amiante comme les salariés du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) ou des sous-traitants ayant travaillé dans des établissements figurant sur les listes 1 ou 2 mais il s'inquiète du coût d'une voie d'accès individuelle et propose un durcissement drastique des conditions d'éligibilité pour tous les futurs bénéficiaires, y compris pour le dispositif actuel.

La Cour des comptes, dans son rapport de 2014 sur la question de l'amiante, propose trois mesures qui pourraient améliorer immédiatement la situation des victimes concernées, à savoir : l'extension du dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante aux fonctionnaires et aux artisans atteints d'une maladie professionnelle liée à l'amiante ; l'octroi automatique par le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) aux malades atteints de cancers du bénéfice des conséquences qui s'attachent à la faute inexcusable de l'employeur ; et l'obligation faite au FIVA d'indemniser les victimes et leurs ayants droit dès que la maladie ou le décès a été pris en charge par un organisme de sécurité sociale.

Il estime souhaitable d'accorder une véritable prise en charge aux victimes de l'amiante. Il note que le nombre de personnes en ACAATA a diminué de près d'un tiers en cinq ans.

Il lui demande donc de lui indiquer la position du Gouvernement sur les propositions de la Cour des comptes et de préciser comment rassurer les victimes de l'amiante et leurs familles sur les propositions du rapport gouvernemental.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 11/05/2016

Réponse apportée en séance publique le 10/05/2016

M. Yannick Vaugrenard. Madame la secrétaire d'État, la mise en place du dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante a été une avancée, qui a permis à de nombreuses victimes de cesser leur travail.

Cependant, certains salariés dont l'exposition à l'amiante a réduit l'espérance de vie en sont encore aujourd'hui exclus.

Pour réparer cette injustice, les associations de soutien aux victimes demandent que le dispositif collectif existant soit complété par une voie d'accès individuelle à la « préretraite amiante ». Elles proposent d'utiliser un faisceau d'indices, tels que le secteur d'activité, le métier, la durée et la période d'exposition, les situations de travail et gestes professionnels, l'exercice d'une activité sur le site d'un établissement inscrit sur les listes ou encore le nombre de malades sur le site.

À la demande du Gouvernement, un rapport a été remis au Parlement sur ce sujet en septembre dernier. Son auteur, M. Pierre Ricordeau, juge la voie d'accès individuelle trop coûteuse et trop lourde de contentieux. Il reconnaît néanmoins que le dispositif actuel exclut des personnes ayant été « exposées professionnellement à l'amiante », en particulier les salariés du bâtiment et des travaux publics ou encore des sous-traitants ayant travaillé dans des établissements jugés dangereux.

La Cour des comptes, dans son rapport public annuel 2014, propose trois mesures, qui pourraient améliorer immédiatement la situation des victimes de l'amiante : premièrement, l'extension du dispositif de cessation anticipée d'activité aux fonctionnaires et aux artisans atteints d'une maladie professionnelle liée à l'amiante ; deuxièmement, l'octroi automatique par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, aux malades atteints de cancers du bénéfice des conséquences qui s'attachent à la faute inexcusable de l'employeur ; troisièmement, l'obligation faite au FIVA d'indemniser les victimes et leurs ayants droit, dès lors que la maladie ou le décès a été pris en charge par un organisme de sécurité sociale.

Il est de notre responsabilité, mes chers collègues, d'accorder aux victimes une véritable prise en charge. Notons par ailleurs que le nombre de travailleurs de l'amiante en cessation anticipée d'activité a diminué de près d'un tiers en cinq ans.

Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous rassurer, nous, ainsi que toutes les victimes de l'amiante et leurs familles, en clarifiant la position du Gouvernement sur les propositions de la Cour des comptes ainsi que sur celles du « rapport Ricordeau » ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur sénateur, le Gouvernement a récemment pris des mesures en faveur des victimes de l'amiante, à la suite des propositions formulées par la Cour des comptes dans son rapport public annuel 2014.

L'une des dispositions de la loi de modernisation de notre système de santé permet de mettre un terme à ce qui constituait une inégalité de traitement entre les victimes de l'amiante : désormais, pour le FIVA, la décision de prise en charge du décès au titre d'une maladie professionnelle occasionnée par l'amiante vaut justification du lien entre l'exposition à l'amiante et ledit décès, à l'instar de ce qui existe pour les personnes vivantes atteintes d'une maladie professionnelle.

Jusqu'alors, quand bien même une caisse de sécurité sociale reconnaissait que le décès d'une victime était la conséquence d'une pathologie consécutive à une exposition à l'amiante, les ayants droit de la personne décédée ne pouvaient présenter cette reconnaissance à l'appui de leur demande d'indemnisation au FIVA pour établir le lien de causalité entre le décès et la pathologie : ils devaient communiquer des éléments démontrant l'existence de ce lien, ce qui pouvait être douloureux et de nature à faire naître des incompréhensions.

Il s'agit donc d'une mesure d'équité entre les demandeurs et de simplification pour les bénéficiaires du dispositif.

Par ailleurs, le Gouvernement s'est engagé à mettre en place des mesures de prévention et de prise en charge des victimes de l'amiante dans la fonction publique. Ainsi, le décret du 20 mai 2015 fixe les principes du droit à un suivi médical postprofessionnel pour les agents de la fonction publique d'État exposés à l'amiante dans le cadre de leur activité professionnelle.

Enfin, l'article 146 de la loi de finances pour 2016 prévoit la possibilité, pour les fonctionnaires atteints d'une maladie professionnelle provoquée par l'amiante, de bénéficier d'une cessation anticipée d'activité et de percevoir l'allocation spécifique de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Les textes d'application de cette disposition font actuellement l'objet d'une concertation et devraient être publiés prochainement.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, dont je ferai part à l'ensemble des associations concernées.

J'espère qu'elle répondra pleinement à leurs préoccupations, que les textes d'application que vous avez évoqués seront mis en œuvre le plus rapidement possible et que la différence entre reconnaissance collective et reconnaissance individuelle des travailleurs ayant souffert de l'amiante tendra à diminuer, voire à disparaître. Disant cela, je pense notamment aux travailleurs du bâtiment et des travaux publics et aux artisans ayant travaillé dans des entreprises jugées dangereuses.

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