Question de M. RAISON Michel (Haute-Saône - Les Républicains) publiée le 28/04/2016

M. Michel Raison attire l'attention de Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur l'évolution des chiffres du chômage en Haute-Saône.
Entre octobre 2014 et octobre 2015, il est apparu que la Haute-Saône était l'un des rares départements à présenter une baisse effective du chômage, à hauteur de 1,3 % dans les catégories A, B et C.
Fin 2015, cette baisse était encore plus marquée pour les demandeurs d'emploi en catégorie A (- 6,5 %) et le secteur de Luxeuil-les-Bains était le principal bénéficiaire de cette tendance en apparence favorable.
Au cours des trois derniers mois, la tendance départementale se vérifie avec un rythme du nombre d'entrées à Pôle emploi qui augmente de 1,9 %, ce qui représente 1 543 personnes, alors que celui du nombre des sorties progresse plus fortement, de 7,9 %, ce qui représente 1 607 personnes.
Toutefois, son expérience professionnelle et politique l'incline à penser qu'il convient toujours de se méfier des chiffres bruts.
De plus, sa perception de la situation économique et sociale l'incite à plus de prudence que d'autres commentateurs expliquant volontiers qu'une telle évolution départementale est principalement liée à un nombre croissant des créations d'emplois et donc à une reprise de l'activité économique.
Premièrement, selon l'enquête annuelle sur les besoins de main-d'œuvre publiée en avril 2016 par Pôle emploi, les projets de recrutements des entreprises haut-saônoises du secteur privé sont en recul, 14,2 % d'entre elles prévoyant d'embaucher en 2016 contre 15,8 % en 2015.
Deuxièmement, pour ce qui concerne les sorties de Pôle emploi, la direction régionale a confirmé que le principal motif de sortie est bien la « cessation d'inscription » pour 39 % des cas contre un taux de 20 % seulement pour les « reprises d'emploi déclarées ».
Troisièmement, il note que les « entrées en stage » représentent tout de même 13 % des cas. Et ce taux devrait fortement augmenter en raison du plan national « 500 000 formations » lancé par le Gouvernement, visant à multiplier par deux le nombre des chômeurs entrant en formation en 2016.
Pour toutes ces raisons, il se méfie des analyses sommaires et des raccourcis sur l'évolution des chiffres du chômage, que ce soit au niveau national ou en Haute-Saône.
C'est pourquoi, afin d'affiner sa compréhension de ce sujet majeur, il la remercie de détailler la catégorie des « cessations d'inscription » en les distinguant par motif et en précisant, pour chacun d'entre eux, l'évolution depuis quatre ans ainsi que le nombre des personnes concernées.
Enfin, il souhaite surtout recueillir son analyse sur cette baisse apparente du nombre des demandeurs d'emploi.
Il lui demande si elle relève principalement du rythme des créations d'emploi, ce qu'il souhaite, ou d'une conjonction moins dynamique qui repose sur la hausse des arrêts maladie, sur la multiplication des départs à la retraite liés à une population de chômeurs âgés et sur une plus grande mobilité géographique des demandeurs d'emploi n'ayant pas d'autre choix que de rejoindre des bassins plus porteurs d'emploi, ce qu'il craint.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargé de la formation professionnelle et de l'apprentissage publiée le 20/07/2016

Réponse apportée en séance publique le 19/07/2016

M. Michel Raison. Ma question se veut pédagogique, et non polémique, car les statistiques cachent des situations réelles de difficulté, parfois de désespoir et parfois aussi, heureusement, d'espoir. Ces réalités m'ont motivé à siéger au sein de la commission d'enquête sénatoriale sur ce sujet.

Au cours des douze derniers mois, en Haute-Saône, on a relevé une très légère baisse du taux de chômage. Aussitôt, certains commentateurs en ont tiré la conclusion, que je juge hâtive, que la Haute-Saône irait mieux...

Quand j'analyse les chiffres, je note un écart positif entre les entrées et les sorties du chômage de trente personnes sur un an.

Au cours de l'année écoulée, les cessations d'inscription pour défaut d'actualisation ont représenté 36 % des sorties, et leur nombre a augmenté de 18 %.

Dans le même temps, les reprises d'emploi n'ont progressé que de 13,8 %, les entrées en stage ont constitué 17 % des sorties - soit une hausse de 78 % - et la mise en place du plan « 500 000 formations supplémentaires » risque de fausser encore un peu plus les chiffres retraçant la réalité douloureuse du chômage.

Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous, pour le département de la Haute-Saône, me détailler la catégorie des cessations d'inscription par motif ? Pouvez-vous me donner les chiffres concernant cette catégorie et leur évolution depuis quatre ans ? Pouvez-vous me dire si la légère évolution positive de la situation de l'emploi est due à des reprises d'emploi ou simplement à des départs à la retraite ou, plus grave encore, à la fuite d'actifs vers d'autres bassins ?

Brandir des chiffres sans les accompagner d'une analyse peut permettre un affichage qui ne reflète pas forcément la réalité de la situation de l'emploi. Quel que soit le gouvernement en place, les Français ont besoin de vérité, de transparence. Les dirigeants, les services de l'État et des collectivités ont besoin d'analyses précises, en phase avec la vraie vie, afin de pouvoir apporter de vraies solutions.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage. Pour vous répondre, monsieur le sénateur Michel Raison, je vais donc expliciter les chiffres que vous avez cités, montrant une réduction du nombre de demandeurs d'emploi dans le département de la Haute-Saône.

La baisse atteint 5,2 % sur un an pour les demandeurs d'emploi sans activité inscrits en catégorie A, alors qu'elle s'établit à 1 % au niveau national. Si l'on prend également en compte l'évolution du nombre de demandeurs d'emploi en activité réduite, la baisse est de 3,4 % en Haute-Saône sur un an, contre 0,4 % au niveau national.

Votre département, monsieur le sénateur, affiche donc, au regard des indicateurs nationaux, des résultats traduisant une situation plus favorable.

Vous avez mentionné le plan « 500 000 formations supplémentaires ». Celui-ci se décline dans les territoires, l'objectif étant d'adapter la formation aux profils réclamés par les entreprises qui créent de l'activité et des emplois. Il s'agit d'un élément positif, mais sa mise en place ne peut avoir eu d'incidence sur les chiffres que vous avez cités, dans la mesure où il vient d'être lancé et commence seulement à produire ses premiers résultats.

La création au niveau national de 110 000 emplois salariés marchands en 2015, après trois années de destruction nette d'emplois, témoigne d'une reprise de l'activité économique, y compris en Haute-Saône.

On constate aussi, dans votre département, que le nombre de demandeurs d'emploi de longue durée, inscrits depuis un an ou plus, a baissé de près de 4 % sur un an. Cela montre bien que des facteurs structurels sont en action, permettant à des personnes depuis longtemps éloignées de l'emploi de reprendre une activité.

Enfin, s'agissant des sorties des statistiques liées à une « cessation d'inscription pour défaut d'actualisation », nous ne disposons pas de données détaillées par territoire.

Toutefois, les résultats d'une enquête menée à l'échelle nationale montrent que 45 % des cessations d'inscription pour défaut d'actualisation correspondent en fait à des reprises d'activité non signalées à Pôle emploi. Le taux que vous mentionnez pour votre département, à savoir 36 %, est inférieur à ce chiffre national.

J'espère que ces éléments auront permis de répondre à votre question. Ils font notamment apparaître que la situation, dans votre département, est meilleure que celle que nous constatons sur l'ensemble du territoire national.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. Je ne suis pas complètement convaincu par votre réponse, madame la secrétaire d'État.

Je souhaite que mon département aille mieux, mais, à l'examen, on constate que la baisse de 5,2 % du nombre des demandeurs d'emploi masque un certain nombre de réalités.

À vous entendre, à l'échelle nationale, 45 % des personnes n'étant plus inscrites à Pôle emploi pour défaut d'actualisation auraient en fait retrouvé un emploi et omis de le signaler. Cela signifie qu'il en reste tout de même encore 55 % qui se trouvent toujours sans emploi ! À cela, il faudrait ajouter les fuites d'actifs ou les départs à la retraite.

Je conserve donc des doutes quant au nombre réel de nouveaux emplois créés dans le département. Je vous remercie néanmoins, madame la secrétaire d'État, d'avoir pris la peine d'essayer de décortiquer certains chiffres...

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