Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 08/02/2018

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le trafic de « faux » médicaments en France.
En 2017, une enquête et des actions menées par les services d'Europol et les autorités douanières de neufs pays européens, dont la France, dans le cadre de l'opération MISMED (pour « misused medicines ») , ont permis la saisie de 75 millions de médicaments et de produits dopants pour une valeurs marchande estimée à plus de 230 millions d'euros. L'office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle estime que la contrefaçon de médicaments pourrait coûter 10 milliards d'euros par an au secteur pharmaceutique au niveau européen.
La France n'échappe pas à ce phénomène puisqu'en 2016, 4,2 millions de comprimés ont été saisis, constituant un record. Récemment, le 26 septembre 2017, les douanes françaises ont annoncé avoir mis la main sur 433 000 produits de santé illicites et 1,4 tonne de produits de santé. Si les ateliers de fabrication de ces médicaments sont souvent installés à l'étranger (en Asie notamment), certains sont situés sur le territoire français et exportent leur production illicite vers d'autres pays, comme l'a montré la découverte d'un site de production à Cherbourg au début de l'année 2017.
L'essor de ce trafic est particulièrement inquiétant en matière sanitaire, les produits vendus et consommés n'étant pas soumis aux règles qui encadrent le secteur pharmaceutique et leur composition ne pouvant pas être contrôlée. Par ailleurs, ces médicaments sont le plus souvent achetés via des sites internet, qui apportent des informations dont la fiabilité n'est pas vérifiée voire même qui préconisent des usages différents de ceux pour lesquels ils sont destinés.
Aussi, il lui demande les mesures que le Gouvernement compte mettre en œuvre afin de mettre fin au trafic de « faux » médicaments observé en France et plus largement en Europe.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 15/03/2018

Grâce à son système d'assurance santé, la France n'est quasiment pas impactée par la consommation de médicaments falsifiés. L'Europe n'y échappe pas, mais ces trafics touchent majoritairement les pays en voie de développement qui ne disposent pas d'un accès aux soins toujours adapté ou d'une couverture médicale universelle comme en France. D'ailleurs, depuis 2012, au sein du ministère de l'intérieur, l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP), placé sous l'autorité de la direction générale de la gendarmerie nationale, n'a eu à connaître que de deux dossiers relatifs à des faits de falsification de substances médicamenteuses impliquant la France comme pays source depuis son territoire. En revanche, elle est un pays de destination s'agissant de produits de confort de type érectiles (contrefaçon de VIAGRA, CIALIS) ou dopants. En règle générale, le trafic de faux médicaments, plus généralement classés comme médicaments falsifiés au regard de la directive européenne 2011/62/UE du 8 juin 2011, inclut le détournement de médicaments soumis à prescription médicale. Ces médicaments sont utilisés de manière détournée du cadre d'utilisation thérapeutique prévu par leur autorisation de mise sur le marché à des fins d'usage psychotrope, festif ou dopant. Profitant du système de sécurité sociale français, d'importantes fraudes sont commises par une délinquance structurée, voire une criminalité organisée, par le biais du nomadisme médical et pharmaceutique afin de se procurer des quantités importantes de médicaments, échappant au contrôle des autorités sanitaires. Les conséquences de ces trafics sont graves et multiples : enjeux de santé et de sécurité publiques, poids sur les finances publiques. Une action interministérielle doit être privilégiée pour une efficacité à long terme. Plusieurs enquêtes menées par l'OCLAESP, en coopération avec les autorités douanières finlandaises, sur des trafics transfrontaliers de Subutex (médicament de substitution pour les consommateurs d'héroïne), ont conduit cet office à monter avec ce partenaire, l'opération MISMED. Cette opération, qui regroupe neuf États-membres, vise à porter un coup d'arrêt au trafic de médicaments détournés de la chaîne légale à des fins de mésusage. La première édition a permis la saisie de plus de 75 millions d'unités médicamenteuses, pour une valeur marchande de plus de 230 M€. Elle a surtout conduit au démantèlement de treize groupes criminels organisés, à l'arrestation de 111 trafiquants et à la saisie de plus de 3 M€ d'avoirs criminels. Cette action est reconduite en 2018 par l'OCLAESP, avec les autorités finlandaises, sous le financement d'Europol. Elle a pour objectif principal de renforcer la dimension opérationnelle qui la caractérise et qui a permis l'obtention des résultats précités. À cet effet, il importe d'intégrer au cercle des pays participants, un certain nombre d'États-membres et d'États-tiers à l'Union européenne, identifiés comme des partenaires clés dans la lutte contre ces trafics. Le trafic de médicaments détournés d'usage étant par nature transfrontalier, il convient de mettre en place et développer une coopération internationale solide et durable, visant à neutraliser les structures organisées qui ont pris le contrôle de cette activité criminelle, particulièrement lucrative et peu risquée. Le ministère de l'intérieur, à travers l'OCLAESP, s'y emploie.

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