Question de M. PACCAUD Olivier (Oise - Les Républicains) publiée le 13/12/2018

M. Olivier Paccaud attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur les critères de répartition académique de l'éducation prioritaire.
Pour définir la carte des réseaux d'éducation prioritaire (REP) et des REP+, tous les quatre ans, la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) utilise « l'indice social ». Cet indice se base sur plusieurs critères, parmi lesquels le pourcentage d'élèves issus des catégories sociales les plus défavorisées, le taux de boursiers, le pourcentage d'élèves issus de zones urbaines sensibles et le pourcentage d'élèves en retard à la rentrée de 6ème.
Or, la limitation géographique aux « zones urbaines sensibles » n'est pas le critère le plus pertinent puisqu'il restreint un soutien scolaire aussi indispensable en milieu rural. Plus qu'ailleurs, les injustices sociales persistent, l'éloignement des services publics, de la culture, des équipements sportifs empêche notre jeunesse d'atteindre la réussite. Il n'est pas juste que sur les 1 097 collèges situés aujourd'hui en zone d'éducation prioritaire, seuls neuf soient ancrés dans des territoires ruraux.
Alors que la carte de l'éducation prioritaire sera prochainement réévaluée, il souhaite savoir si les zones rurales éloignées seront intégrées aux critères « d'indice social ».

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 23/01/2019

Réponse apportée en séance publique le 22/01/2019

M. Olivier Paccaud. Madame la présidente, ma question s'adresse effectivement au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, qui n'est pas présent ce matin.

Pour définir la carte des réseaux d'éducation prioritaire, REP et REP+, tous les 4 ans, la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'éducation nationale utilise « l'indice social ». Cet indice se fonde sur plusieurs critères, parmi lesquels le pourcentage d'élèves issus des catégories sociales les plus défavorisées, le taux de boursiers, le pourcentage d'élèves issus de zones urbaines sensibles et le pourcentage d'élèves en retard à l'entrée en classe de sixième.

Or la limitation géographique aux zones urbaines sensibles peut s'avérer un critère injustement discriminatoire, puisqu'il restreint un soutien scolaire aussi indispensable en milieu rural.

En effet, la ruralité connaît aussi des problèmes sociaux et économiques, difficultés accrues par l'éloignement, l'enclavement et la moindre présence d'infrastructures culturelles, d'équipements sportifs, de services publics.

Est-il ainsi juste que, sur les 1 097 collèges situés aujourd'hui en zone d'éducation prioritaire, seuls 9 – je dis bien 9 ! –, c'est-à-dire 0,8 %, soient ancrés dans des territoires ruraux ?

Pour ne prendre que l'exemple de mon département, l'Oise, le réseau d'éducation prioritaire comptait jusqu'en 2014 deux collèges situés en zone plus ou moins rurale, ceux de Crèvecœur-le-Grand et Mouy. Ils ont alors été sortis du réseau pour y être remplacés par deux établissements purement urbains.

Cette décision, dont les motivations en matière d'efficacité pédagogique s'avéraient incompréhensibles, fut très mal vécue par toutes les parties concernées – parents d'élèves, enseignants, élus… –, ce qui a notamment donné lieu à des manifestations et à des occupations de locaux.

L'actualité récente nous a démontré que les fractures territoriales ne sont plus acceptées par nos concitoyens. À juste titre ! La République, c'est l'égalité des droits et l'égalité des chances, partout sur le territoire. Faisons donc en sorte que notre idéal républicain devienne, ou plutôt redevienne, une réalité dans les faits !

Aussi, alors que la carte de l'éducation prioritaire doit être prochainement réexaminée, j'espère très sincèrement que les zones rurales fragiles – Dieu sait qu'elles sont malheureusement nombreuses – pourront y être intégrées. Merci de m'éclairer et peut-être de me rassurer à ce sujet.

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la présidente, monsieur le sénateur Olivier Paccaud, je vous prie d'excuser mon collègue ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, Jean-Michel Blanquer, qui accompagne aujourd'hui le Président de la République en Allemagne et qui m'a chargé de vous apporter la réponse suivante.

La politique d'éducation prioritaire est centrée sur les structures scolaires, écoles et collèges, qui concentrent un pourcentage important d'élèves issus des milieux sociaux les plus défavorisés. Elle s'appuie sur le constat que l'absence de mixité scolaire et sociale aggrave les difficultés que ces élèves rencontrent pour réussir.

Lors de la révision de sa géographie en 2015, la politique d'éducation prioritaire n'a pas exclu les écoles ou collèges ruraux. Les critères retenus lors de cette révision, à savoir le pourcentage d'élèves boursiers ou appartenant à des catégories sociales défavorisées, font davantage prévaloir l'origine sociale que l'origine géographique des élèves.

M. Blanquer n'a pas les mêmes chiffres que vous, puisque, à la rentrée 2018, 25 collèges de l'éducation prioritaire sont situés en zone rurale et 108 en ville isolée, ce qui représente 12 % des collèges de l'éducation prioritaire. (M. Olivier Paccaud fait un signe de dénégation.)

Si la politique d'éducation prioritaire est centrale pour lutter contre les inégalités scolaires liées aux origines sociales, elle n'est pas la seule réponse aux difficultés de différentes natures que rencontrent les territoires dans leur diversité.

D'autres stratégies sont déjà mises en œuvre et sont appelées à se développer, comme l'allocation progressive des moyens adaptés au profil de chaque école et établissement dans le premier comme dans le second degré.

Par ailleurs, certains obstacles que rencontrent les élèves – vous en avez parl頖 ne sont pas directement liés à leurs origines sociales. Certains tiennent, notamment dans les secteurs les plus ruraux, à d'autres facteurs, tels que l'éloignement des établissements d'enseignement supérieur pour poursuivre sa scolarité ou encore l'éloignement ou l'absence de structures culturelles à proximité.

C'est pour cette raison qu'une mission « Politiques éducatives et territoires » a été confiée à Ariane Azéma, inspectrice générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, et à Pierre Mathiot, professeur des universités. Cette mission travaille avec les services du ministère à la redéfinition des politiques territoriales de l'éducation nationale dans un double objectif d'élévation générale du niveau des élèves et de justice sociale. Elle proposera un cadrage national capable de s'adapter à des situations locales très diverses à l'été 2020.

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