Question de Mme CANAYER Agnès (Seine-Maritime - Les Républicains) publiée le 14/05/2020

Mme Agnès Canayer attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la nécessité d'un versement de la prime aux personnels du secteur médico-social et plus précisément pour les services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD).

En effet, les SAAD assurent au domicile des personnes des prestations de services ménagers et des prestations d'aide à la personne pour les activités ordinaires et les actes essentiels de la vie quotidienne.

Mobilisés comme les personnels des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) pour suivre les personnes âgées ou handicapées maintenues chez elles, les auxiliaires de vie et les personnels d'aides à domicile sont cependant les grands oubliés de la crise du Covid-19. Dans la Seine-Maritime, ce sont par exemple cent douze services qui furent aux avant-postes pour permettre de maintenir la dignité de ses personnes fragiles.

Aussi, elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement, en collaboration avec les départements de France, pour un versement équitable et juste pour ce personnel mobilisé depuis le début de la crise sanitaire.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé publiée le 27/05/2020

Réponse apportée en séance publique le 26/05/2020

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 1184, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Canayer. La crise sanitaire actuelle a mis en lumière le rôle essentiel des personnels médico-sociaux qui accompagnent les personnes les plus fragiles, et dont la profession n'est pas toujours considérée à sa juste valeur.

Le Gouvernement, nous le savons – ma collègue députée Agnès Firmin Le Bodo, monsieur le secrétaire d'État, a eu l'occasion de vous interroger sur ce sujet la semaine dernière –, a annoncé, le 11 mai dernier, le versement d'une prime exceptionnelle, laquelle devrait notamment concerner les aides à domicile accompagnant les plus vulnérables dans leur vie courante.

Néanmoins, le financement des services d'aide à domicile étant supporté par les départements, la prime versée, si elle est de leur seul ressort, variera en fonction de la situation budgétaire de chacun d'entre eux.

Le département de la Seine-Maritime compte près de 112 services d'aide à domicile, dépensant environ 82 millions d'euros pour le soutien des personnes, âgées ou dépendantes, à domicile. Particulièrement endetté, il aura du mal à verser une prime à la hauteur de l'implication de ces hommes et de ces femmes, qui se sont mobilisés avec courage.

Mais cette question de la prime ne doit pas masquer le sujet, majeur, de la revalorisation de ces métiers, maillons essentiels de la solidarité. Le revenu médian de ces travailleurs est de 900 euros par mois, 20 % d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté et leur pouvoir d'achat n'a cessé de diminuer au cours des dernières années.

Il faudra donc bien plus qu'une mesure ponctuelle pour garantir la juste revalorisation des métiers de l'aide à domicile et assurer à ces salariés des conditions de travail satisfaisantes !

Ainsi, les centres communaux d'action sociale (CCAS) ou les centres intercommunaux d'action sociale (CIAS) gérant les services d'aide à domicile – je pense notamment à celui de Fécamp – sont freinés pour embaucher des personnels à temps plein par le montant du plafond de l'exonération des cotisations à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL). En augmentant ce plafond, on limiterait donc le recours aux emplois précaires.

La juste revalorisation des salaires des personnes concernées dépend aussi des moyens budgétaires alloués aux départements, dont les tarifs horaires varient de 17 à 25 euros.

Je souhaiterais donc savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour aider les collectivités, que ce soit les communes ou les départements, à revaloriser les professions d'aide à domicile.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé. Merci, madame la sénatrice Agnès Canayer, d'avoir posé cette question.

De nombreux professionnels s'interrogent, à raison, sur les conditions de versement de la prime exceptionnelle pour les services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD). Comme vous le savez – c'est la réponse « réglementaire » que je vous donne lࠖ, le Gouvernement ne peut décider des conditions de versement et de financement de cette prime exceptionnelle. C'est une compétence des départements, vous l'avez vous-même rappelé.

Il en va de même, j'ai pu le préciser lors des questions au Gouvernement, ici, la semaine dernière, endossant cette fois-ci ma casquette de secrétaire d'État à la protection de l'enfance, pour les travailleurs sociaux des services de l'aide sociale à l'enfance, dont je salue aussi l'engagement, en particulier pendant cette période de crise.

En revanche, pour les personnels travaillant en Ehpad, le Gouvernement vient de décider que l'assurance maladie financerait la totalité des primes. Rappelons que, à la différence des SAAD, les Ehpad ont cette particularité d'être financés par les résidents eux-mêmes, à plus de 50 %, par l'assurance maladie, à environ 30 %, et par les départements au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) en établissement, aux alentours de 15 %.

Pour les mêmes raisons, les personnels travaillant au sein des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), financés exclusivement par l'assurance maladie, bénéficieront aussi de la prime dans des conditions identiques.

Vous avez rappelé le dévouement exemplaire des personnels des SAAD, qui exercent des missions très difficiles au domicile des personnes fragiles. Mais, encore une fois, la décision finale appartient aux conseils départementaux.

C'est un sujet de débat, pour Olivier Véran comme pour moi-même, dans un autre contexte. Depuis plusieurs jours, plusieurs semaines même, nous en parlons régulièrement – intensément, ai-je envie de dire –, y compris avec Dominique Bussereau, président de l'Assemblée des départements de France, ou certains présidents de conseils départementaux. À l'heure où je vous parle, les échanges se poursuivent.

Pour autant, vous ne vous y opposerez pas ici, nous nous devons de respecter les compétences de chacun dans la recherche d'une solution de financement de ces primes pour les personnels des SAAD. J'espère, pour ma part, que nous pourrons le faire dans des conditions les plus proches possible de celles qui ont été retenues pour les Ehpad.

Au-delà de la question des primes, vous avez évoqué celle, plus large, de la revalorisation salariale et des perspectives de carrière. On sait effectivement que, si la problématique du pouvoir d'achat est essentielle pour nos concitoyens, il est tout aussi important, à leurs yeux, de pouvoir se projeter dans une évolution de carrière.

Le secteur médico-social figure, comme vous l'avez vu, parmi les sujets qui seront abordés dans le cadre du Ségur de la santé. Il est effectivement question d'assurer une bonne articulation entre l'hôpital, la médecine de ville et ce secteur médico-social. La question des revalorisations salariales et des perspectives de carrière sera donc mise sur la table.

De même, la prise en charge de la dépendance est une des grandes, et belles, réformes qui sont devant nous. Je ne doute pas que la problématique des services à domicile pourra, dans ce cadre également, être débattue. Ce sera le cas, notamment, dans cet hémicycle.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour la réplique.

Mme Agnès Canayer. Je me permets d'insister sur le fait que la question de la prime ne doit pas cacher celle d'une revalorisation plus générale de ces professions. En Seine-Maritime, 30 000 personnes ayant besoin d'aide à domicile profitent de ces services. Ces salariés sont vraiment un maillon essentiel de la chaîne de solidarité.

C'est pourquoi il faut ne pas renvoyer la responsabilité sur les seules collectivités ; il faut les accompagner pour qu'elles puissent mettre en place une véritable politique de soutien à ces professions.

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