Question de M. COURTIAL Édouard (Oise - Les Républicains) publiée le 21/05/2020

M. Édouard Courtial appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation des travailleurs non-salariés fortement impactés par la crise que notre pays traverse. En effet, nombre d'entre eux ont dû suspendre leur activité entraînant une perte de chiffre d'affaires qui devrait se poursuivre. Si une première série de mesures a été prise, la seconde semble plus restrictive en requérant, notamment, l'emploi d'au moins un salarié ou un plafond de perte trop important qui rend inéligible une partie d'entre eux. Les collectivités territoriales se mobilisent comme le conseil départemental de l'Oise qui a adopté un plan d'urgence comprenant une aide exceptionnelle à destination de ces indépendants qui sont indispensables à notre tissu économique local. Aussi, il lui demande s'il entend élargir le périmètre des dispositifs de soutien les concernant.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics publiée le 27/05/2020

Réponse apportée en séance publique le 26/05/2020

M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial, auteur de la question n° 1189, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Édouard Courtial. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, artisans, commerçants, professions libérales, agriculteurs, micro-entrepreneurs : les travailleurs indépendants sont aussi divers que nombreux puisqu'ils représentent près d'un emploi sur dix en France d'ailleurs. L'Insee les désigne non pas comme des travailleurs indépendants, mais comme des travailleurs non salariés, une définition par la négative qui peine à rendre compte de la diversité du phénomène.

Ces travailleurs ont en partage l'absence de lien de subordination, mais aussi et surtout une prise de risque professionnel et personnel qui, dans le contexte de crise sanitaire actuel, les rend beaucoup plus vulnérables à l'arrêt de leur activité.

Si certains de ces travailleurs ont pu ou dû poursuivre leur activité, d'autres ont été grandement fragilisés par la période de confinement et se trouvent parfois dans une grande détresse, qu'elle soit financière ou émotionnelle. Je pense par exemple aux auto-écoles de l'Oise partenaires du Pass'permis citoyen, dispositif que j'ai mis en place lorsque j'étais président du conseil départemental et qui a aidé plus 12 000 jeunes à obtenir leur permis de conduire en contrepartie du temps accordé à une association ou à une collectivité.

Ne pouvant faire bénéficier les travailleurs non salariés du chômage partiel, l'État a mis en place à leur endroit des mesures d'urgence qui ont été élargies, car elles se sont dans un premier temps révélées trop contraignantes, tant en termes de conditions que de procédure. Ainsi, certains conseils départementaux, comme celui de l'Oise, pionnier dans ce domaine comme dans d'autres, leur ont proposé une aide d'urgence de 500 euros fondée, non plus sur leur compétence générale, aujourd'hui disparue, mais au titre de la solidarité.

Pour clarifier les choses, j'ai déposé, avec mon collègue Arnaud Bazin, une proposition de loi permettant aux conseils départementaux d'exercer une action financière et économique de soutien aux entreprises dans le cas d'une catastrophe sanitaire, comme il leur est possible aujourd'hui de le faire en cas de catastrophe naturelle. Y êtes-vous favorable, monsieur le secrétaire d'État ?

Enfin, si la phase de déconfinement a permis aux travailleurs non salariés de reprendre progressivement leur activité, le soutien qui leur a été accordé doit être pérennisé jusqu'à une reprise complète, mais aussi assoupli. Monsieur le secrétaire d'État, allez-vous prolonger certains dispositifs au-delà du mois de mai pour ces travailleurs non salariés, et surtout, allez-vous supprimer la condition d'emploi d'un salarié pour bénéficier du second volet du fonds de solidarité ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le sénateur Courtial, le fonds de solidarité mis en place par l'État et les régions vise en effet à soutenir les très petites entreprises, les micro-entrepreneurs, les indépendants et les personnes exerçant une profession libérale les plus touchés par la crise.

Ce fonds comporte deux volets. Le premier permet à l'entreprise de compenser sa perte de chiffre d'affaires par une aide d'un montant égal à la perte déclarée du chiffre d'affaires dans la limite de 1 500 euros.

Le second volet permet de verser une aide complémentaire aux entreprises les plus en difficulté qui risqueraient de se trouver dans l'impossibilité de régler leurs dettes exigibles à trente jours, notamment leurs charges fixes telles que les loyers, dues au titre des mois de mars et d'avril 2020. En effet, certaines de ces entreprises ne parviennent pas à trouver de financement alternatif, notamment des prêts, pour couvrir ces besoins. Les entreprises éligibles au second volet peuvent bénéficier d'une aide complémentaire d'un montant compris entre 2 000 euros et 5 000 euros en fonction de leur situation.

Notre objectif est d'éviter des licenciements massifs dans le contexte que nous connaissons. C'est pourquoi le choix a été fait, pour ce second volet, de concentrer les efforts dans un premier temps sur les entreprises qui emploient au moins un salarié.

Toutefois, pour tenir compte de la situation critique des entreprises des secteurs qui ont fait l'objet d'une interdiction d'accueil du public entre le 1er mars et le 11 mai, le second volet du fonds a été élargi récemment aux entreprises sans salarié – ce qui me paraît répondre à votre question –, si leur chiffre d'affaires constaté lors du dernier exercice clos est supérieur ou égal à 8 000 euros.

Le fonds de solidarité est un dispositif d'aide sans précédent par son ampleur et le périmètre de ses bénéficiaires. Son périmètre est d'autant plus étendu que nous l'avons élargi de manière importante en assouplissant les critères d'accès, en portant de 70 % à 50 % la baisse de chiffre d'affaires permettant de bénéficier des aides du premier volet, et en ouvrant aux entreprises sans salarié au 24 mai l'accès au second volet.

Au 24 mai, plus de 2 400 000 demandes d'aide ont été payées pour un montant total de près de 3,2 milliards d'euros au titre du premier volet, et plus de 10 700 demandes d'aides au titre du second, pour un montant un peu inférieur à 30 millions d'euros, l'instruction de ce second volet étant plus longue.

Le fonds de solidarité est un dispositif d'urgence qui s'ajoute aux autres dispositifs mis en place par le Gouvernement depuis le début de la crise sanitaire, notamment le report des charges sociales et fiscales, les dispositifs ciblés d'exonération pour certains secteurs récemment annoncés, les prêts garantis par l'État, l'accélération du remboursement des crédits d'impôts et de TVA ou encore la faculté d'octroyer des remises d'impôts. Les entreprises qui répondent aux conditions d'éligibilité au fonds de solidarité peuvent aussi bénéficier d'un report de paiement de loyer, de factures d'eau, de gaz ou d'électricité.

Je dois m'arrêter faute de temps, monsieur le sénateur, mais je vous transmettrai des éléments complémentaires relatifs à l'articulation des compétences entre les différents niveaux de collectivités.

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