Question de M. CUYPERS Pierre (Seine-et-Marne - Les Républicains) publiée le 25/06/2020

M. Pierre Cuypers attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les graves menaces sanitaires qui pèsent sur les productions végétales et en particulier sur la production de betterave, en raison des conditions climatiques particulièrement douces des derniers mois ayant provoqué l'infestation précoce de pucerons verts, vecteurs de la jaunisse virale. Cette situation impacte considérablement la filière betteravière et pourrait provoquer des pertes de rendement de 30 à 50 %.

Elle inquiète les agriculteurs et les décourage : si aucune solution n'est trouvée, d'autres sucreries pourraient fermer dans les prochains mois, faute de surfaces suffisantes, alors que quatre d'entre elles ont déjà arrêté leur production en 2019.

Il est donc urgent de trouver des solutions robustes, d'une part pour indemniser les betteraviers les plus touchés et, d'autre part, pour lutter contre ces ravageurs de la betterave, notamment en examinant la réautorisation des produits sanitaires efficaces dont certains ont été supprimés en septembre 2018.

Les risques de pertes liées à l'inadaptation des solutions techniques de substitution menacent la pérennité de la culture avec des répercussions sur l'ensemble de la filière en particulier son maillon industriel pour 2021. Des zones fortement contaminées sont apparues depuis fin mai 2020 dans le sud du bassin parisien et les régions plus septentrionales présentent maintenant les mêmes symptômes.

Malgré les mesures techniques et réglementaires apportées par les pouvoirs publics, les populations de pucerons n'ont pu être contrôlées de façon satisfaisante et de très nombreuses parcelles sont gravement touchées. Il est urgent de proposer un autre dispositif.

L'institut technique de la filière betteravière continue à analyser pourquoi les solutions proposées n'ont pas fonctionné et dressera dès que possible les prévisions de pertes de rendement.

Aussi, un dialogue soutenu entre les parties prenantes doit continuer à guider utilement les décisions des pouvoirs publics qui s'avèrent urgentes.

En conséquence, il lui demande de lui indiquer le plan que le Gouvernement entend proposer sans plus tarder aux agriculteurs et à tous les acteurs de la filière betteravière.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 02/12/2020

Réponse apportée en séance publique le 01/12/2020

Mme le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, auteur de la question n° 1236, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Pierre Cuypers. Monsieur le ministre, j'attire de nouveau votre attention sur la crise sanitaire qui a frappé très durement la filière betterave cette année, en raison de conditions climatiques particulièrement douces qui ont provoqué l'infestation précoce de pucerons verts, vecteurs de la jaunisse virale.

Cette situation a affecté considérablement la filière, provoquant des pertes allant de 30 % à 70 %. Les agriculteurs sont bien sûr inquiets, car le manque à gagner, considérable, entraîne des faillites, notamment parmi les petits producteurs, mais aussi parmi les autres.

Monsieur le ministre, bien que vous-même et tout le Gouvernement ayez compris la nécessité de réautoriser les produits pharmaceutiques pour une durée de trois ans – une décision dont je vous remercie –, le dossier de l'indemnisation n'est en rien réglé. Il est urgent de trouver des solutions robustes pour indemniser les betteraviers les plus touchés.

Alors que les pertes financières sur la récolte 2020 sont estimées à 285 millions d'euros, le Gouvernement propose, selon la règle de minimis, une indemnité soumise à un plafond de 20 000 euros par exploitation. Il est certain que cette offre ne répondra pas aux besoins criants des professionnels, auxquels il est urgent de venir en aide.

Monsieur le ministre, pouvez-vous m'éclairer sur le plan financier et le calendrier que vous devez proposer sans tarder aux agriculteurs ?

Mme le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Cuypers, je vous remercie pour vos propos sur le dossier betterave.

En matière d'indemnisations, il y a des mesures que je peux prendre et d'autres que je ne peux pas prendre.

Au moment du lancement du plan d'action, l'été dernier, nous sommes convenus avec la filière d'activer les de minimis. En effet, la filière ne cotisait pas au fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE) et n'avait pas mis en place de système assurantiel.

Comme vous le savez fort bien, l'indemnisation des risques dits sanitaires est extrêmement encadrée. Aujourd'hui, la filière ayant choisi par le passé de ne pas entrer dans d'autres dispositifs, le seul applicable est le de minimis. Nous en avons beaucoup parlé avec la filière, et tout le monde en convient : il n'est pas possible de couvrir a posteriori un risque qui s'est avéré, dès lors qu'un système assurantiel n'a pas été mis en place et que les membres n'ont pas cotisé.

Au-delà du volet assurantiel et des systèmes d'aide européens, un régime de catastrophes agricoles existe, mais il ne couvre pas les risques dits sanitaires, c'est-à-dire liés à des maladies telles que celles qui viennent des insectes.

Un grand travail a été accompli sur ce sujet – vous le savez bien, monsieur le sénateur. Reste que le seul dispositif existant est le de minimis : quelle que soit la volonté politique, c'est le seul moyen d'action pour cette année.

Cette situation soulève la question de la manière dont la filière doit s'organiser en ce qui concerne la couverture de ce type de risques : doit-elle faire le choix d'intégrer le FMSE, doit-on étudier, dans le cadre des débats en cours sur le volet assurantiel, comment étendre ce volet aux risques sanitaires ?

En tout cas, je le répète, un risque non couvert initialement ne peut pas être couvert a posteriori. Le système « de minimis » est donc le seul qui existe aujourd'hui.

Mme le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour la réplique.

M. Pierre Cuypers. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, que je connaissais par avance.

À situation exceptionnelle, il faut des mesures exceptionnelles. De fait, la filière est en grand danger, parce que, au-delà de la première mesure prise, sur laquelle j'espère une décision favorable du Conseil constitutionnel, il faut que les agriculteurs puissent payer les semences pour semer au printemps.

Or les pertes sont aujourd'hui abyssales, de l'ordre de 1 000 à 1 800 euros par hectare, en sorte qu'il n'y a plus de trésorerie. Les exploitations agricoles betteravières sont toutes dans le rouge ! Elles n'ont tout simplement pas la trésorerie pour boucler la fin d'année.

Monsieur le ministre, je sais que vous travaillez sur ces sujets avec la filière, avec laquelle je suis régulièrement en contact. Il ne faut pas lâcher le morceau, et envoyer tout de suite un signal qui permette aux agriculteurs de garder confiance !

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