Question de M. JOLY Patrice (Nièvre - SOCR) publiée le 01/10/2020

M. Patrice Joly attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les démarches à mettre en œuvre auprès de l'Union européenne pour obtenir dès le début de l'année 2021 une dérogation pour les agriculteurs de faucher et faire pâturer les jachères.

En effet, les agriculteurs, mobilisés pour assurer leur mission de nourrir la population, sont exposés à des épisodes climatiques extrêmes et en particulier la sécheresse qui sévit depuis trois ans et qui met en péril leur travail. Les éleveurs sont en effet particulièrement concernés car faute d'herbe suffisante, ils sont d'ores et déjà contraints d'entamer leurs stocks de fourrage pour nourrir leurs animaux.

Pour répondre aux besoins agricoles, cette année comme les années précédentes, l'autorisation de couper les jachères a été donnée mais cette autorisation est intervenue beaucoup trop tard de telle sorte que les jachères n'ont pas permis de bénéficier d'herbages de qualités car trop secs et donc pratiquement inutiles.

Aujourd'hui, les agriculteurs n'ont le droit d'utiliser les jachères comme ressource supplémentaire de fourrage ou pâturage qu'à partir du 31 août. En effet, chaque exploitation a l'obligation de détenir un taux de surfaces d'intérêt écologique (SIE) minimum de 4 %. Pour donner droit au paiement vert, les jachères ne doivent faire l'objet d'aucune utilisation ni valorisation pendant la période de couverture obligatoire de six mois minimum (article 45.2 du règlement délégué 2014/639), fixée nationalement du 1er mars au 31 août, au nom du bon état écologique ; ce qui limite cette possibilité.

En juillet 2018 et en juin 2019, des demandes de dérogation à l'interdiction de valorisation de ces surfaces avant le 31 août avaient été accordées par la Commission européenne. Toutefois les réponses trop tardives n'avaient pas permis aux agriculteurs de faire face aux importantes difficultés d'affouragement.

Les conditions climatiques de 2020 ne sont pas encore connues. Le dérèglement climatique fait craindre des épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents et de plus en plus longs. Il faut donc mettre en place des outils durables pour protéger les agriculteurs français et préserver notre modèle agricole. L'approche et les méthodes agricoles doivent être revues en profondeur pour aider les exploitations à adapter leur modèle de production au regard des enjeux écologiques et de l'urgence de préserver notre écosystème. D'ores et déjà, nos agriculteurs font des efforts très importants pour utiliser moins d'eau et irriguer toujours plus efficacement.

Cependant pour permettre aux éleveurs au moins de reconstituer leurs stocks, il est nécessaire que l'autorisation soit accordée en 2021 plus tôt dans l'année.

Par conséquent, il l'alerte sur la nécessité de conduire dès à présent les démarches nécessaires auprès de Bruxelles pour l'obtention dès le début de l'année 2021 d'une dérogation pour les agriculteurs de faucher et faire pâturer les jachères.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 10/12/2020

Le paiement vert, ou verdissement, est un paiement direct aux exploitants agricoles qui vise à rémunérer les actions spécifiques en faveur de l'environnement et contribue à soutenir leurs revenus. Il impose à ce titre le respect par un grand nombre d'exploitants de mesures, qui par leur effet de masse, contribuent à améliorer la performance environnementale de l'agriculture, en termes de biodiversité, de protection de la ressource en eau et de lutte contre le changement climatique. Dans ce cadre, pour obtenir le paiement vert, les exploitants agricoles doivent disposer de surfaces d'intérêt écologique (SIE) à hauteur d'au moins 5 % de la surface en terres arables. Les SIE peuvent être des éléments topographiques (arbres, haies, murs, bosquets, mares et fossés) ou des surfaces (bandes tampons ou le long des forêts, cultures dérobées, jachères, plantes fixant l'azote et taillis à courte rotation). Les jachères ne sont donc qu'une modalité possible. Pour être considérées comme SIE et donner droit au paiement vert, les jachères ne doivent faire l'objet d'aucune utilisation ni valorisation pendant la période de couverture obligatoire de six mois minimum (article 45.2 du règlement délégué 2014/639), fixée nationalement du 1er mars au 31 août, ce qui permet de préserver la faune et la flore sur ces parcelles. Compte tenu de cet objectif et de la réglementation, un État membre ne peut donner une dérogation que dans le cas de la force majeure, ou sur la base d'une décision de la Commission européenne. Le cas de force majeure ne peut être constaté qu'une fois l'aléa climatique survenu. Il n'est donc pas possible, dès maintenant et avant même le début de la campagne, de déroger dans le cadre de la force majeure aux conditions du paiement vert ou de demander à la Commission européenne la possibilité pour les agriculteurs de faucher librement les jachères. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation rappelle que, dans le contexte de sécheresse qu'ont connu plusieurs régions depuis trois années, des dérogations à l'interdiction de valorisation des jachères SIE ont été accordées chaque année par le ministère lorsque cela était nécessaire. Les modalités de dérogation ont par ailleurs évolué après de nombreux échanges avec la Commission européenne. Ces modalités permettent désormais de répondre de façon plus réactive, dans le cadre du dispositif de la force majeure géré par l'État membre et sans avoir à attendre une décision de la Commission européenne, aux situations difficiles rencontrées par les éleveurs en cas de sécheresse.

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