Question de M. KANNER Patrick (Nord - SER) publiée le 14/07/2022

Question posée en séance publique le 13/07/2022

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Patrick Kanner. Madame la Première ministre, au cours du quinquennat qui vient de s'achever, vous n'avez pas voulu augmenter les revenus du travail de manière significative pour les classes populaires et les classes moyennes.

Plusieurs fois, mon groupe a regretté sur ces travées des mesures prises sans cohérence, toujours trop tard, toujours sous la contrainte, toujours le dos au mur.

Plusieurs fois, sur ces travées, nous vous avons demandé un rééquilibrage de la fiscalité entre le travail et le capital, alors que vous l'avez sciemment déstabilisée par un hyperbouclier fiscal que même Nicolas Sarkozy, votre nouvel ami politique, n'aurait osé imaginer.

C'est au moins un sujet sur lequel on peut vous reconnaître une forme de constance, tant votre politique sur ce point a toujours favorisé les mêmes, par un miracle physique : le ruissellement vers le haut, vers les plus aisés !

Aujourd'hui, vous entamez un nouveau quinquennat, marqué par une situation économique inquiétante. Le mécanisme de revalorisation automatique du SMIC n'est plus suffisant pour compenser l'inflation.

C'est le moment de changer de méthode : renoncez à cette politique de fuite en avant, celle des chèques qui n'ouvrent aucun droit, à laquelle personne ne comprend plus rien !

Vous vous présentez comme un gouvernement qui est dans l'action et non dans l'incantation. Je vous le dis, madame la Première ministre : les Français demandent non pas l'aumône, mais une juste reconnaissance de leur travail.

Pour répondre à cette attente, je vous soumets de nouveau deux solutions justes et efficaces : la revalorisation du SMIC à 1 500 euros et une grande conférence sociale pour augmenter les salaires. Pouvez-vous, madame Borne, expliquer clairement aux Français pourquoi vous vous opposez à ces deux propositions ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)


Réponse du Première ministre publiée le 14/07/2022

Réponse apportée en séance publique le 13/07/2022

M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président Kanner, nous le voyons tous les jours, et nous en sommes convenus lors de notre premier échange : la première priorité des Français, c'est le pouvoir d'achat. Ce doit être aussi notre priorité commune.

Depuis le premier jour, mon gouvernement est à l'action, dans la continuité de ce qui avait été fait par mon prédécesseur Jean Castex depuis l'automne dernier, sous l'autorité du Président de la République.

Nous avons agi pour le pouvoir d'achat des Français. Je rappelle que nous avons mis en place à l'automne dernier un bouclier tarifaire sur le gaz et l'électricité, bloquant les prix du gaz et limitant à 4 % la hausse de l'électricité. Il est important que les Françaises et les Français en soient conscients : sans ces boucliers tarifaires, les factures auraient explosé.

L'action que nous avons menée, c'est aussi la remise sur les carburants. Sans cette remise, le prix d'un plein de 50 litres serait plus cher de 10 euros.

Et nous avons agi aussi avec l'indemnité inflation, avec la revalorisation du barème de l'indemnité kilométrique, avec une aide exceptionnelle sur le chèque énergie, autant de mesures qui ont protégé les Français, notamment les plus modestes et ceux qui travaillent.

Monsieur le président Kanner, l'ensemble de ces mesures représentent 26 milliards d'euros, une somme considérable, mais qu'il était nécessaire de mobiliser pour protéger le pouvoir d'achat des Français.

Grâce à ces mesures, nous avons l'inflation la plus basse de la zone euro. Et nous avons la chance, en France, d'avoir un salaire minimum indexé sur l'inflation et le pouvoir d'achat, qui progressera de nouveau le 1er août prochain.

Il nous faut aussi agir pour l'ensemble des Français. La guerre en Ukraine dure, les perspectives économiques s'assombrissent, les prix continuent à monter. Nous voulons donc prendre de nouvelles mesures pour les protéger.

C'est tout le sens des textes sur le pouvoir d'achat qui sont en cours d'examen à l'Assemblée nationale, et dont vous aurez prochainement à débattre.

Ces textes ont pour objectif de prolonger les boucliers tarifaires sur l'énergie, d'augmenter les revenus du travail et de mieux partager la valeur, par exemple avec une baisse de charges pour les indépendants ou un triplement du plafond de la prime de pouvoir d'achat. Ils visent aussi à revaloriser les retraites et les prestations sociales, et à aider les travailleurs pour lesquels la voiture est une nécessité.

M. Thierry Cozic. Et sur les salaires ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Bref, nous voulons agir globalement pour l'ensemble des Français. Je vous ai présenté nos propositions ; nous voulons en débattre avec le Parlement, mais nous serons attachés dans les discussions à venir à ce que ces propositions soient efficaces, c'est-à-dire qu'elles se traduisent par un impact rapide pour les Français, mais aussi responsables, c'est-à-dire que nous voulons encourager le travail, préserver l'équilibre de nos comptes publics et agir en cohérence avec l'urgence climatique.

Enfin, il faut qu'elles soient équitables, parce que nous voulons d'abord protéger effectivement ceux qui souffrent le plus de cette inflation.

Agir vite et agir fort : tel est le sens de notre action pour les Français. Je suis convaincue qu'ensemble nous y parviendrons. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE et INDEP.)

M. David Assouline. Et rien sur les salaires !

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.

M. Patrick Kanner. Madame la Première ministre, je suis désolé, mais vous ne m'avez pas répondu. J'entends bien toutes les mesures que vous évoquez, qui coûtent d'ailleurs très cher au budget de l'État. À un moment donné, il faudra savoir comment nous réglons la dette en résultant pour la France.

Ma question était simple : quel effort demandez-vous aux employeurs de ce pays ?

Votre ministre de l'économie et des finances, qui n'est pas là aujourd'hui, sûrement pour de bonnes raisons, demande depuis trois ans aux patrons, permettez-moi ce mot, d'augmenter les salaires. Pour quels résultats ? C'est de l'incantation !

Vous nous dites que vous allez augmenter le SMIC. J'entends bien, madame, mais cela correspond à 26 euros pour un SMIC à 1 302 euros aujourd'hui. Voilà la réalité ! Encore une fois, les Français ne demandent pas l'aumône ; ils demandent de pouvoir vivre de leur travail dans de bonnes conditions et dans la dignité. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et GEST.)

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