Question de Mme ROBERT Sylvie (Ille-et-Vilaine - SER) publiée le 07/07/2022

Mme Sylvie Robert appelle l'attention de Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques sur la nécessité de renforcer la protection et l'accessibilité du plus grand nombre au patrimoine sportif français et mondial.

En effet, depuis plusieurs années, s'est développé un mouvement de privatisation des évènements sportifs de grande ampleur, avec un système de découpage et de ventes par lots aux chaînes de télévision, lesquelles ne sont pas nécessairement en accès libre. Si ce système peut permettre d'accroître les revenus issus de la diffusion des compétitions et rencontres, il présente un risque d'éviction évident des publics qui n'ont pas les moyens financiers ni techniques pour accéder aux chaînes payantes.

Récemment, un exemple a particulièrement illustré la tendance à privilégier l'intérêt économique sur l'objectif d'accessibilité du plus grand nombre. Le quart de finale du tournoi de Roland Garros, opposant deux légendes du tennis mondial, n'a pas été diffusé sur le service public, mais en session de nuit sur une plateforme à accès restreint. Si la plateforme a finalement accepté de diffuser gratuitement le match, il n'en demeure pas moins que les Françaises et Français n'ayant pas de connexion internet ou étant dans des zones de bas débit ont été de fait exclus de cet évènement.

Le patrimoine sportif français et mondial ne peut pas devenir l'apanage des plus aisés, pouvant souscrire à de multiples abonnements, ni de celles et ceux ayant les ressources numériques suffisantes. À ce titre, le décret n°2004-1392 du 22 décembre 2004, en son article 3, définit une liste des évènements sportifs « d'importance majeure » devant être diffusés sur un service de télévision en accès libre.

Ainsi, au regard de l'évolution en matière de droits de retransmission des évènements sportifs, elle lui demande si le Gouvernement envisage d'élargir la liste précitée afin d'inclure davantage de compétitions et de rencontres d'une part et, d'autre part, si l'exécutif serait favorable à faire de l'accessibilité du plus grand nombre un motif d'intervention en urgence de l'Arcom pour garantir la diffusion d'un évènement sportif « d'importance majeure » sur une chaîne de télévision en accès libre et ce, dans une logique de régulation.

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Réponse du Ministère de la culture publiée le 26/10/2022

Réponse apportée en séance publique le 25/10/2022

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, auteure de la question n° 017, adressée à Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.

Mme Sylvie Robert. Madame la ministre, il y a quelques mois, nous étions nombreux à nous émouvoir qu'un quart de finale du tournoi de Roland Garros opposant deux légendes du tennis mondial soit diffusé non pas en accès libre sur le service public, comme c'est historiquement le cas, mais en session de nuit sur une plateforme à accès restreint.

Si ladite plateforme a finalement accepté, au dernier moment, de diffuser gratuitement le match, moyennant la collecte des données des utilisateurs, il n'en demeure pas moins que les 20 % de Français n'ayant pas d'accès résidentiel à internet et ceux qui souffrent d'illectronisme ont été, de fait, exclus de cet événement.

Il s'agit malheureusement du dernier exemple d'un mouvement de fond plus global qui tend à privatiser les événements sportifs de grande ampleur, via un système de découpage et de vente par lots aux chaînes de télévision, lesquelles sont de moins en moins en accès libre.

Si ce système permet d'accroître les revenus issus de la diffusion des compétitions et des rencontres, il présente néanmoins un risque évident d'éviction des publics qui n'ont pas les moyens financiers ou techniques d'accéder aux chaînes payantes.

Il me semble que nous partageons tous ici la conviction que le patrimoine sportif français et mondial ne saurait devenir l'apanage de ceux qui peuvent souscrire à de multiples abonnements ou qui disposent des ressources numériques suffisantes. En d'autres termes, un meilleur équilibre doit être trouvé entre viabilité d'un modèle économique dynamique, d'une part, et accessibilité du plus grand nombre au sport, d'autre part.

Le décret du 22 décembre 2004, en son article 3, définit une liste des « événements sportifs d'importance majeure » devant être diffusés sur un service de télévision en accès libre, laquelle pourrait être élargie.

Plus substantiellement, au regard de l'évolution en matière de droits de retransmission de tels événements, êtes-vous favorable, madame la ministre, à faire de l'accessibilité au plus grand nombre un motif d'intervention en urgence de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), afin de garantir la diffusion d'un événement sportif de grande ampleur sur une chaîne de télévision en accès libre ? Cette nouvelle prérogative correspond parfaitement au rôle de régulateur assigné à cette autorité.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture. Madame la sénatrice Sylvie Robert, je profite de cette occasion pour vous remercier de votre engagement en faveur des bibliothèques.

Ma collègue Amélie Oudéa-Castéra m'a chargé de vous répondre, dans la mesure où votre question concerne nos deux ministères.

Vous l'avez dit, cette fameuse liste est au cœur du sujet. La protection des événements dits « d'importance majeure » est encadrée par le droit de l'Union européenne, lequel offre la possibilité de définir une liste d'événements bénéficiant d'une protection particulière en vue de les rendre accessibles gratuitement au plus grand nombre.

En France, cette liste a été fixée par un décret de 2004 et compte vingt et un événements sportifs, le chiffre le plus élevé au sein de l'Union européenne, ce qui témoigne de l'importance que nous accordons à l'accès au sport pour tous. Oui, le Gouvernement est favorable à son élargissement et à sa modernisation, afin d'y intégrer les jeux Paralympiques ainsi que des événements sportifs féminins.

Plusieurs étapes sont nécessaires pour cela. Le précédent Gouvernement avait mené une consultation publique en début d'année et nous nous apprêtons à notifier cette liste modernisée à la Commission européenne, qui doit la valider.

Il est important de rappeler que les droits audiovisuels représentent une part importante des ressources des acteurs du sport français ; ils sont essentiels pour assurer la pérennité des événements et le développement du sport en France, incluant, notamment, la formation des jeunes.

C'est tout l'objet de la taxe Buffet, laquelle assure, comme vous le savez, une solidarité financière du sport professionnel vers le sport amateur. Ainsi, ma collègue Amélie Oudéa-Castéra et moi-même restons attentives au maintien d'un juste équilibre entre la disponibilité des offres à un coût raisonnable pour les téléspectateurs et le développement économique des ayants droit.

Cet équilibre, qu'il importe de toujours rechercher, ne s'est pas dégradé au cours des dernières années. L'Arcom indique ainsi dans son rapport du 25 juillet 2022 que le poids des contenus sportifs diffusés en télévision gratuite est passé de 4,2 % à 5,4 % entre 2019 et 2021, soit une hausse de 1,2 point.

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