Question de Mme MICOULEAU Brigitte (Haute-Garonne - Les Républicains) publiée le 14/07/2022

Mme Brigitte Micouleau attire l'attention de M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur la problématique des transferts des droits d'exploitation des établissements d'hébergement pour personnes âgées et dépendantes (EHPAD). En effet, le modèle d'un certain nombre de ces établissements, notamment privés à but lucratif, est structuré avec l'intervention de plusieurs acteurs : les promoteurs-exploitants qui initient la construction de l'EHPAD, puis vendent des lots à des investisseurs privés (bailleurs), très souvent des épargnants aux revenus modestes, qui leur achètent un appartement ou une chambre médicalisée. Ces chambres sont ensuite prises en location par l'exploitant avec un bail commercial, en général de neuf ans, pour assurer l'hébergement des personnes âgées. L'exploitation de lits de type EHPAD étant obligatoirement soumise à une autorisation de l'agence régionale de santé (ARS), cette autorisation devient essentielle dans le montage. L'État intervient également financièrement avec les importantes dotations publiques provenant de l'ARS et de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) pour les soins, le matériel, les protections et la rémunération du personnel soignant, ce qui profite directement aux exploitants. Les conseils départementaux participent aussi. Il s'avère que certains promoteurs entreprennent la construction d'un nouvel établissement à proximité de celui existant, non entretenu et devenu vieillissant, avec la commercialisation de nouvelles chambres d'EHPAD, puis y transfèrent l'autorisation d'exploitation. En parallèle, ils donnent congé aux propriétaires épargnants de l'établissement d'origine dès l'expiration de leur bail commercial. Ce qui avait été présenté comme un placement sans risque, par des établissements bancaires ou des conseillers en gestion de patrimoine, se révèle être une catastrophe pour des copropriétaires sacrifiés. Les agréments de l'ARS étant accordés aux exploitants pour la gestion d'un EHPAD, ceux-ci ne sont pas liés à la résidence. L'ARS ne semblant pas contrôler le transfert géographique de l'autorisation, les exploitants peuvent alors quitter brutalement des résidences qu'ils jugent insuffisamment profitables, en attribuant l'autorisation à la nouvelle construction. C'est alors la double peine pour les investisseurs : ni loyer, ni agrément. Ils deviennent propriétaires d'une « coquille vide » et leur bien peut perdre jusqu'à 90 % de sa valeur. Elle lui demande donc quel est le réel pouvoir des ARS afin de mieux encadrer les transferts des autorisations et droits d'exploitation des EHPAD qu'elles ont délivrés. Enfin elle lui demande comment faire évoluer la législation afin de mieux protéger les nombreux épargnants modestes qui se retrouvent spoliés, de mieux contrôler et, le cas échéant, prévenir les décisions arbitraires de certains promoteurs-exploitants peu scrupuleux.

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Réponse du Ministère des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées publiée le 15/12/2022

Dans le cadre du « choc de transparence » qu'il a engagé, le Gouvernement est particulièrement attentif aux pratiques des gestionnaires d'établissements pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Le contrôle de la bonne utilisation des financements publics attribués aux établissements et services médico-sociaux, notamment les EHPAD, quel que soit leur statut, est ainsi une des priorités du Gouvernement, réaffirmée par les mesures contenues dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023. Concernant la protection des petits épargnants ayant investi dans des EHPAD (en l'espèce, des copropriétaires ayant investi sous forme de lots), il convient avant tout de rappeler que les autorités de contrôle (agences régionales de santé et conseils départementaux) valident les projets de déménagement au regard des besoins sociaux et médico-sociaux identifiés et priorisés dans le schéma régional de santé, le schéma d'organisation sociale et médico-sociale, ainsi que de l'offre de leur territoire. Elles apprécient la pertinence des projets par rapport à la conformité des lieux d'hébergement et de soins aux dernières normes mais aussi aux attentes des personnes et de leurs familles. Les dispositions applicables en la matière ne distinguent pas un « agrément » au titre des bâtiments occupés par l'établissement de « l'autorisation d'exploitation » dudit établissement. L'autorisation est toujours accordée à une personne physique ou morale déterminée en vue de gérer l'établissement. Par ailleurs, la réglementation n'impose pas de manière générale une configuration particulière quant à la propriété du bâti utilisé, qui est simplement prise en compte en matière tarifaire. Ainsi, la personne morale ou physique gestionnaire est seule considérée détentrice de l'autorisation accordée par les autorités compétentes. Ces autorités ne sont pas en mesure d'examiner les liens contractuels entre le gestionnaire d'EHPAD, ou la filiale immobilière du groupe et les copropriétaires qui ont investi dans les chambres d'EHPAD. Ainsi, la question est plutôt celle de la manière dont les droits des investisseurs sont protégés dans les contrats pour couvrir les situations de changements d'implantation. Il convient de noter au préalable qu'à l'instar d'autres investissements, les placements dans l'immobilier locatif comportent des risques. Ces placements restent soumis aux aléas du marché, ainsi qu'aux éventuelles difficultés rencontrées par les gestionnaires. Pour cette raison, et du fait de l'importance des sommes en jeu notamment s'agissant des particuliers, la spécificité de l'investissement locatif suppose un minimum de vérification de la part de l'investisseur qui doit porter une attention particulière au bien qu'il acquiert, à son environnement, ainsi qu'à la qualité et au volume de l'offre locative concurrente. La loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique a modifié le code de la consommation en créant, notamment, une obligation d'information sur les risques liés aux investissements locatifs. Le non-respect des obligations renforcées de transparence qui s'appliquent à la commercialisation des biens immobiliers dans les EHPAD est sanctionné par une amende administrative pouvant atteindre 100 000 €. Il convient par ailleurs de noter que le dispositif de réduction d'impôts dont bénéficiaient les personnes investissant dans des EHPAD prend fin au 31 décembre 2022, ce qui rendra moins attractif ce type d'investissement à l'avenir.

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