Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SER) publiée le 04/08/2022

M. Hervé Gillé attire l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur l'incohérence de l'obligation à l'autoconsommation de biométhane dans les installations de méthanisation agricoles.
Réelle filière d'avenir dans le mix énergétique, la méthanisation présente des avantages notoires en termes de réductions de gaz à effet de serre. En plus de participer à l'économie circulaire en valorisant des déchets agricoles habituellement non traités et donc polluants, elle permet de fournir nombre de foyers alentour, parfois des communes entières, en énergie verte.
Cependant, les gérants de méthaniseurs, principalement des agriculteurs associés, se heurtent à une disposition réglementaire qui entrave les rendements et la prospérité de ces installations. En effet, l'arrêté du 23 novembre 2011, modifié le 30 avril 2019, oblige à autoconsommer une partie non négligeable (presque 10 %) du biométhane produit par le méthaniseur pour chauffer ses propres digesteurs.
Or, le biométhane est une énergie à haute valeur thermodynamique, aux avantages nombreux mais coûteuse à obtenir. Ainsi, il semble peu rationnel d'utiliser une énergie si noble, aux usages ultérieurs si multiples, pour produire une chaleur à très basse température, qui pourrait être obtenue par une source de moindre valeur. À titre d'exemple, le bois énergie est une alternative rationnelle et cohérente : en plus de son prix compétitif, il permet de développer les filières bois locales. Il est donc dommageable de perdre une énergie d'une telle valeur dans le processus de méthanisation, alors qu'elle pourrait plutôt alimenter des foyers, et que des alternatives locales moins coûteuses existent.
L'argument avancé pour justifier cette disposition réglementaire est la crainte d'une « rentabilité excessive » des méthaniseurs. Or, celle-ci est peu probable, compte tenu des aléas auxquels ils font face : problèmes techniques dus à la complexité du processus, dépendance aux intrants de l'agriculture et de l'élevage… Les méthaniseurs sont directement impactés par les aléas agricoles auxquels font déjà face les agriculteurs, et il semble ainsi difficile de réaliser des bénéfices excessifs sur le processus de méthanisation.
Ainsi, l'obligation à autoconsommer du biométhane dans le fonctionnement des méthaniseurs semble peu cohérente et peu justifiable aux yeux des agriculteurs. En conséquence de quoi, il lui demande si une révision de la législation en vigueur ou un assouplissement de la disposition réglementaire est envisagée à court terme.

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Réponse du Ministère de la transition énergétique publiée le 18/05/2023

Le Gouvernement est pleinement engagé dans le développement de la filière de production de biométhane. Grâce au soutien apporté par l'Etat, le développement de la filière de production de biométhane s'est accéléré au cours des derniers mois : au 25 avril 2023, 551 installations ont injecté du biométhane dans les réseaux de gaz naturel. Leur capacité s'élève à 9,8 TWh/an, en progression de 46 % par rapport à fin 2021. Afin d'atteindre les objectifs fixés par la Programmation pluriannuelle de l'énergie à l'horizon 2028 et sortir de la dépendance aux énergies fossiles, le développement de l'injection de biométhane doit s'accélérer pour atteindre une production injectée d'au moins 14 à 22 TWh par an et la part des énergies renouvelables doit être portée à au moins 10 % de la consommation de gaz à l'horizon 2030. Ces objectifs seront revus dans le cadre de la prochaine Programmation Pluriannuelle de l'Énergie qui sera présentée à l'été. Pour accélérer la dynamique, un nouvel arrêté tarifaire du biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel sera bientôt publié. Il inclut de nouvelles exigences en matière d'efficacité énergétique et élargit les sources d'énergie pouvant être utilisées pour la chaleur, afin de répondre notamment à la problématique que vous soulevez. Le projet d'arrêté a déjà fait l'objet d'une consultation du Conseil supérieur de l'énergie. Dans une optique de forte progression de la filière de production de biométhane, il est nécessaire d'inciter les installations à l'efficacité énergétique, afin de privilégier les projets les plus pertinents, notamment ceux qui consomment le moins d'énergie pour la production de biométhane, et ceux qui n'utilisent pas d'énergie fossile. En parallèle, l'utilisation d'autres sources de production d'énergies renouvelables pour couvrir les besoins énergétiques de l'installation n'est plus limitée, ce qui permettra aux agriculteurs de pouvoir utiliser les énergies renouvelables qui leur paraissent les plus adaptées en particulier le bois énergie, ou par exemple l'ajout de photovoltaïque à proximité afin d'autoconsommer l'électricité produite. Ces nouvelles dispositions s'appliqueront obligatoirement aux nouvelles installations de production de biométhane et les installations ayant déjà contractualisé un contrat d'achat pourront bénéficier de ces nouvelles conditions par un avenant à leur contrat d'achat.

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