Avis n° 95 (2000-2001) de M. Jean FAURE , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 23 novembre 2000

Disponible au format Acrobat (266 Koctets)

N° 95

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2000

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2001 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME IV

DÉFENSE - NUCLÉAIRE, ESPACE ET

SERVICES COMMUNS

Par M. Jean FAURE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Jean Bernard, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Xavier Dugoin, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, Louis Le Pensec, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry,
MM. René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Michel Pelchat, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2585 , 2624 à 2629 et T.A. 570

Sénat : 91 , 92 (annexes n° s 43 et 44 ) (2000-2001)

Lois de finances .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent rapport pour avis porte sur les crédits du budget du ministère de la défense pour 2000 ne relevant ni des trois armées ni de la gendarmerie, anciennement regroupées au sein de la section commune.

Ces crédits se répartissent en cinq agrégats :

- la délégation générale pour l'armement (DGA), agrégat au sein duquel sont comptabilisées les dépenses de personnel et de fonctionnement propres à la DGA, ainsi que certains crédits d'équipement concernant pour l'essentiel les études " amont " et les dotations transférées au Commissariat à l'énergie atomique,

- le soutien interarmées, qui recouvre principalement le service de santé et le service des essences des armées et les organismes interarmées tels que la direction à l'information et à la communication du ministère de la défense,

- le renseignement, regroupant les crédits de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et de la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD),

- l'administration générale, couvrant les dépenses de l'administration centrale et du contrôle général des armées, ainsi que les rémunérations des personnels civils de la défense,

- enfin, l'état-major des armées, auquel sont affectés, outre divers crédits de fonctionnement, des crédits d'équipement relevant de programmes spatiaux et nucléaires.

Cet ensemble assez hétérogène représente à lui seul plus du quart du budget de la défense hors pension, et s'élèvera en 2001 à 48,7 milliards de francs, soit une progression de 0,4 % par rapport à l'an passé.

Votre rapporteur décrira rapidement l'évolution d'ensemble des crédits de l'ancienne section commune, en les replaçant dans le contexte du budget de la défense pour 2001, avant de centrer son analyse autour de quatre préoccupations principales :

- les questions nucléaires, marquées par la poursuite de la modernisation de nos deux composantes et du programme de simulation, dans un contexte de réduction continue des crédits consacrés au nucléaire,

- l'espace et le renseignement, bénéficiaires d'un net redressement dû notamment à la reprise de l'effort budgétaire consacré aux programmes spatiaux,

- la délégation générale pour l'armement engagée dans une profonde réforme de la gestion des programmes d'équipement et de ses activités industrielles,

- le service de santé des armées, dont les difficultés d'adaptation à la professionnalisation ont été insuffisamment prises en compte, et les autres services communs.

CHAPITRE PREMIER -
LE NUCLÉAIRE, L'ESPACE ET LES SERVICES COMMUNS DANS LE BUGET DE LA DÉFENSE POUR 2001

En 2001, l'évolution des crédits de l'ancienne section commune sera très comparable à celle de l'ensemble du budget de la défense, dont ils représentent plus du quart du montant, budget lui-même peu différent de celui de l'an passé.

Le ministère de la défense verra ses crédits, hors pensions, progresser de 0,5 % et s'élever à 188,9 milliards de francs, dont 105,5 milliards de francs pour les dépenses ordinaires (+ 0,5 %) et 83,4 milliards de francs pour les dépenses en capital (+ 0,6 %).

Dans ces conditions, le budget de la défense, tout comme les actions relevant de l'ancienne section commune, restera marqué en 2001 par les faiblesses soulignées l'an passé par notre commission : un niveau global insuffisant pour remédier à la contraction excessive des moyens de fonctionnement et aux tensions sur les programmes d'équipement d'une part, et une rupture confirmée des engagements pris lors de la " revue de programme " d'autre part.

I. L'ÉVOLUTION D'ENSEMBLE DES CRÉDITS DE LA DÉFENSE

Le budget de la défense pour 2001 évolue peu par rapport à celui de l'an passé. Il confirme la rupture avec l'engagement de stabilisation des ressources pris en 1998 et traduit un fléchissement de notre effort de défense au moment où le contexte budgétaire général s'améliore et où plusieurs de nos alliés majeurs maintiennent, voire augmentent, les moyens financiers alloués à leur défense.

A. UN BUDGET DE LA DÉFENSE AUX CARACTÉRISTIQUES VOISINES DE CELUI DE L'AN PASSÉ

Le budget de la défense pour 2000 marquait une nouvelle érosion des crédits militaires. Le projet de budget pour 2001 confirme cette évolution, la progression des dotations de 0,5 % en francs courants se traduisant par une régression de 0,4 % en francs constants.

Evolution du budget de la défense (hors pensions) depuis 1997

(en milliards de francs)

1997

1998

1999

2000

2001

2001/
2000

2001
1997

Rémunérations et charges sociales

77,720

80,471

82,822

84,049

84,662

+ 0,7 %

+ 8,9 %

Fonctionnement

24,503

23,250

21,139

20,942

20,852

- 0,4 %

- 14,9 %

Titre III

102,223

103,721

103,961

104,991

105,514

+ 0,5 %

+ 3,2 %

Titres V et VI

88,705

81,000

86,000

82,955

83,426

+ 0,6 %

- 6,0 %

Total

190,928

184,721

189,961

187,946

188,940

+ 0,5 %

- 1,0 %

Ainsi que l'illustre le tableau ci-dessus, la progression du titre III se poursuit, avec le double mouvement désormais bien connu d'augmentation continue des dépenses de rémunérations et charges sociales (+ 0,7 % par rapport à 2000 et + 8,9 % par rapport à 1997) et de compression des crédits de fonctionnement (- 0,4 % par rapport à 2000 et - 14,9 % depuis 1997).

L'augmentation des dépenses de rémunérations et charges sociales , forte depuis 1997, se ralentit quelque peu. L'impact des mesures d'effectif, c'est-à-dire du remplacement des appelés par des professionnels, certes moins nombreux mais beaucoup mieux rémunérés, demeure fort et peut être évalué à près de 440 millions de francs pour 2001. En revanche, l'incidence des mesures d'accompagnement de la professionnalisation, notamment les aides au départ, s'est très nettement atténuée.

La brutale diminution des crédits de fonctionnement opérée de 1997 à 1999 a été partiellement stoppée en 2000 et, pour 2001, les dotations connaîtront une réduction exceptionnellement modérée de 0,4 %.

Plusieurs mesures permettent, mécaniquement, de réaliser des économies sur les dépenses de fonctionnement , notamment la réduction du format des armées (- 727 millions de francs), la réduction d'un point du taux de TVA (- 96 millions de francs), un nouveau transfert de crédits d'entretien programmé des matériels vers le titre V (- 150 millions de francs) et diverses opérations de trésorerie faisant appel à des recettes extrabudgétaires provenant de comptes spéciaux ou de fonds de concours (- 181 millions de francs).

Ces économies ont permis de dégager des marges pour des mesures nouvelles dont l'incidence réelle sur les conditions d'activité des armées seront cependant inégales. Ainsi, 695 millions de francs supplémentaires sont prévus pour une actualisation des produits pétroliers que l'on sait déjà très insuffisante, puisqu'elle se fonde sur des prix inférieurs de 40 % aux cours actuels. La sous-traitance se voit affecter 104 millions de francs supplémentaires mais cet apport n'est que la contrepartie de postes d'appelés et de personnels civils supprimés. Le seul effort notable porte sur l'entraînement des forces , pour lequel une dotation supplémentaire de 200 millions de francs sera accordée, permettant de relever les taux d'activité qui étaient tombés au plus bas en 1999. Au total, ces quelques mesures positives ne remédient pas aux nombreuses insuffisances qui demeurent en matière de crédits de fonctionnement.

S'agissant des dépenses en capital , les crédits de paiement s'élèvent à 83,4 milliards de francs (+ 0,6 %) et les autorisations de programme à 84,7 milliards de francs (- 3,1 %). Ces dotations incluent une nouvelle fois une contribution au budget civil de recherche et de développement (BCRD), à hauteur de 1,250 milliard de francs. Le niveau des crédits de paiement semble à peine compatible avec les besoins générés par la reprise des engagements , si bien qu'un report de charges de l'ordre de 1 à 2 milliards de francs en fin d'exercice n'est pas à exclure. Il ne permet pas, par ailleurs, de rattraper les réductions opérées à partir de 1998 sur certaines dépenses telles que les infrastructures, l'entretien programmé des matériels ou celui des personnels. Quant au niveau des autorisations de programme , il laisse entier le problème de la forte réduction de l'encours disponible , du fait de la passation depuis 1998 des commandes globales, et laisse présager pour 2001 une gestion tendue des dotations, d'autant que les modalités de financement de certains programmes, et en premier lieu de l'avion de transport A400M, ne sont pas à ce jour totalement garanties.

B. UN BUDGET QUI TRADUIT LE FLÉCHISSEMENT DE L'EFFORT DE DÉFENSE

Votre rapporteur avait rappelé l'an dernier les conditions dans lesquelles, après l'encoche de 1998 et la diminution des dotations d'équipement décidée dans le cadre de la " revue des programmes ", un engagement solennel de stabilisation des ressources avait été pris par le gouvernement.

Le 3 avril 1998, le Premier ministre déclarait à Saint-Mandrier que les crédits d'équipements de la défense s'élèveraient " à 85 milliards de francs constants pour les quatre prochaines annuités " et cet engagement était renouvelé lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1999.

Alors qu'aucune détérioration du contexte économique et financier général n'est intervenue depuis lors, bien au contraire, cet engagement a été contredit un an à peine après avoir été prononcé, lors de la définition du budget pour 2000.

Le projet de budget pour 2001 confirme cette rupture des engagements puisque le niveau du titre V est inférieur d'environ 3,5 milliards de francs à celui défini lors de la revue de programmes .

Ainsi, alors que la " revue de programmes " se présentait comme un ajustement limité par rapport aux ressources prévues jusqu'en 2002, c'est en réalité un écart considérable qui s'est creusé entre la loi de programmation et le niveau effectif des crédits mis à la disposition des armées.

Rappelons que la loi de programmation avait prévu de doter les titres V et VI à hauteur de 86 milliards de francs constants (valeur de 1995) sur les six années 1997-2002.

Compte tenu des coefficients d'actualisation, c'est ainsi une enveloppe globale de 456 milliards de francs qui aurait dû aller aux titres V et VI sur les cinq années 1997-2001. Cette enveloppe a subi au fil des ans trois types d'amputations : les abattements opérés dans les lois de finances initiales, les annulations de crédits et l'inscription au budget des armées de charges non prévues, voire même formellement exclues par la loi.

Au total, pour les cinq années 1997-2001, on peut évaluer à 68 milliards de francs , soit près de 15 % de l'enveloppe , le " manque à gagner " enregistré sur le budget de la défense.

Ce " manque à gagner " se répartit comme suit :

- 24,4 milliards de francs d' annulations de crédits intervenues depuis 1997, dont une large partie a servi, en contradiction avec la loi de programmation, à financer les opérations extérieures et les recapitalisations de GIAT-Industries,

- 15,5 milliards de francs de charges non prévues , en particulier le transfert sur le titre V de dépenses d'entretien programmé des matériels auparavant financées sur le titre III et des prélèvements, formellement exclus par la loi, au titre du budget civil de recherche et de développement,

- 8,3 milliards de francs au titre de " l'encoche " de 1998,

- 12,8 milliards de francs représentant l'incidence sur la période 1999-2001 de la " revue de programmes ",

- 6,7 milliards de francs (3,2 milliards de francs en 2000 et 3,5 milliards de francs en 2001) d' abattements supplémentaires par rapport à la " revue de programmes ".

Globalement, l'effort d'équipement des armées sera inférieur de plus de 10 milliards de francs par an à celui prévu par la loi de programmation .

Ce fléchissement ne constitue par un signal positif à l'adresse de nos partenaires européens dont nous souhaiterions qu'ils contribuent à l'édification de capacités européennes de défense. Il provoque un décrochage de notre effort d'équipement par rapport à celui du Royaume-Uni , ce dernier apparaissant en mesure de s'imposer au premier rang des nations européennes pour certaines capacités ou technologies stratégiques.

Intervenant à un moment où la contrainte sur les finances publiques s'est atténuée, l'érosion des moyens dévolus aux armées traduit un recul de la défense dans l'ordre des priorités gouvernementales.

II. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE L'ANCIENNE SECTION COMMUNE

A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE

Pour 2001, les crédits de l'ancienne section commune se monteront à 48,698 milliards de francs , soit une progression de 0,4 % par rapport à 2000. Leur part dans l'ensemble du budget de la défense (hors pensions) s'élève à 25,8 %.

Evolution des crédits de l'ancienne section commune

(en millions de francs)

2000

2001

%

TITRE III

24 606

24 635

+ 0,1

DGA

2 829

2 664

- 5,8

Soutien interarmées

1 987

2 029

+ 2,1

Renseignement

895

943

+ 5,4

Administration générale

18 387

18 530

+ 0,8

Etat-major des armées

508

468

- 7,9

TITRES V ET VI

23 917

24 063

+ 0,6

DGA

11 694

11 309

- 3,3

Soutien interarmées

1 149

1 025

- 10,8

Renseignement

680

748

+ 10,0

Administration générale

793

901

+ 13,6

Etat-major des armées

9 600

10 078

+ 5,0

TOTAL

48 521

48 698

+ 0,4

DGA

14 523

13 974

- 3,8

Soutien interarmées

3 136

3 054

- 2,6

Renseignement

1 575

1 692

+ 7,4

Administration générale

19 178

19 431

+ 1,3

Etat-major des armées

10 108

10 546

+ 4,3

Les dépenses ordinaires s'établissent à 24,6 milliards de francs , soit un niveau pratiquement analogue à celui de 2000. Les crédits de rémunérations et de charges sociales s'élèvent à 19,7 milliards de francs, soit 1,4 % de plus qu'en 2000, alors que les dépenses de fonctionnement courant, avec 4,9 milliards de francs, diminuent de 4,7 %.

Les dépenses en capital des titres V et VI progressent de 0,6 %, passant de 23,9 milliards de francs en 2000 à 24,1 milliards de francs pour 2001 .

B. ÉVOLUTION PAR AGRÉGAT

1. La délégation générale pour l'armement (DGA)

Les crédits regroupés sous l'agrégat DGA s'élèvent à 13,9 milliards de francs , soit une diminution de 3,8 % par rapport à 2000. Les dépenses ordinaires s'établissent à 2,6 milliards de francs (- 5,8 %) alors que les dépenses en capital se montent à 11,3 milliards de francs (- 3,3 %).

Evolution des crédits de la DGA

(en millions de francs)

2000

2001

%

Rémunérations et charges sociales

972,389

944,740

- 2,8

Fonctionnement

1 856,783

1 720,177

- 7,4

Total dépenses ordinaires

2 829,172

2 664,917

- 5,8

Titre V

9 538,190

9 394,640

- 1,5

Titre VI

2 155,680

1 914,900

- 11,2

Total dépenses en capital

11 693,870

11 309,540

- 3,3

TOTAL

14 523,042

13 974,457

- 3,8

La diminution des dépenses de rémunérations et charges sociales traduit celle des effectifs militaires de la DGA, qui passent de 3 472 à 3 452 postes, 67 postes d'officiers étant notamment supprimés. Parallèlement, les effectifs de personnels civils, rémunérés sur les crédits de l'agrégat "administration générale ", passeront de 14 409 à 13 100 postes.

Les crédits de fonctionnement diminuent fortement (- 7,4 %), l'effet mécanique de la réduction des effectifs et de la baisse du taux de TVA étant amplifié par des mesures d'économie supplémentaires intervenant sur un budget déjà comprimé.

Les crédits d'études, d'équipement et d'infrastructure du titre V, qui regroupent pour l'essentiel les crédits d'études-amont et les dotations transférées au commissariat à l'énergie atomique, diminuent légèrement.

Le recul de plus de 11 % des crédits du titre V reflète la diminution, de 1 500 à 1 250 millions de francs, de la participation de la défense au budget civil de recherche et de développement (BCRD).

2. Le soutien interarmées

Les crédits regroupés sous l'agrégat " soutien interarmées " représentent 3,05 milliards de francs et régressent de 2,6 %.

Evolution des crédits consacrés aux " soutiens interarmées "

(en millions de francs)

2000

2001

%

Rémunérations et charges sociales

1 445,300

1 474,892

+ 2,0

Fonctionnement

541,482

553,823

+ 2,3

Total dépenses ordinaires

1 986,782

2 028,715

+ 2,1

Titre V

457,780

384,340

- 16,0

Titre VI

691,690

640,881

- 7,3

Total dépenses en capital

1 149,470

1 025,221

- 10,8

TOTAL

3 136,252

3 053,936

- 2,6

Cet agrégat regroupe uniquement :

. le budget de service de santé des armées , qui se monte à 1,64 milliard de F, soit une diminution de 4,5 % imputable pour l'essentiel à une diminution des crédits d'équipement et d'infrastructure. Les crédits de fonctionnement, fortement réduits les années passées, sont stabilisés, alors que les ressources extrabudgétaires liées à l'activité hospitalière du service, rattachées en cours d'exercice de crédits de fonds de concours, devraient être en diminution.

. le budget du service des essences , qui s'élève à 582 millions de F, soit un niveau sensiblement supérieur (+ 3 %) à celui de l'an passé.

. le budget (hors frais de personnels) de la Direction à l'information et à la communication (DICOD ), qui se montera à 88,6 millions de F, soit 19,2 % de plus qu'en 2000,

. les dépense d'équipement culturel et social inscrites au titre VI, qui passent de 692 à 641 millions de F, cette rubrique couvrant essentiellement la subvention versée par l'Etat au territoire de Polynésie française en application de la convention pour le renforcement de son autonomie économique qui garantit au territoire, pendant dix ans, le maintien de flux financiers compensant la fermeture du centre d'expérimentation du Pacifique.

3. Le renseignement

Avec 1,69 milliard de francs , les crédits inscrits sous l'agrégat "Renseignement" progressent de 7,4 %. Les dépenses ordinaires s'élèvent à 943 millions de F, soit 5,4 % de plus qu'en 2000 alors que les dépenses en capital augmentent de 10 % et atteignent 748 millions de F.

Evolution des crédits consacrés au renseignement

(en millions de francs)

2000

2001

%

Rémunérations et charges sociales

690,733

740,436

+ 7,2

Fonctionnement

203,956

202,594

- 0,7

Total dépenses ordinaires

894,689

943,030

+ 5,4

Titre V

680,000

748,480

+ 10,1

Titre VI

Total dépenses en capital

680,000

748,480

+ 10,1

Total

1 574,689

1 691,510

+ 7,4

Cet agrégat regroupe uniquement le budget de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), qui atteint 1,6 milliard de francs, ainsi que les crédits de fonctionnement et d'équipement de la Direction de protection et de sécurité de la défense, qui se montent à 70 millions de francs.

4. L'administration générale

Les dépenses d'administration générale (hors pensions) atteignent 19,4 milliards de francs , soit une progression de 1,3 % par rapport à 2000.

Evolution des crédits d'administration générale

(en millions de francs)

2000

2001

%

Rémunérations et charges sociales

16 340,404

16 562,726

+ 1,4

Fonctionnement

2 046,869

1 967,534

- 3,9

Total dépenses ordinaires

18 387,273

18 530,260

+ 0,8

Titre V

560,340

664,954

+ 18,7

Titre VI

232,654

236,650

+ 1,7

Total dépenses en capital

792,994

901,604

+ 13,7

Total

19 180,267

19 431,864

+ 1,3

Cet agrégat regroupe notamment :

. à hauteur de plus de 15 milliards de francs, les dépenses de rémunérations et charges sociales de l'ensemble des personnels civils de la défense (77 629 postes en 2001) hormis ceux relevant de la zone comptes de commerce, ces derniers ne comportant pus les personnels de DCN, sortis du périmètre de la DGA depuis la transformation en service à compétence nationale.

. une provision de 327 millions de francs destinée à couvrir la revalorisation de 0,5 % de la rémunération des personnels tant civils que militaires, cette dotation étant calculée sur la base d'une augmentation de 0,5 % de l'indice de la fonction publique,

. l'indemnité compensatrice versée à la SNCF (957,4 millions de francs) qui diminue de 7 %,

. les frais de fonctionnement de l'administration générale (603 millions de francs),

. des dépenses d'études, d'équipement et d'infrastructure aux titres V et VI qui s'élèvent à 901 millions de francs et qui progressent de 12,7 % sous l'effet d'une augmentation des crédits d'infrastructure, alors que les dotations du Fonds pour les restructurations de la défense (205,8 millions de francs) diminuent légèrement.

5. L'état-major des armées

Les crédits regroupés sous l'agrégat " Etat-major des armées ", créé en 1999, s'élèvent à 10,5 milliards de francs , soit 4,3 % de plus qu'en 2000, dont 467 millions de francs au titre des dépenses ordinaires (- 7,9 %) et 10 milliards de francs au titre des dépenses en capital (+ 5 %).

Evolution des crédits consacrés à l'état-major des armées

(en millions de francs)

2000

2001

%

Rémunérations et charges sociales

-

-

-

Fonctionnement

507,981

467,637

- 7,9

Total dépenses ordinaires

507,981

467,637

- 7,9

Titre V

9 600,226

10 078,460

+ 5,0

Titre VI

-

Total dépenses en capital

9 600,226

10 078,460

+ 5,0

Total

10 108,207

10 546,097

+ 4,3

La forte diminution des dépenses de fonctionnement résulte de la fermeture de la base de Hao, en Polynésie française, qui entraîne une économie de 45 millions de francs sur les crédits alloués pour le fonctionnement des états-majors interarmées outre-mer.

Les crédits d'équipement inscrits au titre V concernent essentiellement l'espace et les systèmes d'information et de communication (3 451,5 millions de francs dont 1 189 millions de francs pour le programme Hélios II et 718 millions de francs pour le programme Syracuse III), et les forces nucléaires (5 616 millions de francs dont 2 299 millions de francs pour le programme M 51, 1 267 millions de francs pour les missiles stratégiques et 1 433 millions de francs transférés au Commissariat à l'énergie atomique au titre des charges nucléaires).

CHAPITRE II -
LES QUESTIONS NUCLÉAIRES

Votre rapporteur a relevé, au cours des trois dernières années, que les crédits consacrés à la dissuasion nucléaire avaient été affectés plus que d'autres par les abattements opérés sur les crédits d'équipement de la défense, leur part diminuant dans un titre V lui-même réduit par rapport aux objectifs de la loi de programmation militaire.

Cette tendance à l'érosion se confirme dans le projet de budget pour 2001, les crédits de paiement, avec 15,6 milliards de francs, diminuant de 1,8 %, alors que les autorisations de programme, qui en 2000 incluaient la commande globale d'une nouvelle tranche de deux ans de développement du missile M51, régresseront en 2001 de 27 %, retrouvant avec 13,4 milliards de francs, le niveau très bas qu'elles avaient atteint en 1999.

Cette érosion des crédits du nucléaire , plus forte que ne le laissait présager la loi de programmation, n'affecte pas les principaux programmes de modernisation et de renouvellement de notre force de dissuasion. Mais elle crée un contexte budgétaire tendu , notamment en matière de crédits d'études-amont, et doit inciter à la vigilance, alors que ces grands programmes exigeront impérativement, lors de la prochaine loi de programmation, un relèvement de l'effort financier.

I. L'ÉVOLUTION DU CONTEXTE INTERNATIONAL

L'année 2000 a été marquée par des difficultés du dialogue stratégique américano-russe, liées au projet de déploiement par Washington d'un système de défense antimissiles (NMD). En dehors des deux principales puissances nucléaires, la tendance n'est pas au désarmement, que ce soit en Chine ou dans les différents pays mettant au point des programmes nucléaires militaires ou balistiques. Parallèlement, aucune avancée n'a été enregistrée quant aux instruments internationaux de désarmement et de non-prolifération.

A. LES DIFFICULTÉS DU DIALOGUE STRATÉGIQUE AMÉRICANO-RUSSE

Bloquée depuis plusieurs années, la ratification de l'accord de réduction des armes stratégiques START II a fait l'objet d'un vote positif par la Douma russe le 14 avril puis par le Conseil de la Fédération le 19 avril. Toutefois, le Président Poutine a subordonné l'application de cet accord à la renonciation des Etats-Unis à la modification et, a fortiori, à la dénonciation du traité ABM. Il a également conditionné cette entrée en vigueur à la ratification, par le Sénat américain, des protocoles, signés en septembre 1997 à Helsinski, le premier repoussant l'application de START II au 31 décembre 2007 et le second opérant une " démarcation " dans le champ d'application du traité ABM afin d'en exclure les défenses antimissiles de théâtre. Ce dernier protocole est manifestement incompatible avec les exigences américaines actuelles puisqu'il confirme, a contrario, que la NMD ne peut être déployée sans contrevenir au traité ABM. Ces conditions ont immédiatement été considérées comme inacceptables par une importante fraction du Sénat américain.

Rappelons que l'accord START I, signé en 1991, avait prévu de ramener en sept ans les arsenaux stratégiques des deux pays à 6 000 têtes nucléaires. Ces objectifs sont en passe d'être atteints puisque, de source officielle, le nombre de têtes nucléaires au début de l'année était inférieur à 6 000 pour la Russie et s'établissait à 7 763 têtes pour les Etats-Unis, l'objectif de 6 000 têtes étant envisagé pour 2001.

Signé en 1993, l'accord START II prévoit une nouvelle réduction, de l'ordre de la moitié par rapport à START I, du nombre d'armes stratégiques. Le retard pris dans la ratification de START II a d'ores et déjà entraîné une modification du calendrier lors du sommet d'Helsinki en mars 1997. Les échéances de mise en oeuvre ont été reculées. La première phase, au cours de laquelle le plafond du nombre total de têtes déployées doit être ramené à 4 250, s'achèverait en 2004, la seconde phase s'achevant en 2007 avec un abaissement des plafonds à 3 000 têtes pour la Russie et à 3 500 pour les Etats-Unis. Toutefois, les deux pays se sont engagés à désactiver avant le 31 décembre 2003 l'ensemble des têtes nucléaires des missiles stratégiques devant être éliminés avant la fin 2007.

Les difficultés pour l'application de START II handicapent la négociation d'un nouvel accord START III destiné à fixer le niveau des arsenaux à un total, pour chaque partie, de 2 000 à 2 500 têtes nucléaires déployées sur des vecteurs stratégiques.

C'est dans ce contexte que la Président Poutine s'est déclaré favorable à une réduction des arsenaux stratégiques russe et américain à moins de 1 500 ogives chacun, niveau très inférieur à celui envisagé pour START III, cette diminution étant soumise, dans l'esprit de Moscou, au respect du traité ABM de 1972. Selon certains observateurs, la Russie pourrait chercher à lever, dans un futur accord START III, l'interdiction des missiles sol-sol à têtes nucléaires multiples prévu par START II. Déliée de son obligation de démanteler ses têtes multiples, elle pourrait ainsi diminuer plus rapidement le nombre de ses missiles pour alléger ses contraintes financières, sans réduire dans la même proportion le nombre de ses têtes nucléaires.

B. LE DÉVELOPPEMENT DES ARSENAUX NUCLÉAIRES ET BALISTIQUES EN ASIE ET AU MOYEN-ORIENT

Parmi les puissances militaires reconnues, seule la Chine n'a pas diminué son arsenal nucléaire qui, au contraire, irait plutôt en augmentant, surtout qualitativement. Elle détiendrait aujourd'hui environ 300 têtes nucléaires stratégiques, auxquelles s'ajouteraient 150 têtes tactiques non déployées. L'arsenal chinois comporte trois composantes (aérienne, terrestre et sous-marine), mais repose surtout sur les moyens basés au sol. Les missiles stratégiques Dongfong à propergol solide, d'une portée de 8 000 km, ont été testés avec succès à l'été 1999 et pourraient emporter des charges multiples.

Après les 5 essais nucléaires du mois de mai 1998, qui ont confirmé ses capacités de production de matières nucléaires et de réalisation d'armes, l' Inde semble déterminée à développer un arsenal complet dont la finalité principale est la dissuasion vis-à-vis de la Chine. Elle poursuit la réalisation d'un ambitieux programme de mise au point de missiles balistiques avec le Prithvi et surtout l'Agni, missile stratégique à propulsion solide capable d'emporter une charge de l'ordre d'une tonne sur une distance de 2 500 kilomètres. C'est la dernière version de ce missile, l'Agni -2, qui a été testée en vol en avril 1999.

Le Pakistan a lui aussi fait la démonstration de sa capacité nucléaire militaire en procédant en mai 1998 à des expérimentations souterraines. Il entreprend la réalisation de têtes pour missiles et a testé au mois d'avril 1999, peu après le tir indien, un missile balistique Ghauri, mis au point avec l'aide de la Corée du Nord, d'une portée théorique de 1 500 kilomètres pour une charge utile de 700 kg, ainsi qu'un missile à carburant solide Shaheen, inspiré semble-t-il d'une technologie chinoise, d'une portée théorique de 750 km pour une charge utile d'une tonne.

Le gel des activités nucléaires militaires nord-coréennes, prévu par l'accord cadre signé avec les Etats-Unis en 1994, demeure toujours sujet à interrogations, l'Agence internationale de l'énergie atomique n'étant pas en mesure de vérifier les déclarations des autorités de Pyongyang et d'accéder aux combustibles stockés pour juger de l'état du programme d'accès au plutonium. En revanche, la Corée du Nord est incontestablement devenue en quelques années l'un des acteurs majeurs de la prolifération balistique dans le monde, particulièrement en direction du Moyen-Orient. La Corée du Nord développerait actuellement deux types de missiles balistiques Taepo-Dong dont la portée pourrait être respectivement de 2 000 et 3 500 km, des essais ayant été effectué pendant l'été 1998 puis en juillet 2000. Il faut par ailleurs rappeler que la Corée du Nord n'a pas adhéré à la convention d'interdiction des armes chimiques et dispose de sites de production d'agents chimiques et de munitions chimiques.

L' Iran est soupçonné de vouloir mettre en oeuvre clandestinement un programme nucléaire militaire sous couvert du développement de son industrie nucléaire civile. Les Etats-Unis estiment que ce programme pourrait aboutir à la fabrication d'armes nucléaires dans une dizaine d'années. La " National Intelligence Estimate " américaine rendue partiellement publique fin 1999 évalue comme " probable " l'existence en 2010 d'une menace d'atteinte du territoire des Etats-Unis par un missile à longue portée iranien équipé d'une tête nucléaire. L'Iran nie les intentions qu'on lui prête et met en avant les futurs besoins en énergie du pays pour justifier les investissements considérables qu'il met en oeuvre pour développer son industrie nucléaire, ce malgré d'importantes réserves en pétrole et surtout en gaz naturel.

Si la volonté politique iranienne de développer un programme nucléaire militaire semble moins affirmée depuis le changement de gouvernement en 1997, certaines activités entreprises par l'Atomic Energy Organization of Iran (AEOI) indiquent toutefois que ce pays n'a pas renoncé à son ambition nucléaire militaire. Les contrôles de l'AIEA n'ont toutefois pas permis de détecter des preuves concrètes de l'existence d'un programme nucléaire militaire, mais l'Agence de Vienne ne peut aujourd'hui inspecter que les sites nucléaires déclarés par l'Iran.

L' Irak a vu une partie de ses infrastructures nucléaires détruites par les raids alliés durant la guerre du Golfe et les destructions d'après-guerre ordonnées par l'ONU ont parachevé le démantèlement des installations dédiées au nucléaire militaire. Depuis décembre 1998, les inspections et contrôles sur place de l'AIEA sont interrompus. Le pays possède l'expertise scientifique, technique et humaine pour reprendre rapidement un programme nucléaire militaire. L'AIEA a pu inspecter les sites nucléaires irakiens le 23 janvier 2000 dans le cadre des accords de garanties passés avec Bagdad au titre du traité de non-prolifération nucléaire (TNP). Par ailleurs, le Conseil de sécurité de l'ONU a approuvé le 17 décembre 1999 une nouvelle résolution sur le désarmement de l'Irak (résolution 1284). La Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations-Unies (COCOVINU) créée par cette résolution pour remplacer la Commission spéciale pour le désarmement de l'Irak (UNSCOM) devra reprendre la vérification sur place des installations sensibles irakiennes interrompues fin 1998.

C. LES INSTRUMENTS INTERNATIONAUX DE DÉSARMEMENT NUCLÉAIRE ET DE NON-PROLIFÉRATION

La période récente n'a enregistré aucun progrès, bien au contraire, des instruments internationaux de désarmement et de non prolifération nucléaire.

Comme on pouvait s'y attendre, la condition requise pour l'entrée en vigueur du traité d'interdiction complète des essais nucléaires, à savoir sa ratification par les 44 Etats membres de la Conférence du désarmement possédant des capacités nucléaires de recherche ou de production d'énergie, n'est toujours pas remplie.

L'Inde, le Pakistan et la Corée du Nord demeurent les trois seuls Etats, parmi les 44 dont la ratification est requise, à n'avoir pas signé le traité.

Après la campagne d'essais nucléaires du printemps 1998, une certaine évolution était perceptible en Inde et au Pakistan. Les deux pays ont déclaré un moratoire sur les essais tout en restant réticents vis-à-vis d'un texte leur paraissant susceptible d'affaiblir, à terme, leurs capacités nucléaires.

Quant à la Corée du Nord, si elle s'est peu exprimée sur le sujet, elle semble toujours aussi déterminée dans son refus de signer le traité.

A ce premier facteur de blocage s'est ajouté le refus du Sénat américain, le 13 octobre 1999, de ratifier le traité. Ce refus compromet les perspectives d'entrée en vigueur d'un régime d'interdiction complète des essais nucléaires, non seulement parce que la ratification des Etats-Unis est elle aussi indispensable, mais également par l'effet que ce refus pourrait entraîner sur d'autres Etats signataires qui pourront notamment s'appuyer sur les arguments développés à Washington quant à l'absence de fiabilité du système de surveillance ou aux impératifs de sécurité nationale. Enfin, face à un régime d'interdiction hypothétique, certains Etats pourraient être tentés de reprendre les essais nucléaires. Signalons cependant que la Douma a autorisé, le 14 juin 2000, la ratification du traité par la Russie.

D'autre part, la négociation d'un traité universel, vérifiable et non discriminatoire d'interdiction de production de matières fissiles pour les armes nucléaires (fissile material cut-off treaty ou " cut-off ") , correspondait à un engagement politique pris en 1995 lors de la prorogation du traité de non-prolifération. Bien qu'inscrite à l'ordre du jour de la Conférence du désarmement, cette négociation n'a toujours pas pu démarrer, faute d'accord sur le mandat de négociation.

Des divergences sont en effet apparues, notamment entre les puissances nucléaires reconnues et le groupe des pays non alignés, sur la prise en compte ou non des stocks de matières fissiles déjà constituées, les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni souhaitant l'ouverture d'une négociation selon les termes du mandat Shannon, agréé en 1995, qui n'inclut pas les stocks de matières fissiles.

Par ailleurs, plusieurs Etats souhaitent lier l'ouverture de la négociation à la création d'enceintes multilatérales sur le désarmement nucléaire et sur la course aux armements dans l'espace.

II. LE DÉROULEMENT DES PROGRAMMES NUCLÉAIRES

L'abandon de la composante sol-sol, la fermeture des usines de production de matière fissile militaire, l'arrêt définitif des essais nucléaires et le démantèlement des sites d'expérimentation, la réduction du volume et de la posture d'alerte des composantes sous-marine et aéroportée ont entraîné une forte contraction, en très peu d'années, de notre force de dissuasion nucléaire , ajustée au nouveau contexte stratégique " dans le strict respect des principes de suffisance et de crédibilité ", selon les termes de la loi de programmation.

Cette diminution unilatérale du format des forces nucléaires et des moyens consacrés à la dissuasion rend d'autant plus indispensable la réalisation des deux objectifs assignés à nos programmes nucléaires :

- la modernisation et le renouvellement des composantes sous-marine et aéroportée,

- la réussite du programme de simulation indispensable, et l'absence d'essais en vraie grandeur, à la fiabilité et à la sûreté des armes futures.

A. LA MODERNISATION ET LE RENOUVELLEMENT DES COMPOSANTES SOUS-MARINE ET AÉROPORTÉE

1. La Force océanique stratégique

Les objectifs assignés à la force océanique stratégique arrêtés par la loi de programmation prévoient :

- la réalisation de 4 sous-marins lanceurs d'engins de nouvelle génération (SNLE-NG) appelés à prendre la suite des SNLE de type " Redoutable " et caractérisés notamment par une invulnérabilité accrue du fait de leur discrétion acoustique,

- le remplacement du missile balistique M 4 en service sur les SNLE de type " Redoutable " par le missile M 45 doté d'une tête nucléaire nouvelle, la TN 75,

- puis à échéance plus lointaine, le remplacement du M 45 par un missile plus performant, le M 51, équipé dans un premier temps (2008) de la TN 75 puis, en 2015, de la nouvelle tête océanique (TNO)

La force océanique stratégique se compose aujourd'hui de 4 bâtiments , nombre considéré comme le minimum indispensable pour assurer, compte tenu des cycles d'entretien, la permanence à la mer de 2 bâtiments si nécessaire, et ce afin de parer la neutralisation éventuelle de l'un d'entre eux.

Le premier SNLE-NG, le Triomphant, est entré en service début 1997. Le deuxième, le Téméraire, a été admis au service actif en décembre 1999. L'admission au service actif des deux derniers SNLE-NG est prévue à l'été 2004 pour le Vigilant et à l'été 2008 pour le Terrible, dont la commande est intervenue cette année.

S'agissant des missiles balistiques , l'actuelle dotation de missiles M4 ne restera en service que sur l'Indomptable, dont le retrait du service actif interviendra fin 2003. Les SNLE-NG Triomphant et Téméraire ont été équipés, dès ou peu après leur admission au service actif, du missile M 45 et de la tête nucléaire TN 75 de capacité de pénétration améliorée. Il en ira de même pour le Vigilant. L'autre SNLE de génération actuelle, l'Inflexible, qui devrait demeurer en service jusqu'à l'été 2006, est en cours d'adaptation pour être capable d'emporter le missile M 45 dès 2001.

A partir de 2008, la FOST sera dotée d'un nouveau missile, le missile M 51 , dont la portée avec un chargement complet en têtes nucléaires sera de 6 000 km, contre 4 000 km pour le M 45, ce qui permettra d'augmenter les zones de patrouille. Les missiles M 51 seront équipés dans un premier temps de la tête nucléaire TN 75 et des aides à la pénétration du missile M45, puis, à partir de 2015, de la nouvelle tête nucléaire océanique (TNO) et d'un nouveau système d'aide à la pénétration.

Rappelons qu'à la suite de la revue de programme, la durée du développement du missile M 51 a été réduite de manière à pouvoir équiper directement le Terrible, dès son admission au service actif à l'été 2008. Cet aménagement du calendrier devait se traduire par une économie globale de l'ordre de 5,5 milliards de francs sur les programmes SNLE-NG, M 45 et M 51 et imposera une optimisation des essais du M 51.

Après une première tranche de deux années de développement lancée en 1998, la négociation de la poursuite du développement du M 51 a mis en évidence, l'été dernier, de fortes divergences entre la Délégation générale pour l'armement et les industriels, en l'occurrence EADS-Launch Vehicles et ses sous-traitants (SNPE et SNECMA).

Ces divergences portent notamment sur la répartition de la prise en charge des aléas exceptionnels, sur la durée de l'engagement concernant la seconde tranche, conditionnant elle-même le montant du rabais que l'industriel entend consentir, sur la prise en compte de spécifications supplémentaires et de l'évolution en coût de travail.

Devant votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, le ministre de la défense et le délégué général pour l'armement ont estimé que le décalage de la notification de la poursuite du développement lié au différend entre les deux parties ne devait pas entraîner de perturbations sur l'activité des bureaux d'études de l'industriel, compte tenu d'un léger retard dans l'exécution du contrat portant sur la première tranche de développement. Ils se sont surtout déclarés confiants quant à l'issue favorable des négociations en cours depuis plusieurs semaines, un rapprochement des points de vue laissant espérer une notification de la poursuite du développement de ce programme avant la fin de l'année 2000 , comme cela avait été prévu dans la loi de finances de cette année.

Votre rapporteur n'entend pas prendre partie dans ce dossier complexe mais souligne l'absolue nécessité de lancer rapidement la poursuite du développement du M 51. Au-delà des problèmes sociaux susceptibles d'affecter les établissements industriels concernés, il s'agit surtout de ne prendre aucun retard sur un échéancier serré défini lors de la revue de programme, le M 51 devant équiper dès l'été 2008 le dernier SNLE-NG, le Terrible, dès son admission au service actif.

2. La composante aéroportée

La composante aéroportée de notre force de dissuasion constitue le complément nécessaire de la composante sous-marine et se caractérise par une mobilité et une souplesse d'emploi permettant de diversifier les modes de pénétration. Mise en oeuvre depuis le sol ou depuis le porte-avions, elle peut contribuer de manière plus visible à l'exercice de la dissuasion.

La composante aéroportée repose sur trois escadrons de Mirage 2000-N de l'armée de l'air et sur les Super-Etendard modernisés de l'aéronavale, qui emportent le missile air sol moyenne portée (ASMP), dont la portée varie de 300 km en haute altitude à 80 km en basse altitude et qui est équipé de la tête nucléaire TN 81.

La composante aéroportée sera entièrement renouvelée à partir de 2007 par l'entrée en service des Rafale Marine et Air, le remplacement de l'ASMP par l'ASMP amélioré (ASMP-A) et le remplacement de la TN 81 par la nouvelle tête nucléaire aéroportée (TNA).

Les tête nucléaires TN 81 commenceront à être retirées du service en 2007 pour être remplacées par les TNA.

La livraison du vecteur ASMP-A devrait intervenir à partir de 2008, le lancement du stade de réalisation ayant été annoncé début octobre 2000. Il bénéficiera du vecteur à stratoréacteur VESTA, mais à la suite de la suspension du programme de missile antinavires futur (ANF), la remise en cause du développement simultané des deux missiles rendra nécessaires des travaux complémentaires pour l'ASMP-A. L'ASMP-A se caractérisera par une portée et une capacité de pénétration des défenses nettement supérieures à celles de l'ASMP.

Enfin, la mise en service de la flottille des Rafale marine interviendra en 2010, tout comme celle du premier escadron de Rafale air, le deuxième escadron étant mis en service en 2016 et le troisième en 2017.

B. LE PROGRAMME DE SIMULATION

La mise en oeuvre du programme de simulation constitue le second impératif pour notre force de dissuasion car il conditionne la garantie de la fiabilité et de la sûreté des armes futures.

1. Les enjeux du programme de simulation

De l'ensemble des puissances nucléaires reconnues, la France se distingue en ayant à la fois renoncé juridiquement aux essais nucléaires, en ratifiant le traité d'interdiction complète des essais nucléaires, et renoncé matériellement et de manière irréversible à sa capacité d'effectuer de tels essais, en démantelant les installations du Centre d'expérimentations du Pacifique.

Le programme de simulation apparaît dans ce contexte comme indispensable à la garantie de la fiabilité et de la sûreté des armes futures, c'est-à-dire de celles qui remplaceront les armes actuelles sans avoir pu bénéficier des essais en vraie grandeur.

Votre rapporteur souhaite ici rappeler les principaux enjeux de la simulation :

- les armes subissent des phénomènes de vieillissement des charges qu'il importe de surveiller et dont il faut mesurer les incidences pour y remédier. En l'absence d'essais, la simulation permettra d'évaluer les conséquences du vieillissement des charges et contribuera au maintien de la durée de vie des armes actuelles, telle qu'elle est prévue jusqu'à leur remplacement ;

- les têtes nucléaires appelées à remplacer les charges actuelles seront définies à partir des concepts "robustes" testés lors de la dernière campagne d'essais, qui toléreront des écarts de modélisation ou de réalisation, limités par rapport aux engins testés. Mais seule la simulation permettra de garantir la fiabilité et la sûreté de ces charges nouvelles, garantie sans laquelle la dissuasion n'aurait plus la même crédibilité.

- enfin, à plus long terme, les concepteurs des armes qui assureront le renouvellement appartiendront à une génération n'ayant pas été confrontée aux essais en grandeur réelle. Au-delà des données recueillies lors de ces essais, la simulation leur fournira des calculateurs et des moyens expérimentaux adaptés (la machine radiographique AIRIX et le laser Mégajoule) leur permettant de confronter leurs calculs à l'expérience.

C'est à cette triple nécessité que répond le programme de simulation.

2. La mise en oeuvre du programme de simulation

La simulation permettra de reproduire, à l'aide d'expériences et de calculs, les phénomènes rencontrés au cours du fonctionnement d'une charge nucléaire.

La mise en oeuvre du programme de simulation repose sur de puissants moyens de simulation numérique fournis par des ordinateurs beaucoup plus performants que ceux actuellement en service, et sur des installations expérimentales permettant de valider les modèles physiques décrivant les phénomènes essentiels du fonctionnement des armes nucléaires : la machine radiographique AIRIX pour la visualisation détaillée du comportement dynamique de l'arme, et le laser Mégajoule pour l'étude des phénomènes physiques, notamment thermonucléaires.

La machine radiographique AIRIX , située à Moronvilliers dans la Marne, sera vouée à l'analyse de la dynamique des matériaux et elle permettra d'étudier le fonctionnement non nucléaire des armes, à l'aide d'expériences au cours desquelles les matériaux nucléaires sont remplacés par des matériaux inertes.

Projet de plus grande ampleur, le laser Mégajoule qui sera installé au Barp, en Gironde, est pour sa part destiné à l'étude du domaine thermonucléaire. Il permettra de déclencher une combustion thermonucléaire sur une très petite quantité de matière et de mesurer ainsi les processus physiques élémentaires. Le développement du projet doit s'effectuer en plusieurs étapes, avec tout d'abord la construction d'une ligne d'intégration laser (LIL) qui devra valider et qualifier la définition de la chaîne laser de base du laser Mégajoule.

Le calendrier du programme de simulation a été arrêté en fonction de plusieurs critères : d'une part, la relève des équipes de concepteurs actuels par des équipes n'ayant pas connu les essais nucléaires, qui implique la mise à disposition de ces dernières de moyens de simulation, et d'autre part les échéances de remplacement des charges nucléaires actuelles.

Le CEA a passé en début d'année 2000 un contrat avec la société américaine Compaq pour l'échat d'un super calculateur.

En ce qui concerne le laser Mégajoule, la ligne d'intégration laser, en cours de réalisation, devrait être mise en service fin 2001. La mise à disposition du laser mégajoule à pleine puissance a été avancée pour tenir compte des échéances de départ en retraite des équipes de concepteurs. Elle est désormais prévue pour 2008, les premières expériences d'ignition et de combustion thermonucléaire étant prévues pour fin 2010.

S'agissant de la machine radiographique AIRIX, une première phase est désormais achevée avec la réalisation de l'installation " un axe ", opérationnelle depuis cet automne. L'ensemble complet, qui implique la réalisation d'un second axe, devrait être opérationnel en 2011, le lancement de cette réalisation ayant été repoussée au-delà de 2007, ce qui impliquera de réaliser les travaux sur une durée inférieure à celle initialement prévue. Ce décalage est la contrepartie de l'avancement du calendrier de mise en service du laser mégajoule.

L'ensemble du programme de mise en place de moyens expérimentaux de simulation représente un coût global de 15 milliards de francs, dont 9,5 milliards de francs d'investissements et 5,5 milliards de francs de sous-traitance d'études et de développement. Depuis le lancement du programme, environ 4 milliards de francs ont été engagés pour l'acquisition de ces moyens.

Pour 2001, le programme de simulation (hors coût de personnel) mobilisera environ 850 millions de francs de crédits de paiement, dont 710 pour le laser mégajoule.

Votre rapporteur croit devoir souligner une nouvelle fois que la contrepartie indispensable aux engagements internationaux souscrits par la France et à ses initiatives unilatérales, réside dans le respect scrupuleux de l'échéancier et des enveloppes financières allouées à la simulation par la dernière loi de programmation militaire. C'est en effet sur la simulation que reposera la crédibilité de notre dissuasion, puisqu'elle seule permettra d'évaluer le comportement des armes et d'en garantir la fiabilité.

III. LES CRÉDITS DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE : UNE ÉROSION CONTINUE DES CRÉDITS

La révision de la posture nucléaire de la France devait logiquement se traduire par une diminution des ressources consacrées à la dissuasion nucléaire. Cette décrue, largement entamée au début de la décennie, est donc appelée à se poursuivre tout au long de la programmation, le part du budget de la défense consacrée aux forces nucléaires devant s'établir, en 2002, à moins de 20 % du titre V, contre 31,4 % en 1990 et 21,9 % en 1996.

Dans les faits, cette diminution a été beaucoup plus rapide que prévue, la part des crédits du nucléaire dans les dépenses d'équipement de la défense étant passée en dessous de 20 % dès 1999, réduisant à un niveau historiquement bas le budget de la dissuasion.

A. L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE : UN NIVEAU DE CRÉDITS HISTORIQUEMENT BAS

Les dotations consacrées à la dissuasion nucléaire en 2001 s'élèvent à 13,4 milliards de francs d'autorisations de programme (- 27 % par rapport à 2000) et à 15,6 milliards de francs en crédits de paiement
(- 1,8 %).
S'agissant des autorisations de programme, leur relèvement, en 2000, correspondait aux dotations relatives à la deuxième tranche du contrat de développement du M 51 et elles retrouveront, en 2001, le niveau très bas atteint en 1999. Les crédits de paiement poursuivent quant à eux l'érosion continue amorcée au début de la décennie, mais amplifiée par un net décrochage en 1998.

Le tableau ci-dessous illustre la décrue très rapide des crédits du nucléaire au cours des 10 dernières années. Il est exprimé en francs courants, mais si l'on tient compte de l'érosion monétaire, c'est-à-dire si l'on raisonne en francs constants, on constate que dès 1998, les crédits de paiement inscrits dans les lois de finances initiales ont atteint un niveau inférieur de moitié à celui de 1992.

Évolution des dotations consacrées au nucléaire depuis 1990
dans les lois de finances initiales

(en millions de francs courants)

Autorisations de programme

% du titre V

Crédits de paiement

% du titre V

1990

31 320

27,0

32 089

31,4

1991

31 333

27,0

31 066

30,1

1992

26 186

25,5

29 896

29,0

1993

21 824

21,2

26 447

25,7

1994

20 502

22,0

21 677

22,8

1995

19 464

20,5

20 745

21,9

1996

18 479

20,8

19 452

21,9

1997

20 116

22,7

19 149

21,6

1998

16 508

20,4

16 628

20,5

1999

13 336

15,5

16 624

19,3

2000

18 423

21,1

15 855

19,1

2001

13 443

15,9

15 568

18,7

Dès 1998, les crédits inscrits en loi de finances initiale ont nettement décroché par rapport à la loi de programmation.

Au cours de l'exercice 1998, le nucléaire a contribué pour plus du quart à " l'encoche " opérée dans les crédits d'équipement du budget de la défense. Un abattement supérieur à 2 milliards de francs avait été opéré, avec les conséquences suivantes :

- pour la FOST, le décalage d'un an du 3e SNLE-NG, l'étalement de l'adaptation opérationnelle des SNLE de génération actuelle ainsi qu'une réduction des travaux et rechanges, un moratoire d'un an sur le programme d'adaptation des SNLE-NG au missile M 51 et sur le développement du missile lui-même,

- pour la direction des applications nucléaires du CEA, le ralentissement des opérations de démantèlement de l'usine de production d'uranium enrichi de Pierrelatte et de la récupération des matières nucléaires, la réduction des programmes de recherche-amont et des programmes de simulation effectués avec les matériels actuels, ainsi que le décalage d'un certain nombre d'expérimentations (non-nucléaires) liées à la mise au point des charges de renouvellement.

Une réduction de crédits supplémentaire représentant pour les quatre annuités restant à courir de la loi de programmation (1999-2002), une économie globale de 3,4 milliards de francs a été décidée dans le cadre de la revue de programmes. Cet abattement représente près de 5 % de l'enveloppe prévue en programmation pour ces quatre annuités, ce qui ajouté à "l'encoche" pratiquée en 1998 aboutissait à réduire de 5 % par rapport à la loi sur l'ensemble de la période 1997-2002, les crédits consacrés au nucléaire.

L'essentiel des économies résultait cependant d'une optimisation des programmes SNLE-NG et M 51 , dont les calendriers ont été plus judicieusement aménagés. On remarquera que ces économies pourraient en partie être remises en cause à la suite des dissensions entre la DGA et EADS-LV sur la poursuite du développement du missile M 51.

La " revue de programmes " s'est également traduite par une réduction supplémentaire imposée aux crédits de maintien en condition opérationnelle et surtout une diminution de 20 % des crédits d'études amont consacrées à la dissuasion.

A ce stade, l'érosion des crédits du nucléaire n'affecte pas la réalisation des principaux programmes qui, sous réserve du règlement du différend sur le missile M 51, suivent actuellement les échéanciers prévus.

Peut-on pour autant considérer sereinement la baisse rapide des crédits consacrés au nucléaire ? Votre rapporteur ne le crois pas et voudrait exprimer deux motifs d'inquiétude.

Le premier touche aux conséquences non visibles aujourd'hui de cette érosion . Des abattements supplémentaires ont été opérés par rapport à ceux que prévoyaient la loi de programmation. Certes, ils n'ont pas affecté les grands programmes nucléaires. Ils ont en revanche pesé sur le financement de la recherche et, finalement, la préparation de l'avenir. Face à des budgets contraints, la gamme des domaines d'étude a dû être réduite et les choix technologiques sont de plus en plus souvent arrêtés sans bénéficier d'une évaluation préalable aussi large qu'auparavant. Il n'est plus guère possible d'étudier en parallèle plusieurs solutions techniques, ce qui conduit à trancher de manière anticipée entre diverses options. Dans un domaine aussi complexe et sensible que le nucléaire, il ne faudrait pas que cette tendance se prolonge, sous peine d'affecter insidieusement la qualité de nos capacités scientifiques et technologiques.

La deuxième inquiétude porte sur l'avenir du financement du nucléaire , une fois arrivé le terme de l'actuelle loi de programmation. La période 2003-2008 exigera une remontée des crédits de paiement pour mener à bien la réalisation d'équipements majeurs : le laser Mégajoule, le 4 ème SNLE-NG, les missiles M51 et ASMP-amélioré. De ce point de vue, la forte décrue opérée depuis 1997 ne nous place pas dans une situation optimale pour aborder la phase suivante de l'adaptation de l'outil de dissuasion. Votre rapporteur déplore une évolution défavorable du contexte financier qui pourrait fragiliser la cohérence des choix effectués en 1996, notamment si venait à être remis en cause le calendrier du programme de simulation.

Sans porter atteinte aux objectifs de modernisation définis en 1996, ce budget 2001 doit, en ce qui concerne la dissuasion nucléaire, nous inciter à la vigilance, tout particulièrement au moment où se prépare la prochaine loi de programmation militaire.

B. LES DOTATIONS CONSACRÉES AUX FORCES NUCLÉAIRES EN 2000

Les dotations consacrées aux forces nucléaires sont, pour l'essentiel, regroupées au sein du chapitre 51-71, une part résiduelle figurant au chapitre 52-81 " Etudes ", ainsi qu'au chapitre 54-41 " Infrastructures ". Elles sont réparties entre quatre gouverneurs de crédits : l'Etat-major des armées, la délégation générale pour l'armement, la Marine et l'armée de l'Air, une partie conséquente des crédits relevant de l'EMA et de la DGA étant cependant transférée au Commissariat à l'énergie atomique.

Evolution des dotations consacrées aux forces nucléaires

AP 2000

AP 2001

%

CP 2000

CP 2001

%

Armée de l'air

505

556

+ 10,1

796

610

- 23,4

Marine

3 523

4 170

+ 18,4

3 852

3 936

+ 2,1

dont programme SNLE-NG

1 485

1 901

+ 28,1

1 771

1 937

+ 9,4

FOST Hors SNLE

1 902

2 269

+ 19,3

1 967

1 999

+ 1,6

DGA

5 661

5 388

- 4,8

5 488

5 382

- 1,9

dont armement et propulsion nucléaires

5 419

5 106

- 5,8

5 181

5 106

- 1,5

Etat-major des armées

8 733

3 329

- 61,9

5 718

5 640

- 1,4

dont charges nucléaires

1 581

1 493

- 5,6

1 609

1 433

- 10,9

missiles stratégiques

1 876

1 045

- 44,3

1 784

1 267

- 29,0

programme M51

5 054

353

- 93,0

1 980

2 299

+ 16,1

Total

18 422

13 442

- 27,0

15 854

15 568

- 1,8

1. Les crédits transférés au Commissariat à l'énergie atomique

Les crédits transférés au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) sont destinés à financer trois types de missions :

- la conception, la fabrication et la maintenance des armes, qui constituent l'essentiel de l'activité militaire du CEA et comportent la production de la tête nucléaire TN75 équipant les SNLE-NG, le maintien en condition opérationnelle des têtes équipant la FOST et la composante aéroportée, le retrait des têtes de la composante sol-sol et des TN71 des SNLE de génération actuelle, le développement des futures têtes nucléaires océanique et aéroportée et enfin le développement de la simulation et des grands équipements associés (laser mégajoule, machine radiographique AIRIX),

- la fourniture de matières et surtout l'assainissement et le démantèlement des anciennes usines de production de matières fissiles de Marcoule et Pierrelatte.

- la mise au point des systèmes de propulsion nucléaire équipant les sous-marins et le porte-avions nucléaires.

Votre rapporteur tient à signaler une nouvelle fois que la subvention versée à la DAM, pourtant destinée pour une large part (environ 50 %) à couvrir des dépenses de personnel et de fonctionnement, demeure inscrite en totalité au titre V, le CEA ne disposant à ce titre d'aucun crédit au titre III, comme cela est prévu pour ses activités de recherche civile.

Globalement, les crédits de paiement transférés au CEA en 2001 s'élèveront à 6,5 milliards de francs. Les crédits affectés aux missions "armes" et "matières", gérés par la Direction des applications militaires (DAM), s'élèveront à 5,9 milliards de francs, soit 6 % de moins que le budget voté de 2000, alors que les crédits affectés aux programmes de propulsion navale s'élèveront à 554 millions de francs.

a) Le budget de la direction des applications militaires du CEA pour les missions " armes " et " matières "

On rappellera que la loi de programmation prévoyait pour la période 1997-2002 un transfert annuel de l'ordre de 6,4 milliards de francs au profit de la DAM, soit environ un total de 39 milliards de francs sur la durée de la programmation.

Au cours de l'exercice 1998 , " l'encoche " pratiquée sur la subvention " armes " et " matières " du CEA a été supérieure à 500 millions de francs. La " revue de programmes " a quant à elle arrêté de nouvelles économies représentant, pour la DAM, 1,3 milliard de francs de 1999 à 2002, portant à environ 2 milliards de francs les abattements opérés sur le budget total alloué aux missions " armes " et " matières " sur la période 1997-2002.

La dotation allouée aux missions " armes " et " matières " passera de 6 282 millions de francs en 2000 à 5 905 millions de francs en 2001, soit une diminution de 6 %.

La DAM a entrepris depuis 1996 une profonde restructuration et a réduit ses effectifs de 5 700 agents en 1996 à 4 575 en 2000. Cette réduction d'effectifs de plus de 1 100 postes a essentiellement concerné les sites de la région parisienne, les centres de Vaujours, Monthléry et Limeil ayant été fermés, seul subsistant, en Ile de France, le site de Bruyères le Chatel, employant environ 2000 agents. Plus de la moitié des agents seront désormais répartis sur les trois centres de province (Valduc, Le Ripault et le Barp) où sont implantés les moyens lourds d'expérimentation et de fabrication.

Le coût total de cette restructuration, qui a impliqué plus de 2000 mobilités , dont 1 500 à caractère géographique, est évalué à 780 millions de francs. Mais l'économie réalisée sur les dépenses de soutien a été perceptible dès 1999 et s'élèvera, pour 2000, à 270 millions de francs.

S'agissant des activités de la DAM, la répartition de son budget en 2000 était la suivante :

- 42 % pour la réalisation des programmes d'armes

- 17 % pour le programme de simulation et la réalisation des investissements associés (machine radiographique AIRIX et laser mégajoule),

- 13 % pour la fourniture de matières.

- 10 % pour les activités de démantèlement et d'assainissement des usines de production de la vallée du Rhône,

S'agissant de l'usine de Marcoule, qui assurait la production de plutonium pour les programmes militaires mais également le retraitement de combustibles de réacteurs civils, le démantèlement est assuré par Cogema, la contribution financière du ministère de la défense s'établissant au prorata des activités passées réalisées à son profit. Les crédits transférés à la DAM s'élevaient à ce titre à 393 millions de francs en 2000 et seront portés à 413 millions de francs en 2001.

En ce qui concerne les usines d'enrichissement d'uranium de Pierrelatte, toutes les opérations de mise à l'arrêt définitif devraient être terminées en fin d'année. Les opérations de démantèlement et d'assainissement ont représenté, pour la DAM, une dépense de 200 millions de francs en 2000, les crédits s'établissant à 254 millions de francs pour 2001.

Les abattements opérés sur le budget de la DAM depuis 1998 n'ont pas remis en cause les moyens affectés aux programme de simulation qui bénéficie d'une priorité afin de respecter les échéances fixées. Ils ont été en partie absorbés par la forte diminution des coûts de personnel et des frais généraux . Ils ont en revanche imposé un étalement des programmes d'assainissement ainsi que des choix draconiens pour les programmes de développements technologiques .

Votre rapporteur voudrait souligner l'inconvénient qu'il y aurait à trop " étaler " ces programmes d'assainissement, le poids des charges fixes, notamment de personnels, ayant intérêt à être allégé dès que possible. Dans ce contexte, on peut se demander si un mode de financement exclusivement budgétaire n'est pas inadapté.

b) Les programmes relatifs à la propulsion navale

Le CEA s'est vu confier un rôle important dans le domaine de la propulsion navale nucléaire , centrée dans un premier temps sur la Force océanique stratégique puis étendue aux sous-marins nucléaires d'attaque (SNA) et au porte-avions nucléaire Charles de Gaulle.

Les crédits relatifs à la propulsion nucléaire sont gérés par un service mixte , le Service technique mixte des chaudières nucléaires de propulsion navale (STXN) regroupant, outre le CEA, la Délégation générale pour l'armement et l'état-major de la Marine. Ce service est désormais placé sous la responsabilité de la direction des applications militaires.

Outre les activités relatives aux SNLE, aux SNLE-NG, aux SNA et au porte-avions (fabrication des coeurs et entretien des équipements nucléaires des bâtiments) l'un des enjeux principaux en matière de propulsion navale réside dans le programme de réacteur à essais (RES) destiné à remplacer, au centre d'études nucléaires de Cadarache, l'actuel réacteur d'essais (réacteur de nouvelle génération : RNG), qui arrivera en fin de vie à l'horizon 2004.

Un tel réacteur à terre est nécessaire pour développer de nouveaux composants pour les chaufferies futures, dont, en premier lieu, la chaufferie du sous-marin d'attaque futur Barracuda, et pour qualifier les combustibles nucléaires ainsi que les évolutions techniques des chaufferies nucléaires en service, évolutions rendues nécessaires par l'expérience acquise lors de l'exploitation, notamment pour améliorer la sûreté des réacteurs,

L'actuel réacteur RNG répondait à ce besoin, et a contribué à la formation des personnels chargés de la conduite et de la maintenance. Au cours des dernières années, certaines installations d'essai ont par ailleurs révélé les limites de leurs capacités à recevoir des adaptations en vue de leur remise à niveau. Leur obsolescence prochaine nécessite leur remplacement au cours de la prochaine décennie.

La concomitance de ces travaux avec le remplacement du réacteur RNG ont conduit à élargir l'objet du programme RES pour y inclure ces travaux complémentaires et assurer la cohérence de l'ensemble de l'opération et la nécessaire permanence des fonctions à remplir.

Sa réalisation contribuera par ailleurs au maintien de la compétence en propulsion navale nucléaire du CEA et des industriels associés (Technicatome et l'établissement d'Indret de DCN). En effet, ce projet assurera la continuité d'activité dans la période séparant les deux programmes de bâtiment à propulsion nucléaire, le porte-avions Charles-de-Gaulle et le sous-marin nucléaire d'attaque de nouvelle génération Barracuda.

Le RES disposera d'une puissance comparable à celle du RNG. Le programme RES comprend, pour une estimation globale de 3 900 millions de francs 1999 :

- le remplacement du RNG, qui reste la composante principale du programme aux plans technique et financier, et de ses servitudes, parmi lesquelles la piscine de stockage des éléments combustibles irradiés ;

- le renouvellement des installations d'essais neutroniques et d'expertise des éléments combustibles ;

- la mise à niveau des installations de formation et d'essais non nucléaires associées.

Le RES doit être mis en service en 2006, date cohérente avec la qualification des principaux composants de la chaufferie du Barracuda, dont l'admission au service actif du premier exemplaire est prévue vers 2010. Ce calendrier permettra la continuité des prestations actuellement fournies par le RNG, dont l'arrêt définitif interviendra entre 2004 et 2006.

Pour 2001, le programme RES se verra attribuer des dotations représentant 221 millions de francs en autorisations de programme et 225 millions de francs en crédits de paiement. Le respect des échéances nécessitera un relèvement significatif des crédits puisqu'une dépense annuelle de l'ordre de 550 millions de francs serait nécessaire de 2002 à 2005.

2. Les crédits consacrés à la force océanique stratégique et à la composante aéroportée

Les crédits de paiement affectés à la Force océanique stratégique , qui relèvent de la Marine, s'élèveront à 3,9 milliards de francs pour 2001, soit une progression de 2,2 % et seront principalement consacrés à la poursuite du programme de construction des SNLE-NG , qui absorbera 1,9 milliard de francs de crédits de paiement en 2001 et aux crédits d'entretien programmé du matériel de la FOST, de l'ordre de 1,1 milliard de francs.

Les autorisations de programme progresseront pour leur part de 18,4 % et s'élèveront à 4,2 milliards de francs, la dotation d'autorisations de programme consacré à la construction des SNLE-NG passant de 1,48 à 1,9 milliard de francs, compte tenu du lancement de la construction du Terrible, qui mobilisera plus de 850 millions de francs d'autorisation de programme (la commande du Terrible a été dotée en gestion 2000 de 620 millions de francs d'autorisations de programme et de 214 millions de francs de crédits de paiement).

Les crédits de paiement relevant de l' Armée de l'Air et consacrés au nucléaire se monteront à 610 millions de francs en 2001, contre 796 millions de francs en 2000. Ces crédits sont essentiellement consacrés à la maintenance et à l'adaptation des appareils de la force aérienne stratégique et de leurs systèmes de transmission, en particulier les Mirage 2000-N. Le retrait anticipé du système de transmission ASTARTE à la mi-2001 permet de générer des économies à partir de 2001.

En ce qui concerne les systèmes d'armes (hors têtes nucléaires), les crédits de paiement prévus en 2001 au titre du missile M45 s'élèvent à 72 millions de francs alors que le développement du M51 bénéficiera de 353 millions de francs d'autorisations de programme et de 2,3 milliards de francs de crédits de paiement. L'ASMP amélioré sera doté de 257 millions de francs en autorisations de programme et de 469 millions de francs en crédits de paiement, dont 148 millions de francs au titre du programme VESTA.

Les crédits d'études-amont de la DGA consacrés au nucléaire s'élèvent pour leur part à 286 millions de francs, soit 12,8 % de moins que l'an passé. Par rapport à 1999, la diminution de la dotation annuelle atteint 26 %. Votre rapporteur rappelle que la " revue de programme " avait abouti à une réduction de 20 % de ces dotations de 1999 à 2002.

CHAPITRE III -
L'ESPACE ET LE RENSEIGNEMENT MILITAIRES

Le renforcement des moyens consacrés aux programmes spatiaux et aux services de renseignement constitue un objectif prioritaire de l'actuelle loi de programmation, en raison du rôle majeur de la maîtrise de l'information dans la gestion des crises.

Votre rapporteur n'insistera pas sur la place capitale de ces deux domaines dans l'acquisition de l'autonomie stratégique. Il tient simplement à rappeler l'écart considérable, une nouvelle fois illustré lors du conflit du Kosovo, entre les capacités des Etats-Unis et celles de ses alliés européens en la matière, la France se situant cependant, au sein de ces derniers, parmi les mieux pourvus en moyens de recueil du renseignement et de communications. D'autre part, les ambitions affichées en matière de capacités militaires européennes passent par un effort beaucoup plus soutenu des pays membres, notamment en matière spatiale.

Sur ce plan, les perspectives apparaissent, en cette fin d'année 2000, un peu plus favorables qu'elles ne l'étaient les années précédentes.

Dans le domaine spatial, l'échec des coopérations européennes a perturbé la poursuite des programmes français, que ce soit en matière d'observation ou de télécommunications, mais plusieurs de nos partenaires semblent de nouveau manifester un intérêt pour les projets de satellites radars.

S'agissant des services de renseignement, ils bénéficient d'une augmentation régulière et continue de leurs moyens, en pleine conformité avec la loi de programmation.

I. L'ESPACE MILITAIRE : UNE AMORCE DE REDRESSEMENT APRÈS QUATRE ANNÉES NOIRES

L'espace militaire a certainement constitué le domaine où l'écart a été le plus fort entre les objectifs affirmés par la loi de programmation et les réalisations, compte tenu de l'échec des coopérations européennes qui a conduit à l'abandon de certains projets et à des retards sur d'autres.

Quelques mois après l'opération Force alliée au Kosovo, qui a montré l'importance des équipements spatiaux militaires, ceux-ci semblent revenir à l'ordre du jour des préoccupations européennes. La déclaration d'engagement de capacités militaires adoptée à Bruxelles le 20 novembre souligne les insuffisances portant sur le renseignement de niveau stratégique et mentionne les équipements satellitaires dont le développement est envisagé par plusieurs Etats membres.

Ce nouveau contexte européen apporte donc une lueur d'espoir dans un domaine où toute ambition passe par une politique de coopération extrêmement volontariste.

Le programme spatial français, fortement perturbé par les défections successives de plusieurs de nos partenaires, pourrait donc se poursuivre dans de meilleures conditions, l'effort de notre pays étant susceptible de s'intégrer, si les intentions de l'Allemagne et de l'Italie se confirment, dans une politique européenne cohérente de renforcement des moyens spatiaux.

Sur le plan strictement budgétaire, la France a dû assumer seule le financement de programmes initialement envisagés en coopération. Le budget spatial, bien que très inférieur aux objectifs de la loi de programmation, amorce une remontée après un point bas atteint en 2000.

A. UN REGAIN D'INTÉRÊT EUROPÉEN POUR LES PROGRAMMES SPATIAUX

1. Les déconvenues de la coopération européenne depuis 1998

Les trois années écoulées ont accentué l'isolement de la France, seule nation européenne à s'être engagée dans un programme spatial militaire significatif.

La principale défection est venue de l'Allemagne, qui n'a pas donné suite aux principes de coopération posés lors du sommet franco-allemand de Baden-Baden en décembre 1995. Faute de financement, elle ne s'est pas engagée aux côtés de la France dans le programme d'observation optique Helios II, ni dans le programme radar Horus, au sein duquel elle devait détenir une participation majeure.

S'agissant d'Hélios II, la France a cherché, sans succès, à compenser le retrait de l'Allemagne par une implication de ses deux partenaires sur Hélios I, à savoir l'Espagne et l'Italie, qui n'ont pas donné suite. La Belgique, également approchée, s'était déclarée intéressée mais a dû renoncer en raison de ressources insuffisantes. Ces défections successives n'ont toutefois pas remis en cause la poursuite du programme Hélios II dans un cadre purement national.

La coopération européenne a également échoué sur le programme de satellites de télécommunications Syracuse III. Le projet de coopération franco-germano-britannique Trimilsatcom a été remis en cause après le retrait, à l'été 1998, du Royaume-Uni qui a considéré qu'une solution nationale lui apportait de meilleures garanties pour son futur système. Quant à l'Allemagne, sa participation éventuelle n'est désormais envisagée que dans le cadre de la seconde étape du programme, lorsque sera lancé fin 2006 le second satellite.

2. De nouvelles perspectives en matière d'observation radar

L'abandon du programme Horus risquait de retarder à une échéance très lointaine toute perspective d'acquisition d'une capacité d'observation radar, pourtant indispensable et complémentaire des moyens d'observation optique.

Les conditions météorologiques au cours de la campagne du Kosovo ont fortement limité la contribution d'Hélios I à l'acquisition d'images, puisqu'il ne peut opérer que de jour et par temps clair. Ce handicap est très pénalisant sur les théâtres du centre et de l'est de l'Europe. L'intérêt de disposer d'une capacité d'imagerie radar est, de ce point de vue, confirmé.

Les progrès technologiques semblent aujourd'hui permettre d'envisager les réalisations de satellites radar de performances équivalant à celles d'Horus, mais plus petits et moins coûteux. Aussi l'abandon d'Horus ne ferme-t-il pas toute perspective d'acquisition de capacités d'observation radar.

En Italie, une loi-cadre votée par le Parlement envisage un projet dual Cosmo-Skymed (4 satellites radar et 3 satellites optiques), en cours d'étude par l'agence spatiale italienne et Alenia Spazio, qui, initialement dédié à la télédétection civile, pourrait également faire l'objet d'une application militaire. Sur la base de ce programme et de son homologue français Pléiades, proposé par le centre national d'études spatiales, des négociations sont en cours entre la France et l'Italie pour examiner une possibilité de coopération franco-italienne duale.

L'Allemagne, pour sa part, a manifesté sa volonté de développer un programme d'observation radar baptisé SAR-LUPE. Ce système serait composé de 4 à 6 mini satellites (classe 500 kilogrammes), munis de capteurs d'imagerie radar de résolution submétrique. La phase de définition devrait être lancée dans le courant du 4 e trimestre 2000 avec un objectif de mise en orbite du premier satellite en 2004. La constellation complète serait opérationnelle à l'horizon 2006.

L'ensemble constitué par Hélios II pour l'observation optique d'une part et Cosmo-Skymed et SAR-LUPE pour l'observation radar, pourrait constituer à un horizon relativement proche, l'armature d'un système d'observation satellitaire européen complet et cohérent .

Lors de la conférence d'engagement des capacités militaires de Bruxelles le 20 novembre dernier, les trois pays ont manifesté leur intention de mettre ces équipements au service de la politique européenne de sécurité et de défense. Par ailleurs, si nos partenaires allemands et italiens concrétisent leurs projets, la France pourrait négocier l'accès à la capacité d'observation radar en contrepartie d'un accès de l'Allemagne et de l'Italie aux images fournies par Hélios II .

B. L'AVANCEMENT DU PROGRAMME SPATIAL FRANÇAIS

1. Le programme spatial de télécommunications

Avec 4 satellites en orbite lancés entre 1991 et 1996 et 100 stations sol mises en service entre 1992 et 1997, le programme Syracuse II couvre les principaux besoins des armées en télécommunications vers les théâtres d'opérations extérieures.

Le quatrième satellite, lancé en 1996, a fait l'objet d'actions de complément afin de prolonger sa durée de vie jusqu'en 2006 , date à laquelle devra impérativement entrer en service un système successeur.

Du fait du retrait britannique du programme Trimilsatcom et de la volonté allemande de retarder ses engagements, la France doit faire face seule, du moins dans un premier temps, à la mise au point de ce système successeur Syracuse III . Rappelons que ce programme doit assurer la continuité du service -ce qui implique nécessairement la mise sur orbite du premier satellite au plus tard fin 2003- tout en assurant une zone de couverture plus large, en augmentant le nombre et le type de stations et en améliorant la capacité de résistance à la guerre électronique. La composante spatiale, qui devait comporter trois ou quatre satellites, selon les hypothèses de coopération, serait réduite à deux satellites dans le cadre d'un programme purement national, le nombre de stations au sol étant de l'ordre de 500, parmi lesquelles de nombreuses petites stations tactiques.

Les difficultés de la coopération européenne conduisent à envisager deux phases de réalisation :

- une première étape exclusivement sous maîtrise nationale en vue de mettre en orbite un premier satellite fin 2003 ; au cours de cette période, l'Allemagne, qui recherche une garantie d'accès à une capacité militaire, pourrait louer l'accès au système français ;

- une seconde étape en vue de satisfaire l'ensemble du besoin opérationnel, doit compléter la constellation à partir de la fin 2006. Cette étape pourrait être conduite en coopération.

Cette situation nouvelle conduit à une réévaluation du coût du programme pour la France , celui-ci ayant été chiffré à 13 milliards de francs en 1997 sur la base d'une coopération trilatérale.

2. Le programme spatial d'observation

Le système d'observation optique Hélios I est en service depuis 1995 et bénéficie, depuis décembre 1999, du second satellite Hélios I-B , ce qui permet d'accroître la cadence de renouvellement des images. Hélios I a été réalisé en coopération avec l'Italie (à hauteur de 14,1 %) et l'Espagne (7 %).

La poursuite du programme devait s'effectuer dans deux directions :

- assurer la continuité du système Hélios I par le système Hélios II, doté de la capacité infrarouge, permettant l'observation de nuit ; le premier satellite Hélios II doit être prêt au lancement au printemps 2004 et bénéficiera d'une résolution supérieure à celle envisagée initialement. Le deuxième satellite doit être disponible à l'été 2005.

- compléter ses capacités d'observation optique par un système d'observation radar capable d'opérer par tout temps.

L'abandon du programme Horus , dont l'Allemagne devait supporter 60 % du financement, laisse entière la question de l'acquisition de capacité d'observation radar.

Comme il a été indiqué précédemment, toutes les hypothèses de coopération européenne sur le programme Hélios II, avec l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne ou encore la Belgique, ont échoué , si bien que la France devra financer seule ce programme estimé, au coût des facteurs de 1996, à 11,5 milliards de francs. Toutefois, si l'Allemagne et l'Italie confirmaient le développement de satellites radars, le principe d'un échange de capacité pourrait être retenu, un accès à l'utilisation d'Hélios II étant consenti à ces deux pays en contrepartie d'un accès, pour la France, aux observations radars allemandes et italiennes.

C. LE BUDGET SPATIAL MILITAIRE

1. Une amorce de redressement

La loi de programmation avait alloué au budget spatial militaire une enveloppe de 20,7 milliards de francs sur la période 1997-2002, soit environ une moyenne de 3,5 milliards de francs par an et pendant six mois, représentant environ 4 % de l'effort d'équipement de la défense ;

D'année en année, les budgets successifs ont consacré l'abandon de ces objectifs.

Evolution des crédits de paiement consacrés à l'espace
en loi de finances initiale

(en millions de francs courants)

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Crédits de paiement

4 085

3 298

3 112

2 707

2 294

2 732

Evolution

+ 0,7 %

- 19,3 %-

- 5,6 %

- 13 ,0 %

- 15,3 %

+ 19,1%

Part dans les dépenses en capital

4,6 %

3,7 %

3,8 %

3,1 %

2,8 %

3,3 %

Le tableau ci-dessus illustre l'amorce d'un redressement après l'effondrement constaté de 1996 à 2000, les crédits consacrés à l'espace ayant pratiquement diminué de moitié en francs constants en quatre ans.

Leur part dans le budget de l'équipement de la défense, voisine de 4 % en début de programmation, n'était plus que de 2,8 % dans le budget 2000 et devrait atteindre 3,3 % en 2001.

2. Les crédits consacrés à l'espace dans le budget 2001

Les dotations consacrées à l'espace dans le budget 2001 s'établissent à 2 732 millions de francs en crédits de paiement et à 3 164 millions de francs en autorisations de programme. Il s'agit, par rapport à la loi de finances initiale pour 2000, d'une hausse de 19,1 % des crédits de paiement et de 52,8 % des autorisations de programme.

Le programme Hélios II absorbe à lui seul près de la moitié de ces crédits. La répartition des crédits de paiement entre les différents programmes est la suivante :

- Programme SYRACUSE II 371 millions de francs

- Programme SYRACUSE III 722 millions de francs

- Programme HELIOS I 219 millions de francs

- Programme HELIOS II 1 189 millions de francs

II. LE RENSEIGNEMENT : LA CONTINUITÉ DU RENFORCEMENT DES MOYENS FINANCIERS

Le budget de la défense pour 2001 traduit une remarquable continuité -le fait est suffisamment rare pour être souligné- dans le renforcement continu en moyens matériels et humains consacrés au renseignement.

Ce domaine avait en effet été reconnu comme prioritaire, tant par le livre blanc sur la défense que par la loi de programmation militaire, et fait également partie de ceux sur lesquels les pays européens, à l'occasion de la conférence de Bruxelles du 20 novembre, ont déclaré vouloir consacrer un effort accru à l'avenir.

Votre rapporteur évoquera l'évolution des principaux moyens dévolus au renseignement avant de présenter les dotations budgétaires pour 2001.

Il souhaite également rappeler que la question de l'implication du Parlement dans le domaine du renseignement semble ne pas avoir progressé depuis un an, malgré plusieurs initiatives parlementaires sur lesquelles le gouvernement n'a, pour l'instant, pas fait connaître son opinion.

Des propositions de loi ont été déposées au Sénat par nos collègues Nicolas About (n° 492, 1998-1999) et Serge Vinçon (n° 236, 1998-1999), alors que la commission de la Défense nationale de l'Assemblée Nationale a examiné à la fin de l'année 1999, une proposition de loi relative à l'instauration de délégations parlementaires pour le renseignement.

Ces propositions de loi s'accordent sur l'idée de créer une représentation parlementaire restreinte habilitée à entendre les responsables des services de renseignement et à recevoir des rapports périodiques sur leurs activités, tout en étant liées par des règles de confidentialité. Elles rejoignent l'esprit des propositions avancées depuis plusieurs années par votre rapporteur (cf. notamment avis n° 80, Tome IV, 1995-1996, pages 81, 82 et 98) et qui répondaient à un souci essentiel : conforter une activité reconnue à juste titre comme prioritaire en prenant mieux en compte le rôle du renseignement et en instaurant un climat de confiance entre la représentation nationale et des services essentiels pour la sécurité de notre pays.

A. L'ÉVOLUTION DES CAPACITÉS FRANÇAISES DANS LE DOMAINE DU RENSEIGNEMENT

1. Les principes guidant la politique du renseignement

Dans la perspective d'une implication croissante dans la prévention et le règlement des crises, la détention d'une capacité propre à acquérir et traiter le renseignement constitue l'une des clés de l'autonomie stratégique.

Le renseignement permet de déceler les crises émergentes et d'intervenir au plus tôt dans leur gestion. Cette anticipation stratégique repose sur des capacités de détection et d'évaluation des indices de crises ou de conflits ; elle doit permettre l'analyse de situation dont les éléments fondamentaux sont essentiellement constitués par l'existence d'une chaîne nationale d'acquisition.

La mise en oeuvre de la politique du renseignement vise à :

- organiser, coordonner la recherche du renseignement en fonction des priorités nationales ;

- collecter les informations grâce à des opérateurs humains et à une large gamme de capteurs spatiaux, aériens, navals et terrestres. Ces moyens complémentaires et très diversifiés par leur nature -optique, radar, interception et écoute des émissions radioélectriques- répondent également à des exigences de permanence, d'aptitude tout temps, de finesse d'observation ;

- traiter, analyser et exploiter les données recueillies dans des délais compatibles avec les besoins de la posture permanente de sûreté, de la prise de décision des autorités politiques et militaires, et, en cas de crise, avec le déroulement de celle-ci.

Dans les différentes phases d'une opération, le renseignement permet d'apprécier les intentions et la volonté de l'adversaire ainsi que ses possibilités de manoeuvre, et il contribue au choix du mode d'action le plus approprié.

La complémentarité et l'efficacité des capteurs ainsi que les capacités d'exploitation doivent permettre d'assurer le recueil des informations de toute nature, y compris les capacités de leurrage et de déception, d'intégrer les renseignements provenant des alliés et d'exploiter tous les renseignements dans des délais compatibles avec les actions planifiées.

Parallèlement, l'évolution des technologies dans le domaine des systèmes d'information et de communication contribue à l'explosion des réseaux et services de toute nature et modifie en profondeur l'environnement du renseignement, l'accès à l'information exigeant un investissement de plus en plus grand dans ces nouvelles technologies.

2. Les différents équipements consacrés au renseignement

En dehors du domaine du renseignement stratégique, relevant des systèmes d'observation satellitaire, plusieurs programmes sont destinés à renforcer les capacités des armées pour le recueil et l'exploitation du renseignement de théâtre ou du renseignement tactique.

Dans le domaine du renseignement d'origine électromagnétique, l'année 2000 aura vu la livraison du Sarigue-NG (Système aéroporté du recueil d'informations de guerre électronique de nouvelle génération), qui a succédé au DC8-Sarigue. Mis en oeuvre par l'escadron électronique de l'armée de l'air, cet appareil à long rayon d'action est voué au recueil de renseignements relatifs aux radiocommunications et aux radars. Une capacité de prise d'images photographiques est envisagée ultérieurement. Le programme MINREM (Moyen interarmées navalisé de recherche électronique) est pour sa part entré dans une première phase, avec le transfert sur le Bougainville des moyens dont disposait le Berry, retiré du service actif à la fin 1999. La seconde phase consistera à améliorer la capacité d'écoute de ce bâtiment, afin de l'adapter aux signaux des émetteurs de la nouvelle génération. Par ailleurs la rénovation des deux transalls Gabriel se poursuit et un nouveau détachement autonome des transmissions devrait être mis en service en 2001.

Pour le renseignement d'origine image , il est procédé à l'expérimentation du drone Hunter de construction israélienne, dont l'endurance est supérieure à 24 heures et qui pourrait également être utilisé pour la désignation d'objectif laser alors qu'est envisagée l'amélioration des capacités de reconnaissance des avions de combat (pod Presto).

S'agissant des drones tactiques, l'armée de terre a interrompu le programme Brevel, cet aérodyne de conception ancienne ne permettant en effet d'emporter qu'un seul type de capteur, ce qui en limitait l'usage à un seul type de mission. En l'attente de la réalisation, à l'horizon 2005, de drones tactiques multicapteurs multimissions, le système Crécerelle actuellement en service sera prolongé.

B. L'ÉVOLUTION DES MOYENS BUDGÉTAIRES CONSACRÉS AU RENSEIGNEMENT

Les crédits regroupés dans l'agrégat " Renseignement " progresseront de 7,4 % en 2001

Evolution des crédits de l'agrégat " Renseignement "

1997

1998

1999

2000

2001

2001/2000
(en %)

Personnel

574,8

602,4

651,8

690,7

740,4

+ 7,2

Fonctionnement

214,1

203,6

204,0

204,0

202,6

- 0,7

Titre III

788,9

806,0

855,8

894,7

943,0

+ 5,4

Titre V

651,0

561,0

667,0

680,0

748,5

+ 10,0

TOTAL

1 439,9

1 367,0

1 522,8

1 574,7

1 691,5

+ 7,4

Le budget 2001 se traduira par une hausse de 7,2 % des dépenses de rémunérations et charges sociales , liée à l'augmentation des effectifs, par une légère diminution des crédits de fonctionnement et par une poursuite de l'augmentation des crédits d'équipement. Depuis 1997, l'agrégat " renseignement " aura connu une augmentation globale de 17,5 %.

Ces données ne traduisent cependant qu'imparfaitement l'évolution des moyens consacrés au renseignement puisqu'ils ne recouvrent que la rémunération des effectifs civils de la DGSE, son fonctionnement courant et ses crédits d'équipement, ainsi que les crédits de fonctionnement (hors rémunération des personnels) et d'équipement de la Direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD).

Elles n'englobent pas les effectifs militaires de la DGSE, ni le budget de la Direction du renseignement militaire, ni les programmes d'équipement relevant de l'état-major des armées. Elles ne couvrent pas davantage les moyens de renseignement propres à chaque armée.

1. La direction générale de la sécurité extérieure

Chargée, selon les termes du décret n° 82-306 du 2 avril 1982 qui a procédé à sa création, "de rechercher et d'exploiter les renseignements intéressant la sécurité de la France, ainsi que de détecter et d'entraver, hors du territoire national, les activités d'espionnage dirigées contre les intérêts français afin d'en prévenir les conséquences", la DGSE voit ses moyens à nouveau augmentés par le budget 2000.

En ce qui concerne ses effectifs , les évolutions suivantes sont enregistrées :

- la DGSE bénéficiera de la création de 88 postes de civils, 50 emplois supplémentaires étant transférés de l'armée de terre et 15 autres provenant de la transformation de postes de sous-officiers de la Marine et de l'armée de l'air. Les effectifs de civils, qui se montaient à 2 647 agents en 1997, atteindront 3 037 agents en 2000, pour un objectif de 3 063 agents en 2002,

- les effectifs militaires diminueront légèrement, passant de 1 395 à 1 352 hommes (dont 150 militaires du Service technique de recherche avancée, directement rattachés à la DGSE depuis le ler juillet 1999). Les effectifs militaires devraient légèrement augmenter pour atteindre 1 369 postes en 2002.

Au total, les effectifs civils et militaires de la DGSE (seuls les civils étant rémunérés sur le budget de cette dernière) passent de 4 279 à 4 389 agents de 2000 à 2001, l'objectif à l'horizon 2002 étant un effectif de 4 432 agents.

Il faut ajouter que la question de la rénovation des statuts particuliers des différents corps de fonctionnaires de la DGSE, qui n'exigeait pas moins de 12 décrets, est en voie de règlement, seul restant à signer le décret relatif au statut des techniciens. Un projet de décret concernant les agents non titulaires est en outre à l'étude. Indépendamment de la transposition à la DGSE de mesures de portée générale, qui ont justifié cette procédure lourde de modification statutaire, d'autres mesures sont à l'étude, notamment la fusion de différents corps et l'évolution du statut particulier des chefs d'études.

Sur le plan budgétaire, les crédits de la DGSE atteindront 1,62 milliard de F (+ 7,7 %) et évolueront comme suit :

- les dépenses de rémunérations et de charges sociales s'élèveront à 740,4 millions de francs en 2001, soit 7,2 % de plus qu'en 2000 du fait de la création de 88 postes civils et du transfert de 65 emplois provenant des trois armées.

- les crédits de fonctionnement courant sont stabilisés et se monteront à 159,2 millions de francs (- 0,5 %), c'est-à-dire à un niveau inférieur d'environ 5 % à ceux de 1997. L'absence de relèvement de cette dotation a imposé de renoncer à certaines actions en matière de renouvellement de matériel informatique , de mobilier et de formation des personnels.

- les crédits d'équipement augmentent de 12 % et passent de 442 à 495 millions de francs, alors que les crédits d'infrastructure s'élèveront quant à eux à 227 millions de francs, soit une augmentation de 6,7 %.

L'extension des locaux du siège de la DGSE sur le site de la caserne Mortier, qui lui a été transféré en 1997, absorbera 38 % des autorisations de programme relatives aux infrastructures, plus du quart des dotations étant consacrées à l'aménagement des centres d'interception.

Votre rapporteur rappelle enfin que le budget de la DGSE tel qu'il est présenté n'inclut pas les crédits provenant des fonds spéciaux provenant des services du Premier ministre, et dont l'objet est de financer certaines activités opérationnelles. Le contrôle de l'utilisation de ces fonds est assuré d'une part par les services financiers de la DGSE elle-même et d'autre part par une commission spéciale de vérification composée de hauts magistrats de la Cour des comptes et du Conseil d'Etat.

2. La direction du renseignement militaire (DRM)

La DRM a été créée peu après la guerre du Golfe, en 1992, pour planifier, coordonner et conduire la recherche et l'exploitation du renseignement militaire.

La loi de programmation a prévu un renforcement progressif des effectifs de la DRM qui doivent augmenter d'environ 20 % sur la période pour atteindre près de 1 800 agents en 2002.

Actuellement, les effectifs de la DRM se répartissent comme suit :

- environ 740 personnes relevant de l'administration centrale et réparties entre Paris et la base de soutien à vocation interarmées de Creil,

- 375 personnes travaillant au sein du pôle de renseignement , situé à Creil et rattaché à la DRM, qui comporte 3 organismes : le centre de formation et d'interprétation interarmées de l'imagerie (CF3I) qui emploie 196 personnes, le centre de formation et d'exploitation des émissions électromagnétiques (CF3E) qui emploie 161 personnes et l'unité interarmées Hélios qui emploie 18 personnes.

- environ 290 personnes relevant de l'école interarmées du renseignement et des études linguistiques de Strasbourg.

- près de 300 personnes réparties dans les détachements avancés de transmissions installés en Afrique et outre-mer et chargés de procéder à des interceptions.

L'augmentation des effectifs d'ici 2002 permettra la montée en puissance du centre de diffusion du renseignement et le renforcement des personnels affectés au renseignement d'origine électromagnétique, que ce soit à Creil au CF3E ou dans les détachements avancés de transmissions qui devraient bénéficier de la création de 2 stations nouvelles en zone Antilles-Guyane et en Nouvelle-Calédonie.

Les crédits de la DRM (hors rémunérations et charges sociales) après une baisse de 11,6 % en 2000, passeront de 91 à 115 millions de francs, soit une hausse de 26 %.

Les crédits de fonctionnement s'élèveront à 39,8 millions de francs, soit 0,7 % de moins que l'an passé, ce qui, compte tenu de la baisse du taux de TVA, permettra un maintien des moyens.

Les crédits d'équipement s'élèveront à 75 millions de francs contre 51 millions de francs en 2000. Sur ce montant, une dotation sera notamment destinée au projet Sirius qui vise à optimiser la gestion et l'exploitation des moyens de recherche électromagnétique.

3. La direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD)

La DPSD est chargée d'assurer les responsabilités incombant au ministère de la défense en matière de protection et de sécurité du personnel, des informations, des matériels et des installations sensibles. Ses attributions couvrent notamment la prévention et la recherche des atteintes à la défense nationale.

Les crédits dévolus à la DPSD (hors rémunérations et charges sociales) se monteront pour 2001 à 70 millions de francs , soit une hausse de 0,6 % par rapport à 2000.

Les crédits de fonctionnement courant diminueront de 1,4 % et se monteront à 43,4 millions de francs.

Les crédits d'équipement (fabrications et infrastructures) se monteront à 26,6 millions de francs, soit 1 million de francs de plus qu'en 2000.

La loi de programmation a prévu une diminution d'environ 10 % des effectifs de la DPSD de 1997 à 2002. Dans cette optique, ceux-ci passeront de 1 543 à 1 490 postes de 2000 à 2001. L'an prochain, 63 postes d'appelés seront supprimés (37 au lieu de 100), ainsi que 3 postes d'officiers et 14 postes de sous-officiers. Les postes de militaires du rang engagés passeront de 68 à 84. En outre 11 postes de personnels civils seront créés (340 postes en 2001).

La plupart des tâches dévolues aux appelés du contingent seront redistribuées soit par un recours à la sous-traitance (sécurité des installations, restauration, entretien des locaux), soit par la mise en place de moyens techniques automatisés (caméras, alarmes) assurant les fonctions de surveillance. Cette politique nécessitera une augmentation des moyens de fonctionnement.

CHAPITRE IV -
LES AUTRES ACTIONS COMMUNES

I. LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT

Les crédits relevant de l'agrégat Délégation générale pour l'armement (DGA) s'élèvent à 13,9 milliards de francs pour 2001, soit une diminution de 3,8 % par rapport à l'an passé. On ne saurait toutefois se limiter à cette stricte approche budgétaire, d'autant qu'une part importante de ces crédits sont transférés en cours d'exercice hors du ministère de la défense. Au travers des programmes d'armement dont elle suit le déroulement, la DGA est en effet appelée à gérer environ 80 % de l'ensemble des crédits d'équipement de la Défense. L'amélioration de son efficacité, avec pour objectif la diminution de son coût de fonctionnement et du coût d'acquisition des équipements est au coeur de la profonde réforme engagée depuis 4 ans.

Votre rapporteur fera le point sur les premiers résultats obtenus, avant d'évoquer l'évolution des structures industrielles et des centres d'expertise et d'essais relevant de la DGA puis de commenter l'évolution des crédits pour 2001.

A. L'ÉVOLUTION DE LA GESTION DES PROGRAMMES D'ÉQUIPEMENT PAR LA DGA

Votre rapporteur souhaite effectuer un rapide bilan des résultats obtenus par la DGA sur trois points : la mise en oeuvre de nouvelles méthodes destinées à réduire le coût des programmes d'armement, la gestion de ces programmes et le développement de la coopération européenne.

1. Les nouvelles méthodes d'acquisition et la réduction des coûts

La DGA s'était engagée dans une action volontariste de diminution du coût des programmes d'armement, l'objectif s'échelonnant, selon les programmes, entre 30 % d'économies pour ceux entrant en phase de faisabilité et si possible jusqu'à 10 % pour ceux déjà en phase de production.

Les 85 programmes d'armement placés sous contrôle de gestion, qui représentaient, en 1996, un montant prévisible de 540 milliards de francs de dépenses, ont d'ores et déjà donné lieu, d'après le délégué général pour l'armement, à 57 milliards de francs d'économies, soit environ 10 % de leur coût initial, ces réductions de coût s'étalant bien entendu sur toute la durée de ces programmes, c'est-à-dire, pour certains d'entre eux, au-delà de 2010.

Parmi les méthodes utilisées, la DGA cite le " travail en plateau ", illustré par la démarche de conception à coût objectif suivie pour le sous-marin d'attaque futur Barracuda, qui a intégré les spécialistes de la DGA, de la DCN, de la Marine et les industriels, la réduction de délai d'une opération (par exemple pour la valorisation du véhicule de l'avant blindé, réduite de 8 à 6 ans), ou l'optimisation du maintien en condition opérationnelle (optimisation du renouvellement des propulseurs des missiles balistiques M4 et M45).

Le développement des commandes pluriannuelles globales , permettant d'engager plusieurs tranches de fabrication ou plusieurs annuités de développement, ont également permis des réductions de devis de la part des industriels en contrepartie d'un engagement à plus long terme de l'Etat.

Cette procédure a été inaugurée en 1997 pour cinq programmes : le missile de croisière air-sol Apache antipiste ; le missile air-air Mica ; la torpille franco-italienne MU 90 ; le missile de croisière air-sol Scalp EG et le développement du statoréacteur VESTA. Ces cinq commandes globales auraient permis d'obtenir une économie de l'ordre de 10 %.

Pour 1998 , la procédure des commandes globales a concerné six programmes : le système de combat de la frégate Horizon (PAAMS), les moyens de transmission des bases aériennes (MTBA), les moyens de transmission des garnisons de l'armée de terre (MTGT), les chars et dépanneurs Leclerc ainsi que le missile stratégique M51. L'économie obtenue pour ces six programmes est estimée à un peu plus de 6 %.

En 1999, trois commandes globales ont été passées pour 28 avions Rafale, 80 hélicoptères de combat Tigre et la modernisation de 13 chasseurs de mines, l'économie étant estimée à 10 %.

Pour 2000 , ont été notifiées les commandes globales relatives au programme AASM (armement air-sol modulaire), à une deuxième tranche de missiles MICA et au véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI). La commande globale d'une seconde tranche de développement du missile M51, espérée d'ici la fin de l'année, est toujours en négociation.

Pour 2001, les commandes globales envisagées concernent une commande complémentaire de 20 Rafale, par l'affermissement des tranches conditionnelles de marchés actuels, et l'avion de transport A400M.

Les commandes pluriannuelles globales depuis 1998

Matériel

Volume de la commande

Montant
(en millions de francs)

MTBA

18 systèmes fixes d'équipement des bases aériennes et 6 systèmes déployables

1 400

PAAMS

5 années de développement

1 100

Dépanneur Leclerc

15 dépanneurs

700

Missile M51

Deux années de développement

3 800

MTGT

99 systèmes de transmission des garnisons de l'armée de terre.

500

Char Leclerc

88 chars (regroupant des commandes de 1997 et 1998)

5 000

Rafale

28 avions de combat

9 600

Tigre

80 hélicoptères de combat

12 700

Chasseurs de mines

Modernisation de 13 bâtiments

837

NH 90

27 hélicoptères marine

8 134

AASM

496 kits de munitions

889

MICA

60 missiles

1 500

VBCI

65 véhicules blindés

2 300

Le développement, par ailleurs hautement souhaitable, de la procédure des commandes globales pluriannuelles se traduit par une tension accrue sur les autorisations de programme , le choix ayant été fait de privilégier la mobilisation des autorisations de programme disponibles, afin d'en résorber le stock, à la mise en place d'autorisations de programmes nouvelles.

Cette méthode atteint aujourd'hui ses limites. Déjà, elle a rencontré un certain nombre de difficultés, la passation de commandes globales ayant imposé la désaffectation d'autorisation de programmes précédemment attribuées à certains équipements. Il est clair que le stock d'autorisations de programmes disponibles, qui s'est considérablement résorbé ces dernières années, s'approche aujourd'hui d'un plancher, la contraction du " fonds de roulement " s'étant déjà traduite par des difficultés de mobilisation d'autorisations de programme.

Il est clair qu'à l'avenir, la passation de commandes globales ne pourra plus s'accommoder de ce prélèvement sur le stock d'autorisations de programme existant, sauf à entraver dangereusement le déroulement des programmes d'équipement. Cela est notamment vrai pour l'A400M qui exigera la mise en place de financements spécifiques.

2. La gestion par la DGA des crédits d'équipement des armées

Au cours des quatre dernières années, les conditions de gestion, par la DGA, des crédits d'équipement des armées, a fortement évolué, en raison de la réforme de la DGA elle-même, de la modification de la nomenclature budgétaire, de la généralisation de la comptabilité spéciale des investissements, de l'intervention d'un contrôle financier déconcentré comme dans les ministères civils, de la restructuration des opérations budgétaires en opérations budgétaires d'investissement et du déploiement, début 2000, d'un nouvel outil de comptabilité (Nabucco).

Malgré ces nombreux changements, les conditions de la gestion des crédits, marquée il y a encore trois ans par de fort reports de charges et des intérêts moratoires, s'est améliorée.

Evolution des crédits d'équipement gérés par la DGA

(en milliards de francs)

Exercice

Ressources disponibles

Paiement

Taux de consommation

1995

64,7

58

89,6 %

1996

63,9

61,5

96,2 %

1997

64,2

61

95,0 %

1998

57,5

55,2

96,0 %

1999

57,6

55,1

95,7 %

Quant aux intérêts moratoires, leur montant, qui s'élevait à 717 millions de francs en 1996, n'était plus que de 278 millions de francs en 1998, 200 millions de francs en 1999 et 49 millions de francs pour les 6 premiers mois de 2000.

3. La coopération européenne sur les programmes d'armement

La DGA a joué un rôle majeur dans la création, en 1996, de l'organisme conjoint de coopération en matière d'armement (OCCAR), qui regroupe actuellement l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni et la France. L'OCCAR entend revaloriser la gestion des programmes de coopération, par la mise en oeuvre de règles et de procédures inspirées des meilleures pratiques en vigueur dans les Etats-membres. Dans le domaine des acquisitions notamment, les quatre pays se sont mis d'accord sur des principes forts et structurants (mise en concurrence systématique dans tous les pays européens, extension à la concurrence extra-européenne en cas de réciprocité effective, abandon du juste retour industriel programme par programme...), totalement nouveaux par rapport aux pratiques traditionnelles de la coopération. La définition des modalités d'application de ces règles est bien avancée.

Le processus de ratification de la convention du 9 septembre 1998 venant de s'achever en Italie, l'OCCAR pourra enfin être dotée de la personnalité juridique internationale lui permettant de mettre en oeuvre ses principes d'acquisition.

L'adhésion des Pays-Bas à l'OCCAR est en cours et celle de la Belgique est examinée. L'Espagne et la Suède se sont également portées candidates.

Parallèlement, dans le prolongement de la lettre d'intention sur les restructurations des industries de défense du 6 juillet 1998, la France, l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni, l'Espagne et la Suède ont signé un accord cadre le 27 juillet 2000 à Farnborough. Cet accord offre un cadre politique et juridique commun pour mettre en place un environnement favorable à l'édification d'une industrie européenne plus compétitive et plus solide sur le marché mondial de la défense et d'un marché européen plus intégré. Cette initiative contribue ainsi à assurer au moindre coût la pérennité de l'approvisionnement des forces armées et à la construction d'une politique européenne commune de sécurité et de défense.

En levant des contraintes excessives, il s'agit en particulier de conforter la motivation des décideurs et des actionnaires à bâtir des sociétés transnationales en bonne santé financière, commercialement puissantes et technologiquement innovantes. Les Etats ont ainsi le devoir de prendre toute disposition pour faciliter la vie des entreprises de défense et les restructurations industrielles en adaptant leurs réglementations afin de définir des règles communes praticables.

C'est aussi le moyen de développer entre Etats une approche commune vis-à-vis de sociétés qui seront de plus en plus puissantes et de préserver ainsi les intérêts légitimes des Etats en matière de sécurité et de défense.

B. L'ÉVOLUTION DES CENTRES D'EXPERTISE ET D'ESSAIS ET DES STRUCTURES INDUSTRIELLES DE LA DGA

La DGA a entrepris une délicate adaptation de ses activités industrielles, d'expertise et d'essais, qui se traduit par une forte déflation des effectifs, et qui est dominée par la question de l'avenir de la Direction des constructions navales (DCN).

1. Les centres d'expertise et d'essais

Créée en 1997, la Direction des centres d'expertise et d'essais, qui constitue désormais, en terme d'effectifs, la principale direction de la DGA dans sa partie étatique, regroupe 20 centres de recherche et d'études, d'évaluation, d'expertise et d'essais qui dépendaient jusqu'alors de diverses directions.

Cette nouvelle organisation met en relief la mission assignée aux centres d'expertise et d'essais, qui est celle de jouer le rôle de prestataire de service au profit des autres directions de la DGA, mais aussi de développer une activité commerciale d'expertise auprès de clients extérieurs.

Par son poids en termes d'effectifs, la Direction des centres d'expertise et d'essais se situe au coeur de l'effort entrepris par la DGA pour réduire son coût de fonctionnement.

Dans ce cadre, plusieurs orientations ont été retenues :

- développer la "culture du client", généraliser la contractualisation et renforcer la présence auprès des services de programmes de la DGA,

- fournir des prestations globales et développer des pôles d'excellence,

- élargir la clientèle au delà du ministère de la Défense afin de mieux rentabiliser les moyens d'essais et de s'exercer à la concurrence : le "chiffre d'affaires" de diversification a atteint 119 millions de francs en 1997, 202 millions de francs en 1998, 237 millions de francs en 1999 et sera proche de 250 millions de francs en 2000 . Nous sommes encore loin de l'objectif de 500 millions de francs qui avait été assigné pour 2002.

L'analyse prévisionnelle de l'activité des centres d'expertise et d'essais pour la période couverte par la loi de programmation a fait apparaître une diminution d'environ 20 % de l'activité pour les besoins de la défense française , baisse qui atteindrait 30 % dans le secteur de l'aéronautique, alors que parallèlement s'ouvrira de plus en plus, du fait du développement des programmes de coopération, une concurrence de plus en plus affirmée entre les 150 centres d'expertise et d'essai existant en Europe . Ce contexte s'accompagne également d'une évolution des techniques, les essais étant souvent remplacés par des simulations moins consommatrices de main-d'oeuvre , et par une maîtrise d'oeuvre croissante des industriels sur les systèmes d'armes.

La DGA a donc entrepris une forte réduction des effectifs de la direction des centres d'expertise et d'essais qui sont passés de 12 000 personnes début 1997 à 9 310 personnes mi-2000. Cette diminution doit se poursuivre pour atteindre un niveau de près de 9 000 personnes en 2002.

Cette évolution sera normalement réalisée sans fermeture de site, compte tenu notamment des investissements qui y ont été réalisés, à l'exception du centre d'essais en vol de Brétigny, qui a été fermé en 1999 et dont les activités ont été réparties dans les centres d'Istres et de Cazaux.

Votre rapporteur avait évoqué l'an passé le projet de passage sous compte de commerce des centres d'expertise et d'essais, qui a été étudié au regard de la possibilité de faciliter l'évolution de leur mode de gestion vers les pratiques d'entreprises. Ce passage en compte de commerce n'est plus envisagé aujourd'hui, et les quatre derniers établissements de la DCE encore dans le périmètre comptable du compte de commerce de la DGN devraient rejoindre la zone budgétaire en 2001.

2. Le service de la maintenance aéronautique

Les trois ateliers industriels de l'aéronautique de la DGA, spécialisés dans la maintenance aéronautique militaire, sont regroupés depuis 1997 au sein du service de la maintenance aéronautique, directement rattaché au délégué général pour l'armement.

Ils prennent en charge les activités de maintenance qui ne peuvent être effectuées au sein des armées elles-mêmes, à l'exclusion de celles qui en raison de leur complexité sont directement confiées aux constructeurs.

L'atelier de Bordeaux est spécialisé dans la réparation des moteurs d'aéronefs, celui de Clermont-Ferrand dans la maintenance et la réparation d'aéronefs et d'équipements des armées de l'air et de terre, et celui de Cuers-Pierrefeu, dans la maintenance et la réparation d'aéronefs et d'équipements de l'aéronautique navale.

Ces activités sont gérées sous compte de commerce.

Au 31 décembre 1999, les effectifs des trois ateliers industriels de l'aéronautique, qui étaient de 3 600 personnes en 1997, avaient été ramenés à 3 327 personnes, dont 1 265 à Clermont-Ferrand, 1 088 à Bordeaux et 974 à Cuers-Pierrefeu.

3. La Direction des constructions navales : l'urgence d'une profonde évolution

L'adaptation de la Direction des constructions navales (DCN), aujourd'hui transformée en service à compétence nationale baptisé " DCN ", demeure la principale source de difficulté et d'inquiétude pour l'avenir au sein de la DGA.

Votre rapporteur souhaite tout d'abord rappeler les données essentielles des contraintes qui s'imposent aujourd'hui à DCN, confrontée à une baisse très importante de son activité de construction neuve au profit de la Marine nationale et à un tassement des activités d'entretien des bâtiments de la flotte. Cette diminution n'est pas compensée par les activités d'exportation, par nature fluctuantes et pour lesquelles, dans un marché de plus en plus concurrentiel, se pose un problème évident de compétitivité.

Face à cette situation difficile, DCN, deuxième acteur de la construction navale militaire dans le monde, reconnue pour sa haute technicité, doit impérativement entreprendre une profonde mutation si elle ne veut pas progressivement s'affaiblir. Il lui faut à la fois adapter ses effectifs à son plan de charge , pour trouver les conditions d'un équilibre économique, et opérer sa transformation d'une administration qu'elle est toujours en une entreprise compétitive.

Selon les informations fournies à votre rapporteur, le plan de charge prévisible de DCN évoluera d'ici 2001 comme l'indique le tableau ci-dessous.

Evolution du plan de charge de la DCN

(en millions d'heures )

1998

1999

2000 (estimation)

2001
(prévision)

Etudes et constructions neuves

7 204

4 458

3 525

3 251

Entretien

5 985

6 641

5 938

5 314

Export et divers

5 399

6 893

4 355

4 123

Total

18 588

17 992

13 818

12 688

Face à ces perspectives très difficiles, DCN a entrepris une réduction de ses effectifs , qui sont passés de 21 000 agents début 1997 à 16 410 début 2000, l'effectif prévisionnel de la fin 1999 étant de 15 270 , soit 1 140 postes de moins qu'en début d'année.

Cette réduction des effectifs a été obtenue par trois types de mesures :

- le dégagement des cadres applicable aux ouvriers ayant atteint l'âge de 55 ans et, depuis 1998, 52 ans (2 175 départs de 1997 à la mi-99),

- les départs volontaires indemnisés (408 départs),

- les mutations dans les armées et les services communs, particulièrement la Marine (1 272 départs).

Ces mesures sont financées par un fonds d'adaptation industrielle imputé sur le titre V de la Marine. Elles ont représenté 411 millions de F en 1997 et 404 millions de F en 1998. Elles sont estimées à 480 millions de F pour 1999 et pourraient atteindre 600 millions de F en 2000. Elles se décomposent comme suit :

- pensions, allocations différentielles et suppléments de pensions pour des personnels dégagés des cadres,

- indemnités de départ volontaire, allocations chômage, indemnités diverses d'aide à la création d'entreprises pour les personnels ayant opté pour le départ volontaire,

- indemnités de mutation, de déménagement, frais de formation et dépenses correspondant au maintien de la rémunération pour les personnels volontaires pour une mutation.

En ce qui concerne les mutations vers les armées , les candidatures se sont surtout manifestées la première année et dès 1998 , les candidatures se sont taries. En effet, aux problèmes géographiques s'ajoutent ceux liés aux profils des postes proposés par les armées, souvent peu qualifiés puisque destinés à remplacer des appelés. Enfin, il est probable que la perspective d'un départ anticipé dès 52 ans a découragé un certain nombre de candidatures. Seules 261 mutations ont été opérées hors de la DGA en 1998 et 118 seulement en 1999.

Ces éléments confirment que ces mesures, fondées sur le volontariat sont insuffisantes pour atteindre les objectifs de réduction d'effectif et permettre à DCN de rallier au plus vite le format qui la rendrait compétitive.

Rappelons que l'objectif retenu vise un effectif de 12 500 agents , étant précisé que l'application des 35 heures hebdomadaires pourrait conduire à réviser ce chiffre.

S'agissant de l' évolution des structures de DCN , les changements s'opèrent lentement.

Après la séparation des activités industrielles des activités dites " étatiques " de maîtrise d'ouvrage, qui relèvent désormais du service des programmes navals, une étape supplémentaire a été franchie avec le décret du 12 avril 2000, transformant la DCN en service à compétence nationale , retiré du périmètre de la DGA et rattaché directement au ministre de la Défense. Cette mesure ne modifie en rien la nature de DCN, qui demeure un service industriel de l'Etat et n'emporte aucune conséquence sur les modes de gestion . Elle ne présente donc, en elle-même, que peu d'intérêt, si ce n'est qu'elle s'accompagne d'une réorganisation de DCN en trois branches (constructions neuves, maintien en condition opérationnelle et systèmes de combat) et surtout d'une charte de gestion , conclue entre le ministère de la Défense et celui de l'Economie et des Finances, qui doit apporter des assouplissements en matière de code des marchés publics, de règles d'embauche, de règle de gestion et d'affectation du résultat.

Votre rapporteur rappelle que la transformation du mode de gestion de DCN, en particulier au travers d'une logique de résultat et non plus de coûts constatés et facturés à la Marine nationale, constitue un enjeu essentiel, pour l'exportation tout d'abord mais aussi pour le marché national. Une telle évolution n'est possible que si parallèlement DCN se voit autorisée à s'inspirer des règles de fonctionnement d'une entreprise pour son action commerciale et sa capacité d'autofinancement.

Au-delà des évolutions propres au statut de DCN, l'année 2000 aura vu l'amorce d'une restructuration du secteur de la construction navale militaire, le ministère de la défense et Thomson-CSF ayant annoncé leur intention de créer une société commune détenue paritairement par l'Etat et Thomson-CSF . Cette société a vocation à assurer la commercialisation et les fonctions de premier contractant pour les commandes de navires de guerre et de systèmes de combat à l'exportation et pur les programmes en coopération. Sur décision de l'Etat, la société pourra également être premier contractant de programmes nationaux ayant un potentiel d'exportation.

Le choix de Thomson-CSF pour cette alliance s'imposait compte tenu des nombreuses coopérations déjà engagées et réussies entre DCN et cette société. Thomson est en effet fournisseur de nombreux systèmes et équipements installés à bord des navires conçus et construits par DCN, les deux industriels étant déjà associés dans des sociétés communes (Eurotrop pour les torpilles MU 90 et Euroslat pour les systèmes de lutte anti-torpilles en partenariat avec la société italienne WASS, UDSI pour les systèmes de combat de sous-marins, SFCS pour le programme SAVARI). Enfin, Thomson-CSF a assuré le rôle de premier contractant des projets Bravo et Sawari II.

Les deux partenaires disposent d'atouts complémentaires, le savoir-faire de DCN pouvant s'appuyer sur le réseau commercial de Thomson-CSF, sur sa capacité d'ingéniérie financière et de mise en place des compensations industrielles demandées par les clients et sur son expérience dans le domaine des systèmes et équipements électroniques.

Votre rapporteur tient également à souligner le handicap considérable que constitue pour DCN son statut actuel, dans lequel sont confondues en la personne de l'Etat les fonctions d'employeur, d'actionnaire et de client. Pernicieux pour la gestion de DCN, ce statut l'était aussi au plan extérieur, du fait de l'incapacité actuelle de DCN de prendre part aux importantes restructurations industrielles entreprises dans le secteur de la construction navale marquées par la reprise du GEC-Marconi par British Aerospace et par les regroupements en Allemagne, notamment autour de HDW pour les sous-marins, qui a repris le Suédois Kockums, alors qu'est envisagée en Espagne, la privatisation de Bazan. DCN ne peut rester à l'écart de ce processus sans être progressivement marginalisé et sorti du marché. Compte tenu de son statut et de son absence de personnalité juridique, elle ne peut pas y participer directement. La future société commune avec Thomson-CSF l'y aidera.

Tout en saluant l'effort entrepris par l'actuelle direction de DCN dans le cadre du plan d'entreprise présenté au printemps dernier, votre rapporteur ne peut que marquer sa très vive inquiétude face au report à une échéance ultérieure de la question de l'évolution du statut de DCN, c'est-à-dire sa transformation en établissement public industriel et commercial ou en société nationale. Tout laisse à craindre en effet que l'adaptation de DCN risque de ne pas être suffisamment rapide pour donner les meilleures chances de préparer son avenir dans un contexte de concurrence accrue.

C. LE BUDGET DE LA DGA

1. L'évolution des crédits

Le montant des crédits alloués à la DGA pour 2001 s'élève à 13,974 milliards de F , contre 14,523 milliards de F dans le budget 2000.

Les dépenses ordinaires , dont le périmètre a fortement évolué, s'élèvent à 2,664 milliards de F, soit une diminution de 6,7 % par rapport à 2000.

Evolution des dépenses ordinaires de la DGA

(en millions de F)

2000

2001

%

Rémunérations et charges sociales

972

945

- 2,8

Fonctionnement courant

1 144

934

- 18,4

Subventions de fonctionnement

705

752

+ 6,7

Alimentation

7

8

+ 14,3

Total

2 828

2 639

- 6,7

La diminution des dépenses de rémunérations et charges sociales correspond au transfert sur les crédits de la direction de la fonction militaire et du personnel civil (DFP) du Secrétariat général pour l'administration de l'ensemble des personnels civils de la DGA, ce transfert étant effectif dès 1999 pour les fonctionnaires titulaires et contractuels et prévu en 2000 pour les ouvriers. Seuls sont désormais inclus dans l'agrégat DGA les crédits de rémunération et charges sociales des personnels militaires.

Les dépenses de fonctionnement courant connaîtront, après une forte diminution les années passées, une nouvelle et très sévère réduction de crédits (- 18,4 %).

Les subventions de fonctionnement augmenteront de 6,7 %.

La subvention de fonctionnement à l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA) s'élève à 325 millions de francs, soit 6,1 % de moins qu'en 2000. Elle est complétée au titre VI par une participation de 118 millions de francs (- 4,3 %) aux dépenses d'investissement et de 225 millions de francs (- 3,1 %) aux dépenses d'études. Globalement, les crédits affectés à l'ONERA s'élèveront donc à 668 millions de francs, soit 4,8 % de moins qu'en 2000.

La subvention de fonctionnement à l'Ecole polytechnique s'élèvera à 275 millions de F (+ 1,9 %), alors que la subvention d'investissement se montera à 29,4 millions de F (+ 14 %).

Les subventions aux écoles de la DGA seront nettement augmentées : 135,7 millions de F pour le fonctionnement (+ 52,3 %) et 65,5 millions de F pour l'investissement (+ 10,6 %).

Enfin, la participation aux dépenses de l'Institut franco-allemand de Saint-Louis, imputée au titre VI, diminuera de 13,8 % et s'élèvera à 114 millions de F.

Les crédits du titre V de la DGA s'élèveront à 9,4 milliards de F , soit 1,5 % de moins qu'en 2000.

Outre les crédits transférés à la direction des applications militaires du CEA, qui diminueront de 6 %, le principal poste de dépenses du titre V est constitué des études-amont , regroupées depuis 1998 sous la responsabilité de la DGA, qui bénéficieront en 2001 de plus de 2,9 milliards de F de crédits, soit un niveau sensiblement équivalent à celui de 2000.

Les crédits d'infrastructure, qui se monteront à 1,17 milliard de F, diminueront de 1,2 %.

Enfin, rappelons que sur le titre VI de la DGA est imputée une dotation de 1,25 milliards de F, qui fait suite à celles de 500, 900 et 1 500 millions de F respectivement inscrites en 1998, 1999 et 2000, transférée au budget civil de recherche et de développement , et ce en contradiction avec les dispositions de la loi de programmation.

2. L'évolution des effectifs de la DGA

Le tableau suivant retrace l'évolution des effectifs budgétaires de la DGA de 2000 à 2001, en distinguant les personnels relevant du budget de l'Etat proprement dit, et ceux relevant des comptes de commerce, ces derniers ne comportant plus les personnels de DCN, sortis du périmètre de la DGA depuis la transformation en service à compétence nationale.

Zone budgétaire 2000

Compte de commerce 2000

Total
2000

Zone budgétaire 2001

Compte de commerce 2001

Total
2001

Officiers

2 437

143

2 580

2 388

163

2 551

Sous-officiers

882

2

884

882

2

884

Volontaires

50

0

50

182

0

182

Contingent

103

0

103

0

0

0

Total militaires

3 472

145

3 617

3 452

165

3 617

Titulaires

5 573

874

6 347

5 494

742

6 236

Contractuels

3 475

509

3 984

2989

465

3 454

Ouvriers

5 361

2 888

8 249

4 605

2 903

7 508

Total civils

14 409

4 171

18 580

13 088

4 110

17 198

TOTAL GÉNÉRAL

17 881

4 316

22 197

16 540

4 275

20 815

On observera qu'en 2000, une réduction globale de 1 382 postes sera appliquée à la DGA. Elle portera presque exclusivement sur la zone budgétaire (- 1 341 postes).

Cette déflation des effectifs touchera les personnels ouvriers (- 741 postes) et les personnels civils non ouvriers (- 641 postes), alors que les effectifs des personnels militaires demeurent inchangés (- 103 postes d'appelés, - 29 postes d'officiers, + 132 postes de volontaires).

La diminution s'effectue par l'exploitation de l'ensemble des possibilités de départ basées sur le volontariat ou les mesures d'âge : préretraites, départs volontaires indemnisés, reclassements au sein d'autres administrations, mutations vers les armées et services communs.

On peut également signaler la montée en puissance des postes de volontaires (182 postes en 2001 pour une cible finale de 300 en 2002) destinés à des profils de poste de " haut niveau " analogues à ceux occupés par les scientifiques du contingent.

3. La réduction du " coût d'intervention " de la DGA

La DGA a pour objectif de réduire son " coût d'intervention ", notion économique qui retrace le coût de ses structures permanentes participant à son activité propre et des moyens mis en oeuvre pur assurer leur fonctionnement.

Tel que calculé par la DGA, selon une méthode qui a été affinée cette année, le coût d'intervention s'établira à 6,4 milliards de francs en 2000, soit une stabilisation par rapport à 1999 et une diminution de 5 % par rapport à 1998 et de 15 % par rapport à 1996.

La DGA entend obtenir une réduction des ces dépenses de l'ordre de 30 % sur la durée de la programmation grâce :

- à la maîtrise des dépenses de rémunérations et charges sociales, liée à la déflation des effectifs , qui a déjà concerné 3 900 personnes de 1997 à fin 1999,

- à la réduction des dépenses de fonctionnement courant (politique de rationalisation systématique du soutien par le regroupement des moyens au sein d'un établissement central de soutien, le resserrement des surfaces occupées, le redimensionnement du parc informatique, l'adaptation de la politique d'achat), qui atteint environ 30 % (600 millions de francs ) par rapport à 1996,

- au contrôle centralisé des investissements, afin d'évaluer l'opportunité et le coût de toutes les opérations significatives, étant précisé que le flux des investissements techniques a diminué de 40 % depuis 1996.

En 2000, les dépenses de personnel et de fonctionnement continueront à baisser sous l'effet de la poursuite de la déflation des effectifs et de la rationalisation des soutiens. En contrepartie, une hausse des dépenses d'investissement est attendue afin de rattraper le retard pris sur les engagements au cours des années antérieures.

II. LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES

Votre rapporteur a souligné depuis maintenant quatre ans l'ampleur, trop souvent méconnue, des changements auxquels se trouve aujourd'hui confronté le service de santé des armées, qui voit ses missions prioritairement orientées vers le soutien des opérations extérieures et procède à une profonde restructuration de son organisation hospitalière, de plus en plus ouverte sur le secteur civil, tout en devant remplacer une partie des médecins issus du contingent qui contribuaient de manière essentielle à son fonctionnement.

Il a vivement déploré que durant cette phase très délicate de mutation, les difficultés du service, notamment en matière de recrutement et de réalisation des effectifs n'aient pas été suffisamment prises en compte. Au cours de la même période, le service de santé a également vu son mode de financement évoluer, avec une forte diminution de ses crédits budgétaires et une place accrue des recettes tirées de l'activité hospitalière.

Pour la première fois depuis quatre ans, ces difficultés semblent bénéficier d'un début de prise en considération. Le déficit en personnel médical est aujourd'hui reconnu et le budget pour 2001 intègre quelques mesures malheureusement tardives et modestes. Quant aux crédits budgétaires, ils ne diminueront que très légèrement après trois années de forte réduction.

A. LES DIFFICULTÉS DE LA REORGANISATION ET LA PROFESSIONNALISATION DU SERVICE DE SANTÉ : UNE AMORCE DE PRISE DE CONSCIENCE

Votre rapporteur a effectué une analyse détaillée de la réorganisation et de la professionnalisation du service de santé dans le rapport d'information en date du 23 juin 1999 effectué au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (le service de santé des armées : les défis de la professionnalisation ; document Sénat n° 458, 1998-1999). Il a souligné que l'action du service de santé des armées s'inscrivait aujourd'hui dans un contexte à bien des égards très différent de celui des dernières décennies :

- la suspension du service national fait disparaître la charge considérable liée à la sélection et au suivi médical des appelés tout en privant le service de l'apport très important fourni par les médecins du contingent,

- les missions du service sont plus que jamais dominées par une priorité -le soutien médical et chirurgical des forces projetées- auquel il consacre une part croissante de ses moyens en personnels et en matériels dans le cadre de nombreuses opérations extérieures.

Il effectuera le point sur l'évolution de la restructuration du service et sur les difficultés de recrutement et de réalisation des effectifs.

1. La poursuite de la restructuration du service

La professionnalisation et la réduction du format des armées ont conduit le service de santé des armées à redéfinir sa politique hospitalière et la diminution de son parc hospitalier. Ce dernier sera constitué de 9 hôpitaux d'instruction des armées, les cinq derniers centres hospitaliers des armées étant fermés selon l'échéancier suivant :

- les centres hospitaliers Bayen à Châlons en Champagne, Forgue à Lamalou les Bains, Calmette à Lorient en 2000,

- le centre hospitalier Larrey à Toulouse en 2001,

- le centre hospitalier Le Bas à Cherbourg en 2002.

Parallèlement, divers organismes de soutien sanitaire ont été fermés, ces fermetures concernant en 2000 les établissements de matériels de mobilisation d'Ardentes, Douai, Nuits sur Armançon, Baden-Baden, Trèves et Donaueschingen.

La contraction du dispositif hospitalier s'accompagne d'une large ouverture à la clientèle civile et au service public, en vue notamment de conserver une activité importante et variée, gage d'un maintien de la compétence du personnel pour les missions de soutien médical au profit des forces. Les hôpitaux militaires se sont plus largement ouverts au secteur civil dans le domaine de l'urgence et dans des activités spécialisées telles que les soins aux brûlés.

La part du secteur civil au sens strict (sans compter les familles de militaires, les retraités et les civils de la défense nationale) dans l'activité hospitalière du service de santé est ainsi passée entre 1996 et 1999 de 47 % à 51 % pour les consultations, de 52 % à 57 % pour les hospitalisations, et de 59 % à 69 % pour l'activité des services d'urgence.

Si la mission prioritaire du service demeure le soutien aux forces armées, notamment lors des opérations de projection, la participation des hôpitaux militaires aux services publics hospitaliers continue de progresser, notamment grâce à des conventions établies avec le secteur civil.

Votre rapporteur précise que la place des hôpitaux des armées vis-à-vis du service public hospitalier doit faire l'objet d'une clarification législative, avec l'insertion de dispositions nouvelles dans le code de la santé publique. Ce dispositif est prévu par l'article 5 (paragraphe IV) du projet de loi de modernisation sociale déposé au Sénat le 24 mai dernier.

La volonté du service de santé de participer au service public hospitalier et le rapprochement avec le secteur hospitalier civil contribuent à maintenir les hôpitaux militaires au meilleur niveau, mais votre rapporteur estime qu'un point d'équilibre doit être défini afin de préserver le caractère prioritaire des missions militaires du service, de même qu'un équilibre devra être trouvé entre crédits budgétaires et ressources externes, ces dernières, aléatoires car dépendantes de l'activité hospitalière, ne pouvant prendre une part trop importante sans fragiliser le service et briser la cohérence qui a jusqu'à présent prévalu dans sa réorganisation.

2. La bonne marche de la professionnalisation se heurte aux difficultés de recrutement des médecins d'active

Compte tenu du rôle que jouaient les appelés du contingent pourvus d'une formation médicale ou paramédicale dans le fonctionnement du service de santé, la professionnalisation impose une politique de recrutement de médecins et de personnels paramédicaux civils et militaires, ainsi que la création d'un corps de chirurgiens dentistes d'active actuellement inexistant.

En raison de la durée des études médicales, seul un recrutement immédiat de médecins déjà formés était de nature à satisfaire les besoins générés par la disparition du contingent. Ce recrutement complémentaire se révèle pour le moment très insuffisant puisqu'en 1998, seuls 15% des postes offerts ont pu être pourvus. En 1999, sur 48 postes offerts, 10 seulement ont été pourvus. Cette situation inquiétante pourrait, si elle perdure, fragiliser le service de santé et aggraver dans de notables proportions un déficit déjà significatif en médecins d'active, surtout au sein des forces.

Ce déficit se creuse d'autant plus que l'on assiste depuis l'an passé à une accélération des départs de médecins . Ce phénomène, qui avait régressé jusqu'en 1997, s'amplifie désormais, le taux de départ par rapport à l'effectif global au ler janvier ayant atteint 4,9 % en 1999, et 6,2 % pour les spécialistes hospitaliers. La tendance à des départs plus nombreux et plus précoces s'accentue chez les chirurgiens, et surtout chez les radiologues et les réanimateurs, spécialités cruciales pour le soutien des forces.

L'étroitesse du vivier potentiel semble être la cause essentielle des résultats décevants du recrutement complémentaire de médecins pourtant indispensable. Outre un effort de communication, sans doute conviendra-t-il de réfléchir au niveau des soldes de médecins des armées, particulièrement en début de carrière, afin de renforcer l'attractivité des postes offerts.

Le fort déficit en personnels civils, lié à des départs massifs lors des restructurations et à l'impossibilité de les remplacer en raison des contraintes imposées au recrutement d'ouvriers et de fonctionnaires, est la seconde source de difficultés dans la mise en oeuvre de la professionnalisation. Elle crée, dans les hôpitaux des armées, des situations tendues auxquelles pourrait seul remédier un nécessaire assouplissement des conditions d'embauche.

La professionnalisation du service de santé s'accompagnera par ailleurs d'une importante simplification et rationalisation des statuts des personnels paramédicaux, l'actuelle mosaïque de statuts disparates étant à terme remplacée par deux statuts, l'un pour les militaires et l'autre pour les civils, inspirés de la fonction publique hospitalière.

Le tableau ci-après retrace l'évolution des effectifs du service de santé et leur réalisation au l er juillet dernier.

Evolution des effectifs du Service de Santé des Armées

Catégories

Effectifs budgétaires 2000

Effectifs réalisés l er juillet 2000

Ecart

Effectifs budgétaires 2001

Officiers

3 472

3 084

- 388

3 448

dont médecins

2 449

2 295

- 134

2 430

Sous-officiers

4 070

3 183

- 887

4 041

MDR engagés

200

119

- 81

230

Appelés

756

1 263

+ 507

548

dont médecins

148

325

+ 177

Volontaires

94

66

- 28

154

Civils

5 890

4 799

- 1091

5 840

Fonctionnaires

2 352

1 914

- 438

2 829

Ouvriers

3 538

2 885

- 653

3 020

Total

14 482

12 514

- 1 968

14 261

B. LE FINANCEMENT DU SERVICE DE SANTÉ : LA PRÉPONDÉRANCE DES RESSOURCES EXTRA-BUDGÉTAIRES S'ACCENTUE

Le budget du service de santé verra une nouvelle fois ses crédits budgétaires diminuer en 2001, la part du financement du service par les recettes de l'activité hospitalière étant désormais largement prépondérante, puisque supérieure à 60 %.

1. Un nouveau recul du budget du service de santé en 2001

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des crédits du service de santé depuis 1997.

Evolution des crédits du service de santé

(en millions de francs)

1997

1998

1999

2000

2001

2001/2000

Rémunérations et charges sociales


1 286,6


1 185,9


1 203,2


1 179,5


1 201,7


+ 1,8%

Fonctionnement courant

753,2

556,3

365,4

239,5

236,5

- 1,3 %

Total titre III

2 039,8

1 742,2

1 568,6

1 419,0

1 438,2

+ 1,4 %

Equipement

128,9

102,0

120,0

115,4

154,5

+ 33,9 %

Infrastructures

154,0

139,0

154,0

151

47

- 68,9 %

Total titre V

282,9

241,0

274,0

266,4

201,5

- 24,4 %

TOTAL

2 322,7

1 983,2

1 842,6

1 685,4

1 639,7

- 2,7 %

Le budget connaîtra une diminution de 2,7 % en 2001 , après celles enregistrées en 1998 (- 14,6 %), en 1999 (- 7,1 %) et en 2000 (- 8,5 %), ce qui conduit à sa réduction de plus de 29 % depuis 1997 .

Les dépenses ordinaires , qui constituent l'essentiel de ce budget et avaient très fortement diminué depuis quatre ans, progresseront de 1,4 %.

On rappellera que de 1998 à 2000, des mesures d'économies portant au total sur 620 millions de francs ont été appliquées aux dépenses ordinaires du service de santé, pour tenir compte des recettes externes de cessions de prestations médicales, qui permettent, par la procédure de fonds de concours, de compléter les ressources du service.

La très forte réduction des crédits de fonctionnement courant, qui sont passés de 753 millions de francs en 1997 à 365 millions de francs en 1999, puis à 239,5 millions de francs en 2000, est stoppée , puisqu'avec 236,5 millions de francs en 2001, ces crédits ne sont que légèrement en retrait par rapport à l'an passé, la dotation reflétant simplement l'effet mécanique de la réduction du format, de celle du taux de TVA et de l'ajustement des crédits de carburants.

Les dépenses de rémunérations et de charges sociales augmentent pour leur part de 1,8 %.

Cette augmentation intègre diverses mesures nouvelles destinées à améliorer la rémunération des médecins , représentant 15 millions de francs (3 millions de francs pour ce repyramidage destiné à faciliter l'avancement au grade de médecin principal, 11,3 millions de francs pour la rémunération des gardes et 1,5 million pour créer une prime de recrutement de médecins titulaires d'une thèse et à couvrir la revalorisation des primes spéciales et de qualification attribuées aux médecins, pharmaciens chimistes et vétérinaires biologistes (+ 1,217 million de francs).

S'agissant des effectifs, le service de santé enregistrera en 2001 la suppression de 24 postes d'officiers. Ce solde résulte de la suppression de 20 postes d'aumôniers, de 13 postes de MITHA officiers, de 34 postes d'OCTA et de 15 postes de pharmaciens, et de la création dans le même temps d'un poste de médecin, de 6 postes de vétérinaires et de 51 postes de chirurgiens-dentistes, corps nouvellement créé et destiné à accueillir des officiers précédemment rattachés au corps des pharmaciens chimistes. L'année 2001 verra également la suppression de 29 postes de sous-officiers et de 208 postes d'appelés et la création de 30 postes d'engagés et de 60 postes de volontaires.

Les effectifs civils, non rémunérés sur le budget du service de santé, passeront de 6 003 à 5 849 postes, mais 477 postes de fonctionnaires seront créés en contrepartie de la suppression de 518 postes d'ouvriers.

En ce qui concerne les dépenses en capital, les crédits de paiement se limitent à 201,5 millions de francs pour 2001, soit une diminution de 24,3 %.

Les dépenses d'équipement s'élèveront à 154 millions de francs (+ 34 %) et les dépenses d'infrastructures à 47 millions de francs (- 68,8%). Les autorisations de programme connaîtront en revanche une très forte augmentation, puisqu'elles passeront de 180,1 à 825,4 millions de francs. Sur ce montant, 646 millions de francs seront consacrés aux travaux de construction du nouvel hôpital d'instruction des armées Sainte Anne à Toulon. L'actuel hôpital sera en effet transféré en 2006 dans un bâtiment neuf sur le site de la caserne Grignan. Les premiers travaux doivent débuter cet automne, la construction proprement dite démarrant fin 2002. Le nouvel hôpital possédera une capacité de 352 lits. Sur le site actuel seront regroupés, à partir de 2006, les autres organismes du service de santé présents sur Toulon ainsi que divers organismes communs. L'ensemble de l'opération représente un budget global d'1 milliard de francs, dont 700 millions de francs pour le nouvel hôpital.

2. Un financement qui repose désormais très majoritairement sur les crédits de fonds de concours

Le financement du service de santé des armées repose sur deux catégories de ressources :

- les crédits budgétaires provenant des titres III et V du budget de la défense,

- les produits d'un fonds de concours qui regroupe les recettes des services hospitaliers, tirées des prestations médicales délivrées à leur clientèle, à l'exception bien entendu de celles qui sont prises en charge par la défense elle-même (soins consécutifs à une affection contractée en service).

Le tableau ci-dessous retrace de 1996 à 1999 l'évolution des parts respectives de chaque catégorie de ressources, et pour 2000 et 2001, le montant des crédits prévus en loi de finances initiale et les prévisions de ressources externes.

Evolution des ressources du service de santé

(en millions de francs)

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Ressources budgétaires

2 371,8

2 474,2

1 983,3

1 842,6

1 685,4

1 609,7

Ressources externes

2 067,6

2 299,6

2 547,6

2 589,3

2 618,8*

2 565*

Part des ressources externes

46,6%

48,2 %

56,2 %

58,4 %

60,8%

61,4

Total

4 439,4

4 773,8

4530,9

4 431,9

4 304,2

4 174,7

*Prévisions

Ce tableau montre la progression sensible des recettes de cessions de prestations médicales au cours des dernières années, et, du fait de la forte diminution des ressources budgétaires de 1998 à 2000, un net accroissement de leur part dans le financement du service de santé , qui pour la première fois en 1998 dépassait 50 %, pour atteindre, si les prévisions se réalisent, plus de 60 % en 2000 et 2001.

Depuis le ler janvier 1999, la clé de répartition des produits de fonds de concours a été établie à 90 % sur les crédits de fonctionnement et à 10 % sur les crédits d'investissement.

Votre rapporteur a souligné à de multiples reprises les implications d'une telle évolution.

Les ressources externes ont un caractère aléatoire , lié au niveau de l'activité qui peut baisser pour des motifs divers : fermeture d'un établissement, travaux ou restructurations diminuant temporairement le potentiel d'un établissement, ralentissement de l'activité des services en cas d'opération extérieure.

Ces ressources n'alimentent pas directement le budget du service mais transitent par un fonds de concours . Leur mise à disposition effective dépend des conditions du rattachement des produits du fonds de concours, variable d'une année sur l'autre. A cet égard, le rattachement tardif des fonds de concours peut créer des difficultés en début d'année, tout en empêchant la consommation intégrale des crédits avant la clôture de l'exercice budgétaire.

Enfin, le service de santé n'est totalement pas maître des tarifs qu'il oppose aux organismes de sécurité sociale et le volume du produit de l'activité remboursable, bien que modeste au regard de l'ensemble des dépenses de l'assurance maladie, pourrait à l'avenir être contraint par la politique de maîtrise des dépenses de santé, même si, jusqu'à présent, la tarification militaire hospitalière est demeurée en deçà des tarifs civils.

Certes, le rôle accru des recettes du fonds de concours peut renforcer la motivation des équipes hospitalières, directement intéressées à l'augmentation de l'activité, et a grandement facilité la modernisation de l'équipement des hôpitaux des armées.

A l'inverse, s'il prenait une part trop importante, il pourrait fragiliser le service de santé en le rendant trop dépendant de variations conjoncturelles qui, s'agissant d'un parc hospitalier réduit (9 hôpitaux et 3200 lits), peuvent être d'autant plus fortes . Rappelons que le prélèvement d'équipes chirurgicales appelées pour des opérations extérieures entraîne immédiatement des ralentissements d'activité et donc de moindres recettes. De même, s'il advenait qu'un soutien chirurgical lourd soit nécessaire en cas d'engagement des forces donnant lieu à des risques de pertes élevés, l'activité hospitalière civile serait momentanément mise en sommeil, avec de lourdes conséquences financières. Les missions " régaliennes " que doit avant tout assurer le service de santé ne sauraient être suspendues à de tels aléas.

Votre rapporteur observe qu'après trois années de réduction très forte -et à ses yeux excessive- les crédits budgétaires du service de santé seront pratiquement stabilisés en 2001. Il souhaite que cette stabilisation soit mise à profit pour examiner sérieusement l'ensemble des contraintes auxquelles le service de santé doit actuellement faire face, et en tout premier lieu ses difficultés de recrutement.

III. LES AUTRES SERVICES COMMUNS

A. LE SERVICE DES ESSENCES DES ARMÉES

Chargé du ravitaillement des forces en produits pétroliers, le service des essences est un service interarmées qui exerce son activité dans deux grands domaines :

- la cession de produits pétroliers aux armées et le soutien logistique "carburants" des forces engagées en opérations extérieures ou lors des manoeuvres et exercices.

- l'expertise dans son domaine de compétence technique (définition des spécifications et homologation de produits pétroliers nécessaires aux armées ; définition, réalisation, gestion et soutien des matériels pétroliers ; contrôle technique, notamment des infrastructures et des véhicules de transport de produits pétroliers).

Les crédits du service des essences progresseront de 3,1 % en 2001 et passeront de 564,3 à 581,8 millions de francs.

Les dépenses de rémunérations et charges sociales s'élèveront à 252,1 millions de francs, soit 2,9 % de plus qu'en 2000.

Cette augmentation traduit la progression des effectifs militaires du service, la suppression des 9 derniers postes d'appelés étant compensée par la création de 54 postes de militaires du rang engagés. La diminution des effectifs de personnel civil (1 009 au lieu de 1 039) est quant à elle sans incidence sur le budget du service, ces personnels étant rémunérés par la direction de la fonction militaire et du personnel civil.

Evolution des effectifs du service des essences

2000

2001

2002

MDR engagés

Appelés

Fonctionnaires

Ouvriers

778

9

389

650

831

0

399

610

850

0

399

610

Total

1 826

1 840

1 859

Le service des essences aura pratiquement atteint en 2001 le format prévu pur 2002. Il a retenu, en ce qui concerne ses personnels, une priorité à la "militarisation ", une partie des postes de personnels civils ouvriers et la totalité des postes d'appelés étant transformés en postes de militaires du rang sous contrat, et ce en vue de disposer des effectifs militaires nécessaires au soutien des forces en opérations extérieures . Les effectifs engagés par le service des essences sur les théâtres d'opérations extérieures dépassent régulièrement 100 personnes depuis 5 ans, avec des pointes à 170 personnes.

Les dépenses de fonctionnement courant s'établissent à 149,3 millions de francs, soit 2,9 % de plus qu'en 2000.

Les crédits d'équipements s'élèveront à 85,7 millions de francs
(+ 2,8 %) et les crédits d'infrastructure à 94,8 millions de francs (+ 4,2 %).

L'augmentation du nombre de véhicules pétroliers engagés en opérations extérieures (22 % des véhicules projetables du service), et l'obligation de mise aux normes des installations de stockage provoque de fortes contraintes sur le titre V qui, si elles perdurent, pourraient conduire à revoir le dimensionnement des moyens pétroliers projetables et à retarder la mise en conformité des installations.

Les enseignements tirés des opérations extérieures ont conduit le service à redéfinir les matériels dont il dispose. Dans certaines conditions d'emploi, les ensembles "tracteurs/semi-remorque citerne" se sont révélés peu adaptés. Le service des essences souhaite disposer de matériels plus "rustiques" utilisables en métropole comme sur les théâtres extérieurs, et interopérables avec les armées alliées. Il est ainsi équipé depuis 1996 de véhicules nouveaux : un avitailleur rustique, aérotransportable avec remorque et un camion citerne à forte motricité et tous chemins pouvant tracter une remorque, dont les derniers exemplaires ont été livrés en 1999. L'armée de terre a également commencé à obtenir la livraison de véhicules citerne sur châssis TRM aptes au ravitaillement des chars Leclerc et à l'avitaillement des hélicoptères.

L'adaptation du service des essences entraîne également une profonde réorganisation de ses infrastructures.

La totalité des dépôts situés en Allemagne a été fermée, ainsi que certains sites de métropole, notamment ceux de faible capacité ou ceux dont la mise en conformité avec les règles de protection de l'environnement s'avère trop coûteuse. Le service des essences privilégie la rénovation de certains sites, dotés de plus grandes capacités et mis à niveau, et si possible raccordés à des moyens de transport massif (oléoduc, voie ferrée).

Les moyens sont regroupés autour de pôles fonctionnels :

- la base pétrolière interarmées de Chalon-sur-Saône, pour la formation et l'entraînement des personnels,

- un pôle de soutien technique par regroupement autour du magasin central de Montereau des fonctions de réparation des matériels exercées par les trois ateliers lourds du service.

Depuis le début 1999, la hausse continue du cours du brut a entraîné une mise en consommation des stocks de carburants qui sont passées de 673 000 m3 le ler janvier 1999 à 591 000 m3 le ler janvier 2000 et 480 000 m3 en juin 2000.

B. LA DÉLÉGATION À L'INFORMATION ET À LA COMMUNICATION DE LA DÉFENSE (DICOD)

Créée en juillet 1998, la délégation à l'information et à la communication de la Défense (DICOD) a remplacé le service d'information et de relations publiques des armées (SIRPA).

La direction en a été confiée à un civil, qui a rang de directeur d'administration centrale, qui exerce en outre les fonctions de porte-parole du ministère et qui est assisté d'un délégué-adjoint issu pour sa part des rangs militaires.

Le décret du 27 juillet 1998 portant création de la DICOD précise ses attributions et indique notamment que l'action des différents organismes d'information et de communication placés sous l'autorité du chef de l'état-major des armées, du délégué général pour l'armement, des chefs d'état-major des trois armées et du directeur général de la gendarmerie doit s'inscrire dans le cadre de la politique générale définie par la DICOD.

Il précise également que "lorsque, pour faire face à une situation de crise, l'emploi opérationnel des forces est envisagé ou décidé, l'information relative à cet emploi est centralisée et conduite, selon les directives du ministre de la défense, par la DICOD. Dans le cadre de ces directives, le chef d'état-major des armées conçoit et conduit la communication de l'ensemble de la chaîne opérationnelle et donne des instructions à la DICOD" .

La réforme de la politique de communication du ministère se poursuivra en 2001, avec la modification du statut de l'Etablissement cinématographique et photographique des armées (ECPA). Afin de confirmer la distinction entre la maîtrise d'ouvrage de cette politique et la maîtrise d'oeuvre de la réalisation des instruments de communication, l'ECPA sera transformé en agence exécutive des instruments de communication de défense, avec un statut d'établissement public national à caractère administratif, sous la nouvelle appellation d'Etablissement de communication et de production audiovisuelle de défense (ECPA.D).

Pour 2001, le budget de la DICOD est en augmentation de 15,2 millions de francs (+ 19,2 %) et s'élèvera à 88,6 millions de francs, dont 34,3 millions de francs pour l'ECPA, répartis comme suit :

- crédits de fonctionnement : 67,8 millions de francs (+ 10 millions de francs), cette forte augmentation résultant de la poursuite du regroupement sous la responsabilité de la DICOD de crédits auparavant gérés par chaque armée pour les publications militaires (3,3 millions de francs transférés), et à l'augmentation (+ 8 millions de francs) des crédits de fonctionnement de l'ECPA.

- équipement : 18,7 millions de francs (+ 3,58 millions de francs)

- infrastructure : 2,07 millions de francs (+ 0,67 million de francs).

Alors qu'en 1997 et 1998, l'effort avait été porté sur la construction du centre de consultation multimédias de l'ECPA, l'augmentation des crédits d'équipement doit désormais permettre l'achat des matériels techniques nécessaires à cette médiathèque. L'effort de numérisation sera notamment intensifié.

CONCLUSION

Au terme de cet examen des dotations consacrées au nucléaire, à l'espace et aux services communs, votre rapporteur croit pouvoir formuler plusieurs observations.

Dans l'ensemble très divers formé par ces crédits, seul le renforcement des moyens humains et financiers des services de renseignement traduit une réelle continuité dans l'application des objectifs définis par la loi de programmation.

Dans d'autres domaines, votre rapporteur constate des évolutions positives, intervenant cependant après plusieurs années de dégradation. C'est le cas en matière d' observation spatiale , avec la perspective d'une concertation européenne aboutissant à l'édification d'un système complet et cohérent d'observation. On peut également se réjouir des évolutions, certes encore trop lentes, de DCN, notamment du rapprochement avec Thomson, même si l'adaptation des modes de gestion et la définition d'un statut plus approprié restent en suspens.

Votre commission relève que la dégradation continue des moyens affectés au service de santé , qu'elle déplore depuis 1998, a été stoppée et que les difficultés de ce service commencent -malheureusement trop tardivement- à être prises en compte. Le service de santé n'a pas fait l'objet de l'attention qu'il méritait au cours des trois dernières années et exigera, à l'évidence, compte tenu des multiples insuffisances qui persistent, un effort de redressement au cours des prochaines années. Une attention soutenue devra notamment être portée à la revalorisation de la condition des personnels, et en premier lieu des personnels médicaux .

Enfin, votre commission tient à manifester sa préoccupation face à l' érosion continue, et plus rapide que prévue, des crédits du nucléaire . Cette inquiétude ne porte pas sur le court terme, car les grands programmes sont financés, mais plutôt sur le moyen terme, car la modernisation de notre dissuasion et le maintien de sa crédibilité exigeront dans les prochaines années un relèvement de l'effort.

En conclusion, dans le domaine du nucléaire, de l'espace et des services communs comme pour l'ensemble du budget de la défense, les dotations pour 2001 souffrent du non-respect, pour la deuxième année consécutive, des engagements pris en 1998 sur la stabilisation des crédits d'équipement, alors même que se renouvellent des opérations aussi contestables que la ponction sur le titre V au titre du budget civil de recherche et de développement.

Pour cet ensemble de raisons, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis défavorable sur le projet de budget de la défense sur 2001.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent avis au cours de sa réunion du 15 novembre 2000.

A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. André Boyer a souligné la difficulté, pour le service de santé des armées, à concilier le maintien d'une activité hospitalière qui lui est indispensable et la participation aux opérations extérieures. Il a confirmé que les perspectives offertes par le secteur civil, notamment dans les spécialités telles que la chirurgie et l'anesthésie-réanimation, amenaient des spécialistes à quitter le service de santé des armées.

M. Philippe de Gaulle s'est interrogé sur les conséquences de la féminisation des effectifs de médecins militaires.

M. Christian de La Malène s'est inquiété du financement du programme de simulation nucléaire.

M. Xavier de Villepin, président, s'est étonné de la nouvelle contribution imposée à la défense au profit du budget civil de recherche et de développement. Il a demandé si la défense bénéficiait de retombées pour les crédits qu'elle transfère au Centre national d'études spatiales. Par ailleurs, il s'est demandé si les Etats-Unis et la Russie ne s'orientaient pas vers une moindre importance du nucléaire dans leur doctrine militaire.

En réponse à ces différentes interventions, M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- les difficultés du service de santé, soulignées par un rapport d'information de la commission présenté en 1999, ont été très insuffisamment prises en compte jusqu'à présent ;

- le programme de simulation, notamment la construction du laser mégajoule, se poursuit normalement, mais les besoins financiers iront croissant au cours de la prochaine loi de programmation, exigeant un redressement des crédits du nucléaire ;

- l'importance des contributions de la défense au BCRD est sans commune mesure avec la modicité des retombées que celle-ci peut en espérer pour ses programmes spatiaux ; ce prélèvement avait été en outre expressément exclu par la loi de programmation ;

- une éventuelle accélération de la réduction des arsenaux nucléaires américain et russe ne devrait pas entraîner celle de l'arsenal français, dimensionné dans une optique de stricte suffisance.

*

La commission a ensuite examiné l'ensemble des crédits du ministère de la défense pour 2000, au cours de sa réunion du 22 novembre 2000.

M. Xavier de Villepin, président, a tout d'abord indiqué que le projet de loi de finances 2001 pour la défense, fondé sur des dotations globalement reconduites par rapport à l'an passé, relativement favorable en son titre III, demeurait en revanche préoccupant pour les crédits d'équipement du titre V. Depuis 1997, a-t-il rappelé, et hors revue de programmes, ce sont quelque 12 % des dotations prévues pour l'équipement des armées, sur la durée de la loi de programmation, qui manquaient par rapport aux bases sur lesquelles le Parlement s'était prononcé. Le projet de budget 2001 pour la défense, en s'inscrivant aussi, comme l'an passé, dans cette logique, ne permettait aucun rattrapage.

Certes, a-t-il relevé, les dotations du présent projet de loi ne mettent pas en cause la réalisation des commandes et des livraisons de matériels de l'annuité 2001 de la loi de programmation. Les armées se trouvent cependant confrontées à deux types de rigidité du fait de ces contractions budgétaires répétées : d'abord, les commandes globales, fortement mobilisatrices d'autorisations de programme, ensuite, à enveloppe de titre V constante et contrainte, les dotations étant réservées prioritairement aux livraisons et aux commandes d'équipement, des crédits font défaut pour les dépenses d'entretien programmé des matériels entraînant un taux d'indisponibilité et de vieillissement des équipements particulièrement préoccupant.

Pour M. Xavier de Villepin, président, ce budget 2001, vraisemblablement comme celui de l'année prochaine (dernière annuité de l'actuelle programmation), augurait mal d'une loi de programmation 2003-2008 qui sera une loi de fabrication, venant après la présente loi de développement de programmes. En conséquence, les engagements financiers qu'elle comportera devront être significativement augmentés et impérativement tenus.

Enfin, le projet de loi de finances 2001, en ce qu'il n'était pas conforme aux engagements pris en 1998 en matière de ressources pour l'équipement des forces, donnait un mauvais signal à l'égard de nos partenaires européens. Alors que la situation économique et financière témoigne d'une certaine embellie, notre ambition politique en ce domaine n'est pas relayée par un volontarisme budgétaire satisfaisant, à l'inverse, notamment, de ce que font nos partenaires britanniques.

Pour ces raisons, M. Xavier de Villepin, président , a indiqué qu'il se rangerait à l'avis défavorable de la majorité des rapporteurs pour avis.

M. Serge Vinçon a souscrit à l'analyse formulée par M. Xavier de Villepin, président. Il s'est félicité de ce que la professionnalisation, engagée par la présente loi de programmation, se révélait un choix positif. Il s'est dit satisfait de voir que le titre III avait honoré les engagements pris à ce titre, tout en relevant que, désormais, l'amélioration nécessaire de la condition militaire devrait être mieux prise en compte. Il s'est, en revanche, déclaré inquiet des divers " décrochages " constatés au niveau des crédits d'équipement entraînant, notamment, un retard du programme Rafale pénalisant son exportation, ou encore un volontarisme budgétaire pour la défense inférieur à celui de nos partenaires britanniques.

M. Michel Caldaguès a estimé qu'il ne saurait se prononcer en faveur d'un budget qui ne tenait pas compte de ce que le Parlement avait voté. Il décelait là une manière, pour le ministère des finances, de " tricher " sur les crédits de défense. Au surplus, il a estimé que, dans un contexte où la France affichait une ambition mondiale pour l'emploi de nos forces, les ressources financières n'étaient pas à la hauteur de l'objectif recherché.

La commission a alors émis un avis défavorable sur l'ensemble des crédits du ministère de la défense inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page