III. UN BUDGET QUI NE TRADUIT PAS LA PRIORITÉ AFFICHÉE POUR LA SÉCURITÉ

Le projet de budget de la police nationale pour 2001 s'établit à 31,989 milliards de francs, ce qui, à structure constante 8 ( * ) , correspond à une progression en francs courants de 1,86%.

Cette progression est à peine supérieure à celle de 1,6% de l'ensemble des dépenses civiles de l'État et elle est largement inférieure à celle du budget pour 2000 (3,02%). Contrairement aux intentions affichées, ce budget ne traduit donc pas une priorité en faveur de la sécurité des français.

La part du budget de la police s'établit à 1,88% du budget de l'État et peut être évaluée à 0,32% du produit intérieur brut.

A. DES DÉPENSES DE PERSONNEL EN FAIBLE AUGMENTATION

Les dépenses de personnel représentent plus de 80% des crédits. Elles s'établissent à 26,45 milliards de francs, soit une augmentation, hors charges sociales de moins de 0,9%%, dans un contexte d'absence de revalorisation du point de la fonction publique.

1. Des effectifs budgétaires en diminution et une gestion sous tension

a) Les effectifs

Les effectifs budgétaires de la police nationale s'élèveront en 2001, hors adjoints de sécurité, à 128 453 agents, dont 113 013 personnels actifs. En incluant 20 000 adjoints de sécurité, on dénombrera au total 148 453 agents contre 149 881 en 2000.

Ainsi que l'annonce le ministère de l'intérieur, on constate une hausse de 0,5% des effectifs budgétaires, hors adjoints de sécurité et policiers auxiliaires. Or, compte tenu de la disparition en 2001 des policiers auxiliaires, induite par la professionnalisation des armées, l'effectif budgétaire total de la police nationale régresse de près de 1%. On constate également une légère diminution de l'effectif budgétaire des personnels actifs (-39 agents).

Effectifs budgétaire de la police (2001)

Personnels actifs :

113 013

Emplois de direction

90

Commissaires

2 037

Officiers

15 683

Gardiens et gradés

95 160

Contractuels et agents de statut local

43

Personnels administratifs et techniques

13 932

Ouvriers

1 508

Adjoints de sécurité

20 000

TOTAL

148 453

b) Les créations et transformations d'emplois

Le projet de budget prévoit les transformations et créations d'emplois suivantes :

- la transformation de 200 emplois d'officiers en emplois de gardiens et brigadiers majors dans le cadre du repyramidage des corps actifs initié par la réforme des corps et carrières intervenue en 1996 dans le droit fil de la loi d'orientation du 21 janvier 1995. Dans son rapport sur la fonction publique en date du 10 janvier 2000, la Cour des comptes avait souligné que les objectifs fixés n'étaient pas tenus. En tout état de cause, il importe que la déflation des corps de commissaires et d'officiers au profit du corps des gardiens et gradés reste compatible avec les besoins en officiers de police judiciaire ;

- la création de 800 postes de personnels administratifs et techniques : 150 informaticiens, 550 emplois administratifs ainsi que 100 emplois de police technique et scientifique pour un montant de 96,4 MF.

Cette mesure a pour objectifs essentiels de remettre des policiers sur le terrain, de renforcer la police technique de proximité et de donner des moyens supplémentaires à la police judiciaire dans le cadre de la mise en oeuvre du fichier automatisé des empreintes génétiques créé, en application de la loi du 17 juin 1998, par le décret n° 2000-413 du 18 mai 2000.

Comme il a été indiqué plus haut, ces créations de postes ne suffiront pas à rattraper le retard sur l'objectif, fixé par la loi d'orientation du 21 janvier 1995, de création en 5 ans de 5 000 emplois administratifs et techniques, dont 4 300 emplois administratifs. Entre le 1 er janvier 1995 et le 1 er janvier 2000, seuls 1 077 emplois de ce type ont été créés, dont 466 emplois administratifs ;

- 37 emplois d'officiers seront transformés en 36 emplois d'attachés de police.

c) Une inquiétante évolution prévisionnelle des effectifs

Du fait des recrutements massifs intervenus à la fin des années 60 et au début des années 70, la police doit faire face à un afflux de départs à la retraite , aggravé par le phénomène, jusqu'à présent sous-estimé, des prises de retraite anticipée .

En application de la loi du 8 avril 1957, les agents peuvent en effet, s'ils justifient de vingt-cinq ans de service, solliciter leur départ à la retraite cinq ans avant la limite d'âge de leur corps. Les gradés et gardiens peuvent donc, en application de cette règle dite de la " bonification du cinquième " partir à la retraite dès 50 ans.

Les années précédentes, plus des deux tiers des agents du corps de maîtrise et d'application et près de la moitié des commissaires partis à la retraite ont bénéficié de ces dispositions.

Les flux de départ culmineront en 2002.

Le repyramidage des corps crée en outre des besoins supplémentaires de recrutement pour le corps de maîtrise et d'application qui voit ses effectifs augmenter.

D'ici 2006, devront ainsi être recrutés plus de 29 000 policiers, dont 25 000 agents du corps de maîtrise et d'application, soit le quart de ce corps.

Compte tenu de la durée de formation, il existe un décalage d'un an entre le recrutement d'un agent et sa prise de poste. Pour éviter une désorganisation totale des services, il est indispensable de prévoir un lissage des recrutements. A ainsi été autorisé, au mépris de la stricte orthodoxie budgétaire, le recrutement en surnombre de 1190 gradés et gardiens en 1999 et de 1000 pour l'année 2000.

Il est essentiel que des recrutements par anticipation puissent également intervenir en 2001.

Le budget 2001 contient en outre, comme celui de 2000, des mesures améliorant les fins de carrière des agents de manière à limiter les départs à la retraite anticipée.

Par ailleurs, il convient de ne pas sous-estimer l'impact que pourrait avoir sur la police, la réduction à 35 heures du temps de travail dans la fonction publique prévu par le décret du 25 août 2000 . Les négociations sur le sujet devraient aboutir dans le courant de l'année 2001.

2. D'importantes mesures catégorielles

La police nationale obtient en 2001 une enveloppe catégorielle de 160 MF, plus importante que celle des années précédentes.

a) La réforme du régime indemnitaire des agents du corps de maîtrise et d'application

Pour sa plus grande part (125 MF), l'enveloppe sera consacrée à la mise en place de la réforme du régime indemnitaire des agents du corps de maîtrise et d'application .

Après la création par le décret du 25 mars 1996 de l'allocation de service des commissaires et la mise en oeuvre, en 1998, de la prime de commandement au profit des officiers, il est en effet envisagé de réformer profondément le système indemnitaire des agents du corps de maîtrise et d'application à compter du 1 er janvier 2001. Les principes retenus sont à la fois de regrouper de multiples indemnités dans un souci de simplification, de moduler le montant de la rémunération en fonction du lieu d'affectation des personnels et de favoriser l'exercice de missions de police de proximité. Le système serait organisé à trois niveaux :

- une allocation de service attribuée à chaque agent du corps de maîtrise et d'application, réunissant les primes actuellement versées de façon forfaitaires (indemnité de sujétions spéciales, prime pour service continu) ;

- une prime " Ile-de-France ", au profit des agents exerçant dans les ressorts des secrétariats généraux pour l'administration de la police (SGAP) de Paris et de Versailles, y compris les fonctionnaires des services centraux. Cette prime regroupera les actuelles indemnités pour postes difficiles, pour sujétions exceptionnelles et pour charge d'habitation ;

- une prime de police de proximité accordée aux agents exerçant des missions de police de proximité.

La création de la prime de proximité se heurte à l'opposition des représentants du corps de maîtrise et d'application. Ces derniers craignent en effet que cette prime entraîne un fractionnement du corps et font ressortir que l'ensemble des personnels, et non seulement ceux qui l'exercent sur le terrain, concourent à la réussite de la police de proximité.

b) Les autre mesures catégorielles

Les autres mesures catégorielles concernent :

- une provision de 12,66 MF au bénéfice du corps de commandement et d'encadrement . Cette somme ne représente qu'une centaine de francs par personne.

A cet égard, votre rapporteur tient à souligner à nouveau le malaise profond qui semble actuellement régner dans le corps des officiers . Ces derniers sont appelés à exercer des responsabilités de plus en plus lourdes du fait du repyramidage des corps. Plusieurs circonscriptions de sécurité publique ont ainsi actuellement à leur tête un commandant. Ce corps estime avoir été lésé à plusieurs titres à travers la réforme des corps et carrières, notamment du fait de l'institution en février 1998 de la prime unifiée de commandement. La carrière d'officier semble d'ailleurs peu attractive si l'on considère la diminution du nombre de candidats aux concours externes comme internes. Votre commission souhaite donc que la situation des fonctionnaires de ce corps soit mieux prise en considération. Lors de son audition par la commission des Lois, le 28 novembre 2000, le ministre de l'intérieur a d'ailleurs indiqué qu'une réflexion était en cours en relation avec le ministère de la fonction publique sur une éventuelle revalorisation de la carrière des officiers ;

- une provision de 3,73 MF au bénéfice du corps de conception et de direction ;

- la revalorisation du régime indemnitaire des personnels administratifs de la police (6 MF) et la transformation de 236 emplois d'agents administratifs en adjoints administratifs (2 MF) ;

- la poursuite de l'action entreprise en 2000 tendant à diminuer le rythme des départs à la retraite anticipée grâce à :

. la création de 1 000 échelons exceptionnels de gardiens de la paix supplémentaires acquis automatiquement à 52 ans (5,25 MF) ;

. la transformation de 40 emplois de commandant en emplois de commandant fonctionnel (1,62 MF) ;

- la poursuite de l'extension de la qualification d'officier de police judiciaire aux agents du corps de maîtrise et d'application . 1000 agents supplémentaires se verraient attribuer la qualité d'officier de police judiciaire, en application de la loi du 18 novembre 1998, et donc percevoir la prime correspondante (dite prime OPJ 16) pour un coût de 96 000 F uniquement car la mesure n'interviendrait qu'en fin d'année. On rappellera que ladite prime est d'un montant mensuel de 220 F mais que le gain réel n'est que de 80 F, les agents concernés perdant le bénéfice de la prime d'agent de police judiciaire, dite " APJ 20 ". Votre commission souligne à nouveau qu'un montant supplémentaire mensuel de 80 F de prime présente une incitation dérisoire au regard des importantes responsabilités découlant de l'attribution de la qualification d'officier de police judiciaire ;

- le repyramidage du corps des ingénieurs et des aides techniques de laboratoire (1,8MF) ainsi que celui des ouvriers cuisiniers (1,3 MF).

* 8 Ce montant comprend en effet les cotisations de sécurité sociale auparavant transférées en cours d'année sur le budget du ministère de l'intérieur.

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