II. PRÉVISIONS POUR 2002

Si l'évolution du revenu agricole pour l'année 2002 n'est pas encore connue, les informations conjoncturelles disponibles permettent néanmoins de distinguer les grandes tendances sur les principaux postes du compte.

En contraste total avec la campagne précédente, les conditions climatiques ont été plutôt favorables, ce qui a permis un rétablissement des surfaces cultivées à leur niveau d'avant 2001 .

En grandes cultures , les surfaces et la production céréalière vont nettement augmenter en 2002. En oléagineux et protéagineux, les surfaces sont en baisse, du fait de la nouvelle diminution des aides compensatrices, mais les rendements seront meilleurs qu'en 2001. Cette augmentation de l'offre va donc peser sur les cours, notamment des céréales, d'autant plus que ces derniers étaient déjà orientés à la baisse en fin de campagne précédente du fait des arrivées massives, sur le marché européen, de blés russes et ukrainiens .

De même, les productions fruitières et légumières retrouvent, après les récoltes faibles de 2001, des niveaux plus proches de la normale. Des baisses de prix en découlent, avec parfois des niveaux de prix sensiblement plus bas que les moyennes des dernières années. La récolte de vins serait légèrement supérieure à celle de 2001, ce qui ne devrait pas permettre une amélioration des prix, en baisse sensible au cours des derniers mois.

Dans le domaine des productions animales , les situations seront à nouveau très variables. La production de viande bovine reprend, avec des prix en très lente amélioration, mais avec de très fortes disparités selon les catégories d'animaux. Contrairement à l'année 2001, le secteur laitier devrait connaître des difficultés liées à la baisse du prix du lait . L'élevage bovin va toutefois bénéficier d'une nouvelle revalorisation des aides européennes de 10 à 15 %, programmée dans l'Agenda 2000.

Les cours des ovins, après une période faste, devraient nettement diminuer. L'indemnité compensatrice ovine augmentera fortement pour se situer, désormais, à un niveau fixe résultant de la nouvelle organisation commune de marché.

C'est dans l'élevage hors sol que la conjoncture devrait être la plus difficile en 2002 , après deux années favorables en raison de reports de consommation de la viande bovine. Les cours du porc pourraient diminuer de 20 % et ceux des produits avicoles seraient également en net retrait.

III. LA CRISE DU SECTEUR AVICOLE

Parmi les multiples difficultés conjoncturelles éprouvées, cette année, par les producteurs agricoles, votre rapporteur pour avis souhaite mettre l'accent sur la crise que rencontre actuellement le secteur avicole.

A. UNE CRISE DE SURPRODUCTION PROVOQUÉE PAR LA CONCURRENCE INTERNATIONALE

? Avec une production de 2,26 tonnes équivalent carcasse (tec) en 2001, ce qui représente près d'un quart de la production européenne de viande de volaille, la France est le premier pays avicole de l'Union européenne .

La filière avicole française n'en subit pas moins, depuis un an, des difficultés illustrant une véritable crise de surproduction : baisse des commandes, réduction des prix payés aux éleveurs, cessations d'activité, fermeture de sites d'abattage, à l'instar de l'établissement Doux à Briec dans le Finistère. L'ensemble de l'industrie avicole française semble touchée par un mouvement de restructuration .

? Cette situation défavorable trouve son origine dans une conjonction de facteurs :

Il convient, tout d'abord, d'évoquer la récente augmentation des capacités de production. Après une première crise subie entre 1998 et 2000, un ajustement de la production du secteur s'était opéré, conduisant notamment à une réduction de 11 % des capacités dans la filière des poulets de chair.

Cependant, les reports de consommation liés à la crise de la viande bovine et l'épidémie d'influenza aviaire en Italie ont, de nouveau, favorisé une augmentation de la production de volailles en 2001, qui s'est trouvée excédentaire par rapport à la demande dès la fin de l'année dernière.

La filière avicole française souffre aujourd'hui d'un ralentissement de la consommation domestique, liée non seulement à la reprise de la consommation de viande rouge, mais également à une diminution tendancielle de la consommation de viande, qui s'explique par l'évolution des modes de vie.

Mais surtout, cette crise trouve largement son origine dans la diminution sensible des exportations .

L'équilibre de la production avicole française a été fondé, depuis l'origine, sur les exportations , en particulier grâce à l'aide apportée par les restitutions européennes.

Aujourd'hui, plus du tiers (36 %) de la production avicole est destinée aux marchés extérieurs, dont :

- 52 % vers l'Union européenne ;

- 48 % vers les pays tiers, en particulier le Moyen-Orient, le Proche-Orient et la Russie.

Or, depuis 1998, la France enregistre une érosion progressive de ses parts de marché tant vers le marché européen qu'à destination des pays tiers, comme l'illustre le tableau suivant :

Ainsi, les exportations vers les pays tiers sont passées de 440.000 tonnes en 1998 à 370.000 tonnes en 2001, soit une réduction de 16 %.

Sur la seule année 2001, les exportations françaises de viande de volaille, représentant un volume total de 813.500 tonnes équivalent carcasse (tec), ont reculé de 9,4 %, cette baisse résultant d'un repli de près de 12 % sur le marché communautaire et de 5,7 % sur les marchés tiers.

Si la baisse des exportations vers les marchés tiers apparaît plus modérée, elle s'est toutefois accompagnée, dans la zone du Moyen-Orient, de fortes diminutions de prix provoquées par la pression concurrentielle du Brésil.

Cette tendance s'est accentuée depuis le début de l'année 2002 . Au cours du premier semestre de cette année, les exportations françaises de volailles ont reculé de 4 % en volume par rapport à la même période en 2001 (- 20 % à destination de l'Union européenne).

Cette situation s'explique en partie par la diminution tendancielle des restitutions à l'exportation, qui sont de plus en plus contingentées par l'Organisation mondiale du Commerce (OMC) et qui s'appliquent, pour l'essentiel, aux poulets entiers congelés.

Plus fondamentalement, la filière avicole française pâtit des conséquences de la concurrence croissante exercée par les grands pays producteurs de volailles que sont devenus le Brésil et la Thaïlande.

Cette concurrence s'exerce, bien sûr, sur les marchés tiers. Cependant, elle est également très marquée sur le marché européen. En effet, les importations européennes de volailles brésiliennes ont progressé de 80 % en 2001 , principalement à destination de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne et des Pays-Bas. En dix ans, les importations européennes de viande de volaille en provenance du Brésil et de la Thaïlande ont été multipliées par quatre . Elles représentent aujourd'hui 10 % de la consommation européenne.

Cette progression des exportations en Europe a été facilitée par l'exploitation de failles dans le dispositif de protection tarifaire de l'Union européenne. Ce dernier prévoyait, en effet, le prélèvement de droits ad valorem réduits sur les viandes saumurées, par rapport aux droits fixes applicables à la viande fraîche. Le Brésil en a profité pour développer ses exportations de volailles saumurées à destination de l'Union européenne.

Pour remédier à ce détournement du tarif douanier, la Commission européenne a procédé, en juillet 2002, à un reclassement des viandes de poulet salées dans la catégorie des viandes de poulet congelées .

Cette mesure est toutefois insuffisante dès lors que d'autres produits de viande bénéficient de droits réduits, offrant ainsi de nouvelles brèches aux pays exportateurs. C'est notamment le cas des préparations et conserves de viande de volaille, créneau sur lequel s'est récemment positionnée la Thaïlande qui approvisionne une partie du marché européen de la restauration rapide et de la sandwicherie.

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