B. LES EXONÉRATIONS CIBLÉES

Demeurent dans le budget de l'Etat les crédits destinés à compenser les pertes de recettes supportées par la sécurité sociale en raison de mesures d'exonération territorialisées ou sectorielles.

1. Les aides territorialisées

Les deux dispositifs qui ont la plus forte incidence budgétaire concernent les zones de revitalisation rurale (ZRR).

Les entreprises installées dans une ZRR qui emploient moins de cinquante salariés ont droit à une exonération pour chaque salarié embauché en CDI ou en CDD pour une durée supérieure à douze mois. L'exonération, qui est limitée, depuis 2008, aux salaires inférieurs à 2,4 Smic, porte sur la part du salaire inférieure à 1,5 Smic et s'applique pendant une durée de douze mois. Les crédits prévus dans le projet de loi de finances s'élèvent à 45 millions d'euros. Ils sont en retrait par rapport à l'an passé (69,5 millions), mais l'année 2009 a été marquée par des opérations de régularisation qui ont fait temporairement augmenter le niveau des dépenses et sont aujourd'hui achevées.

Les organismes d'intérêt général situés dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) bénéficient, depuis 2005, d'une exonération de cotisations patronales ; la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 interdit à de nouveaux organismes de bénéficier de cette exonération mais la maintient pour ceux à qui elle s'applique déjà. Les dépenses progressent pourtant encore de manière dynamique, puisque la dotation inscrite dans le projet de loi de finances s'élève à 190,7 millions, contre seulement 158 millions d'euros l'an passé.

2. Les aides sectorielles

Le projet de budget permet de financer les aides aux secteurs des hôtels, cafés et restaurants et des services à la personne.

a) L'aide aux hôtels, cafés et restaurants

L'aide instituée, en 2004, au profit du secteur des hôtels, cafés et restaurants (HCR) a été supprimée par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques. En contrepartie, une des anciennes revendications du secteur a été satisfaite, puisque le taux de TVA applicable à la restauration sur place (hors boissons alcoolisées) a été ramené de 19,6 % à 5,5 %.

Face au refus de certains pays européens d'accepter la baisse du taux de TVA demandée par la France 7 ( * ) , la loi n° 2004-804 du 9 août 2004, relative au soutien à la consommation et à l'investissement, avait instauré une aide à l'emploi dans les hôtels, cafés et restaurants.

D'abord créée à titre transitoire, cette aide avait ensuite été pérennisée par la loi de finances pour 2008, qui l'avait cependant limitée à trente équivalents temps plein afin de se conformer au plafond autorisé par le droit communautaire en matière d'aides de minimis .

Le régime juridique de cette aide à l'emploi a été modifié à plusieurs reprises. A compter du 1 er janvier 2007, il prévoyait le versement :

- dans le secteur de la restauration traditionnelle, d'une aide de 180 euros par salarié, quel que soit son niveau de rémunération ;

- dans le secteur des hôtels avec restaurant, des cafés-tabacs et des débits de boisson, d'une aide d'un montant moyen de 90 euros ;

- d'une aide à l'embauche « d'extras » (travailleurs occasionnels), limitée à 540 euros par entreprise et par an.

En 2009, la dépense assumée par l'Etat au titre de cette aide a été de 530 millions d'euros.

Précisons que l'aide à l'emploi était cumulable avec l'allégement général de cotisations sociales, qui profite fortement au secteur HCR dans la mesure où 40 % de ses salariés sont rémunérés au Smic.

Cette aide n'est pas allée sans contreparties : deux accords collectifs, étendus respectivement le 13 juillet 2004 et le 5 février 2007, ont ainsi prévus :

- la suppression du « Smic hôtelier » : les employeurs étaient auparavant autorisés à rémunérer leurs salariés en dessous du Smic s'ils fournissaient des avantages en nature (nourriture) ;

- l'octroi de sept jours de congé supplémentaires ;

- la participation des employeurs à un régime de prévoyance ;

- la revalorisation des salaires.

Le secteur HCR a été fortement créateur d'emplois entre 2004 et 2007, puisque ses effectifs salariés ont progressé de 7,6 % au cours de cette période pour atteindre 880 000 personnes. Sur la même période, le salaire mensuel de base 8 ( * ) du secteur a progressé de 9,8 %, contre 8,4 % dans l'ensemble des secteurs marchands. En 2008, le secteur est resté créateur net d'emplois (+ 10 000), alors que l'économie dans son ensemble a détruit des emplois.

La baisse de la TVA appliquée depuis juillet dernier devrait priver l'Etat de 2,8 milliards d'euros de recettes. Le Gouvernement a négocié avec les représentants de la branche un « contrat d'avenir », qui comporte plusieurs engagements de la profession :

- le prix d'au moins sept produits de la carte doit diminuer de 11,8% ;

- 40 000 emplois doivent être créés en trois ans ;

- une négociation doit s'ouvrir pour améliorer les salaires, la protection sociale et la formation ;

- des investissements doivent être réalisés pour moderniser les établissements.

Pour l'instant, la baisse des prix tarde à se matérialiser : si l'engagement de la profession est respecté, il devrait se traduire par une baisse des prix de 3 % en moyenne. Or, depuis l'entrée en vigueur de la baisse de TVA en juillet, les prix n'ont baissé que 1,46 % dans les restaurants, selon l'Insee, et seraient restés stables dans les cafés. Dans les restaurants, la baisse ne semble pas devoir se prolonger puisque les prix ont augmenté de 0,1 % en octobre.

Il ne serait pas acceptable que les efforts déployés par la France, au niveau européen, pour obtenir la baisse de la TVA ne se traduisent par aucun résultat significatif en matière de prix ou de créations d'emplois. Certes, il est encore trop tôt pour dresser un bilan définitif d'une mesure récemment entrée en application, mais votre rapporteur compte rester vigilant et exigeant en ce domaine.

Malgré la baisse de la TVA, les employeurs du secteur HCR conservent le bénéfice de l'exonération spécifique introduite par la loi de finances pour 1998 : l'avantage en nature que constitue la fourniture du repas aux salariés est ainsi toujours exonéré de cotisations patronales. Dans le projet de budget, 150 millions d'euros sont prévus pour compenser à la sécurité sociale cette perte de recettes.

b) Le secteur des services à la personne

La loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne a introduit, au bénéfice de ce secteur, des dispositions d'ordre fiscal et social, dont les premiers résultats paraissent encourageants.

Les particuliers employeurs qui déclarent les droits sociaux de leurs salariés sur la base de l'assiette réelle de leur rémunération bénéficient d'un allégement de cotisations patronales de sécurité sociale à hauteur de quinze points. Les organismes agréés prestataires de services à la personne bénéficient également d'une exonération de charges des cotisations patronales pour leurs salariés. Les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour compenser les pertes de recettes subies par la sécurité sociale s'élèvent, respectivement, à 303,2 millions et 223 millions d'euros. Ils sont en forte progression par rapport à 2009, où ils s'élevaient seulement à 169,7 millions et 162,6 millions.

Les entreprises qui participent au financement des services à la personne, notamment par l'abondement du chèque emploi service universel (Cesu préfinancé), bénéficient d'un crédit d'impôt sur les sociétés, à hauteur de 25 %, et les particuliers employeurs peuvent déduire de l'impôt sur le revenu 50 % des sommes versées pour des services à la personne, dans la limite d'une dépense de 12 000 euros par an. Depuis 2008, les particuliers non imposables peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt sous certaines conditions. La perte de recettes subie par l'Etat au titre de l'impôt sur le revenu est évaluée à 3 milliards d'euros en 2010.

La loi a également institué l'agence nationale des services à la personne (ANSP), chargée d'oeuvrer au développement et à l'organisation du secteur. Elle disposerait d'une dotation budgétaire de 20 millions d'euros en 2010, identique à celle de 2009.

Le dynamisme du secteur des services à la personne s'est confirmé en 2008 : le nombre d'emplois créés est estimé à 95 000 et la progression du nombre d'heures travaillées à 4 %. Le nombre de prestataires agréés est proche de 15 200 alors qu'il était seulement de 12 000 en 2007. Enfin, plus de 18 millions de Cesu préfinancés ont été émis, pour un montant total de 289 millions d'euros en progression de 65 % par rapport à 2007.

3. Une aide exceptionnelle en faveur des TPE

Une mesure d'incitation à la création d'emplois dans les très petites entreprises (TPE) a été décidée dans le cadre du plan de relance et mise en oeuvre par le décret n° 2008-1357 du 19 décembre 2008.

L'aide bénéficie, en 2009, aux entreprises de moins de dix salariés. Son montant est dégressif : maximal pour l'embauche d'un salarié payé au Smic (184,94 euros), il devient nul pour un salaire égal à 1,6 Smic.

Dès le mois de septembre, un demi-million d'embauches avaient donné lieu au versement de cette aide. Sur l'ensemble de l'année, le secrétariat d'Etat à l'emploi table sur un total de 700 000 embauches, pour un coût de 400 millions d'euros, ce qui correspond au nombre de recrutements auquel procèdent ordinairement les TPE au cours d'une année. La mesure aurait donc permis de maintenir constant le niveau des embauches dans ces entreprises malgré la gravité de la récession.

Fort de ce succès, le Gouvernement a décidé, par le décret n° 2009-1396 du 16 novembre 2009, de prolonger l'aide pour les embauches effectuées jusqu'au 30 juin 2010.

* 7 Rappelons que les taux de TVA sont encadrés par une directive communautaire et que les décisions, en matière fiscale, se prennent à l'unanimité au niveau européen.

* 8 Le salaire mensuel de base est le salaire mensuel brut hors primes, indemnités et autres formes de rémunération.

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