N° 69

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 octobre 2010

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 ,

Par M. Alain VASSELLE,

Sénateur,

Rapporteur général

(1) Cette commission est composée de : Mme Muguette Dini , présidente ; Mme Isabelle Debré, M. Gilbert Barbier, Mme Annie David, M. Gérard Dériot, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Raymonde Le Texier, Catherine Procaccia, M. Jean-Marie Vanlerenberghe , vice-présidents ; MM. Nicolas About, François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Gisèle Printz, Patricia Schillinger , secrétaires ; M. Alain Vasselle, rapporteur général ; Mmes Jacqueline Alquier, Brigitte Bout, Claire-Lise Campion, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Yves Daudigny, Mmes Christiane Demontès, Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Guy Fischer, Mme Samia Ghali, MM. Bruno Gilles, Jacques Gillot, Adrien Giraud, Mme Colette Giudicelli, MM. Jean-Pierre Godefroy, Alain Gournac, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, M. Claude Jeannerot, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Jacky Le Menn, Jean-Louis Lorrain, Alain Milon, Mmes Isabelle Pasquet, Anne-Marie Payet, M. Louis Pinton, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, MM. René Teulade, François Vendasi, André Villiers.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

2823 , 2840 et T.A. 549

Sénat :

66, 78 et 79 (2010-2011)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Pour la seconde fois, un projet de loi de programmation des finances publiques est soumis à l'examen du Parlement.

Cette nouvelle catégorie de lois a été instituée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui a inséré un nouvel alinéa à l'article 34 de la Constitution, aux termes duquel :

«  Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s'inscrivent dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques. »

Le Parlement est donc conduit à approuver la stratégie du Gouvernement en matière de finances publiques qui, jusqu'à présent, était élaborée du seul fait du Gouvernement, à l'occasion de la transmission, au début du mois de décembre, du programme de stabilité à la Commission européenne.

Désormais, cette programmation fait donc l'objet d'un vote, ce qui constitue un réel progrès, comme l'est aussi l'approche globale que cette nouvelle catégorie de lois permet d'avoir sur les comptes publics, en intégrant les finances de l'Etat, celles de la sécurité sociale et celles des collectivités territoriales dans un même ensemble et en les insérant dans une perspective pluriannuelle.

Jusque là, en termes de débats généraux, outre le débat d'orientation des finances publiques d'avant l'été, existait seulement celui sur l'évolution des prélèvements obligatoires. Seule notre Haute assemblée d'ailleurs le tient chaque année, avant d'examiner les projets de loi financiers annuels. Il a eu lieu l'année dernière à la même époque ; il est joint cette année à la discussion du présent projet de loi. Ce débat sur les prélèvements obligatoires est évidemment un exercice très utile car il permet un débat d'ensemble, mais il ne concerne qu'un aspect du sujet, celui des recettes, la réflexion sur les dépenses étant renvoyée aux projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale. En outre, que ce soit pour le débat d'orientation ou le débat sur les prélèvements obligatoires, seule l'année suivante est concernée.

Tous ces éléments militent clairement en faveur de l'approche retenue par ces nouvelles lois de programmation.

En matière sociale toutefois, la démarche n'est pas entièrement nouvelle puisque, depuis le vote de la loi organique du 2 août 2005, le projet de loi de financement de la sécurité sociale doit être accompagné d'une annexe B qui comporte une projection pour les quatre années à venir, tant pour les recettes que pour les dépenses, à la fois pour le régime général et l'ensemble des régimes obligatoires de base.

Votre commission a souvent critiqué cette annexe au cours des derniers exercices, même si d'année en année, son contenu s'est amélioré. S'il faut en faire un bilan, il apparaît que malgré ses limites, notamment en termes de fiabilité et de durabilité des projections, elle a le mérite incontestable de proposer une trajectoire et de faire apparaître des tendances qui montrent avec beaucoup de clarté les difficultés du chemin du redressement des comptes et du retour à l'équilibre.

Le présent projet de loi de programmation est un outil plus complet et plus cohérent car il permet d'éclairer de façon plus lisible et transparente le débat public sur l'ensemble de nos finances publiques, c'est-à-dire sur un ensemble qui représente environ la moitié de la richesse nationale.

Ce projet de loi n'est toutefois qu'une programmation. Cela signifie que les prérogatives du législateur financier, comme celles du législateur financier social, sont préservées, de même que les domaines respectifs des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale.

Cette situation pourrait toutefois évoluer si le Gouvernement retenait la proposition récemment avancée par le groupe de travail, présidé par Michel Camdessus, sur la règle d'équilibre des finances publiques, de créer une nouvelle catégorie de loi, les lois-cadre de programmation des finances publiques  qui s'imposeraient juridiquement aux lois de finances et aux lois de financement, sous le contrôle du Conseil constitutionnel.

Le Premier ministre a engagé une large consultation sur les conclusions de ce groupe de travail ainsi que sur une éventuelle réforme en profondeur du pilotage des finances publiques, qui pourrait aller jusqu'à l'introduction, dans la constitution, d'une règle d'équilibre des finances publiques. Ce débat nécessite à l'évidence une réflexion approfondie. Pour votre commission, l'expérience des deux dernières années - et singulièrement du premier projet de loi de programmation des finances publiques - doit rendre particulièrement prudents en la matière.

La loi de programmation votée il y a deux ans est de fait intervenue dans un contexte très particulier : la crise financière venait de se déclarer et ses conséquences sur l'économie « réelle » étaient encore très incertaines. Aussi, la pertinence de l'exercice a été très vite remise en question.

Comme l'indique le Gouvernement dans l'exposé des motifs du présent projet de loi, « la trajectoire des comptes publics inscrite dans la loi de programmation du 9 février 2009 a été rendue caduque par la crise économique et financière qui a conduit à une dégradation rapide et marquée des finances publiques ». Le Gouvernement ayant fait le choix, d'une part, de laisser jouer le libre jeu des stabilisateurs automatiques, d'autre part, de mettre en place un plan de relance significatif, les déficits et la dette publics se sont envolés vers des montants encore jamais atteints.

Il importe désormais de remédier aux déséquilibres budgétaires et financiers considérables que connait notre pays et de remettre nos comptes publics sur une trajectoire de désendettement, à la fois crédible et efficace. L'exercice est naturellement bien plus complexe qu'il ne l'était il y a deux ans.

L'objectif clairement affiché par le Président de la République lors des conférences nationales des finances publiques du printemps dernier, et repris dans le dernier programme de stabilité présenté à nos partenaires européens, est de ramener le déficit public à 3 % du Pib en 2013.

Pour 2011, l'objectif considéré comme « majeur et intangible » est de parvenir à un déficit public de 6 % du Pib.

Le présent projet de loi de programmation a pour but d'associer pleinement le Parlement à la définition des moyens de parvenir à ces objectifs.

La situation actuelle des comptes publics, la vigueur de la compétitivité internationale, les attentes de nos concitoyens sont autant d'éléments qui justifient pleinement qu'une telle démarche soit aujourd'hui adoptée.

I. UNE NOUVELLE APPROCHE, DE NOUVEAUX OUTILS

Le présent projet de loi a plusieurs mérites : il officialise une approche globale et pluriannuelle des finances publiques, il propose un contenu clair et lisible pour traduire cette démarche et il met en place des outils pour la mettre en oeuvre.

A. UNE APPROCHE GLOBALE ET PLURIANNUELLE DES FINANCES PUBLIQUES

En instituant une programmation des finances publiques, le Gouvernement retient plusieurs principes, au premier rang desquels l'affirmation que l'effort de redressement doit engager l'ensemble des administrations publiques , c'est-à-dire l'Etat et les diverses administrations centrales, la sécurité sociale et les collectivités territoriales.

1. Une vision d'ensemble des comptes

La loi de programmation s'inscrit dans le cadre d'un processus, engagé il y a plusieurs années, pour développer une approche plus générale des comptes publics afin d'éviter les problèmes de frontières et les interactions entre les différentes catégories d'administrations.

La récurrence des problèmes liés aux relations financières entre le budget de l'Etat et celui de la sécurité sociale en était, par exemple, l'une des principales manifestations.

Cette approche générale, déjà rendue nécessaire par les obligations européennes de présentation chaque année à la Commission d'un programme de stabilité , s'est, pendant plusieurs années, limitée au débat sur l'évolution des prélèvements obligatoires , que seul le Sénat mettait en oeuvre dans les tout premiers jours de novembre, avant la discussion des projets de loi de financement de la sécurité sociale et de finances, l'Assemblée nationale n'ayant jamais pu intégrer ce débat dans son ordre du jour chargé du début de la session ordinaire. Cette année, ce débat au Sénat est couplé au débat portant sur le présent projet de loi.

Les débats d'avant l'été sur les orientations budgétaires et des finances sociales, transformés en un débat unique depuis le mois de juin 2008 dénommé débat sur l'orientation des finances publiques , ont également contribué à favoriser l'approche globale des comptes.

Plusieurs structures, enfin, ont été mises en place pour favoriser cette approche d'ensemble :

- les conférences des finances publiques , réunies à plusieurs reprises, notamment en janvier et mai derniers sous la présidence du Président de la République, qui rassemblent, outre le Gouvernement et les parlementaires, l'ensemble des parties prenantes aux finances publiques : Etat, collectivités territoriales, régimes de sécurité sociale ;

- le ministère des comptes publics, créé au printemps 2007 dans le cadre de la nouvelle structure gouvernementale. Ce ministère, en charge à la fois des finances de l'Etat et de celles de la sécurité sociale, a ouvert la possibilité d'une appréciation gouvernementale réellement globale sur les finances publiques, qui a longtemps fait défaut et trop souvent permis des défausses d'un ensemble financier sur l'autre, ce que votre commission ne manquait pas de dénoncer et qui aboutissait généralement à ce que la sécurité sociale soit une variable d'ajustement du budget de l'Etat. La création d'un ministère des comptes publics a très largement remédié à ces difficultés, au nom d'une approche enfin globale des comptes publics.

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