AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Après une année 2014 marquée par la transformation de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et la toxicomanie (Mildt) en mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), puis une année 2015 consacrée à l'application, sur le terrain et dans l'action publique, de cette évolution lexicale qui traduit l'élargissement de son champ de compétence , 2016 sera l'année durant laquelle il sera permis de juger l'efficacité de la politique menée dans ce domaine par le Gouvernement depuis 2012.

Organisme à caractère interministériel placé auprès du Premier ministre, la Mildeca a pour mission de définir les lignes directrices de l'action gouvernementale en matière de lutte contre l'offre de drogues et de prise en charge des conséquences individuelles et collectives des addictions et d'en superviser l'application. Pour ce faire, la France a pour spécificité d'avoir mis au point une politique intégrée qui repose sur trois piliers complémentaires et placés sur un pied d'égalité : l'application de la loi , c'est-à-dire la pénalisation de la vente et de l'usage des drogues illicites, la prévention et la réduction des risques .

Défini par le plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017, adopté en septembre 2013, le cadre de l'action de la Mildeca est contraint par une dotation budgétaire en baisse de 2,7 % entre 2015 et 2016, certes complétée par un fonds de concours , toujours aléatoire, alimenté par le produit de la vente des biens saisis aux trafiquants de drogue. S'il est évident que la situation actuelle des finances publiques implique un effort de rigueur et ne laisse persister aucune marge financière, la Mildeca doit néanmoins faire face à de nouveaux défis , liés à l'évolution des comportements de consommation et à l'apparition de nouveaux produits.

Alors que les dernières études tendent à souligner le fait que les niveaux d'usage de substances psychoactives n'ont pas diminué , malgré les campagnes de prévention conduites et la prohibition qui pèse sur la consommation des produits illicites, et que les conduites à risque augmentent, une nouvelle impulsion doit être donnée aux politiques de lutte contre les addictions. Votre rapporteur pour avis salue l'action volontariste de la Mildeca, qui a permis à cette structure de gagner en visibilité, et sa volonté d'améliorer le pilotage de la politique dont elle a la charge, qui mobilise des acteurs hétéroclites. Il n'en partage pour autant pas tous les choix.

Ainsi, il semble nécessaire à votre rapporteur pour avis de renoncer à l'expérimentation 1 ( * ) de salles de consommation à moindre risque (SCMR) qui, en contradiction complète avec l'interdiction de la consommation de drogues qui prévaut aujourd'hui, aboutirait à leur légalisation de facto et à la création, dans leur voisinage, de véritables zones de non-droit.

De plus, il est essentiel qu'une prise de conscience ait lieu sur les détournements et les mésusages des traitements de substitution aux opiacés (TSO). Ils constituent un outil indispensable dans la prise en charge thérapeutique des addictions, mais sont trop souvent consommés de manière non conforme à leur posologie, voire constituent parfois une porte d'entrée dans la toxicomanie.

Enfin une réflexion doit être engagée sur l'efficience de la réponse pénale à la consommation simple de stupéfiants. Alors qu'elle est aujourd'hui passible d'un an d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende 2 ( * ) , cette peine très lourde n'est pas appliquée. Au terme d'une longue procédure judiciaire, une faible amende est prononcée et rarement recouvrée. Le caractère dissuasif de la sanction a disparu , ce à quoi la contraventionnalisation du premier usage , immédiatement appliquée par un agent ou un officier de police judiciaire, permettrait de remédier en accélérant le traitement de ces infractions et en insistant sur leur caractère pécuniaire. Cette proposition, déjà votée par le Sénat à deux reprises à l'initiative de votre rapporteur pour avis, d'abord en décembre 2011 puis, plus récemment, lors de l'examen du projet de loi relatif à la santé, mériterait d'être prise davantage en considération par l'Assemblée nationale, le Gouvernement et la Mildeca.


* 1 Qui figure à l'article 9 du projet de loi relatif à la santé, dont l'examen parlementaire devrait prochainement s'achever.

* 2 Article L. 3421-1 du code de la santé publique.

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