N° 141

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2016

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2017 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME II

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES (ÉNERGIE)

Par M. Bruno SIDO,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Claude Lenoir , président ; Mmes Élisabeth Lamure, Delphine Bataille, MM. Alain Bertrand, Martial Bourquin, Gérard César, Alain Chatillon, Daniel Dubois, Joël Labbé, Michel Le Scouarnec, Yannick Vaugrenard , vice-présidents ; M. Marc Daunis, Mme Valérie Létard, M. Bruno Sido , secrétaires ; MM. Gérard Bailly, Jean-Pierre Bosino, Henri Cabanel, François Calvet, Roland Courteau, Alain Duran, Mmes Frédérique Espagnac, Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet, Mme Annie Guillemot, MM. Michel Houel, Serge Larcher, Jean-Jacques Lasserre, Daniel Laurent, Philippe Leroy, Mmes Marie-Noëlle Lienemann, Anne-Catherine Loisier, MM. Michel Magras, Franck Montaugé, Robert Navarro, Jackie Pierre, Ladislas Poniatowski, Mme Sophie Primas, MM. Yves Rome, Henri Tandonnet .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 4061, 4125 à 4132 et T.A. 833

Sénat : 139 et 140 à 146 (2016-2017)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Avec l'intégration des charges et des recettes de la « contribution au service public de l'électricité » (CSPE) dans le budget de l'État votée en fin d'année dernière, le périmètre des crédits consacrés à l'énergie, dont votre commission des affaires économiques se saisit chaque année pour avis, s'est considérablement élargi , dans son volume comme dans ses finalités.

Au-delà du champ traditionnel des crédits du programme 174 dédiés à l'accompagnement des anciens mineurs, des dépenses fiscales associées ou du compte d'affectation spéciale (CAS) pour l'électrification rurale, le Parlement est désormais conduit à examiner les dépenses de soutien aux énergies renouvelables , retracées dans le CAS « Transition énergétique », et les autres charges de service public de l'énergie (péréquation tarifaire, tarifs sociaux, soutien à la cogénération, ...) regroupées au sein du nouveau programme 345.

Si la budgétisation de ces charges est un progrès, le rôle du Parlement restera toutefois très limité tant l'évolution de ces dépenses, très largement contraintes, lui échappe.

Les subventions aux énergies renouvelables électriques progresseront à nouveau, en 2017, à un rythme soutenu (+ 19 % sur un an et + 34 % sur deux ans, à 5,6 milliards d'euros), signe que la transition énergétique est bien en marche mais qu'elle a un coût .

Pour équilibrer le CAS « Transition énergétique », le Gouvernement a finalement proposé à l'Assemblée nationale, à l'issue de discussions engagées avec la Commission européenne, une alimentation exclusive par une fraction des taxes intérieures de consommation sur le pétrole et le charbon (TICPE et TICC), la totalité de la CSPE étant désormais reversée au budget général.

Il reste que, contrairement à ce qu'exigent pourtant les lois « Grenelle I » et « Transition énergétique », la hausse de la « taxe carbone » intégrée à la fiscalité sur les énergies fossiles ne sera pas intégralement compensée en 2017 par la baisse d'autres prélèvements.

Même en admettant l'idée défendue par le Gouvernement, qui est en soi déjà contestable, d'une compensation par l'annulation d'une autre hausse prévisible via la stabilisation de la CSPE à son niveau de 2016, ce sont entre 196 et 440 millions d'euros de prélèvements supplémentaires qui pèseront sur la facture énergétique des consommateurs en 2017 - et plus encore en 2018 et 2019 - et qui s'ajoutent à l'explosion de la CSPE déjà subie par le passé.

De même, l'exclusion des produits issus de la biomasse du relèvement de la taxe carbone, lui aussi prévu par la loi, n'est toujours pas effective et le Gouvernement annonce y réfléchir pour 2018. Or, si les problèmes de traçabilité sont réels, ils ne semblent pas insurmontables.

En outre, les montages retenus pour financer certaines actions liées à la transition énergétique - « fonds de financement » et « enveloppe spéciale transition énergétique » (ESTE) - s'avèrent particulièrement complexes, voire opaques et, surtout, bien en-deçà des besoins , ou même des annonces initiales du Gouvernement (500 millions d'euros, dont 250 millions d'avances de la Caisse des dépôts et consignations à régulariser en « collectif », au lieu du milliard et demi promis).

En matière de lutte contre la précarité énergétique , les premiers résultats de l'expérimentation du chèque énergie dans quatre départements s'avèrent encourageants , avec une hausse de 37 % des bénéficiaires par rapport aux tarifs sociaux, même si le nouveau dispositif, qui suppose une démarche active du bénéficiaire pour son affectation, nécessitera un accompagnement important .

Dernier élément notable, les dépenses fiscales atteindront en 2017 2,7 milliards d'euros , dont 1,7 milliard pour le seul « crédit d'impôt pour la transition énergétique » (CITE) - ce qui en fait la 11 e dépense fiscale la plus coûteuse de la Nation - et 550 millions pour les taux réduits en faveur des industries grandes consommatrices d'énergie. Ces deux postes expliquent à eux seuls la forte dynamique des dépenses observée depuis deux ans : + 1 milliard en 2016 et encore + 200 millions attendus en 2017.

À cet égard, votre rapporteur approuve la demande d'évaluation du CITE votée à l'Assemblée nationale cette année, qui s'avère d'autant plus nécessaire que la baisse du nombre de bénéficiaires observée en 2015 interpelle. Dans une moindre mesure, une évaluation globale de la cohérence des diverses mesures adoptées ces trois dernières années pour préserver la compétitivité des industries intensives en énergie - qui représentent au total près d'1,5 milliard d'euros de soutien - serait également bienvenue, le cas échéant pour aller au-delà si cela s'avérait nécessaire.

Plus globalement, ce budget s'inscrit dans le « manque de vision stratégique » justement souligné par le rapporteur spécial de la mission et dont on peut citer deux exemples parmi tant d'autres :

- l'annonce présidentielle, en janvier, d'un prix plancher du carbone pour la production électrique nationale, limité ensuite aux seules centrales charbon avant d'être finalement abandonné, alors que les difficultés posées par une telle fixation unilatérale étaient identifiées dès l'origine ;

- l'inconséquence de la « programmation pluriannuelle de l'énergie » (PPE), censée décliner opérationnellement les objectifs de la loi « Transition énergétique » mais qui ne dit rien sur la façon dont on réduirait la part du nucléaire à 50 % de la production électrique en moins de dix ans désormais, ce que votre commission comprend fort bien pour avoir dénoncé le caractère irréaliste de cet objectif mais qui n'est, du point de vue du Gouvernement, guère cohérent.

Au cours de sa réunion du 9 novembre 2016 - et dans l'attente de l'audition de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer le 23 novembre prochain -, la commission des affaires économiques a réservé son avis sur les programmes 174 et 345 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et sur les comptes d'affectation spéciale « Transition énergétique » et « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ».

I. LES COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « TRANSITION ÉNERGÉTIQUE » ET PROGRAMME 345 « SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE » : DES DÉPENSES DE SOUTIEN AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES DYNAMIQUES DONT LE COÛT PÈSE SUR LES MÉNAGES

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Transition énergétique » et le programme 345 « Service public de l'énergie » sont la traduction budgétaire de la réforme de la fiscalité énergétique intervenue en loi de finances rectificative pour 2015 1 ( * ) .

Cette réforme a consisté, pour l'essentiel 2 ( * ) , à :

- intégrer la contribution au service public de l'électricité (CSPE) au budget de l'État 3 ( * ) , en logeant les charges liées à la transition énergétique au sein du CAS et les autres charges de service dans le budget général ;

- sécuriser juridiquement la CSPE , en la fusionnant avec la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) 4 ( * ) dont la conformité au droit européen était mieux assurée ;

- enfin, élargir l'assiette du financement des énergies renouvelables en affectant au CAS, à partir de 2017, une partie des taxes intérieures de consommation sur les énergies fossiles.

En raison d'une montée en charge progressive du dispositif liée au décalage de perception dans l'année des nouvelles recettes, seules 79,7 % des charges couvertes par l'« ancienne » CSPE et 75 % de celles financées par la contribution au tarif spécial de solidarité du gaz (CTSSG) figurent dans le budget 2016, les dépenses restantes étant couvertes par les circuits résiduels des anciennes taxes. À compter de 2017 en revanche, la totalité des charges sont retracées dans le CAS et dans le programme budgétaire, ce qui explique une grande partie des variations de crédits présentées dans le tableau ci-après 5 ( * ) .

S'agissant du CAS, les 2,6 milliards d'euros de dépenses supplémentaires constatées en 2017 sont ainsi liés, pour 1,1 milliard (43 %), à l'extension de la réforme en année pleine et, pour 1,5 milliard (57 %), à l'accroissement des charges à financer entre 2016 et 2017, dont plus de 900 millions au titre du soutien aux EnR (35 %) et un peu moins de 600 millions au titre des engagements financiers passés (22 %).

Compte d'affectation spéciale « Transition énergétique »
(en euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

2016

2017

2016

2017

764 - Soutien à la transition énergétique

Soutien aux énergies renouvelables électriques

3 633 000 000

5 630 300 000

+55 %

3 633 000 000

5 630 300 000

+55 %

Soutien à l'effacement de consommation électrique

0

0

0

0

Soutien à l'injection de biométhane

17 000 000

49 900 000

+193,5 %

17 000 000

49 900 000

+193,5 %

765 - Engagements financiers liés à la transition énergétique

Désendettement vis-à-vis des opérateurs supportant des charges de service public de l'électricité

194 000 000

1 228 000 000

+533 %

194 000 000

1 228 000 000

+533 %

Versement au profit du budget général correspondant aux montants des remboursements et dégrèvements au titre de la TICFE

0

0

0

0

Versements au profit de la CDC correspondant à des remboursements partiels de CSPE

530 000 000

75 000 000

-85,8 %

530 000 000

75 000 000

-85,8 %

Total

4 374 000 000

6 983 200 000

+59,7 %

4 374 000 000

6 983 200 000

+59,7 %

Programme 345 « Service public de l'énergie »
(en euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

2016

2017

2016

2017

Solidarité avec les zones non interconnectées au réseau métropolitain

1 072 700 000

1 380 300 000

+28,7 %

1 072 700 000

1 380 300 000

+28,7 %

Protection des consommateurs en situation de précarité énergétique

316 100 000

496 900 000

+57,2 %

316 100 000

496 900 000

+57,2 %

Soutien à la cogénération

468 200 000

565 600 000

+21,4 %

468 200 000

565 600 000

+21,4 %

Compensation carbone

93 000 000

- 6 ( * )

93 000 000

-

Frais de support

93 900 000

99 870 000

+6,4 %

93 900 000

99 870 000

+6,4 %

Médiateur de l'énergie

5 700 000

5 330 000

-6,5 %

5 700 000

5 330 000

-6,5 %

Total

2 049 600 000

2 548 000 000

+24,3 %

2 049 600 000

2 548 000 000

+24,3 %

Total CAS + programme 345

6 423 600 000

9 531 200 000

+48,4 %

6 423 600 000

9 531 200 000

+48,4 %

Sources : projets annuels de performances des projets de loi de finances rectificative
pour 2015 et de finances pour 2017

A. UN SOUTIEN CROISSANT AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES QUI ALOURDIT LA FACTURE ÉNERGÉTIQUE DES MÉNAGES

Le CAS « transition énergétique » se décline en deux programmes :

- un programme 764 « Soutien à la transition énergétique » qui finance les subventions versées aux énergies renouvelables (EnR) électriques et gazières et à l'effacement de consommation électrique ;

- et un programme 765 « Engagements financiers liés à la transition énergétique » principalement destiné à apurer la dette contractée à l'égard d'EDF en raison du défaut de compensation passé des charges de service public par la CSPE.

1. Des dépenses de soutien aux énergies renouvelables tirées par l'augmentation des capacités installées et par la baisse des prix de marché
a) Les énergies renouvelables électriques

Selon les évaluations de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) 7 ( * ) reprises par le Gouvernement, les dépenses de soutien aux EnR électriques 8 ( * ) resteront très dynamiques en 2017 pour atteindre plus de 5,6 milliards d'euros (5 629,3), soit une hausse de 19 % sur un an (+ 915 millions) et de 34 % sur deux ans (+ 1,4 milliard), pour une production soutenue d'environ 48 TWh, soit environ 9 % de la production d'électricité nationale.

Évolution des dépenses de soutien aux énergies renouvelables électriques

Charges
(en millions d'euros)

Constatées
en 2015

Prévisionnelles mises à jour pour 2016

Prévisionnelles pour 2017

Évolution sur 1 an

Évolution sur 2 ans

Total EnR électriques

4 198,8

4 714,7

5 629,3

+19 %

+34 %

dont photovoltaïque

2 622,4

2 724,6

3 102,9

+14 %

+18 %

dont éolien

1 029,5

1 189,3

1 507,0

+27 %

+46 %

dont autres EnR

553,9

806,2

1 019,4

+26 %

+84 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017

Deux facteurs principaux expliquent la hausse des charges :

- l'augmentation des capacités installées , qui ne faiblit pas : ainsi, la progression du parc de production d'électricité renouvelable a atteint 728 MW au deuxième trimestre 2016 9 ( * ) - soit la plus forte évolution trimestrielle depuis quatre ans - et 2 140 MW sur une année glissante, tandis que 14 187 MW étaient en attente de raccordement au 30 juin 10 ( * ) ;

- la baisse des prix de marché de gros de l'électricité 11 ( * ) , qui augmente mécaniquement le différentiel à couvrir entre prix de marché et prix garantis ; cette baisse a été particulièrement marquée début 2016 (jusqu'à moins de 26 €/MWh pour les prix en base à un an) et les prix ont ensuite oscillé entre 30 et 40 €/MWh, soit un niveau qui reste inférieur, par exemple, aux 42 € de l'ARENH 12 ( * ) .

En 2017, le soutien sera concentré à 55 % sur la filière photovoltaïque - qui ne représente pourtant que 19,4 % de la production soutenue 13 ( * ) (9,4 TWh) - et à 27 % sur la filière éolienne (pour 51,7 % de la production soutenue, soit 25 TWh).

Tarifs d'achat prévisionnels moyens 14 ( * ) des principales filières

Tarifs d'achat prévisionnels moyens en 2017

Évolution par rapport aux tarifs 2016

Hypothèse de développement du parc en 2017

Éolien

90,2 €/MWh

+1,8 % 15 ( * )

1 008 MW

Photovoltaïque

356,9 €/MWh

-3,0 %

790 MW

Biogaz

168,7€/MWh

nc

36 MW

Centrales d'incinération

54,8€/MWh

nc

20 MW

Biomasse

145,0 €/MWh

nc

12 MW

Hydraulique

74,3€/MWh

nc

10 MW

Cogénération 16 ( * )

125,7 €/MWh

nc

nc

Source : CRE, annexe 1 de la délibération du 13 juillet 2016 susmentionnée, à partir des hypothèses fournies et justifiées par EDF

Ainsi, malgré la baisse importante des prix d'achat observée dans le cadre des derniers appels d'offres 17 ( * ) , les surcoûts moyens associés à la filière photovoltaïque sont encore notablement plus élevés que ceux des autres filières.

En outre, à compter de 2017 et en application de l'article 22 du présent projet de loi de finances, le coût des études techniques préalables au lancement des appels d'offres EnR, jusqu'à présent imputé sur le budget général, sera désormais couvert par le CAS, à hauteur d'1 million d'euros l'an prochain.

Enfin, on notera le démarrage très progressif du complément de rémunération , nouveau mécanisme de soutien de type « prime + marché » 18 ( * ) créé par la loi « Transition énergétique » en application des lignes directrices européennes, qui s'explique notamment par le fait que seules certaines filières et installations (au-delà d'une puissance installée supérieure à 500 kW pour l'essentiel) sont concernées - même si l'exemption de la filière éolienne terrestre doit prochainement disparaître 19 ( * ) -, par les dispositions transitoires prévues par la loi pour basculer d'un régime à l'autre, par le fait que les modalités d'application du dispositif doivent encore être déclinées par filière dans des arrêtés tarifaires ou, tout simplement, par les délais avant raccordement au réseau des nouveaux projets éligibles.

Ainsi, selon les prévisions d'EDF reprises par la CRE, le complément de rémunération ne devrait occasionner que 5 ,6 millions d'euros de charges en 2017, pour trois filières concernées : hydraulique (3,1 millions), photovoltaïque (2,4) et cogénération (0,2).

b) L'injection de biométhane dans les réseaux

L'injection de biométhane dans les réseaux de transport et de distribution de gaz naturel permet de valoriser des déchets 20 ( * ) avec un très haut rendement énergétique (de l'ordre de 90 % de l'énergie valorisée, contre 30 % à 40 % pour la production simple d'électricité).

Pour aider à son développement, et contribuer ainsi à l'atteinte de l'objectif fixé par la loi « Transition énergétique » de 10 % d'EnR dans la consommation de gaz en 2030, deux dispositifs de soutien sont mis en oeuvre depuis 2011 : un tarif d'achat garanti, financé par le présent CAS, et une valorisation des garanties d'origine (venant en déduction des surcoûts d'achat).

Si les volumes concernés restent encore faibles, la filière est particulièrement dynamique : le nombre d'installations devrait passer d'une seule en 2012 à 74 en 2017 et les surcoûts d'achat devraient être multipliés par 7 entre 2015 et 2017, à 49,9 millions d'euros .

Le soutien à l'injection de biométhane dans les réseaux

2015

2016

2017

2018

2023

(prévisions)

(objectifs PPE)

Obligation d'achat biométhane
(en millions d'euros)

7,1

20,9

49,9

-

-

Nombre d'installations

15

29

74

-

-

Quantité injectée
(en TWh)

nc

nc

0,6

1,7

8

Source : CRE, annexe 1 de la délibération du 13 juillet 2016
et programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE)

*

Au total, en 2017, le soutien aux EnR - électricité et gaz confondus - représentera 71 % des charges de service public de l'énergie (soit 5,7 milliards d'euros ), contre 17 % pour la péréquation tarifaire, 6 % pour le soutien à la cogénération et 5 % pour les dispositifs sociaux 21 ( * ) . Pour illustrer la dynamique observée sur les quinze dernières années, on rappellera qu'en 2003, les EnR ne comptaient que pour 10 % des charges de service public de l'électricité, à 0,2 milliard d'euros.

c) L'effacement de consommation électrique

Pour développer les capacités d'effacement de consommation électrique - qui doivent permettre, à la fois, d'aider à gérer les pointes de consommation et l'intermittence des EnR, et de générer des économies d'énergie -, la loi « Transition énergétique » a prévu l'organisation d'appels d'offres 22 ( * ) que le CAS a vocation à financer.

Initialement prévus pour l'année 2017, ces appels d'offres ne seront finalement lancés qu'en 2018 23 ( * ) , ce qui explique qu'aucun crédit ne soit inscrit au CAS en 2017. Dans l'intervalle, un dernier appel d'offres pris sur le fondement de la loi « NOME » et financé par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE) sera initié par RTE avant la fin de l'année pour couvrir l'année 2017.  En 2016, près de 30 millions d'euros ont ainsi été attribués à sept opérateurs d'effacement diffus ou industriel 24 ( * ) .

2. Un apurement progressif de la dette contractée à l'égard d'EDF

Faute d'assumer politiquement la facture croissante des dépenses de soutien aux EnR pour les ménages et pour les entreprises 25 ( * ) - alors même que la pertinence de cette politique pouvait être défendue au regard de l'urgence climatique -, les Gouvernements successifs se sont refusés, à partir de 2009, à porter la CSPE acquittée par les consommateurs d'électricité au niveau des charges qu'elle devait couvrir 26 ( * ) .

Évolution de la contribution unitaire de CSPE entre 2009 et 2016

(en euros par MWh)

Commission des affaires économiques à partir des délibérations de la CRE

Les dépenses financées étant très largement contraintes, il s'en est suivi un défaut de compensation, en pratique exclusivement supporté par EDF 27 ( * ) , qui a atteint en cumulé jusqu'à 5,7 milliards d'euros 28 ( * ) .

Évolution du déficit de compensation supporté par EDF

(en millions d'euros courants)

Défaut de recouvrement cumulé

2009

527

2010

1 089

2011

2 441

2012

3 523

2013

4 259

2014

5 471

2015

5 439

Source : CRE, délibération du 13 juillet 2016

Par un courrier daté du 8 janvier 2013, l'État s'était engagé auprès d'EDF sur un échéancier prévisionnel indicatif conduisant au remboursement complet de la dette à l'horizon 2018. En mai 2016, cet engagement a été formalisé dans un arrêté 29 ( * ) qui reporte certes cette perspective à fin 2020 mais dont les projets de loi de finances pour 2016 et pour 2017 respectent les premières échéances fixées pour le remboursement du déficit et des intérêts associés, soit 1,2 milliard d'euros de remboursement du principal et 99,3 millions pour les intérêts associés en 2017 .

Échéancier de remboursement de la dette de CSPE à EDF

(en millions d'euros)

DÉFICIT DE COMPENSATION
restant dû
au 31 décembre
de l'année n hors intérêts 2015

REMBOURSEMENT EN PRINCIPAL
du déficit précité
par le compte d'affectation spéciale
« Transition énergétique »

PAIEMENT DES INTÉRÊTS FUTURS
associés au déficit précité
par le budget général

2015

5 772 30 ( * )

0

2016

5 579

194

99,3

2017

4 351

1 228

99,3

2018

2 730

1 622

87,1

2019

891

1 839

62,4

2020

0

891

40,4 31 ( * )

Total

na

5 772

388,5

Source : arrêté du 13 mai 2016

Bien qu'ils soient, à l'évidence, intimement liés, le remboursement du principal de la dette et le paiement des intérêts associés sont retracés, pour l'un, au CAS et, pour l'autre, au programme budgétaire, ce qui ne manque pas d'étonner . Même si le Gouvernement justifie ce choix en assimilant les intérêts à des frais de fonctionnement, votre rapporteur juge que la présentation budgétaire gagnerait en clarté et en cohérence à regrouper ces deux charges au sein du CAS, les intérêts acquittés faisant bel et bien partie des charges de financement de la transition énergétique qu'il finance.

Enfin, le CAS retrace deux autres dépenses au titre des engagements financiers liés à la transition énergétique :

- les remboursements et dégrèvements de CSPE à reverser, le cas échéant, au budget général s'il s'avérait que les trop perçus correspondants conduisaient à dépasser la prévision de recettes inscrite au CAS ; cette ligne est nulle en 2016 et 2017 ;

- et les remboursements liés aux exonérations et plafonnements de l'ancienne CSPE sur les consommations de l'année 2015, pour lesquels des demandes interviendront jusqu'en 2018 : ces demandes, en extinction progressive, sont évaluées à 75 millions d'euros pour 2017, contre 533 millions en 2016.

3. Une facture qui s'alourdit encore pour les ménages en l'absence de compensation du relèvement de la taxe carbone
a) Un financement désormais assuré en intégralité par la fiscalité sur les énergies les plus carbonées

Dans le cadre de la réforme de la fiscalité énergétique engagée l'an dernier, le Gouvernement avait pris l'engagement de stabiliser, à compter de 2017, la fiscalité électrique et d'élargir l'assiette du financement de la transition énergétique aux énergies fossiles .

Lors de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2015, votre commission a déjà eu l'occasion d' approuver, sur le principe, ces orientations , par pragmatisme d'abord - la fiscalité pesant d'un tel poids sur les factures des consommateurs qu'il n'était guère envisageable de l'alourdir encore 32 ( * ) -, par conviction ensuite, dès lors qu'il lui a paru légitime de faire contribuer les énergies carbonées à la décarbonation de l'économie 33 ( * ) .

En pratique, il a donc été décidé de maintenir, en 2017, la CSPE, à son niveau de 2016 , soit 22,5 euros par MWh, et d' augmenter le rendement de la « contribution climat-énergie » (CCE) 34 ( * ) sur la base d'une valeur théorique de la tonne de carbone relevée de 22 euros en 2016 à 30,5 euros en 2017 .

Il reste qu'en dépit de la volonté affichée du Gouvernement de « flécher » ces recettes nouvelles vers le financement de la transition énergétique, aucune affectation au CAS n'était prévue dans la version initiale du « collectif ». En première lecture, l'Assemblée nationale adopta une affectation a minima , à hauteur d'1,2 % de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et de la totalité de la taxe intérieure de consommation sur le charbon (TICC), soit un niveau très inférieur aux besoins de financement à couvrir 35 ( * ) . À l'initiative de votre commission, le Sénat avait donc, par cohérence, relevé le montant des taxes affectées à la hauteur des dépenses prévisionnelles du CAS mais cet amendement fut finalement rejeté par l'Assemblée en nouvelle lecture.

Dix mois plus tard, le Gouvernement valide l'analyse du Sénat en constatant la nécessité d'alimenter le CAS par des « recettes supplémentaires à hauteur de 1 319 millions d'euros » en raison du décalage entre ses recettes actuelles - environ 5,6 milliards d'euros au total - et ses dépenses - près de 7 milliards.

La façon de couvrir ce besoin de financement a cependant varié entre le projet initial du Gouvernement et sa discussion à l'Assemblée nationale ( cf. tableau ci-après).


Dans sa version initiale , l'article 22 du présent projet de loi de finances prévoyait d' augmenter la part des taxes sur les énergies carbonées affectées à son financement « pour un montant représentatif de la hausse du prix de la tonne carbone entre 2016 et 2017 » 36 ( * ) . Outre qu'ils permettaient de couvrir les dépenses prévisionnelles du CAS, les taux fixés revenaient à lui affecter la totalité du rendement résultant de la hausse de la part carbone dans les taxe intérieures de consommation de consommation sur le gaz naturel (TICGN) et sur le charbon (TICC), et un peu plus de 80 % (81,5 %) de ce rendement dans le cas de la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE, ex-TIPP).


Par voie d'amendement , le Gouvernement a modifié ce schéma initial en prévoyant désormais :

- d'exclure des recettes du CAS la CSPE et la TICGN et d'affecter la totalité de leur produit au budget général ;

- en conséquence, d'alimenter exclusivement le CAS par la fiscalité sur « les énergies les plus carbonées » 37 ( * ) , c'est-à-dire par une fraction des recettes de taxes sur les produits pétroliers plus importante qu'envisagée initialement (près de 40 % du produit de la TICPE contre 7,72 %) et sur le charbon (9,09 % de la TICC, comme dans le schéma initial).

Comme indiqué par le secrétaire d'État chargé du budget en séance, ce changement de « tuyauterie [par rapport au projet initial] n'a d'incidence ni sur le fonctionnement du CAS ni sur le budget de l'État » dès lors que les mouvements de recettes envisagées entre l'un et l'autre se compensent mutuellement ; en particulier, l'équilibre du CAS est préservé.

La raison de cette évolution tient en fait à la conclusion tardive des discussions engagées avec la Commission européenne au titre du respect des règles de l'Union douanière 38 ( * ) . La Commission considérait en effet que l'électricité renouvelable importée, bien qu'assujettie à la CSPE, ne bénéficiait pas en retour des recettes de cette taxe affectées au développement des EnR sur le territoire national. Pour lever cette difficulté, la solution, acceptée par la Commission 39 ( * ) , consiste donc à supprimer le lien d'affectation entre les recettes de CPSE 40 ( * ) et le CAS qui finance le soutien aux EnR.

Évolution proposée des recettes affectées au CAS « Transition énergétique »
pour 2017

Loi de finances rectificative
pour 2015

Loi de finances initiale
pour 2017

Loi de finances pour 2017 adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale

Part affectée

Produit affecté
(en millions d'euros)

Part affectée

Produit affecté
(en millions d'euros)

Part affectée

Produit affecté
(en millions d'euros)

CSPE

100 % moins 2 548 millions d'euros

5 252

100 % moins 2 548 millions d'euros

5 252

0 %

0

TICPE

1,2 %

365

7,72 %

1 357

39,72 %

6 982

TICGN

2,16 %

30

26,64 %

373

0 %

0

TICC

100 %

11

9,09 %

1

9,09 %

1

Total des recettes affectées

5 658

6 983

6 983

Équilibre du CAS

- 1 325

0

0

Source : évaluation préalable de l'article 22 rectifiée selon les précisions apportées par le Gouvernement, projet annuel de performances et projet de loi de finances pour 2017 tel qu'adopté par l'Assemblée nationale en première lecture

b) Mais une absence de compensation contraire à la loi qui alourdit encore les prélèvements sur les consommateurs d'énergie

Comme votre commission l'avait déjà dénoncé, en vain, à l'occasion de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2015, aucune mesure de compensation de la hausse de la part carbone n'est aujourd'hui prévue, et ce en violation manifeste du principe figurant pourtant expressément dans deux lois :

- la loi dite « Grenelle I » 41 ( * ) , qui appelait l'État à étudier la création de la CCE, dispose que cette contribution « sera strictement compensée par une baisse des prélèvements obligatoires de façon à préserver le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises » ;

- et la loi « Transition énergétique » 42 ( * ) , qui dispose, à l'initiative de votre commission, que « l'élargissement progressif de la part carbone [est] compensé, à due concurrence , par un allègement de la fiscalité pesant sur d'autres produits, travaux ou revenus ».

Du reste, lors de la création de la CCE en 2014, le Gouvernement lui-même a appliqué ce principe de compensation intégrale : ainsi, sur les 4 milliards d'euros de recettes supplémentaires attendues en 2016, 3 milliards ont été « restitués » aux entreprises, sous la forme du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), et 1 milliard d'euros aux ménages, au travers des taux réduits de TVA applicables aux travaux de rénovation énergétique des logements et en faveur du logement social et du logement intermédiaire.

Lors de l'examen du « collectif » en première lecture à l'Assemblée, le secrétaire d'État chargé du budget avait expliqué que la hausse de la CCE serait compensée par la stabilisation de la fiscalité électrique , mettant ainsi fin à la hausse annuelle de 3 euros par MWh présentée comme « automatique » 43 ( * ) .

Or, même en retenant cette conception extensive de la compensation d'une hausse par l'annulation d'une autre hausse « prévisible », la réforme génèrera un surcroît de recettes annuelles non compensé, et donc un alourdissement des prélèvements sur les consommateurs d'énergie , que votre commission évalue, selon différentes hypothèses de rendement annuel de la CCE, entre 196 et 440 millions d'euros la première année, 625 millions et 1,113 milliard l'année suivante, et 1,054 et 1,786 milliards deux ans plus tard .

Cet alourdissement s'ajoute du reste à l'explosion du coût de la CSPE entre 2003 et 2016 (1,4 milliard d'euros à 7,8 milliards) et qui a été exclusivement supporté par les consommateurs d'électricité , jusqu'à représenter désormais environ 16 % de la facture annuelle d'un client résidentiel moyen.

Évolution des produits de CSPE et de CCE

(en millions d'euros)

2017

2018

2019

Ancienne CSPE (rendement théorique sans réforme dans l'hypothèse d'une hausse de 3 €/MWh et par an) 44 ( * )

9 104

10 175

11 246

CSPE actuelle

7 800

7 800

7 800

Évolution du rendement annuel de CSPE après réforme

- 1 304

- 2 375

- 3 446

« Contribution climat énergie » (CCE) (sur la base d'une valeur de la tonne carbone fixée à 30,5 €/MWh en 2017 45 ( * ) , 39 €/MWh en 2018 et 47,5 €/MWh en 2019 46 ( * ) )

entre
5 550
et
5 794 47 ( * )

entre
7 050
et
7 538

entre
8 550
et
9 282

Évolution du rendement annuel de CCE (base 2016)

entre
+ 1 500
et
+ 1 744

entre
+ 3 000
et
+ 3 488

Entre
+ 4 500
et
+ 5 232

Gain net pour les finances publiques et surcoût pour les consommateurs d'énergie

entre
196
et
440

entre
625
et
1 113

entre
1 054
et
1 786

Commission des affaires économiques à partir des documents budgétaires annexés aux projets de loi
de finances rectificative pour 2015 et de loi de finances pour 2017 et des précisions apportées par le Gouvernement

En réponse aux amendements déposés à l'époque par la commission des finances et par votre commission pour neutraliser ce surcroît de recettes 48 ( * ) , le secrétaire d'État avait ensuite indiqué « qu'on [avait] le temps d'ici à l'année 2017 de déterminer quelles seront les baisses d'impôt qu'il serait judicieux de mettre en oeuvre pour tenir l'engagement pris par le Gouvernement dans le cadre de la loi relative à la transition énergétique ».

À nouveau interrogé cette année par votre rapporteur, le Gouvernement a confirmé, dans ses réponses au questionnaire budgétaire, que « conformément à la loi, l'augmentation de la composante carbone sera compensée par une réduction, à due concurrence, de la fiscalité sur autres produits, travaux ou revenus ». Or, à ce jour, aucune mesure de compensation ne vient matérialiser cet engagement dans le présent projet de budget. En réalité, le Gouvernement se trouve confronté à une équation a priori insoluble consistant à respecter l'obligation légale de compensation - et plus généralement la promesse de « pause fiscale » jusqu'à la fin du quinquennat - tout en dégageant de nouvelles recettes, par définition non compensées, pour financer le soutien croissant aux énergies renouvelables.

*

En outre, une autre disposition de la loi « Transition énergétique » en vue d' exclure tous les produits issus de la biomasse du relèvement de la part carbone 49 ( * ) n'est à ce jour pas respectée . En réponse à votre rapporteur, qui ne sous-estime pas les problèmes de traçabilité posés par une telle différenciation, le Gouvernement a indiqué qu'« une réflexion [était] amorcée » mais qu'elle n'aboutirait que dans le cadre des « tarifs des taxes intérieures de consommation pour 2018 » ; il a aussi rappelé les quelques mesures ponctuelles déjà prises, telles que la modulation de tarifs adoptée l'an dernier pour favoriser le sans plomb dit « E10 » car incorporant jusqu'à 10 % de biocarburants et dont la diffusion ne cesse de progresser, ou la fiscalité avantageuse du superéthanol « E85 » qui en contient jusqu'à 85 % mais qui reste largement confidentiel en France, faute de véhicules compatibles d'origine.

4. Des modalités de financement de la transition énergétique toujours aussi floues

En complément des crédits budgétaires et des dépenses fiscales retracés dans le présent rapport 50 ( * ) , le Gouvernement a fait le choix de financer certaines actions liées à la transition énergétique en recourant à des montages financiers complexes, voire opaques , régularisés a posteriori en loi de finances rectificative (LFR) et dont les modalités n'ont du reste cessé d'évoluer, rendant de fait difficile leur contrôle par le Parlement.

Ainsi, « l'enveloppe spéciale transition énergétique » (ESTE) - annoncée par la loi éponyme 51 ( * ) et censée constituer l'un des éléments, parmi d'autres, d'un fonds plus vaste dédié au « financement de la transition énergétique » et géré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) - devait initialement être abondée par l'affectation exceptionnelle d'une partie des dividendes de la CDC (250 millions d'euros annuels au maximum sur trois ans), qui aurait elle-même été compensée pour l'État par des dividendes plus importants en provenance d'EDF.

Au vu des difficultés juridiques et opérationnelles posées par un tel montage 52 ( * ) , il fut finalement décidé, en LFR 2015, d' ouvrir 250 millions d'euros de crédits budgétaires supplémentaires pour 2015 pour couvrir les avances déjà faites par la CDC - majorant au passage de près d'un tiers les crédits du programme 174 - et de les couvrir par l'encaissement des dividendes de la Caisse. Selon le même mécanisme, 250 millions supplémentaires pour 2016 seront ouverts en LFR 2016, qui pourrait aussi comprendre l'ouverture d'une dernière tranche annuelle de 250 millions pour 2017.

À ce jour, l'ESTE est donc dotée de 500 millions d'euros , soit 250 millions d'euros ouverts en LFR 2015 et 250 millions à titre d'avance accordée par la CDC devant être couverte en LFR 2016.

Selon les éléments transmis à votre rapporteur par le Gouvernement, les engagements financiers de l'ESTE s'élevaient fin septembre à 357,2 millions d'euros , dont :

- 312 millions au titre du soutien aux projets des « territoires à « énergie positive pour la croissance verte » (TEPCV) 53 ( * ) , notamment sous la forme d'une bonification des aides attribuées par l'Ademe ;

- 20 millions de complément exceptionnel en faveur de l'Agence nationale pour l'habitat (Anah) pour 2015 ;

- 10 millions pour l'aide à l'exploitation des transports combinés ;

- 10 millions d'aides à l'investissement des agriculteurs pour limiter la pollution atmosphérique,

- et 2,4 millions pour le soutien à la méthanisation.

D'autres projets ou programmes seraient en cours d'engagements, à hauteur de 62 millions - 42 millions supplémentaires pour les TEPCV, 8 millions pour l'appel à manifestation d'intérêt « Dynamic Bois » 54 ( * ) , 2 millions pour les plateformes territoriales de la transition énergétique 55 ( * ) ou, plus étonnamment, 10 millions d'euros pour le projet de plateforme dérivante « Polar Pod » autour de l'Antarctique 56 ( * ) - pour un total visé d'engagements fin 2016 de 450 millions . En outre, la ministre a annoncé à l'Assemblée nationale qu'« un complément de financement de 50 millions d'euros [pour l'Anah serait prélevé] sur le fonds de transition énergétique pour la croissance verte (sic) » mais sans plus de précisions sur ces modalités.

Aucun engagement n'est en revanche mentionné au profit des territoires « zéro gaspillage zéro déchet » ou du doublement du fonds chaleur de l'Ademe , en dépit des annonces gouvernementales et bien qu'ils figurent expressément dans la convention signée entre l'État et la CDC.

Surtout, ces 500 millions d'euros de l'ESTE restent très en-deçà du milliard et demi d'euros promis par le Gouvernement pour alimenter le fonds de financement la transition énergétique, dont aucune des autres composantes 57 ( * ) n'a à ce jour été mobilisée.


* 1 Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, art. 5 et 14.

* 2 Ne sont pas évoquées ici les mesures particulières relatives à la fiscalité des carburants.

* 3 La même rebudgétisation est effectuée pour la contribution au tarif spécial de solidarité du gaz (CTSSG) et la contribution biométhane, qui sont intégrées à la taxe intérieure sur la consommation finale de gaz naturel (TICGN).

* 4 Renommée à cette occasion « contribution au service public de l'électricité ».

* 5 Le cas échéant, des précisions sont apportées dans les développements ultérieurs.

* 6 La « compensation carbone » est transférée pour 2017 sur le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie » ( cf. infra les mesures de soutien en faveur des industries fortement consommatrices d'énergie).

* 7 Dans le nouveau dispositif, la CRE reste chargée de l'évaluation des charges de service public de l'énergie, qui fait l'objet d'une délibération annuelle (en l'espèce la délibération du 13 juillet 2016 relative à l'évaluation des charges de service public de l'énergie pour 2017). En revanche, la CRE n'intervient plus dans les opérations de recouvrement et de compensation aux opérateurs, respectivement assurées par les douanes et par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour le compte de l'État.

* 8 Contrats d'achat ou contrats offrant un complément de rémunération, conclus à guichet ouvert ou à l'issue d'un appel d'offres.

* 9 Dont 551 MW pour les seules filières éolienne et solaire.

* 10 Source : panorama de l'électricité renouvelable au 30 juin 2016, RTE, SER, Enedis et ADEeF.

* 11 Dont les causes sont désormais bien connues : stagnation de la demande (liée à une croissance économique faible, une moindre consommation industrielle et une meilleure efficacité énergétique), augmentation de l'offre (avec l'arrivée de nouvelles capacités renouvelables subventionnées) et baisse des cours du charbon et du gaz (en raison du développement des hydrocarbures de schiste aux États-Unis).

* 12 Soit le prix de l'« accès régulé à l'électricité nucléaire historique » auquel EDF est tenu de proposer une quantité déterminée de sa production à ses concurrents.

* 13 Ce qui illustre le poids encore important des contrats passés conclus à des prix très élevés. En 2014, la CRE rappelait ainsi que le parc photovoltaïque installé à fin 2013 représenterait le quart des 100 milliards de surcoûts cumulés entre 2014 et 2025 (source : la contribution au service public de l'électricité : mécanisme, historique et prospective, CRE, octobre 2014).

* 14 Pour EDF en métropole continentale.

* 15 Évolution par rapport à 2015, sous l'effet de l'indexation.

* 16 Cogénération sous obligation d'achat (installations de moins de 12 MW).

* 17 134,8 €/MWh par exemple pour les 80,2 MW attribués en décembre 2015 dans le cadre de la deuxième tranche de l'appel d'offres pour développer les installations photovoltaïques de moyenne puissance (entre 100 et 250 kWc).

* 18 C'est-à-dire d'une prime versée aux producteurs en complément de la valorisation de leur production sur les marchés et destinée à mieux intégrer les énergies renouvelables au marché.

* 19 Bien que les tarifs d'achat éolien aient été validés par la Commission européenne en 2014 pour une durée de dix ans, la Commission considère que la réforme de la CSPE, en ce qu'elle modifie le cadre de soutien des EnR, justifie une remise à plat du dispositif et un basculement vers le complément de rémunération qui pourrait s'appliquer dès 2017.

* 20 Déchets d'origine agricole, déchets ménagers, déchets de l'industrie agroalimentaire ou de boues de stations d'épuration.

* 21 Et moins de 1 % pour les charges liées aux contrats d'achat en métropole continentale hors EnR. Source : CRE, délibération du 13 juillet 2016.

* 22 En remplacement de la prime versée aux opérateurs d'effacement et des appels d'offres prévus par la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, dite loi « NOME ».

* 23 Ce délai supplémentaire étant notamment lié au dialogue engagé avec la Commission européenne pour garantir la robustesse juridique du nouveau cadre.

* 24 Source : RTE, dépêche du 9 décembre 2015.

* 25 À l'exception de celles qui, grandes consommatrices d'électricité, bénéficiaient de plafonnements.

* 26 À défaut d'arrêté ministériel, le montant unitaire de la CSPE était reconduit d'une année sur l'autre puis, à compter de 2011, majoré d'au plus 3 € par MWh et par an sur la base du montant proposé par la CRE.

* 27 Les autres opérateurs (entreprises locales de distribution et Électricité de Mayotte) étant prioritairement compensés de l'intégralité de leurs charges.

* 28 Au 31 décembre 2015, y compris les frais financiers au titre de 2013 et 2014.

* 29 Arrêté du 13 mai 2016 pris en application de l'article R. 121-31 du code de l'énergie.

* 30 Y compris les frais financiers au titre de 2013 et 2014.

* 31 Dont 32,2 millions d'euros dus au titre de l'année 2019 et 8,2 millions dus au titre de l'année 2020.

* 32 Toutes taxes et contributions confondues (CSPE, taxes locales sur l'électricité, contribution au tarif d'acheminement et taxe sur la valeur ajoutée), la fiscalité représente déjà plus du tiers de la facture d'un client résidentiel moyen, le reste se répartissant entre coûts de réseaux et consommations.

* 33 En soulignant au passage le paradoxe consistant à faire financer, jusqu'alors, le soutien aux énergies renouvelables par une production d'électricité déjà très largement décarbonée grâce, pour l'essentiel, au nucléaire et à l'hydraulique.

* 34 Soit la part variable des taxes intérieures de consommation assise sur le contenu en carbone des énergies fossiles, plus communément désignée sous les termes de « part carbone » ou « composante carbone ».

* 35 160 millions d'euros estimés à l'époque, aujourd'hui réévalués à 368 millions, à comparer à un déficit du CAS estimé par votre commission fin 2015 (sans ces recettes supplémentaires et sur la base des prévisions de dépenses alors disponibles) à 1,254 milliard, réévalué depuis par le Gouvernement à 1,319 milliard (en intégrant ces recettes supplémentaires et sur la base des prévisions de dépenses actualisées pour 2017).

* 36 Source : évaluation préalable de l'article 22.

* 37 Exposé des motifs de l'amendement n° I-806 présenté par le Gouvernement.

* 38 Art. 30 et 110 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

* 39 Ce qui devrait en outre permettre d'obtenir de celle-ci l'approbation des dispositifs de soutien aux EnR qui lui sont actuellement soumis.

* 40 Le même raisonnement s'appliquant à la TICGN qui finance aussi, à la suite de la fusion opérée avec la « contribution biométhane », le développement du biogaz.

* 41 Art. 2 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

* 42 Art. 1 er , VIII de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 précitée, codifié à l'art. L. 100-2 du code de l'énergie.

* 43 En omettant au passage le fait qu'à force d'augmenter chaque année son montant unitaire, la CSPE aurait fini par « rattraper » la dynamique des charges à couvrir et par se stabiliser « naturellement » quoiqu'à un niveau élevé.

* 44 Estimations du Gouvernement pour 2017 et 2018, extrapolées pour 2019.

* 45 Art. 14 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

* 46 Si l'article 16 de la loi de finances rectificative pour 2015 complète la trajectoire figurant dans la loi « Transition énergétique » pour préciser les valeurs de la tonne de carbone visées en 2018 et 2019, cette disposition n'a cependant, en l'état, aucune incidence budgétaire puisque les tarifs effectifs devront être fixés dans une loi de finances ultérieure.

* 47 La fourchette basse reprend l'estimation de rendement annuel (+ 1,5 milliard par an) de la direction générale de l'énergie et du climat et la fourchette haute celle du rendement 2017 (1,744 milliard, extrapolé pour 2018 et 2019) figurant dans l'évaluation préalable de l'article 22 rectifiée après les précisions apportées par le Gouvernement.

* 48 Via une baisse du montant unitaire de la CSPE pour 2017 de 22,5 euros à 20,15 euros par MWh.

* 49 Également introduite par votre commission et codifiée à l'art. L. 100-2 précité qui dispose que la composante carbone doit être « assise sur le contenu en carbone fossile », ce qui exclut de fait la biomasse.

* 50 Ainsi que d'autres dispositifs tels que les certificats d'économies d'énergie ou les fonds chaleur et déchets de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).

* 51 Art. 20 de la loi « Transition énergétique ».

* 52 Sans même évoquer la situation financière d'EDF, au vu de laquelle l'État a accepté un versement en actions plutôt qu'en numéraire des dividendes au titre des exercices 2016 et 2017.

* 53 Constructions de bâtiments à énergie positive, développement des réseaux de chaleur renouvelable, rénovation énergétique de logements et bâtiments publics, développement de véhicules propres, remplacement de l'éclairage public vétuste, etc.

* 54 Qui a pour objectif de mobiliser davantage de biomasse en France en favorisant l'exploitation des forêts privées.

* 55 Chargées de délivrer aux particuliers des conseils et un accompagnement technique ou financier de leurs projets de travaux.

* 56 Et destinée à étudier les courants de l'océan austral.

* 57 Étaient annoncés, sur trois ans, la mobilisation des certificats d'énergie (150 millions), le redéploiement d'enveloppes existantes du programme d'investissements d'avenir (PIA) (300 millions) et des ressources et investissements en fonds propres de la CDC (150 autres millions), soit au total, ESTE incluse, 1,35 milliard, soit 150 millions en-deçà de l'objectif.

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