II. UNE AMÉLIORATION PRÉCAIRE DES COMPTES SOCIAUX QUI NE PERMET PAS COMME ANNONCÉ LE RETOUR À L'ÉQUILIBRE DU RÉGIME GÉNÉRAL EN 2017

A. UN REDRESSEMENT DES COMPTES PLUS IMPORTANT QUE PRÉVU EN 2016

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 prévoyait une amélioration substantielle des comptes des régimes obligatoires de base et du FSV pour 2016, de près de 2,4 milliards d'euros par rapport à la loi de financement pour 2016.

Le déficit des comptes s'avère en exécution en effet assez éloigné des prévisions initiales et proche des prévisions actualisées de l'automne 2016, pour s'établir à 7 milliards d'euros, conformément au tableau d'équilibre présenté à l'article 1 er du présent projet de loi de financement, soit une amélioration de 3,2 milliards d'euros par rapport au résultat de 2015 .

Le déficit du régime général est néanmoins plus lourd que prévu , avec un écart de 700 millions d'euros par rapport aux prévisions actualisées de la loi de financement pour 2017.

Comparaison des prévisions et de l'exécution 2016 des régimes de sécurité sociale

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des annexes B aux lois de financement de la sécurité sociale pour 2016, 2017 et au projet de financement pour 2018)

Cette variation entre la prévision initiale de l'automne 2015 et le résultat constaté pour l'année 2016 découle principalement d'un effet de base positif , liée au surcroît de recettes en 2015 et enregistré dans la prévision d'exécution réalisée à l'automne 2016 .

Ainsi, cet effet de base facilite l'effort de consolidation des comptes , prévu par la loi de financement pour 2016, qui devait se concentrer sur la dépense et non plus sur des mesures supplémentaires en recettes, comme lors des exercices précédents .

L'année 2016 marque néanmoins la première réduction du déficit par rapport au niveau de l'avant-crise financière de 2008 5 ( * ) . Si cette réduction concerne toutes les branches du régime général, elle se révèle largement « en trompe-l'oeil » s'agissant de la branche maladie.

En premier lieu, le solde de la branche vieillesse s'est amélioré de 1,2 milliard d'euros en 2016, redevenant temporairement (cf. infra ) excédentaire, après plus d'une décennie de déficits . Cette amélioration s'explique principalement par la montée en charge du relèvement de l'âge légal de départ en retraite et de l'âge de départ à taux plein (de 65 à 67 ans), prévu par la réforme des retraites de 2010 6 ( * ) , et par l'apport de recettes nouvelles à court terme permis par la réforme de janvier 2014 7 ( * ) .

Le déficit de la branche famille s'est résorbé de 500 millions d'euros , grâce à des dépenses stables découlant d'une inflation faible et de la montée en charge de la modulation des allocations familiales en fonction des revenus entrée en vigueur en 1 er juillet 2015.

Tandis que l'excédent de la branche AT-MP reste stable, le solde de la branche maladie s'est amélioré d'1 milliard d'euros par rapport à 2015 . Cette amélioration revêt toutefois un caractère purement comptable. La comptabilisation d'une ressource exceptionnelle de 700 millions d'euros de CSG, liée à la mise en oeuvre de la protection universelle maladie (PUMa), source de réserve à la certification des comptes de la CNAMTS par la Cour des comptes en juin dernier 8 ( * ) , a en effet permis de réduire artificiellement le déficit de l'Assurance maladie en 2016 9 ( * ) .

Ainsi corrigé, et en dépit de la sous-exécution d'un ONDAM pourtant historiquement faible (+ 1,75 %), le solde de la branche ne s'améliorerait que de 300 millions d'euros entre 2015 et 2016 , pour atteindre 5,5 milliards d'euros.

Aussi l'amélioration du solde de la branche maladie résulte-t-elle principalement de mesures de gestion plutôt que de la mise en oeuvre de réformes structurelles , comme en témoigne l'annulation en fin d'année de crédits mis en réserve sur le sous-objectif établissements de santé de l'ONDAM (près de 500 millions d'euros), redeployés afin de couvrir les dépassements non contenus du sous-objectif soins de ville.

En excluant la ressource exceptionnelle de CSG perçue en 2016, le déficit du régime général et du FSV s'élèverait à 8,5 milliards d'euros, se réduisant de 2,3 milliards d'euros par rapport à 2015, soit une consolidation du même ordre de grandeur que celle réalisée entre 2014 et 2015 .

Solde du régime général et du FSV entre 2014 et 2016

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

De surcroît, la progression contenue des dépenses résulte principalement de la stratégie adoptée par le Gouvernement en 2016, consistant à compenser les pertes de recettes pour la sécurité sociale découlant des mesures du pacte de responsabilité et de solidarité, telle la baisse des cotisations famille, par une prise en charge par l'État de prestations - les allocations de logement à caractère familial (ALF) et la protection juridique des majeurs, pour un montant total de 4,8 milliards d'euros. Pour autant, la prise en charge par l'État de prestations sociales ne saurait constituer une mesure sérieuse de régulation de la dépense.

La consolidation relative des comptes de la sécurité sociale découle en réalité d'une progression contenue des dépenses en raison du contexte favorable de très faible inflation et de recettes dynamiques, portées par l'évolution de la masse salariale plus élevée en 2016 qu'en 2015 - 2,4 % contre 1,7 %, mais moindre que la prévision actualisée en loi de financement pour 2017, de 2,6 %- , et non d'un effort réel de maîtrise des dépenses, sans cesse repoussé , conduisant à retarder le retour à l'équilibre du régime général pourtant annoncé pour 2017.


* 5 Le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV s'élevait en 2008 à 8,2 milliards d'euros.

* 6 Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

* 7 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

* 8 Cour des comptes, certification des comptes du régime général de sécurité sociale, exercice 2016, juin 2017 : ce produit « contrevient aux normes et principes comptables, ce qui constitue un désaccord sur les comptes de la CNAMTS et de la branche maladie ».

* 9 La mise en place de la PUMa a conduit à une modification des règles d'attribution de la CSG aux autres régimes maladie se traduisant par la perception d'un produit exceptionnel de CSG en 2016, non prévu par la loi de financement pour 2016.

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